BGer 4A_560/2018 |
BGer 4A_560/2018 vom 16.11.2018 |
4A_560/2018 |
Arrêt du 16 novembre 2018 |
Ire Cour de droit civil |
Composition
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Mmes les Juges Kiss, présidente, Klett et Hohl.
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Greffier: M. Carruzzo.
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Participants à la procédure
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Fédération Internationale de Football Association (FIFA), représentée par Mes Antonio Rigozzi et Mario Gallavotti,
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recourante,
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contre
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1. X.________,
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représenté par Mes Alexandre Zen-Ruffinen et Laurent Crevoisier, ainsi que par Me Juan De Dios Crespo,
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intimé,
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2. Agence Mondiale Antidopage (AMA), représentée par Mes Ross Wenzel et Nicolas Zbinden,
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intimée.
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Objet
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arbitrage international en matière de sport,
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recours en matière civile contre la sentence rendue
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le 30 juillet 2018 par le Tribunal Arbitral du Sport (CAS 2018/A/5571).
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Considérant en fait et en droit: |
1.
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1.1. Par décision du 7 décembre 2017, la Commission de discipline de la Fédération Internationale de Football Association (ci-après: la FIFA) a suspendu le joueur de football professionnel... X.________ (ci-après: le footballeur), reconnu coupable d'une violation de l'art. 6 du Règlement antidopage de la FIFA, pour une durée d'une année, dont à déduire la période de suspension provisoire déjà subie depuis le 3 novembre 2017.
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Le 20 décembre 2017, la Commission de recours de la FIFA, admettant partiellement l'appel interjeté par le footballeur, a réduit la période de suspension à six mois, sous déduction de la période de suspension provisoire déjà écoulée.
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1.2. En date des 26 février et 9 mars 2018, le footballeur et l'Agence Mondiale Antidopage (ci-après: l'AMA) ont interjeté appel contre cette décision.
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Par sentence motivée du 30 juillet 2018, dont le dispositif avait été notifié aux parties le 14 mai 2018, une Formation de trois membres du Tribunal Arbitral du Sport (TAS), rejetant l'appel du footballeur et admettant partiellement celui de l'AMA, a fixé la durée de la suspension à quatorze mois à partir de la notification de la sentence, dont à déduire la période de suspension provisoire déjà subie.
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1.3. Le 25 mai 2018, le footballeur a déposé un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre ladite sentence (cause 4A_318/2018). L'affaire est toujours pendante.
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1.4. La FIFA (ci-après: la recourante) en a fait de même, par mémoire du 17 octobre 2018 (cause 4A_560/2018).
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Le footballeur, l'AMA et le TAS n'ont pas été invités à déposer une réponse.
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2.
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2.1. Selon l'art. 76 al. 1 LTF, applicable à l'arbitrage tant interne qu'international en vertu de l'art. 77 al. 2 LTF a contrario, a qualité pour former un recours en matière civile quiconque a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire (let. a), pour autant qu'il soit particulièrement touché par la décision attaquée et ait un intérêt digne de protection à son annulation ou sa modification (let. b). Si la qualité pour recourir n'est pas évidente, il incombe au recourant de démontrer que les conditions en sont remplies et, pour ce faire, de fournir toutes les données nécessaires (arrêt 5A_439/2009 du 14 septembre 2009 consid. 1.2.3; BERNARD CORBOZ, in Commentaire de la LTF, 2e éd. 2014, n° 6a ad art. 76 LTF). La qualité pour recourir se détermine exclusivement selon l'art. 76 LTF (arrêt cité, consid. 1.2.2, lequel se réfère à l'ATF 126 I 43 consid. 1a p. 44).
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Conformément à l'art. 76 al. 1 let. b LTF, le recourant doit notamment avoir un intérêt digne de protection à l'annulation de la décision attaquée. L'intérêt digne de protection consiste dans l'utilité pratique que l'admission du recours apporterait à son auteur, en lui évitant de subir un préjudice de nature économique, idéale, matérielle ou autre que la décision entreprise lui occasionnerait (ATF 137 II 40 consid. 2.3. p. 43). L'intérêt doit être actuel (arrêt 4A_426/2017 du 17 avril 2018 consid. 3.1 et les arrêts cités). Au demeurant, le recourant doit avoir un intérêt personnel à recourir. Selon l'adage "nul ne plaide par procureur", il n'est en principe pas admis d'agir en justice en faisant valoir non pas son intérêt, mais l'intérêt d'autrui (CORBOZ, op. cit., n° 22 ad art. 76 LTF).
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2.2. La FIFA a pris part formellement, en qualité de défenderesse, à la procédure devant le TAS (sentence, n. 3). Elle remplit donc la condition posée à l'art. 76 al. 1 let. a LTF.
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L'art. 75 al. 3, 1er par., du Règlement confère certes à la FIFA le droit d'interjeter devant le TAS des appels relatifs à des joueurs de niveau international. Toutefois, cette faculté ne préjuge pas la qualité de cette association pour former un recours en matière civile contre la sentence du TAS attaquée, puisqu'il s'agit là d'une question à trancher au regard du seul art. 76 LTF, comme on l'a vu.
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La recourante indique qu'elle soulève les griefs tirés de l'arbitraire, voire de la contrariété à l'ordre public, et de la violation de son droit d'être entendue (recours, n. 43 (ii)). Cette simple énumération des griefs qu'elle entend formuler à l'encontre de la sentence ne permet nullement à la Cour de céans de vérifier en quoi la FIFA aurait un intérêt personnel, actuel et digne de protection à s'en prendre à la décision attaquée.
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Il en va de même de l'affirmation de la FIFA selon laquelle l'ensemble de ses conclusions ont été rejetées par le TAS (recours, n. 43 (iii)). Lesdites conclusions ne tendaient du reste qu'au rejet des appels formés par le footballeur et par l'AMA, ainsi qu'à la confirmation de la décision prise le 20 décembre 2017 par la Commission de recours de la FIFA ou, sinon, de celle rendue le 7 décembre 2017 par la Commission de discipline de la FIFA (sentence, n. 47). La Formation du TAS ne les a pas admises, elle qui, après avoir rejeté l'appel du footballeur et admis partiellement celui de l'AMA, a fait passer la durée de la suspension de six à quatorze mois et a modifié la décision du 20 décembre 2017 dans cette mesure. Devant le TAS, la FIFA a ainsi joué, mutatis mutandis, le même rôle que celui qui est dévolu d'ordinaire, dans une procédure cantonale, à un tribunal de première instance dont le jugement est soumis à la juridiction d'appel compétente. Il va sans dire que ce tribunal, pas plus que la collectivité publique dont il dépend, ne saurait se prévaloir de l'art. 76 al. 1 let. b LTF pour contester devant le Tribunal fédéral la décision d'appel au seul motif qu'elle a modifié le dispositif de son jugement. Rien ne justifie d'en décider autrement en ce qui concerne la FIFA, en l'espèce du moins. Cette association ne démontre pas, de surcroît, en quoi le fait que le footballeur a été davantage puni que ce qu'elle estimait justifié lui causerait, à elle, un préjudice d'une quelconque nature.
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Dans l'ordonnance rendue le 27 septembre 2018 en l'affaire connexe 4A_318/2018, X.________ c. FIFA et AMA, la présidente de la Ire Cour de droit civil, statuant sur une requête d'effet suspensif du footballeur, a souligné que, dans ses observations du 18 septembre 2018 au sujet de ladite requête, la FIFA avait fait part de son intention d'interjeter un recours séparé - intention qu'elle a mise à exécution depuis lors -, tout en déclarant considérer avec une certaine bienveillance les arguments développés par le footballeur dans une partie de sa requête (ordonnance, p. 3, dernier par.). Elle a d'ailleurs évoqué en passant la question de la qualité pour recourir de la FIFA sans pousser plus avant l'examen de celle-ci. Il appert de ces remarques que la FIFA entendait soutenir, par son propre recours à venir, l'un ou l'autre des arguments avancés par le footballeur dans son propre recours. Or, pareille intention, correspondant peu ou prou au fait de plaider pour autrui, n'était guère compatible avec l'allégation, par ladite association, de l'existence d'un intérêt personnel lui conférant la qualité pour agir devant le Tribunal fédéral.
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Au demeurant, dans les susdites observations du 18 septembre 2018, la recourante a clairement indiqué, en ces termes, quel était le but poursuivi par elle, via le recours distinct qu'elle s'apprêtait à déposer ( p. 3, let. D.b) :
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" La FIFA entend d'ailleurs interjeter un recours séparé en son propre nom car la motivation de la Sentence attaquée soulève une question fondamentale du point de vue du principe de la proportionnalité sur laquelle il est dans l'intérêt général d'obtenir l'avis du Tribunal fédéral, même sous l'angle restreint de l'arbitraire ou de l'ordre public."
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Il va sans dire que le seul désir, fût-il compréhensible, d'obtenir du Tribunal fédéral une réponse à une question juridique qualifiée par elle de fondamentale n'est pas propre à conférer à la FIFA la qualité pour recourir au sens de l'art. 76 al. 1 let. b LTF.
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Dès lors, le présent recours est frappé d'irrecevabilité.
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3. La recourante, qui succombe, devra payer les frais de la procédure fédérale (art. 66 al. 1 LTF). En revanche, elle n'aura pas à indemniser ses parties adverses puisque celles-ci n'ont pas été invitées à se déterminer sur le recours.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: |
1. Le recours est irrecevable.
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2. Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.
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3. Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et au Tribunal Arbitral du Sport.
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Lausanne, le 16 novembre 2018
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Au nom de la Ire Cour de droit civil
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du Tribunal fédéral suisse
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La Présidente: Kiss
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Le Greffier: Carruzzo
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