Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
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9C_831/2018
Arrêt du 12 février 2019
IIe Cour de droit social
Composition
Mmes les Juges fédérales Pfiffner, Présidente, Glanzmann et Moser-Szeless.
Greffière : Mme Perrenoud.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Me Gilles-Antoine Hofstetter, avocat,
recourant,
contre
Moove Sympany SA,
c/o Stiftung Sympany, Peter Merian-Weg 4, 4052 Basel, représentée par Me Isabelle Jacques, avocate,
intimée.
Objet
Assurance-maladie,
recours contre le jugement du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour des assurances sociales, du 23 octobre 2018 (AA 22/16 - 125/2018).
Faits :
A.
A.a. A.________, né en 1980, a travaillé en qualité de serrurier pour le compte de la société B.________ Sàrl. A ce titre, il a bénéficié d'une assurance collective d'indemnités journalières en cas de maladie auprès de Moove Sympany SA (ci-après: Moove Sympany).
A la suite d'un accident le 17 mars 2009, A.________ a présenté une incapacité totale de travail et perçu des indemnités journalières de son assureur-accidents, la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA), jusqu'au 7 février 2010, date à partir de laquelle elle a refusé toute prestation (décision du 4 février 2010, confirmée sur opposition le 1
er avril 2010). Saisi d'une demande de prestations en décembre 2009, l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après: l'office AI) a octroyé à l'assuré des mesures de réadaptation du 26 avril au 23 septembre 2010, durant lesquelles des indemnités journalières lui ont été versées. Par la suite, il a nié le droit à des prestations de l'assurance-invalidité (décision du 5 décembre 2012). Entre l'intervention de la CNA et celle de l'office AI, soit du 8 février au 25 avril 2010, A.________ a bénéficié d'indemnités journalières pour perte de gain de Moove Sympany (décision du 26 février 2015).
A.b. Le 13 avril 2011, A.________ a requis de Moove Sympany la poursuite du versement des indemnités journalières au-delà du 25 avril 2010. Après avoir informé l'assuré qu'elle n'avait pas l'obligation de prester du 26 avril au 22 septembre 2010, dès lors qu'il avait perçu des indemnités journalières de l'assurance-invalidité qui dépassaient son gain perdu durant cette période, et lui avoir rappelé que conformément aux conditions générales, il était tenu de présenter des attestations médicales toutes les quatre semaines afin de justifier son incapacité de travail supérieure à un mois (courrier du 13 septembre 2011), Moove Sympany lui a ensuite fait savoir qu'elle allait procéder à l'évaluation de son incapacité de travail (courrier du 31 octobre 2011). Un échange de correspondances a également eu lieu entre les parties au sujet de la couverture d'assurance de A.________. Après avoir recueilli l'avis de ses médecins-conseils (rapports des doctoresses C.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie, du 3 janvier 2015, et D.________, spécialiste en médecine interne générale, du 28 mai 2014), Moove Sympany a refusé le versement d'indemnités journalières au-delà du 25 avril 2010 (décision du 26 février 2015, confirmée sur opposition le 20 janvier 2016).
B.
A.________ a recouru contre la décision sur opposition du 20 janvier 2016 devant le Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour des assurances sociales. Après avoir fait verser au dossier ceux de l'assurance-invalidité et de l'assurance-accidents, la juridiction cantonale a rejeté le recours (arrêt du 23 octobre 2018).
C.
A.________ interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement, dont il demande la réforme, en ce sens qu'il a droit à des indemnités journalières au-delà du 25 avril 2010, sur la base d'un taux d'incapacité de travail de 100 % jusqu'au 23 septembre 2010 (sous déduction des prestations de l'assurance-invalidité), puis du 24 septembre 2010 au 29 février 2012, sur la base d'une capacité de travail de 50 % au maximum. Subsidiairement, il requiert l'annulation du jugement cantonal et le renvoi de la cause à l'autorité intimée pour nouvelle instruction et/ou décision dans le sens des considérants.
Considérant en droit :
1.
1.1. Le recours peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF . Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il statue par ailleurs sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Le recourant qui entend s'en écarter doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF sont réalisées sinon un état de fait divergent ne peut pas être pris en considération.
1.2. Les constatations de l'autorité cantonale de recours sur l'atteinte à la santé, la capacité de travail de la personne assurée et l'exigibilité - pour autant qu'elles ne soient pas fondées sur l'expérience générale de la vie - relèvent d'une question de fait et ne peuvent donc être contrôlées par le Tribunal fédéral que sous un angle restreint (ATF 132 V 393 consid. 3.2 p. 398). On rappellera également qu'il n'y a pas arbitraire du seul fait qu'une solution autre que celle de l'autorité cantonale semble concevable, voire préférable. Pour qu'une décision soit annulée pour cause d'arbitraire, il ne suffit pas que sa motivation soit insoutenable; il faut encore que cette décision soit arbitraire dans son résultat (ATF 141 I 70 consid. 2.2 p. 72).
2.
2.1. Le litige a trait au droit du recourant à des indemnités journalières pour perte de gain selon la LAMal pour la période courant du 26 avril 2010 au 29 février 2012. Il porte plus particulièrement sur la détermination de la capacité de travail de l'assuré après le 25 avril 2010.
2.2. Le jugement attaqué expose de manière complète les dispositions légales et les principes jurisprudentiels relatifs notamment aux notions de maladie (art. 3 LPGA) et d'incapacité de travail (art. 6 LPGA), au droit à des prestations de l'assurance facultative d'une indemnité journalière (art. 67 à 77 LAMal), ainsi qu'à la valeur probante des rapports médicaux (ATF 134 V 231 consid. 5.1 p. 232; 125 V 351 consid. 3 p. 352) et à la libre appréciation des preuves (art. 61 let. c LPGA). Il suffit d'y renvoyer.
3.
3.1. En se fondant sur les rapports médicaux que lui ont transmis l'office AI, la CNA et l'intimée, les premiers juges ont considéré que le recourant n'avait pas présenté d'incapacité de travail au-delà du 18 janvier 2010. Ils ont en particulier accordé une pleine valeur probante aux conclusions de la doctoresse C.________, selon lesquelles aucune incapacité de travail n'était médicalement justifiée après le 23 septembre 2010 (rapport du 3 janvier 2015). La juridiction cantonale a en revanche considéré que l'avis de l'autre médecin-conseil de l'intimée, la doctoresse D.________, qui avait attesté une incapacité totale de travail jusqu'au 23 septembre 2010, puis une capacité de 50 % avec un rendement de 50 % dans une activité adaptée et sans stress jusqu'au 29 février 2012 (rapport du 28 mai 2014), n'était pas motivé à satisfaction pour remettre en doute les conclusions de la doctoresse C.________. Aussi les premiers juges ont-ils confirmé la décision sur opposition rendue par l'intimée. Au vu de l'issue du litige, ils ont laissé ouvertes la question de la surindemnisation de l'assuré durant la période de perception des indemnités journalières de l'assurance-invalidité, ainsi que celle de la couverture du recourant par l'assurance collective, respectivement individuelle, auprès de l'intimée.
3.2. Le recourant reproche d'abord à la juridiction cantonale d'avoir apprécié les faits et les preuves de manière arbitraire pour admettre qu'il présentait une pleine capacité de travail du 26 avril 2010 au 29 février 2012. Il fait valoir que sa capacité de travail ne devait pas être examinée "a posteriori, notamment à l'aune du dossier AI, mais bien plutôt sur la base des propres constatations de l'intimée qui a mené des investigations médicales, en recueill[ant] notamment l'avis expertal de la Dresse D.________". Pour cette raison déjà, l'assuré conteste que le rapport de la doctoresse C.________, établi le 3 janvier 2015, soit près de trois ans après la période litigieuse, pût avoir une quelconque valeur probante. Par ailleurs, il soutient que "les seuls médecins qui [l']ont examiné [...] durant la période litigieuse", soit les doctoresses E.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie, et D.________, ainsi que le docteur F.________, spécialiste en médecine interne générale, ont "tous attesté, d'une même plume, d'une incapacité de travail", d'abord totale jusqu'au 30 septembre 2011 [recte : 23 septembre 2010], puis de 50 % jusqu'au 29 février 2012. Le recourant fait finalement grief aux premiers juges de s'être livrés à une appréciation arbitraire des faits pour considérer que son contrat de travail avait été résilié au début de l'année 2010. Il allègue être toujours lié à son employeur, avec pour conséquence qu'il bénéficie encore de la couverture de l'assurance collective de l'intimée.
4.
Les griefs du recourant sont mal fondés.
4.1. A titre liminaire, il convient de relever que l'intimée était tenue d'examiner la capacité de travail du recourant a posteriori, dès lors que celui-ci a requis la poursuite du versement des indemnités journalières au mois d'avril 2011, soit près d'un an après la fin de la perception desdites prestations le 25 avril 2010 (courrier du recourant du 13 avril 2011). A la lecture du courrier de l'intimée du 13 septembre 2011, on constate en effet que l'assuré a justifié son incapacité de travail au mois d'avril 2011 seulement, alors qu'il ne lui avait précédemment pas adressé des attestations médicales toutes les quatre semaines, comme le prévoient les conditions générales d'assurance; l'intimée était donc en droit de procéder à une instruction complémentaire de la capacité de travail de son assuré pendant la période litigieuse, ce qu'elle a fait en recueillant l'avis de ses médecins-conseils.
4.2. A l'inverse de ce que prétend le recourant, le rapport de la doctoresse C.________ satisfait aux exigences jurisprudentielles pour se voir reconnaître une pleine valeur probante. On observe d'abord, à la suite de la juridiction de première instance, que la doctoresse C.________ a motivé son point de vue de manière sérieuse et convaincante et qu'elle a expliqué les raisons pour lesquelles elle s'est distancée des conclusions des médecins traitants du recourant. Le médecin-conseil a en effet exposé que la doctoresse E.________ et le docteur F.________ s'étaient essentiellement fiés aux plaintes subjectives exprimées par leur patient, sans apporter d'élément objectif pour étayer leurs constatations, et sans procéder à une réévaluation de leur diagnostic et de la capacité de travail du recourant, ce nonobstant l'existence de ressources mobilisables élevées et de facteurs non-pathologiques. Aussi, le recourant ne peut-il être suivi lorsqu'il soutient que la doctoresse C.________ se serait prononcée au sujet de sa capacité de travail sans prendre en considération le point de vue de ses médecins traitants, pas plus d'ailleurs que lorsqu'il affirme que les avis de ces derniers sont "probants au sens de la jurisprudence". A cet égard, il ressort effectivement de leurs rapports que les médecins traitants de l'assuré ont posé le diagnostic d'état de stress post-traumatique (F43.1) et attesté une incapacité de travail postérieurement au 25 avril 2010, sans motiver leurs conclusions. Les éléments qu'ils ont par ailleurs retenus ont été qualifiés, par la doctoresse C.________, d'insuffisants pour justifier le diagnostic posé par la psychiatre traitante (cf., notamment, rapports du docteur F.________ du 29 mars 2010 et de la doctoresse E.________ du 21 octobre 2011).
La doctoresse C.________ a en revanche fait siennes les conclusions émises par le docteur G.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie et en médecine pharmaceutique, au terme de l'expertise à laquelle il a procédé sur mandat de l'office AI. Dans son rapport du 29 février 2012, l'expert a exclu, pour toute la période considérée, la présence d'une maladie psychiatrique incapacitante, sous la forme de la persistance d'un état de stress post-traumatique; il a retenu comme seul diagnostic, celui non incapacitant de dysthymie (F34.1) faisant suite à un trouble de l'adaptation survenu en mars 2009. Le docteur G.________ a également fait état d'incohérences entre les plaintes de l'assuré et ses propres constatations objectives, et mis en évidence que le recourant disposait de ressources mobilisables élevées, notamment dans sa vie sociale, conjugale et familiale, ainsi que dans ses loisirs (l'assuré "refuse pour l'instant, de sortir d'un rôle d'invalide en mettant en avant un cortège de symptômes subjectifs et incohérents"). Les conclusions de l'expert, auxquelles les premiers juges ont accordé une pleine valeur probante, coïncident par ailleurs avec celles précédemment posées par les médecins de la Clinique romande de réadaptation (CRR) et par le docteur H.________, médecin d'arrondissement de la CNA (rapport du 18 janvier 2010), qui eux se sont prononcés durant la période litigieuse; elles ont au demeurant été confirmées par le docteur I.________, spécialiste en chirurgie et médecin au Service médical régional de l'AI (SMR) qui a considéré que l'incapacité de travail de l'assuré avait duré du 17 mars 2009 au 18 janvier 2010 (rapport du 6 juin 2012).
4.3. On ne saurait par ailleurs reprocher à la juridiction cantonale de s'être distancée de l'avis de la doctoresse D.________, en raison du fait que celle-ci "semble se limiter à reprendre les certificats médicaux en sa possession, sans se livrer à un examen critique de leur contenu". A la lecture du rapport que ce médecin a établi le 28 mai 2014, on constate effectivement que les périodes et taux d'incapacité de travail qu'il a retenus ne sont pas motivés. Par conséquent, le motif pour lequel les premiers juges n'ont pas suivi les conclusions de la doctoresse D.________ n'est pas arbitraire.
On ajoutera que l'argumentation du recourant selon laquelle les premiers juges auraient dû se fonder sur l'avis de la doctoresse D.________ pour déterminer quelle était sa capacité de travail après le 25 avril 2010, parce que ce médecin l'a, contrairement à la doctoresse C.________, examiné durant la période litigieuse, ne résiste pas à l'examen. En effet, contrairement à ce que soutient l'assuré, la doctoresse D.________ s'est également prononcée sur sa capacité de travail, a posteriori, sur la base du dossier que lui a transmis l'intimée, et non en fonction de l'examen qui avait apparemment eu lieu durant la période litigieuse. Si dans son rapport du 28 mai 2014, le médecin-conseil a certes mentionné avoir reçu le recourant à son cabinet le 14 juillet 2010, elle se réfère à "l'incapacité de travail suite à l'agression" et au programme de réinsertion alors suivi par l'assuré auprès de l'assurance-invalidité. Il s'agit d'une époque pour laquelle l'assurance-invalidité a par la suite nié toute incapacité de travail (rapport du SMR du 6 juin 2012), de sorte que l'attestation d'un empêchement à ce moment-là n'apparaît pas fondée. Pour le reste, la doctoresse D.________ a procédé à une évaluation a posteriori de la capacité de travail de l'assuré, en se fondant sur les différents rapports médicaux que lui avait remis Moove Sympany.
4.4. En définitive, le recourant oppose simplement les avis de la doctoresse D.________ et de ses médecins traitants à celui de la doctoresse C.________, sans mettre en évidence d'éléments objectifs déterminants que le médecin aurait omis dans son appréciation. Une telle argumentation ne suffit pas pour établir le caractère arbitraire du choix des premiers juges. Par conséquent, il n'y a pas lieu de s'écarter des constatations de la juridiction cantonale quant à l'absence d'atteinte à la santé incapacitante durant la période litigieuse. Le recours se révèle mal fondé sur ce point.
4.5. S'agissant finalement du grief que soulève le recourant en lien avec l'absence de résiliation des rapports de travail le liant à la société B.________ Sàrl et la validité de la couverture de l'assurance collective de Moove Sympany, il devient sans objet, dès lors que c'est à bon droit que cette dernière a refusé de verser des indemnités journalières au-delà du 25 avril 2010, en raison déjà de l'absence d'incapacité de travail. On relèvera que le recourant frise la témérité en tant qu'il continue à affirmer qu'il est "juridiquement parlant toujours lié à son employeur". Il suffit à cet égard de se référer aux constatations cantonales relatives à l'absence de mention du nom de l'intéressé sur les listes du personnel de la société B.________ Sàrl à compter de 2010.
5.
Le recours est mal fondé.
6.
Vu l'issue du litige, les frais de la présente procédure sont mis à la charge du recourant qui succombe (art. 66 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour des assurances sociales, et à l'Office fédéral de la santé publique.
Lucerne, le 12 février 2019
Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente : Pfiffner
La Greffière : Perrenoud