BGer 1B_268/2019
 
BGer 1B_268/2019 vom 25.11.2019
 
1B_268/2019
 
Arrêt du 25 novembre 2019
 
Ire Cour de droit public
Composition
MM. les Juges fédéraux Chaix, Président,
Fonjallaz et Haag.
Greffière : Mme Kropf.
Participants à la procédure
Ministère public de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B,
1213 Petit-Lancy,
recourant,
contre
A.________ SA,
représentée par Maîtres Vincent Jeanneret, Carlo Lombardini et Clara Poglia, avocats,
intimée.
Objet
Tardiveté de la demande de levée de scellés,
recours contre l'ordonnance du Tribunal des mesures de contrainte du Tribunal pénal de la République et canton de Genève du 21 mai 2019 (STmc_1 P_1).
 
Faits :
A. Le Ministère public de la République et canton de Genève instruit une enquête contre différentes personnes - dont notamment B.________ et C.________ - pour les chefs d'abus de confiance (art. 138 CP), d'escroquerie (art. 146 CP), de gestion déloyale (art. 158 CP), de blanchiment d'argent (art. 305bis CP) et de défaut de vigilance en matière d'opérations financières et droit de communication (art. 305ter CP) à la suite des communications du Bureau de communication en matière de blanchiment d'argent (MROS) des 17 mars et 23 avril 2015, organisme saisi par la banque A.________ SA après l'identification d'opérations insolites.
L'instruction a été progressivement étendue à divers employés de la banque susmentionnée à plusieurs degrés hiérarchiques jusqu'à la mise en prévention de A.________ SA lui-même en date du 7 novembre 2018 pour infractions aux art. 305teret 102 al. 1 ainsi que 2 CP dans le cadre de la surveillance d'opérations effectuées sur des relations ouvertes auprès de cet établissement et dont la gestion était assurée par D.________ SA et ses principaux animateurs C.________ et B.________.
B. Le 3 décembre 2018, l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA), contactée par le Ministère public, a indiqué avoir clos le vendredi précédent une procédure contre A.________ SA [...]. Le 4 suivant, le Ministère public a requis une copie de la décision alors rendue par la FINMA. Cette pièce a été transmise le lendemain en application de l'art. 38 al. 1 de la loi fédérale du 22 juin 2007 sur l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (LFINMA; RS 956.1), la FINMA insistant sur les précautions indispensables à prendre vis-à-vis des données sensibles qui y étaient contenues. Elle a également joint à cet envoi une procuration, ainsi qu'une demande du 30 novembre 2018 de mise sous scellés formée par A.________ SA; cet établissement invoquait son droit de refuser de témoigner, son défaut de qualité de partie dans la procédure d'entraide prévue à l'art. 38 LFINMA et son ignorance d'une éventuelle requête d'une autorité pénale, ce qui ne pouvait avoir comme conséquence la perte de ses droits au sens de l'art. 248 CPP; cette demande de mise sous scellés visait (1) la décision rendue par la FINMA le 23 novembre 2018 dans la procédure xxx [...], ainsi que (2) tous les rapports et compléments établis par E.________ dans ce même cadre et (3) tous les échanges entre la FINMA et A.________ SA, respectivement ses représentants, pièces jointes comprises. Par courrier du 6 décembre 2018, le Ministère public a informé le conseil de A.________ SA de l'état de ses échanges avec la FINMA - relatifs notamment à la demande de la banque de mise sous scellés du 30 novembre 2018 - et de son refus de donner suite à la requête précitée
Par arrêt du 10 mai 2019, la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève a admis le recours formé par A.________ SA contre ce refus. La cour cantonale a enjoint le Ministère public à mettre sous scellés l'ordonnance du 23 novembre 2018 de la FINMA.
C. Parallèlement à ces démarches, le Ministère public a demandé à la FINMA, en invoquant la requête d'entraide administrative, la remise d'autres documents que la décision du 23 novembre 2018, soit précisément ceux pour lesquels la banque avait formulé la demande de mise sous scellés le 30 novembre 2018 (cf. ch. 2 et 3 susmentionnés). Le 17 janvier 2019, la FINMA a transmis, sous une forme protégée et sur la base de l'art. 38 al. 1 LFINMA, les documents en sa possession (un DVD et une clé USB), ainsi que la demande de mise sous scellés formée le 30 novembre 2018, insistant sur le caractère sensible des données et les précautions à observer dans le cadre d'une procédure pénale; sur ce courrier, adressé en recommandé par la FINMA, figure un accusé de réception par le Ministère public en date du 21 janvier 2019. Ce même jour, la FINMA a transmis au Ministère public, par courrier électronique, les codes relatifs au DVD et à la clé USB.
Le 23 janvier 2019, le Ministère public a saisi le Tribunal des mesures de contrainte du Tribunal pénal de la République et canton de Genève (Tmc) d'une demande de levée des scellés s'agissant de ces documents. A l'appui de sa requête, il a relevé l'absence de motif allégué justifiant la mise sous scellés, indiquant l'utilité potentielle des rapports et pièces rendus par le chargé d'enquête de la FINMA, du courrier de la FINMA du 3 décembre 2018, ainsi que de la page de garde de la décision du 23 novembre 2018. Les 31 janvier et 1er février 2019, le Ministère public a déposé deux autres écritures, concluant à l'irrecevabilité de la demande de mise sous scellés en raison de la distinction existant entre l'entraide administrative et les mesures de contrainte.
La banque A.________ SA s'est déterminée le 18 mars 2019, relevant en particulier que l'utilité potentielle des pièces requises devait être analysée avec soin vu le caractère hautement confidentiel des informations en cause; les principes prévalant dans la procédure menée par la FINMA n'étaient en outre pas les mêmes que ceux de la procédure pénale, notamment s'agissant du devoir de collaboration et du refus de témoigner. La banque a encore relevé que cette procédure administrative n'était pas définitive, l'ordonnance rendue n'étant pas exécutoire.
Le 21 mai 2019, le Tmc a constaté que la demande de levée des scellés du 23 janvier 2019 était tardive, partant irrecevable, et a ordonné la restitution des supports numériques à la FINMA une fois le délai de recours au Tribunal fédéral échu.
D. Par acte du 29 mai 2019, le Ministère public forme un recours en matière pénale contre l'ordonnance du Tmc du 21 mai 2019, concluant à la levée des scellés sur les documents électroniques enregistrés sur les supports joints au courrier de la FINMA du 17 janvier 2019 et à leur remise en ses mains.
L'autorité précédente a conclu au rejet du recours. La banque intimée a pris des conclusions similaires, dans la mesure où le recours serait recevable; elle a également conclu à l'allocation d'une indemnité, à titre de dépens, de 3'000 francs. Après communication des différentes écritures, les parties ont renoncé à déposer d'autres observations.
 
Considérant en droit :
1. Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 144 II 184 consid. 1 p. 186).
1.1. Conformément à l'art. 393 al. 1 let. c CPP, un recours n'est ouvert contre les décisions du Tmc que dans les cas prévus par ledit code. Aux termes de l'art. 248 al. 3 let. a CPP, cette juridiction statue définitivement sur la demande de levée des scellés au stade de la procédure préliminaire. Le code ne prévoit pas de recours cantonal contre les autres décisions rendues par le Tmc dans le cadre de la procédure de levée des scellés. La voie du recours en matière pénale au Tribunal fédéral est ainsi en principe directement ouverte contre de tels prononcés (art. 80 al. 2 in fine LTF; ATF 143 IV 462 consid. 1 p. 465).
1.2. Le recours est dirigé contre une décision d'irrecevabilité. Sur le fond, le litige porte sur la demande du 23 janvier 2019 de levée des scellés apposés sur les pièces transmises par la FINMA.
C'est le lieu d'ailleurs de préciser l'objet du litige, fixé par les conclusions prises dans la requête du Ministère public ("prononcer la levée intégrale des scellés apposés sur les documents électroniques enregistrés sur les supports joints [à cette demande]"), soit la levée de la mesure de protection s'agissant des documents remis par la FINMA sur un DVD et une clé USB par lettre du 17 janvier 2019, courrier auquel était joint la demande de mise sous scellés de la banque intimée du 30 novembre 2018.
1.3. Ne mettant pas un terme à la procédure pénale, l'arrêt attaqué est de nature incidente et le recours n'est en principe recevable qu'en présence d'un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF. Selon le recourant, les documents requis - dont il ignore la nature et le contenu exacts - paraissaient être des éléments du dossier de la FINMA sur lesquels celle-ci se serait appuyée pour rendre une décision à l'encontre de la banque intimée dans un contexte identique à celui qui faisait l'objet de sa propre instruction; le fait de ne pas en disposer constituerait un préjudice irréparable pour son enquête. Le Ministère public ne prétend cependant que son enquête serait entravée dans une telle mesure qu'il devrait mettre un terme à la procédure pénale (arrêts 1B_526/2017 du 4 mai 2018 consid. 1.3.1; 1B_297/2016 du 23 novembre 2016 consid. 1.2; 1B_249/2015 du 30 mai 2016 consid. 2 non publié aux ATF 142 IV 207). Il ne soutient pas non plus que la restitution des pièces en cause, non pas à la banque intimée, mais à la FINMA entraînerait le risque que celles-ci soient détruites. Cela étant, le motif retenu par le Tmc - dépôt tardif de la demande de levée des scellés eu égard à la connaissance de la requête tendant à l'obtention de cette mesure dès le 6 décembre 2018 - pourrait lui être à nouveau opposé en cas de nouvelle requête à la FINMA. Le recourant pourrait ainsi se voir priver de manière définitive des pièces requises, ce qui permet, vu ces circonstances particulières, de retenir l'existence d'un préjudice irréparable qu'aucune décision ultérieure ne serait à même de réparer.
En tout état de cause, le recours est dirigé contre une décision d'irrecevabilité, ce qui équivaut généralement à un déni de justice permettant l'entrée en matière indépendamment de l'existence d'un préjudice au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF (ATF 143 I 344 consid. 1.2 p. 346; 138 IV 258 consid. 1.1 p. 261; arrêt 1B_39/2016 du 29 mars 2016). Seule la question de la recevabilité peut donc en l'état être portée devant le Tribunal fédéral, ce qui exclut que celui-ci ordonne la levée des scellés (cf. les conclusions prises par le recourant).
1.4. Pour le surplus, les autres conditions de recevabilité étant réunies, il y a lieu d'entrer en matière.
2. Se prévalant de l'art. 194 CPP, le recourant soutient en substance que la production du dossier de la FINMA, mesure d'entraide entre autorités, ne pourrait pas faire l'objet d'une procédure de mise sous scellés au sens de l'art. 248 CPP.
2.1. Les autorités - pénales (arrêt 1B_289/2016 du 8 décembre 2016 consid. 3.1) - fédérales et cantonales sont tenues de s'accorder l'entraide judiciaire lorsqu'il s'agit de poursuivre et de juger des infractions prévues par le droit fédéral, en application du Code de procédure pénale (art. 44 al. 1 CPP).
Selon l'art. 194 CPP, le ministère public et les tribunaux requièrent les dossiers d'autres procédures lorsque cela est nécessaire pour établir les faits ou pour juger le prévenu (al. 1); les autorités administratives et judiciaires autorisent la consultation de leurs dossiers lorsqu'aucun intérêt public ou privé prépondérant au maintien du secret ne s'y oppose (al. 2); les désaccords entre autorités d'un même canton sont tranchés par l'autorité de recours de ce canton et ceux qui opposent des autorités de différents cantons ou des autorités cantonales et une autorité fédérale le sont par le Tribunal pénal fédéral (al. 3).
L'autorité requise en application de l'art. 194 CPP peut ainsi s'opposer à la demande de production en invoquant un intérêt public ou privé prépondérant (arrêts 1B_547/2018 du 15 janvier 2019 consid. 1.2; 1B_289/2016 du 8 décembre 2016 consid. 3; 1B_26/2016 du 29 novembre 2016 consid. 4.1; 1B_231/2015 du 15 mars 2016 consid. 5). Un intérêt privé peut être en lien avec la protection d'un secret de fabrication, un secret d'affaires, commercial, industriel, professionnel - dont celui bancaire - ou la protection de la sphère privée, notamment de certaines personnes comme un mineur ou une victime (JEANNERET/KUHN, Précis de procédure pénale, 2e éd. 2018, n° 13020 p. 329; MOREILLON/PAREIN-REYMOND, Petit commentaire, Code de procédure pénale, 2e éd. 2016, n° 9 ad art. 194 CPP; MARTIN BÜRGISSER, in Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, art. 1-195 StPO, 2e éd. 2014, n° 11 ad art. 194 CPP; ANDREAS DONATSCH, in DONATSCH/HANSJAKOB/LIEBER (édit.), Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung [StPO], 2e éd. 2014, n° 20 ad art. 194 CPP; ISABELLE PONCET CARNICÉ, in Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2011, n° 15 ad art. 194 CPP). Il faut cependant retenir qu'au vu du caractère généralement prépondérant de l'intérêt à l'élucidation des infractions, le refus de produire un dossier doit demeurer exceptionnel et il faudra examiner s'il est possible de sauvegarder les intérêts invoqués par une mesure moins incisive comme le tri d'un dossier ou le caviardage de certaines pièces (cf. le principe de proportionnalité et la balance des intérêts à effectuer; JEANNERET/KUHN, op. cit., n° 13020 p. 329; SCHMID/JOSITSCH, Schweizerische Strafprozessordnung, Praxiskommentar, 3e éd. 2018, n° 5 ad art. 194 CPP; MOREILLON/PAREIN-REYMOND, op. cit., n° 9 ad art. 194 CPP; BÜRGISSER, op. cit., n° 13 ad art. 194 CPP; DONATSCH, op. cit., n° 23 ad art. 194 CPP).
Dans la mesure ensuite où une autorité refuse de donner suite - intégralement ou partiellement - à une demande de production, le différend opposant les deux autorités en cause doit être porté devant l'autorité compétente au sens de l'art. 194 al. 3 CPP; l'autorité requise ne peut en effet pas demander la mise sous scellés des pièces produites pour s'opposer à la production des pièces demandées dans le cadre de l'entraide (arrêts 1B_547/2018 du 15 janvier 2019 consid. 1.2; 1B_289/2016 du 8 décembre 2016 consid. 3; 1B_231/2015 du 15 mars 2016 consid. 5). Si l'appréciation de l'autorité requise est confirmée, le ministère public ne peut pas ordonner de mesure de contrainte à l'encontre de l'autorité requise afin d'obtenir les pièces refusées (ATF 142 IV 207 notamment consid. 8.12 ss p. 219 ss; 129 IV 141 consid. 2 p. 144; arrêt 1B_26/2016 du 29 novembre 2016 consid. 4.1).
Il n'y a pas lieu de déterminer si la personne concernée dispose d'un droit de participation dans le cadre de l'entraide entre autorités et/ou au cours d'une éventuelle procédure au sens de l'art. 194 al. 3 CPP (cf. le texte légal limitant a priori les parties : "entre autorités", "zwischen Behörden", "tra autorità"; a contrario BÜRGISSER, op. cit., n° 12 ad art. 194 CPP pour lequel un droit de participation devrait entrer en considération lorsque des intérêts privés sont en cause). Il apparaît en effet que lorsque la personne concernée est partie à la procédure pénale, elle peut faire valoir ses moyens dans ce cadre. En effet, l'autorité pénale requérante est tenue de l'informer de sa demande d'édition (MOREILLON/PAREIN-REYMOND, op. cit., n° 6 ad art. 194 CPP; DONATSCH, op. cit., n° 11 ad art. 194 CPP), ce qui lui permet de faire valoir ses droits (arrêt 1B_342/2016 du 12 décembre 2016 consid. 2). En particulier, elle peut aussi dans le cadre pénal contester l'exploitabilité d'un moyen de preuve prétendument obtenu en violation de son droit de ne pas collaborer (cf. notamment art. 113 al. 1 et 158 al. 1 let. b CPP; VIKTOR LIEBER, in DONATSCH/HANSJAKOB/LIEBER (édit.), Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung [StPO], 2e éd. 2014, n° 57 ad art. 113 CPP; NIKLAUS RUCKSTUHL, in Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, art. 1-195 StPO, 2e éd. 2014, n° 36 ad art. 158 CPP). Peu importe à cet égard que les moyens de preuve aient été obtenus par le ministère public par le biais d'une mesure ordonnée dans le cadre de la procédure pénale ou à la suite d'une requête d'entraide entre autorités (arrêt 1B_26/2016 du 29 novembre 2016 consid. 4.2).
2.2. Selon l'art. 38 LFINMA, la FINMA et l'autorité de poursuite pénale compétente échangent les informations dont elles ont besoin pour accomplir leurs tâches dans le cadre de leur collaboration; elles ne peuvent utiliser les informations reçues que pour accomplir leurs tâches respectives (al. 1); elles coordonnent leurs enquêtes dans la mesure où cela est nécessaire et possible (al. 2); lorsque la FINMA a connaissance de crimes ou de délits de droit commun, ou d'infractions à la LFINMA ou aux lois sur les marchés financiers, elle en informe les autorités de poursuite pénale compétentes (al. 3).
A teneur de l'art. 40 LFINMA, la FINMA peut refuser de communiquer aux autorités de poursuite pénale et à d'autres autorités suisses des informations non accessibles au public ou de leur transmettre des documents dans la mesure où ces informations ou documents lui servent uniquement à se faire une opinion (let. a), cette collaboration pourrait mettre en péril une procédure en cours ou nuire à la surveillance des marchés financiers (let. b) ou cette collaboration n'est pas compatible avec les buts de la surveillance des marchés financiers (let. c).
A la demande d'une des autorités concernées, le Tribunal administratif fédéral statue sur les différends en matière de collaboration qui opposent la FINMA et les autorités de poursuite pénale ou les autres autorités suisses (art. 41 LFINMA).
Sont parties à cette procédure uniquement les autorités concernées par le différend, les tiers ne pouvant pas y prendre part (cf. art. 36a al. 2 de la loi fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal administratif fédéral [LTAF; RS 173.32]; SCHWOB/WOHLERS, in Basler Kommentar, Finanzmartkaufsichtsgesetz, Finanzmarktinfrastrukturgesetz, 3e éd. 2019, n° 3 ad art. 41 LFINMA; CAROLE CLAUDIA BECK, Enforcementverfahren der FINMA und Dissonanz zum nemo tenetur-Grundsatz, thèse 2019, no 666 p. 259). Ainsi, si la FINMA refuse la transmission, seule l'autorité pénale cantonale requérante peut contester cette décision. Dans l'hypothèse inverse, l'éventuel tiers concerné ne dispose d'aucun droit de remettre en cause dans le cadre d'une procédure au sens de l'art. 41 LFINMA le transfert du dossier de la FINMA (cf. art. 36a al. 2 LTAF; le Message du Conseil fédéral du 1er février 2006 concernant la loi fédérale sur l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers, FF 2006 2741 p. 2798 relevant l'absence de recours contre la transmission du dossier par la FINMA; SCHWOB/WOHLERS, op. cit., n° 3 ad art. 41 LFINMA, auteur qui conteste cependant cette absence de droit pour la personne surveillée [cf. n° 4 ad art. 41 LFINMA]).
Comme la FINMA est fondamentalement obligée d'accorder l'entraide - sous réserve des motifs prévus à l'art. 40 LFINMA (BECK, op. cit., nos 669 ss p. 260 ss) -, elle ne se prononce pas, dans le cadre d'une procédure administrative, sur cette question; cela se justifie par le fait que les personnes concernées peuvent faire valoir leurs droits au cours de la procédure pénale (BECK, op. cit., n° 666 p. 259 s.). Il appartient en conséquence à l'autorité pénale, dans le cadre de l'appréciation des preuves, d'examiner si les éléments recueillis dans le cadre de la procédure administrative sont exploitables au cours de l'instruction pénale (arrêts 2C_1011/2014 du 18 juin 2015 consid. 3.2; 2A.580/2003 du 10 mai 2004 consid. 2.3). Les personnes concernées peuvent donc faire valoir leurs droits dans ce cadre (BECK, op. cit., n° 666 p. 259 s. et n° 678 p. 264; GUILLAUME BRAIDI, L'individu en droit de la surveillance financière, thèse 2016, n° 1297 p. 486; ZULAUF/WYSS/TANNER/KÄHR/FRITSCHE/EYMANN/AMMANN, Finanzmarktenenforcement, 2e éd. 2014, ad 61 p. 203; REGULA KURZBEIN, Verletzung der börsenrechtlichen Meldepflichten [Art. 20 un 31 BEHG], Verwaltungs- und strafrechtliche Konsequenzen nach dem revidierten Börsengesetz [2013], 2013, nos 695 ss p. 281 s.; CLAUDIA M. FRITSCHE, Interne Untersuchungen in der Schweiz, Ein Hanbuch für regulierte Finanzinstitute und andere Unternehmen, 2013, ad 34.3.3 p. 329).
C'est encore le lieu de relever que dans ses Lignes directrices applicables à l'entraide judiciaire avec les autorités pénales suisses du 20 novembre 2015 (état au 14 janvier 2016 [ https://www.finma.ch/fr/documents/, consulté le 5 novembre 2019 15h49]), la FINMA considère que "La fourniture de l'entraide judiciaire ou son refus ne prennent pas la forme d'une décision selon l'art. 5 PA" [RS 172.021] et que "Dans le cadre de l'entraide judiciaire, aucun droit procédural n'est en principe reconnu aux personnes concernées", la FINMA prenant "en toute indépendance la décision de fournir l'entraide judiciaire ou de s'y refuser" (cf. ad 6 p. 4). Elle précise de plus qu' "Il appartient à l'autorité requérante de garantir que les éventuels droits procéduraux des parties concernées sont respectés"; en particulier, "les réserves relevant du droit de la procédure pénale ou de l'interdiction d'utiliser certaines preuves (principe de droit pénal selon lequel l'on ne peut demander à une partie de s'auto-incriminer connu sous le principe du nemo tenetur, confiscation interdite) ne constituent pas en eux-mêmes des motifs de refus et ne sont ni examinés ni invoqués par la FINMA", celle-ci tenant cependant compte "du principe nemo tenetur autant que faire se peut dans le cadre de ses propres investigations" (cf. ad 4.4 p. 3).
2.3. En l'occurrence, la requête de production du Ministère public du 11 décembre 2018 adressée à la FINMA constitue une mesure d'entraide entre autorités au sens de l'art. 38 LFINMA. Dans le cadre de cette procédure entre autorités, la FINMA ne s'est pas opposée, même partiellement, à la production des pièces demandées.
Il est de plus établi que la banque intimée a des obligations de renseignements et d'annonces vis-à-vis de la FINMA (cf. en particulier en lien avec l'art. 29 LFINMA; BECK, op. cit., nos 87 ss p. 33 ss et nos 6205 ss p. 79 ss; ROLAND TRUFFER, in Basler Kommentar, Finanzmartkaufsichtsgesetz, Finanzmarktinfrastrukturgesetz, 3e éd. 2019, n° s 2 et 14 ss ad art. 29 LFINMA; SCHWOB/WOHLERS, op. cit., n° 12 ad 38 LFINMA). Dans le cadre de cette collaboration particulière, les documents et autres informations qu'elle peut être amenée à produire peuvent entrer en conflit avec le droit de ne pas s'auto-incriminer qui prévaut en matière pénale. En effet, les pièces et renseignements donnés afin de respecter ses obligations sur le plan administratif pourraient être transmises aux autorités pénales (SCHWOB/WOHLERS, op. cit., n° 14 ad 38 LFINMA; BECK, op. cit., no 675 p. 263 et nos 686 ss p. 267 ss; LAURA MACULA, Verwaltungs (aufsichts) rechtliche Mitwirkungspflichten und strafprozessuale Selbstbelastungsfreiheit, 2016, ad II p. 5 ss). Si la banque intimée ne peut pas s'opposer à la production du dossier de la FINMA au cours de la procédure d'entraide entre autorités, elle peut en revanche faire valoir ses droits dans le cadre de la procédure pénale et soulever l'éventuel non-respect de son droit de ne pas collaborer.
Dans la mesure où la banque intimée ne se limite pas à demander le retranchement de pièces, mais invoque aussi le secret professionnel de l'avocat et celui des affaires pour s'opposer au versement de certaines pièces du dossier de la FINMA dans la cause pénale, il ne peut lui être reproché d'avoir procédé par le biais d'une demande de mise sous scellés, procédure particulière permettant, le cas échéant, d'assurer la protection des secrets invoqués (cf. arrêts 1B_289/2016 du 8 décembre 2016 consid. 3.2 in fine; 1B_231/2015 du 15 mars 2016). Contrairement ainsi à ce que soutient le recourant, la requête de mise sous scellés n'était pas sans objet et, partant, ce premier grief peut être écarté.
3. Le recourant reproche ensuite au Tmc d'avoir considéré que sa demande de levée des scellés aurait été déposée tardivement.
3.1. Selon l'art. 248 al. 2 CPP, si l'autorité pénale ne demande pas la levée des scellés dans les 20 jours, les documents et les autres objets mis sous scellés sont restitués à l'ayant droit.
Le délai de vingt jours prévu par cette disposition est un délai légal, qui ne peut être prolongé (art. 89 al. 1 CPP). Son non-respect entraîne la restitution des objets placés sous scellés (arrêts 1B_304/2018 du 13 novembre 2018 consid. 2.2; 1B_117/2012 du 26 mars 2012 consid. 2.3). S'agissant de déterminer quand débutent les vingt jours impartis au ministère public pour agir, l'art. 90 al. 1 CPP prévoit que les délais fixés en jours commencent à courir le jour qui suit leur notification ou l'événement qui les déclenche. En ce qui concerne une mise sous scellés, il s'agit donc en principe de la demande tendant à cette mesure. La requête de mise sous scellés, après que l'ayant droit a été informé de cette possibilité, doit être formulée immédiatement, soit en relation temporelle directe avec la mesure coercitive. Elle coïncide donc en principe avec l'exécution de la perquisition (arrêt 1B_24/2019 du 27 février 2019 consid. 2.2 et les arrêts cités), respectivement la production des documents (ANDREAS J. KELLER, in DONATSCH/HANSJAKOB/LIEBER (édit.), Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung [StPO], 2e éd. 2014, n° 37 ad art. 248 CPP; THORMANN/BRECHBÜHL, in Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, art. 1-195 StPO, 2e éd. 2014, n° 19 ad art. 248 CPP). Afin de garantir une protection effective des droits de l'intéressé, celui-ci doit toutefois pouvoir se faire conseiller par un avocat et ainsi, l'opposition à un séquestre devrait pouvoir encore être déposée quelques heures après que la mesure a été mise en oeuvre, voire exceptionnellement quelques jours plus tard lorsque la procédure est particulièrement complexe (arrêt 1B_24/2019 du 27 février 2019 consid. 2.2 et les arrêts cités).
3.2. Le Tmc a en substance considéré que la demande de mise sous scellés du 30 novembre 2018 était connue du Ministère public dès le 6 décembre 2018; le délai de 20 jours pour demander la levée de cette mesure de protection était donc arrivé à son terme le 27 décembre 2018. Selon le Tmc, la requête du 23 janvier 2019 était ainsi tardive.
3.3. Ce raisonnement ne saurait cependant être suivi. On ne saurait en effet se fonder comme point de départ pour calculer le délai posé à l'art. 248 al. 2 CPP sur la connaissance de la demande de mise sous scellés par le Ministère public lorsque celle-ci est déposée antérieurement à toute réquisition et/ou obtention de documents de la part du magistrat. Une telle manière de procéder équivaudrait à permettre le dépôt anticipé d'une demande de protection visant tous les éléments qui pourraient être saisis au cours de la procédure, manière de procéder qui obligerait ensuite le Procureur à agir dans les vingt jours qui suivent pour (1) effectuer toutes les perquisitions qui pourraient être envisagées, respectivement pour (2) demander, dans ce même délai, la levée de la mesure, sauf à être à l'avenir forclos. Il n'y a dès lors pas lieu de se distancer des principes susmentionnés du seul fait que la demande de mise sous scellés relative à certains documents est formée antérieurement à toute réquisition de la part du Ministère public s'agissant de ces pièces. Dans une telle situation, la requête de mise sous scellés déploie donc ses effets à l'issue de la perquisition effective et/ou lors de la réception des documents requis par le Ministère public, moment à partir duquel le délai de l'art. 248 al. 2 CPP commence à courir.
Afin de garantir la sécurité du droit, il n'en va pas différemment du fait qu'une même requête de mise sous scellés vise des éléments différents, puisque ceux-ci ont été demandés et remis en deux temps. Cette solution s'impose encore vu l'art. 40 LFINMA. En effet, le fait que la FINMA ait accepté de transmettre les premiers documents requis ne saurait impliquer que tel sera également le cas pour ceux qui seront demandés ultérieurement. On ne peut dès lors exiger, au regard du principe d'économie de procédure, que le Ministère public saisisse de manière anticipée le Tmc d'une requête éventuellement sans objet.
Partant, la demande de mise sous scellés du 30 novembre 2018 concernant les pièces requises le 11 décembre 2018 a déployé ses effets à la réception de ces éléments par le Ministère public, soit le 21 janvier 2019. En formant sa requête de levée des scellés le 23 suivant, le Ministère public n'a ainsi pas agi tardivement. En considérant que tel était le cas, le Tmc viole le droit fédéral et ce grief doit être admis.
4. Vu les considérations précédentes et les observations déposées par le Tmc au cours de la procédure fédérale (cf. ad 3 desdites écritures), il n'y a pas lieu d'examiner l'éventuelle violation du droit d'être entendu invoquée par le recourant en lien avec le défaut de transmission des déterminations produites par la banque intimée au cours de la procédure devant le Tmc.
Cela étant, c'est le lieu de rappeler que si tout échange d'écritures n'est pas d'emblée exclu au cours de la procédure de levée des scellés, l'absence de transmission d'une partie ou de l'intégralité des observations déposées par ceux ayant sollicité cette mesure de protection peut résulter de la nature particulière de cette procédure. Celle-ci tend en effet à assurer - temporairement au moins - que le contenu des pièces placées sous scellés, respectivement en conséquence celui des observations et/ou annexes y faisant référence, ne soit pas transmis aux autorités de poursuite pénale, dont fait partie le recourant (cf. art. 12 let. b CPP; ATF 142 IV 372 consid. 3.2.1 p. 376; arrêt 1B_526/2017 du 4 mai 2018 consid. 2).
5. Il s'ensuit que le recours est partiellement admis. L'ordonnance attaquée est annulée dans la mesure où elle déclare la requête de levée des scellés du 23 janvier 2019 déposée par le recourant tardive et la cause est renvoyée à l'autorité précédente pour qu'elle procède, le cas échéant, aux échanges d'écritures nécessaires, puis entre en matière sur la demande de levée des scellés et rende une nouvelle décision.
La banque intimée, qui procède avec l'assistance de mandataires professionnels, obtient gain de cause partiellement. Elle a droit à des dépens réduits à la charge de la République et canton de Genève (art. 68 al. 1 LTF). Pour ce même motif, les frais judiciaires, mis partiellement à la charge de la banque intimée, seront réduits (art. 66 al. 1 LTF). Pour le surplus, il n'est pas perçu de frais judiciaires (art. 66 al. 4 LTF), ni alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF).
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1. Le recours est partiellement admis. L'ordonnance du 21 mai 2019 du Tribunal des mesures de contrainte du Tribunal pénal de la République et canton de Genève est annulée dans la mesure où elle déclare la requête de levée des scellés du 23 janvier 2019 déposée par le Ministère public de la République et canton de Genève tardive et la cause est renvoyée à l'autorité précédente pour qu'elle procède au sens des considérants.
2. Les frais judiciaires, fixés à 1'000 fr., sont mis à la charge de la banque intimée.
3. Une indemnité de dépens, arrêtée à 1'500 fr., est allouée à la banque intimée, à la charge de la République et canton de Genève.
4. Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal des mesures de contrainte du Tribunal pénal de la République et canton de Genève.
Lausanne, le 25 novembre 2019
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Chaix
La Greffière : Kropf