BGer 1B_377/2018 |
BGer 1B_377/2018 vom 23.08.2018 |
1B_377/2018 |
Arrêt du 23 août 2018 |
Ire Cour de droit public |
Composition
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MM. les Juges fédéraux Merkli, Président,
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Karlen et Kneubühler.
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Greffier : M. Parmelin.
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Participants à la procédure
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recourant,
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contre
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Ministère public de la République et canton du Jura, Le Château, 2900 Porrentruy.
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Objet
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Refus de mise en liberté provisoire,
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recours contre la décision de la Chambre pénale des recours du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura du 24 juillet 2018 (CPR 42 / 2018).
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Considérant en fait et en droit : |
1.
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A.________, ressortissant français né le 8 décembre 1986, a été placé en détention provisoire le 8 juillet 2017 et est incarcéré depuis lors sous les préventions de vols en bande, dommages à la propriété, violations de domicile, vol d'usage, empêchement d'accomplir un acte officiel, infractions à la loi fédérale sur la circulation routière, à la loi fédérale sur les stupéfiants et à la loi fédérale sur les étrangers et injure.
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Par ordonnance du 7 juin 2018, le Ministère public de la République et canton du Jura l'a autorisé à exécuter sa peine de manière anticipée dès le 19 juin 2018.
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Le 11 juillet 2018, A.________ a requis sa mise en liberté provisoire moyennant, le cas échéant, la fourniture de sûretés d'un montant de 5'000 euros au motif que sa détention était disproportionnée au vu des infractions qui lui sont désormais reprochées et de la peine encourue.
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Le 18 juillet 2018, le Juge des mesures de contrainte du Tribunal de première instance de la République et canton du Jura a admis cette requête et ordonné la libération immédiate du prévenu.
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Statuant le 24 juillet 2018 sur recours du Ministère public, la Chambre pénale des recours du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura a annulé cette ordonnance, rejeté la demande de mise en liberté provisoire de A.________ et ordonné le maintien de celui-ci en détention.
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Par acte daté du 27 juillet 2018 et posté le 8 août 2018, A.________ recourt auprès du Tribunal fédéral contre cette décision qu'il lui demande d'annuler et de "donner acte à la mise en liberté immédiate du Juge des mesures de contrainte".
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Invitée à se déterminer, la Chambre pénale des recours propose de rejeter le recours et de confirmer sa décision. Quant au Ministère public, il renvoie à la décision attaquée dont il requiert la confirmation et conclut au maintien du prévenu en exécution de peine.
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Par acte du 17 août 2018, la mandataire d'office de A.________ a complété le recours en concluant, sous suite de frais et dépens, à l'admission de celui-ci et à la libération immédiate de son mandant.
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Le recourant a répliqué.
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2.
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Selon l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral (LTF; RS 173.110), le recours en matière pénale est ouvert contre la décision de la Chambre pénale des recours du 24 juillet 2018 qui rejette la demande de mise en liberté provisoire présentée par A.________ et ordonne son maintien en détention (ATF 137 IV 22 consid. 1 p. 23; arrêt 1B_400/2017 du 18 octobre 2017 consid. 1). Le recourant, prévenu et actuellement détenu sous le régime de l'exécution anticipée de peine, a qualité pour agir (art. 81 al. 1 let. a et b ch. 1 LTF). Pour le surplus, le recours a été formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision rendue en dernière instance cantonale (art. 80 al. 1 LTF). Les conclusions prises dans le recours et son complément sont en outre recevables au regard de l'art. 107 al. 2 LTF. Partant, il y a lieu d'entrer en matière.
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Une mesure de détention avant jugement n'est compatible avec la liberté personnelle garantie aux art. 10 al. 2 Cst. et 5 CEDH que si elle repose sur une base légale (art. 31 al. 1 et 36 al. 1 Cst.), soit en l'espèce l'art. 221 CPP. Elle doit en outre correspondre à un intérêt public et respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 2 et 3 Cst.). Pour que tel soit le cas, la privation de liberté doit être justifiée par un risque de fuite, de collusion ou de réitération (cf. art. 221 al. 1 let. a, b et c CPP). Préalablement à ces conditions, il doit exister à l'égard de l'intéressé des charges suffisantes, soit de sérieux soupçons de culpabilité (art. 221 al. 1 CPP; art. 5 par. 1 let. c CEDH). En tout état de cause, la détention avant jugement ne doit pas durer plus longtemps que la peine privative de liberté prévisible (art. 212 al. 3 CPP). La poursuite de la détention sous la forme de l'exécution anticipée de la peine est soumise aux mêmes conditions (ATF 143 IV 160 consid. 2.1 p. 162).
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3.
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Le recourant se plaint de ne pas avoir reçu de copie du recours du Ministère public contre la décision du Juge des mesures de contrainte et de l'ordonnance du Président ad hoc de la Chambre pénale des recours du 18 juillet 2018 qui ordonnait son maintien en détention à titre superprovisoire. Il conteste également avoir pris position sur le recours du Ministère public par sa mandataire, comme le retient la décision attaquée. Le président n'avait aucune obligation d'entendre le recourant avant d'ordonner le maintien de la détention jusqu'à droit connu sur le recours. La jurisprudence admet en effet qu'une telle décision peut être prise à titre superprovisoire sans que le prévenu n'ait été entendu préalablement dans la mesure où elle ne souffre aucun délai (ATF 138 IV 148 consid. 3.2 p. 151). La notification du recours du Ministère public et de l'ordonnance incidente du 18 juillet 2018 invitant le prévenu à se déterminer sur celui-ci adressée à la mandataire d'office du recourant exclusivement était au surplus conforme à l'art. 87 al. 3 CPP (ATF 144 IV 64 consid. 2.5 p. 68; arrêt 6B_644/2017 du 16 mai 2018 consid. 3.1). Le recourant ne saurait ainsi se plaindre de ne pas avoir reçu ces décisions ni pu prendre personnellement position sur le recours, ce d'autant moins que son avocate d'office a déposé des observations dans le délai imparti à cet effet sans qu'il n'indique les éléments qu'elle aurait omis de soulever.
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Sur le fond, le recourant soutient que le principe de la proportionnalité n'est pas respecté par rapport à B.________, coprévenu des infractions de vols en bande, dommages à la propriété et violations de domicile qui lui sont reprochées, lequel a été libéré le 20 février 2018 après six mois de détention provisoire. Il dénonce l'absence de toute motivation sur ce point dans la décision attaquée. L'argumentation en lien avec la libération de son complice avait certes été soulevée en réplique par sa mandataire devant le Juge des mesures de contrainte, mais elle n'a pas été reprise dans les déterminations sur le recours du Ministère public de sorte que l'on ne saurait reprocher à la Chambre pénale des recours de ne pas s'être prononcée sur ce point. Quoi qu'il en soit, le Ministère public motivait son refus de libérer provisoirement le recourant non seulement par un risque de fuite mais également par un danger de récidive qui ne pouvait être pallié par le versement de sûretés, ce qui justifiait un traitement différencié des coprévenus. Au demeurant, l'appréciation du risque de fuite dépend de divers critères, tels que le caractère de l'intéressé, sa moralité, ses ressources, ses liens avec l'Etat qui le poursuit, ses contacts à l'étranger, ainsi que la gravité des infractions en cause, qui rendent toute comparaison pour le moins hasardeuse. Il appartenait en tout état de cause au recourant d'expliquer en quoi sa situation serait en tous égards comparable à celle de B.________ au point de considérer le refus d'ordonner sa libération provisoire comme discriminatoire ou disproportionné, ce qu'il ne fait pas. Sur ce point, le recours est insuffisamment motivé.
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Le recourant reproche également à la Chambre pénale des recours d'avoir constaté les faits de manière inexacte en indiquant que la durée de la détention subie était de 12 mois alors qu'au jour où elle a rendu sa décision, elle s'élevait à 12 mois et 18 jours. Ce grief procède d'une lecture erronée de la décision attaquée où l'autorité précédente indique clairement que la durée de la détention subie à ce jour, soit plus de 12 mois, ne pouvait pas être considérée comme excessive au regard de la peine encourue. La seconde critique en lien avec une constatation erronée des faits n'est pas mieux fondée. Le recourant semble faire grief à la Chambre pénale des recours d'avoir évoqué une condamnation à une peine privative de liberté de 4 ans en 2013 pour des brigandages, alors que cette condamnation concernait aussi un vol et une tentative de vol. La Chambre pénale des recours a relevé que le prévenu avait déjà été condamné en 2013 dans le canton de Neuchâtel, notamment pour brigandage. L'emploi de cet adverbe montre que sa condamnation s'étendait à d'autres infractions que la cour cantonale n'a pas jugé utile de citer. Or, le recourant ne démontre pas que la mention de l'intégralité des infractions ayant donné lieu à cette condamnation s'imposait et que la correction de cette irrégularité dans le sens indiqué aurait pu conduire à une autre issue comme l'exige l'art. 97 al. 1 LTF pour se plaindre avec succès d'une constatation inexacte des faits. Le fait que le recourant conteste les infractions graves à la loi fédérale sur la circulation routière que le Ministère public lui impute n'empêchait pas davantage la Chambre pénale des recours d'en tenir compte dans l'appréciation du risque de fuite et de la proportionnalité de la détention. Sur ce point également, le recours est infondé. Enfin, il appartiendra au juge du fond d'examiner si le fait que le sergent C.________ ne se soit pas senti en danger lors du contrôle routier opéré le 8 juin 2017 a ou non une incidence sur le point de savoir si l'infraction aux règles de la circulation routière commise à cette occasion doit ou non être qualifiée de grave. Pour le surplus, le recourant ne conteste pas que les conditions de fond à un maintien en détention (soit notamment les charges suffisantes et le risque de fuite) sont remplies.
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En définitive, les griefs qu'il adresse à l'encontre de la décision attaquée ne sont pas de nature à conduire à son annulation.
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4.
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La mandataire d'office du recourant soutient dans son complément au recours que, eu égard aux ordonnances de classement partiel dont son client a bénéficié et à l'abandon des infractions de mise en danger de la vie d'autrui initialement retenues à son encontre, il aurait effectué la peine prévisible à laquelle il sera condamné et que son maintien en détention viole le principe de proportionnalité.
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L'art. 212 al. 3 CPP prévoit que la détention provisoire et la détention pour des motifs de sûreté ne doivent pas durer plus longtemps que la peine privative de liberté prévisible. Le juge peut dès lors maintenir la détention provisoire ou pour des motifs de sûreté aussi longtemps qu'elle n'est pas très proche de la durée de la peine privative de liberté à laquelle il faut s'attendre concrètement en cas de condamnation. Il convient d'accorder une attention particulière à cette limite, car le juge de première instance ou d'appel pourrait être enclin à prendre en considération dans la fixation de la peine la durée de la détention avant jugement à imputer selon l'art. 51 CP (ATF 143 IV 168 consid. 5.1 p. 173; 139 IV 270 consid. 3.1 p. 275). Les mêmes principes s'appliquent lorsque le prévenu se trouve en détention sous le régime de l'exécution anticipée de la peine (ATF 143 IV 160 consid. 2.1 p. 162).
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En l'occurrence, il est établi que le recourant a bénéficié en juin 2018 de deux classements partiels en lien d'une part avec les infractions d'incendie intentionnel, dont la poursuite relevait de la compétence des autorités françaises, et d'autre part avec les infractions d'empêchement de procéder à un acte officiel, de violation des règles de la circulation routière et de mise en danger de la vie d'autrui. Il n'en demeure pas moins que le Ministère public entend le renvoyer en jugement pour trois cas de vols en bande, dommages à la propriété et violations de domicile, vol d'usage, empêchement d'accomplir un acte officiel, ainsi que six infractions à loi fédérale sur la circulation routière, dont deux graves, au motif que le recourant avait, par sa conduite, causé un sérieux danger pour la sécurité d'autrui au sens de l'art. 90 ch. 2 LCR. Par ailleurs, le recourant a été condamné en France à de multiples reprises entre le 5 septembre 2003 et le 7 septembre 2012 et subi des peines d'emprisonnement notamment pour vols. Il a été condamné le 4 décembre 2013 par le Tribunal criminel du Littoral et du Val-de-Travers à une peine privative de liberté de 4 ans pour vol, vol en bande, tentative de vol et de vol en bande, brigandage, brigandage en bande, dommages à la propriété, violation de domicile et vol d'usage d'un véhicule automobile. Au vu des infractions reprochées au recourant, qui entrent en concours, de la gravité de certaines d'entre elles, de ses antécédents nettement défavorables, et plus particulièrement de sa dernière condamnation en Suisse pour des infractions similaires, dont il convient de tenir compte (cf. art. 47 al. 2 CP), la Chambre pénale des recours pouvait admettre qu'une peine privative de liberté supérieure à celle subie à ce jour entrait en considération et que le maintien du recourant en détention ne violait pas en l'état le principe de proportionnalité. Le fait que le Juge des mesures de contrainte ait été d'un autre avis sur la base de jugements prononcés par le Tribunal pénal de première instance dans des dossiers concernant des infractions similaires contre le patrimoine n'est à cet égard pas déterminant, le recourant étant également prévenu d'infractions graves à la loi fédérale sur la circulation routière. Toutefois, pour respecter les exigences de célérité, il appartiendra au Ministère public de faire diligence pour que le dépôt de l'acte d'accusation intervienne rapidement.
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5.
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Le recours doit par conséquent être rejeté dans la mesure où il est recevable. Vu la situation personnelle du recourant qui est détenu et indigent, le présent arrêt sera exceptionnellement rendu sans frais (art. 66 al. 1, 2 ème phrase, LTF). Une copie sera communiquée pour information à la mandataire d'office du recourant.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : |
1. Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
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2. Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
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3. Le présent arrêt est communiqué au recourant, au Ministère public et à la Chambre pénale des recours du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura ainsi que, pour information, à Me Elodie Allievi, avocate à Porrentruy.
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Lausanne, le 23 août 2018
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Au nom de la Ire Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président : Merkli
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Le Greffier : Parmelin
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