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Original
 
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
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8C_754/2018
Arrêt du 7 mars 2019
Ire Cour de droit social
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Frésard, Juge présidant, Heine et Wirthlin.
Greffière : Mme Castella.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Me Philippe Pasquier, avocat,
recourant,
contre
Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA), Fluhmattstrasse 1, 6004 Lucerne,
intimée.
Objet
Assurance-accidents (procédure de première instance, condition de recevabilité),
recours contre le jugement de la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 27 septembre 2018 (A/2387/2018 ATAS/851/2018).
Faits :
A.
A.________, né en 1997, travaillait au service de B.________ SA et était, à ce titre, obligatoirement assuré contre le risque d'accident auprès de la caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (ci après: CNA).
Le 16 février 2018, l'assuré a frappé une porte vitrée avec son poing et s'est coupé sur toute la longueur de l'avant-bras droit. Il a été hospitalisé en urgence à l'hôpital C.________ et s'est trouvé en incapacité totale de travail.
Par décision du 2 mars 2018, la CNA a réduit de 50 % les prestations en espèces, en raison du caractère téméraire du comportement à l'origine de l'accident. Saisie d'une opposition, elle l'a rejetée par décision du 8 juin 2018, communiquée par courrier A Plus.
B.
Le 11 juillet 2018, A.________ a déposé un recours contre la décision sur opposition du 8 juin 2018. Par arrêt du 27 septembre 2018, la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice de la République et canton de Genève a déclaré le recours irrecevable pour cause de tardiveté.
C.
A.________ interjette un recours en matière de droit public dans lequel il conclut à l'annulation du jugement attaqué et au renvoi de la cause à la cour cantonale pour instruction et nouvelle décision. Préalablement, il demande à ce qu'il soit ordonné à la CNA de produire les statistiques des envois de ses décisions sur les cinq dernières années en distinguant pour chaque jour de la semaine les envois en courrier A, A Plus et recommandé.
La CNA conclut au rejet du recours. Le recourant a répliqué.
Considérant en droit :
1.
Le recours est dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière de droit public (art. 82 ss LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d LTF). Il a été déposé dans le délai (art. 100 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi. Il est donc recevable.
2.
Le litige porte sur le respect du délai de recours devant la juridiction cantonale, singulièrement sur le point de départ de ce délai.
3.
Aux termes de l'art. 60 al. 1 LPGA (RS 830.1), le recours doit être déposé dans les trente jours suivant la notification de la décision sujette à recours. L'art. 38 al. 1 LPGA, applicable par analogie en vertu de l'art. 60 al. 2 LPGA, dispose que si le délai, compté par jours ou par mois, doit être communiqué aux parties, il commence à courir le lendemain de la communication.
4.
Se fondant sur l'attestation de suivi des envois de La Poste Suisse SA (ci-après: la poste; relevé "Track & Trace"), la cour cantonale a constaté que la décision sur opposition du 8 juin 2018 avait été distribuée le samedi 9 juin 2019, via la case postale de l'étude du mandataire du recourant. Aussi, le délai de recours avait-il commencé à courir le dimanche 10 juin 2018 pour arriver à échéance le lundi 9 juillet 2018. Par conséquent, le recours, déposé le 11 juillet 2018, ne l'avait pas été en temps utile.
5.
5.1. Invoquant la violation du droit à la preuve (art. 29 al. 2 Cst. et 6 CEDH), le recourant reproche aux premiers juges de n'avoir pas donné suite à sa requête tendant à la production par l'intimée des statistiques des types d'envoi de ses décisions pour les cinq dernières années. Il entendait ainsi identifier une pratique de la part de l'intimée consistant à envoyer ses décisions par courrier A Plus le vendredi, plutôt que par courrier recommandé.
5.2. Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. comprend notamment le droit pour l'intéressé d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 p. 299; 135 II 286 consid. 5.1 p. 293 et les arrêts cités). Toutefois, il est possible de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes, lorsque le fait dont les parties veulent rapporter l'authenticité n'est pas important pour la solution du cas, lorsque les preuves résultent déjà de constatations versées au dossier ou lorsque le juge parvient à la conclusion qu'elles ne sont pas décisives pour la solution du litige ou qu'elles ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 précité et les arrêts cités; 136 I 229 consid. 5.3 p. 236).
5.3. Comme l'ont relevé les premiers juges, en droit des assurances sociales, il n'existe pas de disposition légale obligeant les assureurs sociaux à notifier leurs décisions selon un mode particulier. Dès lors, la jurisprudence admet que les assureurs sont libres de décider de la manière dont ils souhaitent notifier leurs décisions. Ils peuvent en particulier choisir d'envoyer celle-ci par courrier A Plus (ATF 142 III 599 consid. 2.4.1 p. 603; voir également, parmi d'autres, arrêt 8C_559/2018 du 26 novembre 2018 consid. 4.3.1). Rien ne les empêche non plus d'envoyer leurs décisions un vendredi. Contrairement à ce que soutient le recourant, l'intimée n'a pas amputé arbitrairement de deux jours le délai de recours en procédant de la sorte. En effet, en dehors des féries judiciaires et avant l'échéance du délai de recours, les week-ends doivent être pris en compte dans le calcul du délai. Dans ces conditions, l'acte d'instruction sollicité par le recourant n'apparaissait pas pertinent et les premiers juges pouvaient refuser d'y donner suite. Pour les mêmes raisons, il n'y pas lieu d'accéder à la requête formulée une nouvelle fois devant la Cour de céans.
6.
6.1. Le recourant invoque la violation de son droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.) par la juridiction cantonale, du fait que celle-ci n'a pas examiné ses arguments en relation avec l'art. 29 al. 7 de l'Ordonnance du 19 août 2012 sur la poste (OPO; RS 783.01) et le ch. 2.5.3 des conditions générales de la poste ("Prestations du service postal" pour les clients commerciaux), dont il déduit que le samedi est un jour férié pour ce qui est de la date de la distribution.
6.2. La jurisprudence a déduit du droit d'être entendu le devoir pour le juge de motiver sa décision, afin que le destinataire puisse en saisir la portée, le cas échéant, l'attaquer en connaissance de cause et que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle (ATF 138 I 232 consid. 5.1 p. 238 et les arrêts cités). Pour répondre à ces exigences, il suffit que le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision; il n'est pas tenu de discuter tous les arguments soulevés par les parties, mais peut se limiter à ceux qui lui apparaissent pertinents (ATF 142 III 433 consid. 4.3.2 p. 436 et les arrêts cités).
6.3. En l'espèce, les premiers juges ont appliqué la jurisprudence du Tribunal fédéral, selon laquelle un envoi expédié par courrier A Plus se trouve dans la sphère de puissance du destinataire dès la date du dépôt dans la boîte aux lettres ou la case postale du destinataire, fût-elle un samedi. Dans cette mesure, ils ont rejeté, à tout le moins implicitement, la thèse du recourant, selon laquelle le samedi serait un jour férié susceptible de reporter le dies a quo du délai de recours. Au demeurant, le fait que le samedi n'est pas mentionné comme jour "ouvrable et de dépôt" à l'art. 29 al. 7 OPO ne signifie pas pour autant que les envois ne peuvent pas être distribués ce jour-là. Quant au ch. 2.5.3 "Dimanche et jours fériés" des conditions générales susmentionnées, il prévoit que "si la date de distribution (= échéance) tombe un dimanche ou un autre jour férié reconnu, au niveau étatique ou par l'usage local, au lieu de la prestation, le premier jour ouvrable qui suit ce dimanche ou jour férié est considéré date de distribution". On ne peut pas en déduire que le samedi est un jour férié au sens de cette disposition, auquel cas il serait mentionné au même titre que le dimanche. On notera par ailleurs que la fermeture des bureaux de l'administration, et à plus forte raison des cabinets d'avocats, ne suffit pas en soi pour reconnaître au samedi le caractère de jour férié (cf. arrêt 6B_730/2013 du 10 décembre 2013 consid. 1.3.2 et les arrêts cités; arrêt 1P.322/2006 du 25 juillet 2006 consid. 2.5). En conclusion, les premiers juges n'ont pas violé leur devoir de motivation en renonçant à s'exprimer davantage sur les arguments du recourant qui sont inconsistants.
7.
7.1. Invoquant la garantie d'un procès équitable (art. 29 al. 1 et 2 Cst. et 6 CEDH), le principe de l'égalité des parties et de la sécurité du droit ou encore le principe de la bonne foi, le recourant estime qu'il n'est pas admissible qu'un acte ayant des effets aussi importants que le refus de prestations pécuniaires de la part de l'intimée puisse produire des effets à un moment où il est certain que son destinataire n'a pas encore pu prendre connaissance, puisque cette décision est déposée dans une case postale à laquelle l'accès est très restreint le samedi. Selon lui, la notification par courrier A Plus est un élément "étranger au système qui vient en violation des principes sûrs et connus, établis dans le cadre ordinaire de la notification par pli recommandé". Il se plaint également de la violation du droit à l'accès au juge (art. 29a Cst.) en raison du fait que le destinataire d'un envoi A Plus est contraint à rechercher et introduire un numéro de pli sur internet pour connaître la date de notification. Il invoque enfin une insécurité juridique et une inégalité de traitement entre les destinataires des décisions, selon qu'ils reçoivent celle-ci par courrier A Plus ou par recommandé.
7.2.
7.2.1. Les griefs sont mal fondés. En effet, selon une jurisprudence déjà bien établie, les communications des autorités sont soumises au principe de la réception. Il suffit qu'elles soient placées dans la sphère de puissance de leur destinataire et que celui-ci soit à même d'en prendre connaissance pour admettre qu'elles ont été valablement notifiées (ATF 144 IV 57 consid. 2.3.2 p. 62; 142 III 599 consid. 2.4.1 déjà cité; 122 I 139 consid. 1 p. 143; 115 Ia 12 consid. 3b p. 17). Autrement dit, la prise de connaissance effective de l'envoi ne joue pas de rôle sur la détermination du dies a quo du délai de recours.
7.2.2. Selon le mode d'expédition A Plus, la lettre est numérotée et envoyée par courrier A de la même manière qu'une lettre recommandée. Toutefois, contrairement au courrier recommandé, le destinataire n'a pas à en accuser réception. En cas d'absence, celui-ci ne reçoit donc pas d'invitation à retirer le pli. La livraison est néanmoins enregistrée électroniquement au moment du dépôt de l'envoi dans la boîte aux lettres ou la case postale du destinataire. Grâce au système électronique "Track & Trace" de la poste, il est ainsi possible de suivre l'envoi jusqu'à la zone de réception du destinataire (ATF 142 III 599 précité consid. 2.2 p. 601 s. et les arrêts cités; arrêts 8C_586/2018 du 6 décembre 2018 consid. 5; 8C_53/2017 du 2 mars 2017 consid. 4.1; 8C_573/2014 du 26 novembre 2014 consid. 2.2).
7.2.3. Le Tribunal fédéral s'est déjà penché sur la question de la notification des décisions par courrier A Plus, notamment dans le domaine des assurances sociales (supra consid. 5.3). Il a exposé en particulier que le dépôt de l'envoi dans la boîte aux lettres ou la case postale constitue le point de départ pour le calcul du délai de recours, quand bien même la livraison a lieu un samedi et que le pli n'est récupéré qu'à une date ultérieure, comme le lundi suivant (arrêts 9C_655/2018 du 28 janvier 2019 consid. 4.4; 8C_559/2018 déjà cité consid. 3.4; 9C_90/2015 du 2 juin 2015 consid. 3.4; 8C_198/2015 du 30 avril 2015 consid. 3.2; 8C_573/2014 déjà cité consid. 3.1; 2C_1126/2014 du 20 février 2015 consid. 2.2). Il n'y a pas lieu de revenir sur cette jurisprudence que le Tribunal fédéral a confirmée à maintes reprises. Le recourant ne prétend d'ailleurs pas que les conditions d'un changement de jurisprudence seraient remplies (à ce sujet cf. ATF 144 IV 265 consid. 2.2 p. 269; 142 V 212 consid. 4.4 p. 117; 139 V 307 consid. 6.1 p. 313). En outre, quoi qu'en dise le recourant, le délai de recours est le même pour toutes les formes de notification. Il commence à courir lorsque l'envoi entre dans la sphère de puissance du destinataire et que ce dernier peut prendre connaissance du contenu de l'envoi. En présence d'un courrier recommandé, c'est le cas lorsque l'envoi est retiré au guichet; en présence d'un courrier sans signature, c'est au moment du dépôt dans la boîte aux lettres ou la case postale. La notification par lettre recommandée n'offre pas un avantage significatif puisqu'au stade de l'avis de retrait, le destinataire ne connaît ni le contenu ni la motivation de la décision qui lui est adressée (arrêt 2C_1126/2014 du 20 février 2015 consid. 2.4). Au demeurant, le point de vue du recourant reviendrait à opérer une distinction injustifiée entre les destinataires d'un envoi sans signature distribué le samedi, selon qu'ils disposent ou non d'une case postale. Contrairement à ce que laisse entendre le recourant à cet égard, l'accès aux cases postales est en principe garanti en tout temps. Les horaires "d'installation des cases postales" auxquels il se réfère ne sont pas relevants et le fait de ne pas vider la case postale le samedi relève de la responsabilité du destinataire. Il ne saurait s'en prévaloir pour reporter le dies a quo du délai de recours, alors que la date exacte de distribution est facilement déterminable au moyen du numéro apposé sur l'enveloppe. Un tel procédé ne présente aucune difficulté particulière, surtout pour un cabinet d'avocats.
8.
Le recourant invoque enfin la violation de l'art. 60 al. 1 LPGA. Ce grief repose toutefois sur la prémisse erronée que la décision sur opposition a été notifiée le lundi 11 juin 2018, de sorte qu'il apparaît d'emblée mal fondé.
9.
En conclusion, les considérations des premiers juges sur la tardiveté du recours ne sont pas critiquables, étant précisé que le recourant ne conteste pas la date du dépôt dans la case postale. Le recours se révèle ainsi mal fondé et doit être rejeté.
10.
Le recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, et à l'Office fédéral de la santé publique.
Lucerne, le 7 mars 2019
Au nom de la Ire Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Juge présidant : Frésard
La Greffière : Castella