Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
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6B_1205/2019
Arrêt du 31 octobre 2019
Cour de droit pénal
Composition
M. et Mmes les Juges fédéraux Denys, Président,
Jacquemoud-Rossari et Jametti.
Greffier : M. Graa.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Me Baptiste Viredaz, avocat,
recourant,
contre
Ministère public central du canton de Vaud,
intimé.
Objet
Recevabilité du recours en matière pénale; assistance judiciaire,
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale, du 11 septembre 2019 (n° 743 SPEN/2309/SBA/mbr).
Faits :
A.
A.________ exécute une peine privative de liberté aux Etablissements B.________. Le 12 décembre 2018, un contrôle de conformité de l'ordinateur personnel mis à disposition du prénommé a révélé que ce dernier avait sauvegardé sur le disque dur 5'438 vidéos pornographiques, ainsi que 3'404 images pornographiques. Ces vidéos et images provenaient de DVD originaux, que A.________ s'était fait prêter par d'autres détenus et dont il avait copié des séquences vidéos, respectivement sur la base desquels il avait réalisé des captures d'écran.
Par décision du 6 février 2019, la Direction des Etablissements B.________ a condamné A.________ à 90 jours de suppression de l'usage de son ordinateur.
Par décision du 6 août 2019, le Service pénitentiaire (ci-après : SPEN) a rejeté le recours formé par A.________ contre cette décision et a confirmé celle-ci.
B.
Par arrêt du 11 septembre 2019, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud a rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, le recours formé par A.________ contre la décision du 6 août 2019 et a confirmé celle-ci. Elle a par ailleurs rejeté la requête d'assistance judiciaire formée par le prénommé.
C.
A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 11 septembre 2019, en concluant, avec suite de frais et dépens, principalement à sa réforme en ce sens que la décision du 6 août 2019 est annulée, qu'il est constaté que le prénommé n'a commis aucune infraction disciplinaire, qu'une indemnité de 5'000 fr. lui est octroyée pour l'exercice raisonnable de ses droits dans les procédures de première et deuxième instances, que sa requête d'assistance judiciaire est admise, Baptiste Viredaz étant désigné comme défenseur d'office. Subsidiairement, il conclut à son annulation et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision. Il sollicite par ailleurs le bénéfice de l'assistance judiciaire.
Considérant en droit :
1.
Le recours en matière pénale est recevable à l'encontre des décisions sur l'exécution de peines et de mesures (art. 78 al. 2 let. b LTF).
1.1. Selon l'art. 81 al. 1 LTF, a qualité pour former un recours en matière pénale quiconque a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire (let. a) et a un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée (let. b). De jurisprudence constante, cet intérêt doit être actuel et pratique. De cette manière, les tribunaux sont assurés de trancher uniquement des questions concrètes et non de prendre des décisions à caractère théorique, ce qui répond à un souci d'économie de procédure (ATF 144 IV 81 consid. 2.3.1 p. 84 s.; 140 IV 74 consid. 1.3.1 p. 77; 136 I 274 consid. 1.3 p. 276).
Le Tribunal fédéral fait exceptionnellement abstraction de l'exigence d'un intérêt actuel, lorsque la contestation peut se reproduire en tout temps dans des circonstances identiques ou analogues, que sa nature ne permet pas de la trancher avant qu'elle perde son actualité et que, en raison de sa portée de principe, il existe un intérêt public suffisamment important à la solution de la question litigieuse (ATF 142 I 135 consid. 1.3.1 p. 143; 140 IV 74 consid. 1.3.3 p. 78; 139 I 206 consid. 1.1 p. 208; 137 I 23 consid. 1.3.1 p. 25; 136 II 101 consid. 1.1 p. 103).
1.2. En l'espèce, le recourant indique que la sanction de 90 jours de suppression de l'usage de son ordinateur a déjà été exécutée.
Sur ce point, il n'existe dès lors plus d'intérêt actuel à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée. Il convient donc d'examiner si les conditions permettant exceptionnellement de traiter un recours nonobstant l'absence d'un tel intérêt pourraient être remplies.
1.2.1. Le recourant soutient à cet égard qu'une contestation pourrait se reproduire s'il "venait à nouveau à être condamné pour les mêmes faits". Il ajoute que la nature de la contestation ne permettrait pas de la trancher avant qu'elle perde son actualité, "l'autorité de recours n'assortissant généralement pas un tel recours de l'effet suspensif". Enfin, le recourant affirme qu'il existerait "manifestement un intérêt public à la solution de la question litigieuse, ne serait-ce qu'au regard du droit des détenus à ne pas être sanctionnés sur la base de l'interprétation arbitraire d'une Directive à laquelle ils sont soumis".
1.2.2. En l'espèce, on ne voit pas que la nature de la contestation exclurait qu'une cause telle que celle du recourant soit tranchée avant de perdre son actualité. L'intéressé se borne à prétendre que l'autorité de recours n'assortirait "généralement" pas un recours de l'effet suspensif, ce qui n'exclut nullement qu'un tel effet suspensif puisse être accordé lorsqu'il est requis. Au contraire, il ressort de l'art. 35 de la loi vaudoise sur l'exécution des condamnations pénales (LEP/VD; RS/VD 340.01) que la déclaration de recours au SPEN contre la décision d'un établissement pénitentiaire n'entraîne pas d'effet suspensif, "sauf décision contraire de l'autorité de recours". En l'occurrence, il ne ressort pas de l'arrêt attaqué qu'un effet suspensif aurait été demandé au SPEN, ni devant la cour cantonale, à supposer que la sanction litigieuse n'eût alors pas encore été exécutée. Il n'apparaît donc pas que le recourant aurait été empêché de former recours au Tribunal fédéral avant l'exécution de la sanction disciplinaire litigieuse en raison de la nature de la décision concernée.
Par ailleurs, on ne saurait admettre que, en raison de sa portée de principe, il existerait un intérêt public suffisamment important à la solution de la question litigieuse. En effet, le recourant a été sanctionné pour avoir enfreint la directive relative à l'utilisation, par les détenus avant jugement et les condamnés, de matériel et logiciels informatiques au sein des établissements pénitentiaires du canton de Vaud, d'une part en se faisant prêter un DVD par un autre détenu et, d'autre part, en copiant ledit DVD ainsi qu'en conservant cette copie sur le disque dur de l'ordinateur qu'il utilisait. La question litigieuse consiste donc à déterminer si le recourant pouvait se faire prêter un DVD et pouvait en outre en effectuer une copie sur l'ordinateur mis à sa disposition. On peine à distinguer un intérêt public à cet égard, puisqu'il s'agit en définitive uniquement de savoir si les détenus au sein d'un établissement pénitentiaire vaudois peuvent ou non utiliser les ordinateurs mis à leur disposition comme l'a fait le recourant, soit sauvegarder sur le disque dur des fichiers pornographiques extraits d'un DVD prêté par un codétenu. Le recourant ne prétend pas qu'un tel comportement serait généralisé ou qu'il consacrerait l'exercice d'un droit en particulier. La décision attaquée ne revêt ainsi aucun caractère de principe qui permettrait de s'écarter exceptionnellement de l'exigence d'un intérêt actuel pour entrer en matière sur le recours.
1.3. Au vu de ce qui précède, à défaut d'un intérêt juridique actuel à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée, le recourant n'a pas qualité pour former recours au Tribunal fédéral afin de contester la sanction disciplinaire qui lui a été infligée et qu'il a d'ores et déjà exécutée.
2.
Dans la mesure où le recourant reproche à l'autorité précédente de ne pas lui avoir accordé l'assistance judiciaire dans la procédure de recours cantonale, il y a en revanche lieu d'entrer en matière sur le recours.
2.1. La cour cantonale a exposé que l'assistance judiciaire pour la procédure de recours contre la décision du 6 août 2019 devait être refusée, car le recours était d'emblée dénué de chances de succès. Par ailleurs, selon l'autorité précédente, l'affaire en question n'était pas compliquée puisque, dans son acte de recours, le recourant s'était contenté de soutenir que la décision attaquée était arbitraire en livrant sa propre interprétation des dispositions règlementaires appliquées. Les problèmes à résoudre ne nécessitaient donc pas l'assistance d'un défenseur. De surcroît, dès lors que la sanction disciplinaire en cause ne portait que sur une suspension de l'usage d'un ordinateur durant 90 jours, la présente affaire s'apparentait à un cas bagatelle.
2.2.
2.2.1. Selon l'art. 38 LEP/VD, peuvent notamment faire l'objet d'un recours au Tribunal cantonal les décisions rendues par le SPEN (al. 1). La procédure est régie par les dispositions du CPP relatives au recours (al. 2).
2.2.2. Aux termes de l'art. 132 al. 1 let. b CPP, la direction de la procédure ordonne une défense d'office si le prévenu ne dispose pas des moyens nécessaires et que l'assistance d'un défenseur est justifiée pour sauvegarder ses intérêts. La défense d'office aux fins de protéger les intérêts du prévenu se justifie notamment lorsque l'affaire n'est pas de peu de gravité et qu'elle présente, sur le plan des faits ou du droit, des difficultés que le prévenu seul ne pourrait pas surmonter (al. 2).
2.2.3. Aux termes de l'art. 29 al. 3 Cst., toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès, à l'assistance judiciaire gratuite. Elle a en outre droit à l'assistance gratuite d'un défenseur, dans la mesure où la sauvegarde de ses droits le requiert.
2.3.
2.3.1. En l'espèce, il est douteux que le grief du recourant satisfasse aux conditions de motivation découlant de l'art. 106 al. 2 LTF. Celui-ci évoque en effet uniquement les conditions d'octroi de l'assistance judiciaire ressortant de l'art. 132 al. 2 CPP, sans prétendre que l'application de cette disposition aurait pu se révéler arbitraire, alors même qu'une telle norme pouvait tout au plus s'appliquer à titre de droit cantonal supplétif (cf. sur ce point l'arrêt 6B_496/2019 du 11 juillet 2019 consid. 1.1.1 et les références citées) dont le Tribunal fédéral ne revoit l'application que son cet angle restreint (cf. art. 95 LTF a contrario).
2.3.2. Quoi qu'il en soit, les critères énoncés par l'art. 132 al. 1 let. b, 2 et 3 CPP reprennent largement la jurisprudence du Tribunal fédéral en matière d'assistance judiciaire, rendue sur la base des art. 29 al. 3 Cst. et 6 par. 3 let. c CEDH (cf. ATF 143 I 164 consid. 3.5 p. 174; 139 IV 113 consid. 4.3 p. 119). Sous l'angle de l'art. 29 al. 3 Cst., dont le Tribunal fédéral examine librement les conditions d'application (cf. ATF 135 I 221 consid. 5.1 p. 223), il apparaît que l'assistance judiciaire devait, dans le cas d'espèce, être refusée au recourant. Tout d'abord, comme l'a relevé la cour cantonale, on doit admettre que la cause ne présentait pas de difficultés particulières sur le plan des faits ou du droit, puisque les faits n'étaient pas contestés et qu'il s'agissait exclusivement de discuter l'interprétation littérale des deux articles de la directive relative à l'utilisation, par les détenus avant jugement et les condamnés, de matériel et logiciels informatiques au sein des établissements pénitentiaires du canton de Vaud. En outre, compte tenu de la privation temporaire de l'usage d'un ordinateur - dont on ignore en quoi il était utilisé par le recourant hormis pour consulter des fichiers pornographiques -, on ne saurait admettre que les droits de ce dernier auraient été gravement atteints par la sanction disciplinaire prononcée (cf. à cet égard ATF 143 I 164 consid. 3.5 p. 174 s.; 128 I 225 consid. 2.5.2 p. 232; 122 I 275 consid. 3a p. 276; 122 I 49 consid. 2c/bb p. 51). Ce qui précède vaut même si la sanction disciplinaire concernée pourrait éventuellement être utilisée, à l'avenir, dans l'appréciation globale du comportement de l'intéressé en détention. Le raisonnement du recourant sur ce point ne saurait être suivi, car il conduirait à admettre un droit à l'assistance judiciaire dans le cadre de toute procédure disciplinaire durant la détention, une sanction - même bénigne - étant toujours susceptible d'être évoquée dans les discussions entourant les questions d'élargissement du régime de détention ou de libération conditionnelle.
2.3.3. Enfin, l'art. 29 al. 3 Cst. conditionne l'octroi de l'assistance judiciaire gratuite à l'existence de chances de succès dans la cause de celui qui réclame celle-ci (cf. ATF 139 III 396 consid. 1.2 p. 397; 139 I 206 consid. 3.3.1 p. 214; 138 III 217 consid. 2.2.4 p. 18; 133 III 614 consid. 5 p. 616; 129 I 129 consid. 2.3.1 p. 135 s.). Un procès est dépourvu de chances de succès lorsque les perspectives de le gagner sont notablement plus faibles que les risques de le perdre, et qu'elles ne peuvent donc être considérées comme sérieuses, de sorte qu'une personne raisonnable et de condition aisée renoncerait à s'y engager en raison des frais qu'elle s'exposerait à devoir supporter; il ne l'est en revanche pas lorsque les chances de succès et les risques d'échec s'équilibrent à peu près, ou que les premières ne sont que légèrement inférieures aux secondes. L'élément déterminant réside dans le fait que l'indigent ne doit pas se lancer, parce qu'il plaide aux frais de la collectivité, dans des démarches vaines qu'une personne raisonnable n'entreprendrait pas si, disposant de moyens suffisants, elle devait les financer de ses propres deniers (cf. ATF 139 III 396 consid. 1.2 p. 397; 138 III 217 consid. 2.2.4 p. 218; 129 I 129 consid. 2.2 p. 133 ss).
En l'occurrence, conformément à l'art. 38 al. 3 LEP/VD appliqué par la cour cantonale, le recourant ne pouvait contester la décision du SPEN qu'au moyen de motifs limités à ceux fixés aux art. 95 et 97 LTF . Concrètement, il devait ainsi démontrer que les dispositions de la directive relative à l'utilisation, par les détenus avant jugement et les condamnés, de matériel et logiciels informatiques au sein des établissements pénitentiaires du canton de Vaud dont la violation avait été constatée avaient été arbitrairement appliquées par deux autorités successives, en livrant essentiellement, à l'appui de son recours, sa propre compréhension des normes concernées. Les perspectives d'obtenir gain de cause à cet égard étaient notablement plus faibles que celles de voir le recours rejeté, si bien qu'une personne raisonnable et de condition aisée ne se serait pas exposée au risque de devoir supporter des frais judiciaires dans une telle affaire.
2.4. Ainsi, l'autorité précédente n'a pas violé le droit constitutionnel en refusant d'accorder au recourant l'assistance judiciaire pour la procédure de recours cantonale. Le grief doit être rejeté dans la mesure où il est recevable.
3.
Le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Comme il était dépourvu de chances de succès, la demande d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF), dont le montant sera fixé en tenant compte de sa situation financière, laquelle n'apparaît pas favorable.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
La demande d'assistance judiciaire est rejetée.
3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'200 fr., sont mis à la charge du recourant.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale.
Lausanne, le 31 octobre 2019
Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Denys
Le Greffier : Graa