Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
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1C_54/2019
Arrêt du 11 novembre 2019
Ire Cour de droit public
Composition
MM. les Juges fédéraux Chaix, Président,
Merkli et Fonjallaz.
Greffière : Mme Sidi-Ali.
Participants à la procédure
A.A.________ et B.A.________, tous les deux représentés par Me Sébastien Fries, avocat,
recourants,
contre
Commune de Plan-les-Ouates, Mairie, 3, route des Chevaliers-de-Malte, 1228 Plan-les-Ouates, représentée par Me Lucien Lazzarotto, avocat,
Département du territoire de la République et canton de Genève, Direction générale de l'Office de l'urbanisme, case postale 224, 1211 Genève 8,
Département du territoire de la République et canton de Genève, Office des autorisations de construire, Service des affaires juridiques, case postale 22, 1211 Genève 8,
Département des infrastructures de la République et canton de Genève, rue de l'Hôtel-de-Ville 14, 1204 Genève, représenté par Me Aurèle Muller,
avocat.
Objet
Réaménagement routier et réglementation du trafic,
recours contre l'arrêt de la Cour de justice
de la République et canton de Genève,
Chambre administrative, du 4 décembre 2018
(ATA/1303/2018 - A/1287/2016-LCI).
Faits :
A.
Le projet "CEVA" consiste en la réalisation d'une infrastructure ferroviaire de 16 km en région genevoise reliant le réseau suisse au réseau français. Côté suisse, cinq stations jalonneront le parcours, dont la halte de Carouge-Bachet dont les travaux de construction ont commencé en février 2012.
En avril 2015, l'Etat de Genève, soit pour lui la Direction générale de l'office de l'urbanisme (DGOU), a sollicité une autorisation de construire pour le "réaménagement des interfaces de la ligne CEVA, amélioration de l'intermodalité" sur diverses parcelles des communes de Lancy et Carouge situées dans le secteur de Carouge-Bachet. Ce projet, qui vise l'aménagement des espaces publics, se compose de divers éléments (vélostation, place haute, place basse, couverts des Transports publics genevois [TPG], sortie sud, sortie nord, route de la Chapelle-section basse, projet ferroviaire) et empiète sur l'actuel croisement entre la route de Saint-Julien et la route de la Chapelle.
La route du Camp est parallèle à la route de la Chapelle. Ces deux voies cantonales appartiennent au réseau secondaire et sont situées sur les communes de Plan-les-Ouates et de Lancy. Elles permettent de relier, au nord, la route de Saint-Julien (réseau cantonal primaire) et, au sud, la route de Saconnex-d'Arve (réseau communal de quartier).
Le chemin du Trèfle-Blanc, situé sur la commune de Lancy entre les routes de la Chapelle et du Camp, fait partie du réseau cantonal de quartier et permet de relier la jonction autoroutière de la Milice à la route de Saint-Julien.
Conformément au préavis qu'elle avait émis dans le cadre du projet de réaménagement des interfaces de la ligne CEVA, la Direction générale des transports (DGT) a, pour le compte du Département de l'environnement, des transports et de l'agriculture (devenu depuis le 1er juin 2018 le Département des infrastructures - DI), mis à l'enquête publique un projet de réglementation locale du trafic prévoyant de nouvelles mesures de circulation liées au réaménagement du périmètre de l'interface CEVA-Bachet. Ces mesures portent sur une portion du chemin du Trèfle-Blanc, la route de Saint-Julien à la hauteur de la route de la Chapelle, ainsi que sur une portion de la route de la Chapelle. Le plan y annexé prévoyait notamment la fermeture partielle au transport motorisé de la route de la Chapelle et du chemin du Trèfle-Blanc au niveau de leur jonction respective avec la route de Saint-Julien.
B.
Par arrêté n° 2011-00801 du 7 mars 2016, le DI a édicté une nouvelle réglementation de la circulation des véhicules sur le chemin du Trèfle-Blanc ainsi que les routes de Saint-Julien et de la Chapelle dans la commune de Lancy. Conformément au plan annexé à l'arrêté, sur le chemin du Trèfle-Blanc, cinq tronçons font l'objet d'interdictions de circulation de tous les véhicules avec, selon les cas, des exceptions pour les riverains, les bus TPG et les cycles. En particulier, seuls les bus pourront circuler de bout en bout entre la route de Saint-Julien et le rond-point de la Milice. Sur la route de la Chapelle, deux tronçons font l'objet d'interdictions de circulation de tous les véhicules avec des exceptions pour les bus TPG et les cycles ainsi que les taxis pour l'un de ces tronçons. En outre, seuls les cycles - à l'exclusion des bus autorisés sur ce tronçon - sont admis à tourner à droite depuis la route de Sain-Julien sur la route de la Chapelle.
Par décision du même jour, l'Office des autorisations de construire du Département de l'aménagement, du logement et de l'énergie (devenu depuis le 1er juin 2018 le Département du territoire - DT), se référant en particulier à l'arrêté précité, a délivré l'autorisation de construire pour le réaménagement des interfaces de la ligne CEVA.
C.
La Commune de Plan-les-Ouates ainsi que A.A.________ et B.A.________ ont recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance de la République et canton de Genève (TAPI). Les époux A.________ sont propriétaires de la parcelle n° 4070 de la commune de Plan-les-Ouates sise à la route du Camp. Leur maison y est érigée.
Par jugement du 18 septembre 2017, le TAPI, après avoir joint les causes, a rejeté les recours des époux A.________ et de la commune.
Saisie à son tour d'un recours des époux A.________, la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève a confirmé ce jugement par arrêt du 4 décembre 2018. Elle a en substance considéré qu'au vu du but d'intérêt public poursuivi par le projet dans son ensemble, une éventuelle augmentation perceptible du bruit sur la route du Camp restait acceptable, ce d'autant plus que les mesures de restriction de circulation avaient été prises dans le respect du principe de la proportionnalité, aucune alternative n'étant réellementenvisageable, et la situation n'étant selon elle que temporaire.
D.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public par acte du 28 janvier 2019, les époux A.________ demandent au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt cantonal ainsi que l'arrêté de réglementation de la circulation et l'autorisation de construire du 7 mars 2016. Les recourants requièrent par ailleurs l'octroi de l'effet suspensif s'agissant de la réalisation de certains aménagements contenus dans l'autorisation de construire ainsi que du maintien du tourner à droite depuis la route de la Chapelle sur la route de Saint-Julien et du maintien de la circulation à ce jour autorisée sur le chemin du Trèfle-Blanc et la route de la Chapelle, sous réserve d'éventuelles mesures strictement temporaires nécessaires à la réalisation des travaux en question.
La cour cantonale renonce à formuler des observations; elle se réfère aux considérants et dispositif de son arrêt. Le DI et le DT concluent au rejet du recours.
Consulté, l'Office fédéral de l'environnement (OFEV) constate que la Cour de justice a omis d'appliquer la disposition légale prévoyant la mise en oeuvre de mesures d'isolation acoustique et n'a pas examiné si le principe de prévention imposait des restrictions supplémentaires. La Commune de Plan-les-Ouates renonce à se déterminer et s'en rapporte à justice.
Dans un nouvel échange d'écritures, les départements concernés et les recourants maintiennent leur position respective.
Par ordonnance du 7 mars 2019, le Président de la Ire Cour de droit public a rejeté la requête d'effet suspensif.
Considérant en droit :
1.
La voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss LTF) est ouverte contre une décision prise par une autorité cantonale de dernière instance dans une contestation portant sur l'application du droit de l'aménagement du territoire et de la protection de l'environnement.
Aux termes de l'art. 89 LTF, la qualité pour recourir est reconnue à toute personne atteinte par la décision attaquée et qui dispose d'un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification. Pour satisfaire à ce critère, la partie recourante doit se trouver dans une relation spéciale, étroite et digne d'être prise en considération avec l'objet de la contestation. Le voisin direct de la construction ou de l'installation litigieuse a en principe la qualité pour recourir. Le critère de la distance n'est pas le seul déterminant; s'il est certain ou très vraisemblable que l'installation ou la construction litigieuse sera à l'origine d'immissions - bruit, poussières, vibrations, lumière, fumée - atteignant spécialement le voisin, même situé à une certaine distance, celui-ci peut avoir qualité pour recourir (ATF 136 II 281 consid. 2.3.1 p. 285 et les arrêts cités). Il doit en outre retirer un avantage pratique de l'annulation ou de la modification de la décision contestée qui permette d'admettre qu'il est touché dans un intérêt personnel se distinguant nettement de l'intérêt général des autres habitants de la collectivité concernée de manière à exclure l'action populaire (ATF 137 II 30 consid. 2.2.3 p. 33). En l'occurrence, les recourants sont riverains d'une route sur laquelle le trafic des voies désormais fermées à la circulation est reporté. Ils sont ainsi particulièrement atteints par la décision attaquée, notamment en raison de la vraisemblable augmentation des nuisances induites, et ont un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification. Ils ont par ailleurs pris part à la procédure devant l'autorité précédente de sorte qu'ils ont qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF.
Les autres conditions de recevabilité sont réunies, si bien qu'il y a lieu d'entrer en matière sur le fond.
2.
2.1.
2.1.1. Selon l'art. 11 al. 2 LPE (RS 814.01), il importe, à titre préventif, de limiter les émissions nuisibles, dont le bruit, dans la mesure que permettent l'état de la technique ainsi que les conditions d'exploitation et pour autant que cela soit économiquement supportable. Cette disposition peut notamment justifier de procéder à l'étude d'une autre variante d'un projet ou d'un site préférable et disponible en vue d'assurer une réduction des immissions (ATF 141 II 476 consid. 3.2 p. 480; ANNE-CHRISTINE FAVRE, la protection contre le bruit dans la LPE, 2002, p. 118).
2.1.2. Outre la réglementation des émissions, la loi prévoit que le Conseil fédéral édicte par voie d'ordonnance des valeurs limites d'immissions applicables à l'évaluation des atteintes nuisibles ou incommodantes (art. 13 LPE), de façon à ne pas gêner de manière sensible la population dans son bien-être (art. 15 LPE). Les
installations existantes qui ne satisfont pas aux prescriptions légales seront assainies (art. 16 al. 1 LPE). Des allégements peuvent être accordés lorsque l'assainissement ne répond pas au principe de la proportionnalité, pour autant que les valeurs d'alarme demeurent respectées (art. 17 LPE; cf. également art. 14 de l'ordonnance du 15 décembre 1986 sur la protection contre le bruit [OPB; RS 814.41]).
Conformément à ces prescription générales, l'art. 8 OPB exprime les conditions que doit respecter une
installation qui serait modifiée : les émissions de bruit des éléments nouveaux doivent être limitées dans la mesure où cela est réalisable sur le plan de la technique et de l'exploitation, et économiquement supportable (art. 8 al. 1 OPB), respectivement, en cas de modification notable - à savoir lorsque la modification entraîne la perception d'immissions de bruit plus élevées (art. 8 al. 3 OPB) -, les émissions de bruit de l'ensemble de l'installation doivent au moins être limitées de façon à ne pas dépasser les valeurs limites d'immission (art. 8 al. 2 OPB). L'impossibilité de respecter ces conditions dans le cadre d'installations publiques ou concessionnaires donne lieu à une obligation de procéder à l'isolation acoustique des bâtiments existants ( art. 10 et 11 OPB ).
En parallèle, lorsque l'
installation existante est déjà sujette à assainissement, l'art. 18 LPE subordonne sa
transformation ou son agrandissement à l'exécution simultanée de cet assainissement (al. 1), les allégements prévus à l'art. 17 LPE pouvant alors être limités ou supprimés (al. 2). Aussi, les conditions de l'assainissement et, cas échéant de l'octroi d'allègements, doivent être réexaminées à la lumière des dispositions topiques, à savoir les art. 13 ss OPB (ATF 133 II 181 consid. 7.1 p. 200; GRIFFEL/RAUSCH, Kommentar zum Umweltschutzgesetz - Ergänzungsband zur 2. Auflage, 2011, LPE n° 10
ad art. 18 LPE), dont le système est le suivant. L'assainissement est ordonné lorsque les valeurs limites d'immission ne sont pas respectées (art. 16 LPE et 13 al. 1 et al. 2 let. b OPB). Il a lieu s'il répond au principe de la proportionnalité (art. 17 al. 1 LPE), en particulier s'il est réalisable sur le plan de la technique et de l'exploitation, et s'il est économiquement supportable (art. 13 al. 2 let. a), pour autant qu'il n'entrave pas de manière excessive l'exploitation ni n'entraîne des frais disproportionnés (14 al. 1 let. a OPB) et qu'aucun intérêt prépondérant ne s'y oppose (art. 14 al. 1 let. b OPB), auquel cas des allégements peuvent être accordés. Les valeurs d'alarme doivent en tout état être respectées (art. 17 al. 2 LPE). Pour des installations publiques ou concessionnaires, il est envisageable de renoncer à l'assainissement aux conditions précitées même en cas de dépassement des valeurs d'alarme, des mesures d'isolation acoustique des bâtiments existants devant alors impérativement être prises (art. 20 al. 1 LPE; art. 14 al. 2 OPB
a contrarioet art. 15 OPB). D'éventuelles exceptions à la prise de mesures d'isolation acoustique sont uniquement dépendantes de variables propres aux bâtiments concernés eux-mêmes (art. 15 al. 3 OPB).
En sus des dispositions précitées régissant précisément les conditions à respecter pour la modification d'installations fixes existantes, l'art. 9 OPB prévoit que l'exploitation d'installations fixes nouvelles ou notablement modifiées ne doit pas entraîner un dépassement des valeurs limites d'immission consécutif à l'
utilisation accrue d'une voie de communication (let. a) ou la perception d'immissions de bruit plus élevées en raison de l'utilisation accrue d'une voie de communication nécessitant un assainissement (let. b). Comme pour l'art. 8 OPB, l'impossibilité de respecter ces conditions dans le cadre d'installations publiques ou concessionnaires donne également lieu à une obligation de procéder à l'isolation acoustique des bâtiments existants conformément aux art. 10 et 11 OPB susmentionnés.
2.2.
Les recourants font valoir une augmentation des nuisances de la route du Camp due à un report sur cet axe du trafic de la route de la Chapelle et du chemin du Trèfle-Blanc qui subissent une modification du régime de circulation routière directement liée à la construction de la plateforme CEVA de Carouge-Bachet. Fondés sur le rapport de l'entreprise B+S AG, version du 29 juillet 2013 (intitulé "Scénarii d'aménagements du réseau viaire"), produit au dossier par les départements intimés, ils évaluent l'augmentation de ce report à plus de 10'000 véhicules par jour.
Les départements cantonaux concernés considèrent que la route du Camp ne subit pas d'augmentation de trafic sensible. La Cour de justice considère qu'il est difficile de procéder à des estimations du report de trafic. Elle tient cependant pour établi un report du trafic sur la route du Camp mais elle considère que son ampleur est inférieure à celle qu'allèguent les recourants. Se référant aux indications figurant dans le jugement du TAPI, elles-mêmes fondées sur l'étude précitée, elle évoque un report de 4'000 véhicules par jour, les autres véhicules supplémentaires étant le fait d'autres modifications du trafic (arrêt attaqué consid. 4d p.15; jugement du TAPI chiffre 19 pp. 17-18, consid. 7 p. 26).
Nonobstant la difficulté de procéder à des estimations, on ne voit pas ce qui ferait obstacle à la prise en considération de l'étude de B+S AG mandatée par l'administration (arrêt attaqué chiffre 22c p. 24) alors qu'aucun élément sérieux contraire ne permet de considérer que les chiffres précités ont été surévalués. En particulier, on ne saurait suivre les départements intimés - l'arrêt cantonal n'en parle pas -, qui retiennent sans justification, et à l'encontre de l'étude figurant au dossier, que l'augmentation du trafic serait moindre en raison d'un état de quasi-saturation préexistant sur ce tronçon. Avec l'OFEV, il y a lieu de considérer comme plausible une augmentation du trafic au moins selon la fourchette basse évoquée ci-dessus de 4'000 véhicules supplémentaires (art. 105 al. 2 LTF; arrêt 1C_589/2014 du 3 février 2016 consid. 4.2 et 5, in DEP 2016 p. 319, résumé in RDAF 2017 I p. 423). A l'instar de cet office, il faut donc admettre comme hautement vraisemblable une augmentation perceptible des émissions sonores à la route du Camp de plus de 2 dB (A). En effet, l'OFEV rappelle qu'une augmentation de bruit est perceptible à partir d'une variation de 1 dB (A) (cf. également arrêt 1C_589/2014 du 3 février 2016 précité consid. 3).
2.2.1. Comme cela découle de l'art. 11 al. 2 LPE, le principe de prévention implique de limiter les nuisances au maximum, cas échéant en examinant des variantes au projet prévu. Cette opération correspond en l'espèce à l'examen que les recourants et la cour cantonale traitent du point de vue du principe général de la proportionnalité et en lien avec le droit de la circulation routière, étant précisé que la liberté du canton d'édicter des restrictions du trafic n'est pas limitée uniquement par le respect des principes constitutionnels, mais évidemment par le respect de l'ensemble du droit fédéral.
Contrairement à ce que laissent entendre les autorités cantonales, la seule existence d'un intérêt public manifeste à la réalisation d'un projet (en l'occurrence, les aménagements aux abords d'une gare du CEVA et non la réalisation du CEVA lui-même) ne saurait exclure d'emblée de prendre en considération diverses variantes lorsque d'autres intérêts publics - la protection contre le bruit est un intérêt public majeur - ou privés sont en jeu, en particulier lorsque ces autres intérêts publics sont fondés sur des normes de droit fédéral qui s'imposent auxdites autorités.
En outre, si les recourants invoquent l'examen de variantes de façon plausible, celle-ci ne sauraient être écartées au simple motif que les opposants n'apportent aucune démonstration de la faisabilité de telles options. Il appartient au minimum aux autorités d'exposer - brièvement lorsque cela est manifeste - en quoi elles seraient irréalisables.
Nonobstant les exigences précitées, il y a lieu de considérer que les autorités genevoises ont satisfait à l'obligation de l'examen de variantes.
En préambule, il faut déplorer que certains des aménagements litigieux, dans la mesure où ils dépendent impérativement et directement d'éléments déjà décidés dans le cadre de la réalisation de la gare du CEVA, n'aient pas été inclus dans la procédure concernant cette dernière installation conformément au principe de coordination. Cet élément factuel réduit en soi les possibilités de variantes. Ainsi, la cour cantonale relève que, vu l'emplacement de l'issue de secours de la station le long de la route de Saint-Julien, la piste cyclable et le trottoir doivent nécessairement être réalisés sur l'actuelle voie de présélection routière.
A cela s'ajoute que la cohabitation entre les différentes mobilités - dont en particulier celle, considérablement accrue, des piétons - impose la création d'une zone fermée à la circulation motorisée privée. Les autorités cantonales citent une étude du Laboratoire de sociologie urbaine (LASUR) de l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) qui corrobore cette appréciation. Cet institut voit également un conflit spatial entre la circulation motorisée actuelle et non seulement la sortie de secours, mais encore la sortie elle-même de la station, à l'angle de la route. Les mêmes constats découlent de l'étude "Scénarii d'aménagements du réseau viaire" précitée qui souligne qu'il est notamment nécessaire de limiter les conflits entre les différents modes de transport, de garantir des accès de qualité aux transports publics et de réattribuer certains espaces au profit de la mobilité douce (p. 3).
Alors que les autorités cantonales affirment que l'emplacement du nouveau trottoir et celui de la piste cyclable se trouvent imposés sur l'actuelle voie de présélection du tourner à droite à supprimer, les recourants prétendent qu'il y a suffisamment de place pour réaliser trois voies de circulation (et donc maintenir la circulation actuelle). Ils font valoir qu'il faudrait pour ce faire déplacer ou aménager des espaces verts, des places deux-roues ou des trottoirs, ce qui serait selon eux peu impactant pour le fonctionnement de l'interface. Ce faisant, ils ne désignent toutefois pas, dans les plans par exemple, les installations qu'ils estiment déplaçables. L'espace destiné aux deux-roues et le trottoir étant précisément des aménagements jugés impératifs s'agissant de promouvoir les mobilités douces, on comprend mal les explications peu concrètes des recourants. Que la sortie de secours n'ait pas d'emprise sur l'actuelle présélection ne saurait justifier de maintenir le tourner à droite; il semble en effet pertinent, du point de vue de la sécurité toujours, qu'un espace minimum entre la sortie elle-même et la première voie de circulation routière soit prévu. Enfin, comme le relèvent tant l'arrêt attaqué que les autorités administratives concernées, les recourants ne sauraient se référer à la situation actuelle qui n'est pas comparable à ce qu'elle sera à l'ouverture de la nouvelle liaison ferroviaire qui fera transiter quelque 7'500 usagers quotidiens par cette gare et impliquera des transports en commun à cadence élevée.
Dans ces circonstances, on ne saurait donner tort à la cour cantonale et aux départements concernés lorsqu'ils soulignent que, en ce qui concerne les aménagements liés à la gare, la solution adoptée est la seule qui s'impose compte tenu des contraintes de sécurité, en particulier vu l'emplacement de la sortie de secours du CEVA arrêté de manière impérative par la procédure fédérale d'approbation des plans.
En outre, à plus grande échelle, il ressort de l'arrêt attaqué que des études avaient été menées pour la création d'un nouvel axe routier, apparemment parallèle aux axes litigieux, pour rejoindre le giratoire de la Milice, mais que le projet avait dû être abandonné en raison d'un recours de la Commune de Plan-les-Ouates. Un projet de bretelle autoroutière de contournement est par ailleurs en cours d'élaboration. Si l'existence d'un tel projet ne saurait dispenser les autorités de prendre les mesures qui s'imposent en matière de protection contre le bruit (cf. consid. 2.2.2), il n'en demeure pas moins que les aménagements litigieux s'intègrent dans une démarche de planification du réseau routier à plus long terme.
Enfin, les recourants n'évoquent pas de manière suffisamment sérieuse des solutions alternatives réalistes qui auraient été omises. Ils ne donnent aucune explication s'agissant du seul exemple qu'ils citent, savoir la réhabilitation de la "route du P+R", reliant anciennement la route de la Chapelle à l'autoroute de contournement et supprimée pour laisser place aux travaux du CEVA, et, alors que cette option ne ressort pas de l'arrêt cantonal, ils ne font valoir aucune violation de leur droit d'être entendu à ce sujet.
En définitive, vu la complexité du développement du réseau dans les environs et la meilleure connaissance des lieux qu'ont les autorités cantonales, il apparaît, du point de vue de l'obligation de procéder à l'examen des variantes, que le droit fédéral a été respecté: les circonstances liées à la gare CEVA elle-même et à l'échelle de tout le périmètre concerné de l'agglomération genevoise ont été suffisamment prises en considération dans la recherche d'autres solutions.
2.2.2. La variante litigieuse confirmée, il y a lieu d'examiner à quelles conditions elle peut être réalisée.
Le cas d'espèce est particulier en ce sens qu'il concerne deux décisions: il s'agit, d'une part, de l'aménagement des abords d'une gare ferroviaire ainsi que, d'autre part, de la modification des règles de la circulation routière. Il n'est donc pas exclu que diverses dispositions de la législation sur la protection contre le bruit soient applicables.
2.2.2.1. L'autorisation de réaliser divers aménagements aux abords d'une gare ferroviaire porte sur une installation nouvelle. Bien qu'elle n'apparaisse pas en elle-même génératrice de bruit particulier, elle ne doit pas, conformément à l'art. 9 OPB, entraîner un dépassement des valeurs limites d'immission ni la perception d'immissions de bruit plus élevées en raison de l'utilisation accrue d'une voie de communication. Cette restriction concerne en l'occurrence notamment le trafic de la route du Camp, conséquence directe du report du trafic de la route de la Chapelle et du chemin du Trèfle-Blanc.
2.2.2.2. La décision de modification des règles de la circulation routière réorganise le trafic non seulement sur les tronçons faisant l'objet des interdictions de circuler, mais également dans tout le secteur, qui subit des reports de trafic soudains - non précisément quantifiés mais avérés. Tel est le cas en particulier pour la route du Camp, installation fixe existante qui génère déjà un bruit dépassant les valeurs limites (arrêt attaqué consid. 4e p. 17). Comme cela découle des directives de l'OFEV, un transfert de trafic rapide et volontairement remanié peut constituer une modification notable au sens de l'art. 8 OPB (OFEV/OFROU, Manuel du bruit routier - aide à l'exécution pour l'assainissement, 2006, ch. 3.5 p. 19). Aussi, quand bien même la décision ne porte pas expressément sur la route du Camp, vu l'augmentation du trafic prévisible sur cet axe (cf. consid. 2.2. ci-dessus), elle a pour effet d'en modifier notablement l'exploitation au sens de l'art. 8 OPB. Il est en outre établi que les valeurs limites sont déjà dépassées le long de la route du Camp et que la propriété des recourants a déjà fait l'objet d'une mesure d'allégement en lien avec ce dépassement. La décision de modification des règles de la circulation consiste ainsi en une
modification notable
d'une installation fixe sujette à assainissement qu'est la route du Camp au sens des art. 17 LPE et 8 OPB.
2.2.2.3. Sont donc applicables en l'espèce les art. 8 et 9 OPB prescrivant le bruit maximal admissible. Ces dispositions imposent:
- de ne pas dépasser les valeurs limites d'immission ( art. 8 al. 2 et 9 let. a OPB ), et
- l'absence de perception d'immissions de bruit plus élevées (art. 9 let. b OPB).
En l'occurrence, vu le dépassement préexistant des valeurs limites et l'augmentation de trafic prévue, il appert que ni l'une ni l'autre de ces conditions ne sera respectée. En pareil cas, la loi impose que des mesures de protection passive contre le bruit soient prises sur les bâtiments d'habitation touchés ( art. 10 et 11 OPB ), sauf conditions dérogatoires qui ne paraissent a priori pas réalisées en l'espèce.
En outre, l'art. 8 al. 1 OPB prescrit à titre général de limiter le bruit dans la mesure où cela est réalisable sur le plan de la technique et de l'exploitation, et est économiquement supportable (art. 8 al. 1 OPB). Or aucun examen des mesures envisageables en ce sens n'a été entrepris. Cette prescription est en l'espèce quoi qu'il en soit couverte par les obligations liées à l'assainissement de l'installation, applicables comme on l'a vu ci-dessus en vertu de l'art. 18 LPE. A teneur de cette disposition, la loi impose de réévaluer la nécessité de l'assainissement et le bien-fondé des allégements. En effet, contrairement à ce qu'a retenu la cour cantonale à l'instar des instances précédentes, on ne saurait considérer que les allégements accordés lors d'un examen antérieur de l'assainissement de la route du Camp sont immuables. De manière générale, une telle appréciation n'est pas exacte. Elle l'est encore moins lorsque l'évolution du trafic est liée à de nouvelles règles de circulation et non à une simple augmentation rampante du nombre de véhicules. Il s'agit en effet alors d'une modification notable de la route que la loi subordonne expressément à l'exécution de son assainissement.
L'art. 18 LPE impose au premier chef de procéder à l'assainissement de l'infrastructure routière, les allégements possibles n'étant accordés qu'aux conditions de l'art. 16 LPE, respectivement 13 et 14 OPB. Il appartient ainsi à l'autorité compétente d'examiner quelles sont les mesures d'assainissement possibles. Une fois celles-ci connues, l'autorité pourra examiner si des motifs d'allégements prévus par la loi justifient qu'il y soit renoncé, en tout ou partie. L'installation qui fait l'objet de la modification étant déjà "sujette à assainissement", voire déjà assainie précédemment (cf. GOSSWEILER, Strassen-lärmsanierung bei Kantons- und Gemeindestrassen nach Ablauf der Lärmschutzrechtlichen Sanierungsfrist - Abscluss der [Erst-] Sanierungen und Konstellationen möglicher "Nachsanierungen", in URP/DEP 2018/7 pp. 600 ss., 610 ss), l'octroi d'allégements devra être examiné de manière d'autant plus restrictive en ce qui concerne les paramètres des art. 13 et 14 OPB . Enfin, en cas d'allégement, hypothèse qui n'est certes pas exclue, l'obligation de procéder à l'isolation acoustique des bâtiments subsiste quoi qu'il en soit.
3.
Il résulte de ce qui précède que le recours doit être admis et la cause retournée à la cour cantonale en vue du prononcé d'éventuelles mesures telles qu'évoquées ci-dessus. Il appartiendra à cette instance de déterminer si le dossier doit être renvoyé à l'un seul des deux départements concernés ou à chacun de ceux-ci pour satisfaire aux exigences légales exposées ci-dessus. La Cour de justice statuera également sur le sort des frais et dépens devant les instances judiciaires cantonales.
Les recourants obtenant gain de cause avec l'aide d'un avocat, ils ont droit à des dépens, à charge de la République et canton de Genève (art. 68 al. 1 LTF). Le présent arrêt est en outre rendu sans frais (art. 66 al. 4 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est admis. L'arrêt attaqué est annulé. La cause est renvoyée à la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève, pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
2.
Une indemnité de dépens de 3'000 fr. est accordée aux recourants, à la charge de la République et canton de Genève, pour la procédure devant le Tribunal fédéral.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des recourants, de la Commune de Plan-les-Ouates, et du Département des infrastructures de la République et canton de Genève, ainsi qu'au Département du territoire de la République et canton de Genève, Direction générale de l'urbanisme et Office des autorisations de construire, ainsi qu'à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, et à l'Office fédéral de l'environnement.
Lausanne, le 11 novembre 2019
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Chaix
La Greffière : Sidi-Ali