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Original
 
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
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4A_539/2018
Arrêt du 27 mars 2019
Ire Cour de droit civil
Composition
Mmes les juges Kiss, présidente, Klett et Hohl.
Greffier : M. Thélin.
Participants à la procédure
X.________,
défendeur et recourant,
contre
Z.________,
demandeur et intimé.
Objet
arbitrage interne
recours contre la sentence rendue le 30 août 2018 par un tribunal arbitral avec siège à Genève.
Considérant en fait et en droit :
1.
Z.________ et X.________ sont l'un et l'autre avocats à Genève. Le 8 janvier 2008, ils ont convenu par écrit de s'associer dans l'exercice de leur profession. La convention incluait une clause d'arbitrage.
Me Z.________ a ouvert une procédure d'arbitrage le 1er février 2011. Par jugement du 8 février 2016, le Tribunal de première instance du canton de Genève a destitué l'arbitre d'abord saisi. Un deuxième arbitre a démissionné le 30 septembre suivant. Le 20 mars 2017, le Tribunal de première instance a désigné Me E.________ en qualité d'arbitre unique. Le défendeur Me X.________ a contesté la validité de cette désignation et, aussi, la compétence du tribunal arbitral. Celui-ci a rejeté ces exceptions et admis sa compétence par une sentence incidente du 19 juin 2017. Le défendeur a attaqué cette sentence et le Tribunal fédéral a rejeté son recours par arrêt du 20 novembre 2017 (4A_407/2017).
Selon les conclusions dites principales du demandeur, le défendeur devait être condamné à payer 40'329 fr.50 avec intérêts au taux de 5% par an dès le 1er février 2011. Le défendeur a conclu au rejet de l'action.
Le tribunal arbitral s'est prononcé par une sentence finale le 30 août 2018. Le défendeur est condamné à payer au demandeur 34'329 fr.50 avec intérêts selon les conclusions ci-rapportées. Le défendeur est en outre condamné à rembourser au demandeur les frais de l'arbitrage, arrêtés à 11'526 fr.65. Le tribunal arbitral n'a pas alloué de dépens.
2.
Agissant par la voie du recours en matière civile, le défendeur requiert le Tribunal fédéral d'annuler la sentence finale.
Le demandeur conclut au rejet du recours.
Invité lui aussi à répondre, le tribunal arbitral s'est abstenu de prendre position.
Sans y avoir été invitées, les parties ont déposé une réplique et une duplique.
3.
Par ordonnance du 16 novembre 2018, la Présidente de la Ire Cour de droit civil a rejeté une demande d'effet suspensif jointe au recours.
4.
La sentence attaquée est susceptible du recours en matière civile selon l'art. 77 al. 1 let. b LTF relatif à l'arbitrage interne.
Il n'est pas nécessaire d'examiner si le recours ainsi prévu est soumis à l'exigence d'une valeur litigieuse minimale selon l'art. 74 al. 1 let. b LTF car le seuil de 30'000 fr. est de toute manière atteint.
5.
Le défendeur expose que devant le tribunal arbitral, il a non seulement contesté les prétentions de l'adverse partie mais aussi, à titre subsidiaire, soulevé une exception de compensation. Il fait grief au tribunal arbitral d'avoir totalement omis de mentionner et de discuter cette exception dans sa sentence finale. Il se réfère au moyen de recours prévu par l'art. 393 let. d CPC.
6.
S'il y a lieu et selon cette disposition, la partie recourante est autorisée à faire valoir que le tribunal arbitral n'a pas respecté son droit d'être entendue en procédure contradictoire.
Dans le domaine de l'arbitrage international, le droit de chaque partie d'être entendue en procédure contradictoire est consacré par les art. 182 al. 3 et 190 al. 2 let. d de la loi fédérale sur le droit international privé (LDIP). Selon la jurisprudence, ce droit d'être entendu n'exige pas qu'une sentence arbitrale internationale soit motivée. Néanmoins, ce droit impose au tribunal arbitral un devoir minimum d'examiner et de traiter les problèmes pertinents. Le tribunal manque à ce devoir lorsque, par inadvertance ou malentendu, il ne prend pas en considération des allégués, arguments, preuves ou offres de preuve présentés par l'une des parties et importants pour la décision à intervenir. Cette partie est alors lésée dans son droit de faire valoir son point de vue devant les arbitres; elle est placée dans la même situation que si elle n'avait pas eu la possibilité de leur présenter ses arguments.
A la partie qui se prétend ainsi lésée, il incombe de démontrer en quoi une inadvertance des arbitres l'a empêchée de se faire entendre sur un point important. Il lui incombe d'établir, d'une part, que le tribunal arbitral n'a pas examiné certains des éléments de fait, de preuve ou de droit qu'elle avait régulièrement avancés à l'appui de ses conclusions, et, d'autre part, que ces éléments étaient de nature à influer sur le sort du litige. Si la sentence passe totalement sous silence des éléments apparemment importants pour la solution du litige, c'est aux arbitres ou à la partie intimée qu'il appartient de justifier cette omission dans leurs observations sur le recours. Ils peuvent le faire en démontrant que, contrairement aux affirmations de la partie recourante, les éléments omis n'étaient pas pertinents pour résoudre le cas concret, ou, s'ils l'étaient, qu'ils ont été implicitement réfutés par le tribunal arbitral. Celui-ci n'est pas tenu de discuter tous les arguments des parties et il peut s'abstenir de réfuter explicitement un moyen objectivement dénué de toute pertinence (ATF 133 III 235 consid. 5.2 p. 248; arrêt 4A_520/2015 du 16 décembre 2015, consid. 3.3.1).
Dans le domaine de l'arbitrage interne, les art. 374 al. 4 et 393 let. d CPC correspondent textuellement, respectivement, aux art. 182 al. 3 et 190 al. 2 let. d LDIP. Il s'ensuit que la jurisprudence relative à ces dispositions-ci peut être transposée à celles-là (ATF 142 III 284 consid. 4.1 p. 288).
7.
Selon l'exposé du défendeur, celui-ci a allégué et prouvé par pièces, dans la procédure arbitrale, un courriel que le demandeur a,
durant la première quinzaine du mois de décembre 2010, envoyé à au moins une vingtaine de personnes, dont des juges, banquiers et avocats de la place, traitant son associé de voleur, pour dire le moins, en ces termes:
Très cher X.________,
Tu as donc quitté l'Etude vendredi passé.
Dans Les misérables, Jean Valjean subtilise un chandelier au prêtre qui l'avait accueilli et nourri. Interrogé, le prêtre répond que c'était un cadeau de sa part.
En partant, tu as pris l'aspirateur, tous les sacs d'aspirateur, la savonnette des toilettes, la réserve d'agrafes, des fourres en plastique, des fourres en papier jaune et que sais-je encore. Une vraie liste à la Prévert.
Tu encaisses des honoraires sur un compte perso et refuses de payer la TVA que tu as pourtant reçue de tes clients, me laissant le soin de le faire à ta place.
Tu es sans doute trop absorbé par la lecture des grands classiques littéraires et tu n'as pas eu le temps de lire la loi sur la TVA dans son intégralité; en tous cas pas jusqu'aux articles sur les dispositions pénales de la loi. C'est tout à ton honneur et bien compréhensible.
Tu es parti comme un voleur sans même dire au revoir au petit personnel (mais tout en ouvrant une dernière canette de coca).
Oserais-je te le dire: le petit personnel (que tu as d'ailleurs toujours considéré comme inutile, raison pour laquelle tu ne payais aucune participation à ce titre) a mal pris ton attitude et l'a considérée comme une goujaterie. Faut les comprendre: ils n'ont pas ta grandeur et restent très binaires (bien/mal) sans percevoir que tu ne voulais ainsi que leur faire un rappel discret mais appuyé aux Misérables ou aux listes de Prévert.
Selon le même exposé, l'exception de compensation a été soulevée dans le mémoire de réponse daté du 4 avril 2018, d'abord, et à l'audience du 12 juin suivant, ensuite, respectivement et dans les termes suivants, selon le procès-verbal de l'audience:
-. si par impossible le [tribunal arbitral] devait retenir que le défendeur [doive] encore quelque chose au titre de la liquidation de la société simple, la violation de l'obligation de fidélité et de loyauté entraînera le rejet de la demande, tant il est vrai, en équité et compte tenu de l'expérience générale de la vie, que le dommage créé par le demandeur au défendeur par la large diffusion de son message calomnieux dépasse le total du montant réclamé au défendeur (art. 97, 99 al. 3, 42 CO; art. 2 al. 2 CC).
[Le défendeur] précise que si le tribunal arbitral devait faire droit aux prétentions du demandeur (découlant de ses conclusions principales et subsidiaires), il excipe compensation de ces prétentions avec les dommages-intérêts qu'il est fondé à réclamer pour le dommage qu'il a subi du fait du comportement déloyal et calomnieux du demandeur à son encontre, qui constituait autant de violation (sic) de ses obligations contractuelles et qui excèdent celui allégué par [le demandeur].
La créance compensante ainsi invoquée était donc une prétention en dommages-intérêts. Le défendeur n'a pas cru utile de la chiffrer. La preuve du dommage lui incombait à teneur de l'art. 42 al. 1 CO; néanmoins, il n'a pas allégué de dommage d'un montant déterminé et il n'a non plus allégué aucun élément propre à permettre l'estimation réservée par l'art. 42 al. 2 CO. Le défendeur n'a fait aucune allusion à un éventuel préjudice moral et il a moins encore cherché à démontrer une atteinte à sa personnalité, suffisamment grave pour justifier une réparation en argent à allouer sur la base de l'art. 49 CO. L'exception de compensation, certes soulevée, n'était donc pas motivée, sinon par la seule allégation d'un acte illicite. Cela n'était de toute évidence pas suffisant. Dans ce litige entre avocats, empreint d'un puissant esprit d'animosité et de polémique, le tribunal arbitral pouvait voir dans l'exception une simple récrimination supplémentaire plutôt qu'un moyen de défense sérieux et apte à influencer l'issue de la cause. Il s'ensuit que le tribunal pouvait se dispenser de mentionner et de discuter l'exception, sans violer, par là, le droit du défendeur d'être entendu en procédure contradictoire. La sentence finale échappe donc au grief tiré de l'art. 393 let. d CPC.
8.
Le recours se révèle privé de fondement, ce qui conduit à son rejet. A titre de partie qui succombe, son auteur doit acquitter l'émolument à percevoir par le Tribunal fédéral. L'adverse partie procède personnellement et il n'y a donc pas lieu de lui allouer des dépens.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
Le défendeur acquittera un émolument judiciaire de 2'000 francs.
3.
Il n'est pas alloué de dépens.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au tribunal arbitral.
Lausanne, le 27 mars 2019
Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La présidente : Kiss
Le greffier : Thélin