BGer 2C_1012/2018 |
BGer 2C_1012/2018 vom 29.01.2019 |
2C_1012/2018 |
Arrêt du 29 janvier 2019 |
IIe Cour de droit public |
Composition
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MM. les Juges fédéraux, Seiler, Président,
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Zünd et Donzallaz.
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Greffier : M. de Chambrier.
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Participants à la procédure
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1. A.X.________,
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2. B.X.________,
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3. C.X.________,
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tous les trois agissant par D.X.________,
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recourants,
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contre
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Secrétariat d'Etat aux migrations.
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Objet
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Reconnaissance du statut d'apatride; assistance judiciaire,
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recours contre l'arrêt du Tribunal administratif fédéral, Cour VI, du 2 octobre 2018 (F-5410/2018).
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Faits : |
A. Par décision du 21 août 2018, le Secrétariat d'Etat aux migrations (SEM) a rejeté la demande de reconnaissance du statut d'apatride du 15 juillet 2015 déposée en faveur de A.X.________, née en 2003, B.X.________, née en 2007, et C.X.________, né en 2013 (art. 105 al. 2 LTF).
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Le 20 septembre 2018, les intéressés ont déposé un recours, assorti d'une demande d'assistance judiciaire partielle, contre la décision précitée du 21 août 2018 auprès du Tribunal administratif fédéral. Par décision incidente du 2 octobre 2018, le juge instructeur du Tribunal administratif fédéral a rejeté la requête d'assistance judiciaire partielle et fixé un délai aux intéressés pour verser une avance de frais, sous menace d'irrecevabilité du recours.
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B. Par acte du 1er novembre 2018, A.X.________, B.X.________ et C.X.________ ont formulé "une contestation" contre la décision incidente précitée du 2 octobre 2018 auprès du Tribunal fédéral et requis l'assistance judiciaire.
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Le Tribunal administratif fédéral et le SEM renoncent à prendre position sur le recours.
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Considérant en droit : |
1. Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (art. 29 al. 1 LTF; cf. ATF 142 II 363 consid. 1 p. 365; 141 II 113 consid. 1 p. 116).
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1.1. Les recourants n'ont pas qualifié leur recours au Tribunal fédéral. Cette imprécision ne saurait leur nuire, pour autant que l'acte remplisse les exigences légales de la voie de droit qui est ouverte (cf. ATF 138 I 367 consid. 1.1 p. 370).
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1.2. Une décision de refus de l'assistance judiciaire constitue une décision incidente susceptible de causer un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF (arrêt 2D_73/2015 du 30 juin 2016 consid. 1.1 et références citées). En vertu du principe de l'unité de la procédure, la voie de recours ouverte contre une telle décision est déterminée par le litige principal (ATF 137 III 261 consid. 1.4 p. 264). La présente cause, qui porte sur une demande de reconnaissance du statut d'apatride, relève du droit public (art. 82 let. a LTF). Elle ne tombe sous le coup d'aucune des exceptions visées par l'art. 83 LTF (cf. arrêt 2C_661/2015 du 12 novembre 2015 consid. 1), de sorte que la voie du recours en matière de droit public est en principe ouverte.
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1.3. Dirigé contre une décision rendue par le Tribunal administratif fédéral (cf. art. 86 al. 1 let. a LTF), le recours a été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF), par les destinataires de la décision attaquée qui ont qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF.
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1.4. Selon l'art. 42 al. 1 LTF, les mémoires doivent notamment indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve. Pour satisfaire à l'exigence de motivation prévue à l'art. 42 al. 2 LTF, le recourant doit discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le droit (cf. ATF 134 V 53 consid. 3.3 p. 60).
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En l'occurrence, le recours ne contient pas de conclusion claire concernant la décision incidente attaquée et le refus d'assistance judiciaire qu'elle comporte. La motivation consiste essentiellement à répéter les arguments invoqués dans l'affaire au fond, sans expliquer en quoi la décision querellée serait contraire au droit. Bien qu'il s'agisse d'un cas limite, il peut néanmoins être admis en l'espèce que le recours a été déposé dans les formes prescrites (art. 42 LTF), dans la mesure où il ne faut pas se montrer trop formaliste quant aux exigences liées à la motivation, ainsi que dans la formulation des conclusions, lorsque la partie recourante, comme en l'espèce, agit en personne (cf. ATF 141 I 49 consid. 3.2 p. 52; arrêts 2C_841/2017 du 6 novembre 2018 consid. 1.4 et autres références citées) et qu'il ressort implicitement du recours que les intéressés demandent l'annulation de la décision attaquée et l'octroi de l'assistance judiciaire pour la procédure devant le Tribunal administratif fédéral, au motif que celui-ci aurait retenu à tort que leur recours du 20 septembre 2018 était dépourvu de chance de succès.
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1.5. En revanche, dans la mesure où le recours conclut à la reconnaissance du statut d'apatride et à la réparation du tort moral, il est irrecevable, car hors objet de la contestation. La décision attaquée porte en effet uniquement sur le refus d'octroi de l'assistance judiciaire prononcée par l'autorité précédente. Sous les réserves qui précèdent, il peut donc être entré en matière sur le recours.
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2. Les pièces produites par les recourants qui sont ultérieures à la décision attaquée, telles que les documents du 8 octobre 2018 de l'ambassade de la Mongolie en Suisse, ne seront pas prises en considération. En effet, aucun fait nouveau ni preuve nouvelle, postérieur à l'arrêt entrepris, ne peut en principe être présenté devant le Tribunal fédéral (cf. art. 99 al. 1 LTF).
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Erwägung 3 |
3.1. En vertu de l'art. 29 al. 3 Cst., toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès, à l'assistance judiciaire. Ce principe est concrétisé à l'art. 65 al. 1 de la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative (PA; RS 172.021), applicable à la procédure devant le Tribunal administratif fédéral en vertu de l'art. 37 de la loi fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal administratif fédéral (LTAF; RS 173.32; cf. arrêt 2C_118/2016 du 23 mai 2016 consid. 6). L'art. 29 al. 3 Cst. confère au justiciable une garantie minimale, dont le Tribunal fédéral examine librement le respect (arrêt 2C_1056/2015 du 20 janvier 2016 consid. 4.1). Il ne sanctionne toutefois les constatations faites par les juridictions cantonales dans ce cadre-là que si elles sont arbitraires (ATF 134 I 12 consid. 2.3; 130 I 180 consid. 2.1 p. 182).
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3.2. Un procès est dépourvu de chances de succès lorsque les perspectives de le gagner sont notablement plus faibles que les risques de le perdre, et qu'elles ne peuvent donc être considérées comme sérieuses, de sorte qu'une personne raisonnable et de condition aisée renoncerait à s'y engager en raison des frais qu'elle s'exposerait à devoir supporter; il ne l'est en revanche pas lorsque les chances de succès et les risques d'échec s'équilibrent à peu près, ou que les premières ne sont que légèrement inférieures aux secondes. L'élément déterminant réside dans le fait que l'indigent ne doit pas se lancer, parce qu'il plaide aux frais de la collectivité, dans des démarches vaines qu'une personne raisonnable n'entreprendrait pas si, disposant de moyens suffisants, elle devait les financer de ses propres deniers (cf. ATF 139 III 396 consid. 1.2 p. 397; 138 III 217 consid. 2.2.4 p. 218; 129 I 129 consid. 2.2 p. 133 ss). Le Tribunal fédéral examine librement si, au regard du droit applicable à la cause, celle-ci présente des chances de succès ou, au contraire, s'en trouve dépourvue (ATF 134 I 12 consid. 2.3 p. 14; 129 I 129 consid. 2.3.1 p. 135 s.). L'estimation des chances de succès se fonde sur les circonstances au moment du dépôt de la demande d'assistance judiciaire, sur la base d'un examen sommaire (ATF 139 III 475 consid. 2.2 p. 476 s.; 138 III 217 consid. 2.2.4, p. 218; 129 I 129 consid. 2.3.1 p. 136).
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3.3. La seule question qui fait l'objet du litige est celle de savoir si c'est à bon droit que l'instance précédente a jugé à première vue dénuée de chance de succès le recours déposé par les intéressés contre le refus de reconnaissance du statut d'apatride prononcé à leur égard.
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3.4. Selon l'art. 1er al. 1 de la Convention du 28 septembre 1954 relative au statut des apatrides (ci-après : la Convention; RS 0.142.40), "le terme «apatride» désigne une personne qu'aucun Etat ne considère comme son ressortissant par application de sa législation". Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, cette disposition doit être interprétée en ce sens que, par apatrides, il faut entendre les personnes qui, sans intervention de leur part, ont été privées de leur nationalité et n'ont aucune possibilité de la recouvrer. A contrario, cette convention n'est pas applicable aux personnes qui abandonnent volontairement leur nationalité ou refusent, sans raisons valables, de la recouvrer, alors qu'ils ont la possibilité de le faire, dans le seul but d'obtenir le statut d'apatride (cf. arrêts 2C_661/2015 du 12 novembre 2015 consid. 3.1; 2C_621/2011 du 6 décembre 2011 consid. 4.2). Il appartient ainsi au requérant, qui peut prétendre à la nationalité d'un pays, d'entreprendre toutes les démarches utiles pour se voir délivrer - ou refuser de manière circonstanciée - cette nationalité et les documents d'identité y afférents (cf. arrêt 2C_621/2011 du 6 décembre 2011 consid. 4.3).
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3.5. En l'espèce, il ressort des faits retenus par l'autorité précédente que la mère des recourants a la nationalité mongole et leur père pakistanaise, que les parents des intéressés n'étaient ni réfugiés, ni requérants d'asile et qu'ils pouvaient prendre contact avec leur pays d'origine afin de formuler une demande de nationalité pour leurs enfants. Le Tribunal administratif fédéral retient également qu'en dépit des injonctions du SEM, les intéressés n'ont pas établi avoir effectué les démarches nécessaires pour obtenir la nationalité mongole ou pakistanaise. En particulier, ils n'ont produit aucun document officiel provenant des autorités compétentes de la Mongolie et du Pakistan prouvant qu'une demande de nationalité avait été déposée, puis éventuellement refusée. Enfin, le Tribunal administratif fédéral relève aussi que les lois mongole et pakistanaise permettent aux enfants nés hors de ces pays d'en obtenir la nationalité (cf. law of Mongolia on citizenship du 5 juin 1995 art. 7 et Pakistan Citizenship Act de 1951 ch. 5; consultables sur le site www.unhcr.org/refworld; art. 105 al. 2 LTF).
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Les recourants ne remettent pas en question les faits retenus par l'autorité précédente et on ne voit pas en quoi les constatations qui précèdent seraient arbitraires. Les intéressés reprochent aux autorités helvétiques de leur avoir remis des titres de séjour qui indiquaient de façon erronée qu'ils étaient ressortissants de la Mongolie, pour la période courant de novembre 2014 à février 2017. Ils n'expliquent toutefois pas de façon crédible pour quelle raison les documents précités les auraient empêchés d'effectuer des démarches en vue d'obtenir la nationalité mongole ou pakistanaise. Par ailleurs, ils n'allèguent pas avoir entrepris de telles démarches après avoir obtenu des autorités suisses des titres de séjour indiquant non plus la nationalité mongole, mais la mention "Etat inconnu".
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Dans ces circonstances, le Tribunal administratif fédéral pouvait sans violer le droit fédéral considérer prima facie que le recours déposé par les intéressés contre le refus de reconnaissance du statut d'apatride était dépourvu de chance de succès et que ceux-ci ne pouvaient obtenir l'assistance judiciaire.
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4. Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours, dans la mesure de sa recevabilité. Le recours étant d'emblée dénué de chances de succès, la requête d'assistance judiciaire est rejetée (art. 64 al. 1 LTF). Succombant, les recourants doivent supporter les frais judiciaires réduits, solidairement entre eux (art. 66 al. 1 et 5 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : |
1. Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
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2. La demande d'assistance judiciaire est rejetée.
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3. Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge des recourants, solidairement entre eux.
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4. Le présent arrêt est communiqué aux recourants, au Secrétariat d'Etat aux migrations et au Tribunal administratif fédéral, Cour VI.
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Lausanne, le 29 janvier 2019
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Au nom de la IIe Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président : Seiler
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Le Greffier : de Chambrier
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