BGer 1C_28/2019 |
BGer 1C_28/2019 vom 23.12.2019 |
1C_28/2019 |
Arrêt du 23 décembre 2019 |
Ire Cour de droit public |
Composition
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MM. les Juges fédéraux Chaix, Président,
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Fonjallaz et Kneubühler.
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Greffier : M. Kurz.
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Participants à la procédure
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A.________ AG,
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représentée par Me Peter Reetz, avocat,
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recourante,
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contre
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Administration communale de Sion, Hôtel de Ville, 1950 Sion 2,
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Conseil d'Etat du canton du Valais, place de la Planta, Palais du Gouvernement, 1950 Sion.
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Objet
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refus d'autorisation de construire,
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recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal
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du canton du Valais, Cour de droit public,
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du 23 novembre 2018 (A1 18 9).
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Faits : |
A. Le 15 octobre 2015, A.________ AG a déposé auprès de la commune de Sion une demande d'autorisation de construire un centre commercial dédié à la vente de produits alimentaires sur la parcelle n° 2529 du cadastre communal. La parcelle, de 8'896 m², est située au lieu dit « Chandoline » le long de la route de Riddes, et colloquée en zone industrielle 1 selon le plan d'affectation des zones communales (ci-après: PAZ) de 1989. En décembre 2005, un projet similaire avait été autorisé sur le même bien-fonds par l'exécutif communal, celui-ci ayant considéré le projet comme conforme à l'affectation de la zone. Le permis avait été prolongé jusqu'en 2009, mais le projet n'avait pas été réalisé. Dans le cadre de la nouvelle demande, le Service cantonal du développement territorial (SDT) a rendu un préavis négatif, considérant que le projet n'était conforme ni à la zone industrielle 1, ni aux principes imposés par la fiche de coordination B.3/5 du plan directeur cantonal (PDCn) relative aux centres d'achat. Aucune opposition n'a été formulée contre le projet.
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Le 6 octobre 2016, le Conseil municipal de Sion a refusé l'autorisation de construire, considérant à l'instar du SDT que l'implantation d 'un centre commercial à cet endroit allait à l'encontre des principes de planification, tant sur le plan communal que cantonal, visant à maintenir un centre-ville attractif et à desservir de manière adéquate les quartiers d'habitation. Le permis délivré en 2005 n'y changeait rien car la politique communale d'aménagement du territoire s'était substantiellement modifiée depuis lors.
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B. Par décision du 22 novembre 2017, le Conseil d'Etat du canton du Valais a rejeté le recours formé par A.________ AG contre ce refus. Selon le tableau des zones figurant à l'art. 95 du règlement communal de construction et de zones (RCCZ), les différentes affectations possibles comportaient, pour la zone industrielle 1, les mentions suivantes:
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Habitat: non
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Bureaux/Commerces: - (tiret)
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Industries: oui
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Ateliers/Dépôts/Caves: oui
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Agricole: - (tiret)
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Le tiret devait être interprété comme une évidence selon laquelle le législateur communal avait considéré que la zone industrielle à fortes nuisances ne permettait pas d'installer des bureaux ou des commerces. Une autorisation de construire ordinaire était donc exclue et une dérogation l'était également car des intérêts publics majeurs s'y opposaient. La recourante ne pouvait invoquer l'égalité de traitement en se prévalant des permis accordés jusqu'ici car la commune avait désormais manifesté son intention de s'en tenir à une application de son règlement conforme aux nouveaux principes d'aménagement. Le permis accordé en 2005 n'empêchait pas une nouvelle appréciation par l'autorité communale.
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C. Par arrêt du 23 novembre 2018, la Cour de droit public du Tribunal cantonal a elle aussi rejeté le recours formé par A.________ AG. A l'instar des industries dans l'ensemble des zones qui ne leur étaient pas consacrées, le tiret signifiait que le législateur avait évidemment voulu exclure les bureaux/commerces de la zone industrielle 1, même si cette zone présentait actuellement une certaine mixité. Le permis délivré plus de dix ans auparavant ne changeait rien à cette interprétation: la fiche B.3/5 du PDCn adoptée entretemps (préconisant l'intégration des centres d'achats dans le centre urbain ou à proximité d'une desserte en transport public) et la révision de la LAT de 2014 posaient des exigences plus restrictives pour des centres d'achats hors des centres. Le changement de pratique de l'autorité communale était justifié. Une dérogation ne pouvait être accordée qu'en raison de circonstances exceptionnelles. Le permis accordé plus de dix ans auparavant ne pouvait constituer une telle circonstance et les intérêts publics opposés au projet étaient prépondérants. Il n'y avait pas d'inégalité de traitement avec les projets autorisés dans la même zone qui ne constituaient pas des centres d'achats comparables. Les griefs tirés de la protection de la bonne foi et de l'interdiction de l'arbitraire ont également été rejetés.
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D. Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ AG demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt cantonal et de renvoyer la cause à l'instance précédente, subsidiairement à la première instance; plus subsidiairement, elle demande l'octroi du permis de construire.
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La Cour de droit public renonce à se déterminer. La Ville de Sion conclut au rejet du recours. En réplique, la recourante et la Ville de Sion persistent dans leurs conclusions. Le Conseil d'Etat déclare partager la position de la commune. Dans ses dernières écritures, la recourante persiste dans ses griefs et ses conclusions.
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Considérant en droit : |
1. Dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) prise en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF) dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF), le recours est en principe recevable, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. Le recours a été déposé dans le délai prescrit (art. 100 al. 1 LTF). La recourante s'est vu refuser un permis de construire sur sa parcelle, décision confirmée par les instances cantonales. Elle a qualité pour agir contre ce prononcé (art. 89 al. 1 LTF) et ses conclusions sont recevables au regard de l'art. 107 LTF. Il y a donc lieu d'entrer en matière.
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2. Se plaignant d'un établissement incomplet des faits, la recourante reproche à la cour cantonale d'avoir passé sous silence l'ensemble des faits antérieurs au 15 octobre 2015, en particulier le permis délivré en janvier 2006 dans lequel le projet était jugé conforme à la zone industrielle 1. En outre, deux séances des 19 mai et 30 septembre 2015 n'auraient pas été mentionnées, au cours desquelles aucune réserve n'avait été formulée quant à la conformité du projet à la zone, ce qui démontrerait que la commune s'en tenait jusque-là à sa pratique précédente. Une troisième séance avaient encore eu lieu en septembre 2016, durant laquelle la conformité à la zone n'avait pas non plus été évoquée. Ces faits seraient propres à remettre en cause l'intention de la commune de changer sa pratique, ainsi que la bonne foi de l'autorité. L'arrêt attaqué n'aurait pas non plus tenu compte du caractère mixte de la zone, comprenant des surfaces administratives et commerciales (dont l'une autorisée en 2012 encore), ce qui viendrait confirmer le grief d'inégalité de traitement.
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La recourante se plaint aussi d'une appréciation arbitraire des preuves. L'arrêt attaqué retient que la commune aurait clairement indiqué qu'elle entendait changer de pratique, alors que cela ne ressortirait ni de sa décision de refus (qui se fonde sur une pesée d'intérêts) ni de ses déterminations. Cette intention serait aussi contredite par l'attitude de la Ville de Sion (participation à diverses séances relatives aux aspects techniques et de densité), ce qui démontrerait qu'il n'y avait pas d'intention de changer de pratique au moment du dépôt de la demande d'autorisation de construire et que le refus serait simplement dirigé contre le projet de la recourante, considéré à tort comme un centre d'achats. La recourante relève ensuite que le RCCZ aurait fait l'objet de plusieurs interprétations successives et incompatibles en 2005, en 2016 et dans la procédure de recours en 2017, de sorte que le Tribunal cantonal ne pouvait retenir qu'il n'y avait aucune contradiction ou inconstance dans la motivation de l'autorité communale.
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2.1. Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), soit pour l'essentiel de façon arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. L'appréciation des preuves est arbitraire ou manifestement inexacte au sens de l'art. 97 al. 1 LTF lorsqu'elle est en contradiction avec le dossier ou contraire au sens de la justice et de l'équité ou lorsque l'autorité ne tient pas compte, sans raison sérieuse, d'un élément propre à modifier la décision, se trompe sur le sens et la portée de celui-ci ou, se fondant sur les éléments recueillis, en tire des constatations insoutenables. Pour qu'une partie puisse demander une rectification de l'état de fait cantonal, il faut encore que celle-ci soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 142 I 135 consid. 1.6 p. 144 s.).
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2.2. L'existence d'un permis de construire délivré en 2005 est évoquée dans la partie en fait de l'arrêt attaqué (let. A, B in fine, C in fine) ainsi que dans les considérants en droit (consid. 3.3.3 et 4.3). La cour cantonale n'a pas manqué de relever la contradiction entre les deux décisions communales et s'est également prononcée sur les prétendues contradictions dans les motivations successives, jugeant celles-ci au contraire compatibles entre elles (consid. 3.3.4). S'agissant du changement de pratique instauré par la commune, il est consacré par la décision de refus du 6 octobre 2016. Quels qu'en soient les objets, les diverses séances intervenues auparavant ne pouvaient impliquer aucune assurance quant à la manière d'interpréter la réglementation (cf. consid. 7 ci-dessous). L'arrêt attaqué écarte ainsi à juste titre les offres de preuve tendant à établir la teneur des deux séances de 2015, jugeant ces éléments sans pertinence (consid. 1.3). La cour cantonale fait aussi mention d'une lettre du 25 novembre 2015 dans laquelle la commune faisait déjà état de l'incompatibilité du projet avec les prescriptions de la zone et le PDCn. Le préavis négatif du SDT du 8 août 2016 constitue également un élément essentiel sur ce point. L'arrêt attaqué passe ainsi en revue les différents éléments permettant de se prononcer sur l'intention de la commune de modifier sa pratique. Le fait que la zone en question présente déjà une certaine mixité est rappelé aux consid. 3.3.2 et 6.2 de l'arrêt attaqué, la cour cantonale ayant considéré à ce propos que la préexistence de bureaux et de commerces n'empêchait pas un changement de pratique et ne constituait pas une inégalité de traitement dans la mesure où il ne s'agissait pas d'activités comparables à celle que la recourante entend exercer. Les éléments de faits énoncés par la recourante se trouvent ainsi suffisamment évoqués dans l'arrêt attaqué.
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2.3. L'intention de la commune de changer sa pratique ressort en premier lieu de sa décision de refus de permis, dont les motifs font clairement apparaître que le projet est considéré comme non conforme à l'art. 95 RCCZ. L'arrêt attaqué reprend les griefs de la recourante quant à l'inconstance alléguée de la position communale, en particulier lors de la délivrance du permis de 2005 ou lors des discussions avec des cadres de l'administration communale (consid. 3.3.3 et 7.3); il considère que les changements de position de l'autorité ne sont pas déterminants au vu du changement de contexte et de législation. Il s'agit là d'une appréciation juridique que la recourante ne saurait remettre en cause par le biais d'un grief relatif à l'établissement des faits. Celui-ci doit être écarté.
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3. Sur le fond, la recourante se plaint d'une interprétation arbitraire de l'art. 95 RCCZ. Elle considère que le tiret figurant en regard de la zone industrielle 1 pour les bureaux et commerces signifierait que de telles activités peuvent y être admises en fonction des circonstances. Elle se fonde sur une interprétation historique (s'agissant de ce que le législateur communal aurait toujours voulu autoriser dans la zone en question et de ce qui y a été effectivement réalisé, conformément à la pratique antérieure), systématique (fondée sur les emplacements des autres tirets figurant sur le tableau des zones, soit la destination agricole dans les zones industrielles 1 et 2, la destination " industries " dans les zones de centre, collectifs, individuels et mixte, soit des affectations dont l'interdiction n'aurait aucun caractère d'évidence), littérale (la zone en question n'est pas " réservée " aux activités à fortes nuisances, mais celles-ci seraient simplement " admises ") et téléologique (le législateur ayant renoncé à inscrire "non" à l'endroit correspondant, préférant un tiret laissant une marge d'appréciation). L'arrêt attaqué serait en outre arbitraire dans son résultat car un simple tiret ne comporterait pas une densité normative et une clarté suffisantes pour justifier l'atteinte au droit de propriété.
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3.1. Le Tribunal fédéral ne revoit l'interprétation et l'application du droit cantonal et communal que sous l'angle de l'arbitraire. Une décision est arbitraire lorsqu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou lorsqu'elle contredit d'une manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Le Tribunal fédéral n'a pas à déterminer quelle est l'interprétation correcte que l'autorité cantonale aurait dû donner des dispositions applicables; il doit uniquement examiner si l'interprétation qui a été faite est défendable. Par conséquent, si celle-ci ne se révèle pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation cantonale en cause, elle sera confirmée, même si une autre solution paraît également concevable, voire préférable. De plus, il ne suffit pas que les motifs de la décision attaquée soient insoutenables, encore faut-il que cette dernière soit arbitraire dans son résultat (ATF 144 I 170 consid. 7.3 p. 174 s. et les références). Dans ce contexte, le recourant est soumis aux exigences accrues de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF.
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3.2. L'interprétation historique consiste à rechercher la volonté du législateur sur la base des travaux préparatoires (ATF 145 I 183 consid 2.3). En l'occurrence, l'argumentation de la recourante se fonde sur l'ancienne réglementation de 1963 et sur les nombreuses activités qui ont été autorisées sur cette base, ainsi que sur la base du RCCZ de 1989. Un tel argument se rapporte au changement de pratique dont se plaint par ailleurs également la recourante, mais ne permet pas d'établir la volonté réelle de l'auteur du RCCZ de 1989. La recourante n'invoque d'ailleurs nullement les travaux préparatoires ayant abouti à l'adoption de ce règlement.
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La cour cantonale a tenu compte des éléments d'interprétation invoqués par le recourante. Elle les a qualifiés de " défendables " et a néanmoins confirmé l'appréciation des instances précédentes, rappelant en premier lieu à juste titre la réserve dont elle devait faire preuve dans l'interprétation des dispositions de droit communal. Elle a considéré que si le législateur communal avait voulu autoriser les commerces et bureaux en zone industrielle 1, il aurait mentionné un " oui ", le cas échéant sous certaines conditions comme cela était prévu pour la même affectation en zone industrielle 2 (cf. art. 95 ch. 5 let. c RCCZ). La différence de régime entre ces deux zones s'explique d'ailleurs par le fait que la zone industrielle 1 admet " les activités comportant de fortes nuisances et d'un impact qui est partout ailleurs trop fort pour le paysage urbain (art. 95 ch. 7 RCCZ), alors que la zone industrielle 2 admet " les activités comportant de faibles nuisances et d'un impact tolérable pour le paysage urbain " (art. 95 ch. 8 RCCZ). Le tiret est aussi utilisé pour exclure les industries des zones de centre et d'habitat, ainsi que l'agriculture dans les zones industrielles. Il n'y a évidemment rien d'arbitraire à considérer ces exclusions comme évidentes dans le cadre de la réglementation, quand bien même la recourante évoque des cas particuliers où des affectations auraient été tolérées, voire admises. D'un point de vue général et abstrait, les industries apparaissent incompatibles avec les zones vouées à l'habitation, de même que l'agriculture dans les zones industrielles. Il est pareillement justifié d'instaurer une incompatibilité entre l'industrie lourde, comportant de fortes nuisances, et des activités de bureaux et de commerces. L'interprétation des instances précédentes ne prête donc pas le flanc à la critique; elle apparaît même préférable à celle défendue par la recourante et ne saurait être qualifiée d'arbitraire.
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3.3. L'arrêt attaqué n'est pas non plus arbitraire dans son résultat puisqu'il consacre comme on le verra une interprétation davantage conforme au droit supérieur que la pratique antérieure dont se prévaut la recourante. Même si elle résulte d'un simple tiret apposé dans un tableau, l'atteinte au droit de propriété repose sur une base légale claire, soit sur les dispositions réglementaires sur la zone industrielle, interprétées de manière à tout le moins non arbitraire.
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4. La recourante conteste ensuite l'application de la fiche B.3/5 du PDCn. Elle rappelle que la planification directrice n'a pas force obligatoire pour les particuliers et qu'elle ne s'appliquerait pas à un magasin du type de celui qu'elle entend implanter, d'une taille limitée, consacré aux seules denrées alimentaires et ne présentant que quelque 1800 produits. La fiche B.3/5 correspondrait en outre pour l'essentiel à la précédente fiche (B.3/4) du PDCn prise en considération lors de l'octroi du permis de 2005. L'argument tiré des art. 1 et 3 LAT serait lui aussi inopérant puisqu'il ne s'agit que de principes généraux et que le projet respecte l'exigence d'utilisation mesurée du sol et de concentration de l'urbanisation vers l'intérieur.
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Ces arguments n'ont toutefois pas à être examiné dès lors que le refus du permis de construire pouvait à juste titre se fonder sur la seule application de la réglementation communale. Cela étant, la cour cantonale a rappelé la portée limitée d'un plan directeur cantonal dans le cadre de l'octroi d'une autorisation de construire, et relève que l'argument y relatif n'a été retenu que pour confirmer l'interprétation de la réglementation communale.
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5. La recourante soutient ensuite que le refus de l'autorité communale ne résulterait pas d'un changement de pratique, mais d'un simple changement d'attitude arbitraire ne reposant pas sur des motifs sérieux et pertinents. Les nouvelles dispositions de la LAT du 1er mai 2014 ne consacrent que des principes généraux qui seraient respectés par le projet. La commune n'aurait jamais clairement indiqué abandonner son ancienne pratique, son attitude durant les séances des 19 mai, 30 septembre 2015 et 7 septembre 2016 laissant penser que celle-ci serait au contraire maintenue.
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5.1. Un changement de pratique administrative ne se justifie, en principe, que lorsque la nouvelle solution procède d'une meilleure compréhension de la
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5.2. Il est indéniable que l'autorité communale a changé sa pratique dès lors que le projet de la recourante, au même emplacement, avait fait l'objet d'un permis délivré en 2005 et prolongé à plusieurs reprises, sans aucune restriction quant à la conformité à la zone. Il est également possible que l'attitude de l'autorité ait semblé varier durant la seconde procédure d'autorisation de construire, à l'occasion de certaines séances. Il ressort toutefois clairement de la lettre du 25 novembre 2015 que le projet contrevenait aux prescriptions relatives à la zone industrielle, ainsi qu'aux principes du PDCn en raison de son implantation hors zone d'habitat ou de centre, de la mauvaise desserte en mobilité douce, de l'absence de desserte en transports publics, des problèmes liés au trafic automobile et du taux d'occupation du sol insuffisant. Comme cela est relevé ci-dessus, ce revirement par rapport au permis de 2005 est justifié par une meilleure interprétation des prescriptions relatives à la zone industrielle 1. Contrairement à ce que soutient la recourante, elle peut également se fonder sur les nouvelles dispositions de la LAT entrées en vigueur le 1er mai 2014, notamment la nécessité d'orienter l'urbanisation vers l'intérieur du milieu bâti en maintenant une qualité de l'habitat appropriée (art. 1 al. 2 let. a bis LAT). Cela implique notamment que le commerce de détail, en particulier les magasins d'alimentation, soient situés à proximité immédiate des habitations (PAUL DOMINIK HASLER, Redynamiser les centres de localité, VLP-ASPAN, Territoire & Environnement, novembre 4/2015 p. 7 ss). Ce changement de pratique est ainsi justifié et le grief doit être écarté.
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6. La recourante se plaint encore d'inégalité de traitement en relevant que de nombreux commerces et bureaux auraient été autorisés dans la zone industrielle alors que les mêmes principes (en particulier la fiche B.3/5 du PDCn) leur étaient déjà applicables: elle mentionne un magasin Emaüs, un magasin de décoration et d'ameublement, une société de construction avec une surface commerciale, une assurance, une société de conseils financiers, un magasin de sport, ainsi que le complexe " Econopole " autorisé en 2012, comprenant des surfaces administratives et commerciales de 4'000 m² avec des commerces et bureaux, des complexes de bureaux ainsi que des restaurants et cafés et une salle de concerts. Contrairement à ce que retient la cour cantonale, ces exemples seraient assimilables pour l'essentiel à un centre d'achats et constitueraient tout autant des activités commerciales ou de bureaux au sens du RCCZ, certaines d'entre elles générant plus de trafic que le projet litigieux.
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6.1. Une décision viole le principe de l'égalité de traitement consacré à l'art. 8 al. 1 Cst. lorsqu'elle établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou qu'elle omet de faire des distinctions qui s'imposent au vu des circonstances, c'est-à-dire lorsque ce qui est semblable n'est pas traité de manière identique et ce qui est dissemblable ne l'est pas de manière différente. Il faut que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante. L'inégalité de traitement apparaît ainsi comme une forme particulière d'arbitraire, consistant à traiter de manière inégale ce qui devrait l'être de manière semblable ou inversement (ATF 141 I 153 consid. 5.1 p. 157; 140 I 77 consid. 5.1 p. 80; 137 V 334 consid. 6.2.1 p. 348; 134 I 23 consid. 9.1 p. 42).
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Le principe de la légalité de l'activité administrative (cf. art. 5 al. 1 Cst.) prévaut sur celui de l'égalité de traitement (ATF 126 V 390 consid. 6a p. 392). Le justiciable ne peut en règle générale pas se prétendre victime d'une inégalité de traitement lorsque la loi est correctement appliquée à son cas, alors qu'elle l'aurait été faussement, voire pas appliquée du tout dans d'autres cas semblables. Cela présuppose cependant, de la part de l'autorité dont la décision est attaquée, la volonté d'appliquer correctement à l'avenir les dispositions légales en question; le citoyen ne peut prétendre à l'égalité dans l'illégalité que s'il y a lieu de prévoir que l'administration persévérera dans l'inobservation de la loi (ATF 136 I 65 consid. 5.6 p. 78; 127 II 113 consid. 9 p. 121 et les références citées). Cette règle n'oblige pas pour autant les organes de la justice administrative à entreprendre des investigations systématiques, approfondies et contradictoires dans le but de découvrir d'hypothétiques manquements à la loi (arrêt 1C_265/2012 du 25 mars 2013 consid. 6). Et encore ne doit-il pas y avoir d'intérêt public prépondérant au respect de la légalité qui impose de donner la préférence à celle-ci au détriment de l'égalité de traitement (ATF 123 II 248 consid. 3c p. 254; 115 Ia 81 consid. 2 p. 83 et les références citées). Il est en outre nécessaire que l'autorité n'ait pas respecté la loi, non pas dans un cas isolé, ni même dans plusieurs cas, mais selon une pratique constante (ATF 132 II 485 consid. 8.6 p. 510).
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6.2. Comme le relève la cour cantonale, aucun des exemples mentionnés par la recourante ne concerne une surface commerciale comparable à celle qui est projetée: une surface commerciale vendant au détail des produits alimentaires, soit des biens de consommations journaliers non encombrants. Ce sont précisément ces caractéristiques qui ont dicté le choix de l'autorité communale, celle-ci considérant qu'un commerce de ce type devait se trouver dans les zones d'habitation afin notamment de ne pas générer de trafic inutile. Les bureaux ne sont manifestement pas destinés à attirer une clientèle nombreuse et les magasins mentionnés par la recourante ne peuvent être qualifiés de commerces de proximité. Mais surtout, comme le relève la cour cantonale, la recourante ne démontre pas que des commerces comparables auraient été autorisés après le changement de pratique de l'autorité communale. Dès lors que ce changement repose sur des motifs convaincants et que la commune a manifesté, et confirmé en procédure, son intention de s'y tenir à l'avenir, l'invocation du principe d'égalité de traitement tombe à faux.
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6.3. Pour les mêmes motifs, la recourante n'a pas droit à une égalité de traitement dans l'illégalité. Elle insiste sur le fait que les motifs retenus pour le changement de pratique pouvaient déjà l'être sous l'empire de l'ancienne réglementation. Cela ne change rien au fait déterminant qu'après une certaine période d'hésitation, l'autorité a désormais clairement manifesté son intention de persévérer dans son interprétation de la réglementation à l'égard des surfaces commerciales telles que celle que la recourante entend implanter (cf. ATF 136 I 65 consid. 5.6 p. 78; 127 II 113 consid. 9 p. 121 et les références citées).
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7. Dans un dernier grief, la recourante se plaint d'une violation du principe de protection de la bonne foi. Elle estime avoir reçu des promesses effectives découlant de l'octroi d'un permis pour un projet similaire et des assurances reçues lors des séances de 2015 et 2016 et émanant d'autorités compétentes ou supposées l'être. Ces promesses seraient dignes de foi et la recourante aurait pris des dispositions irréversibles sur cette base. Enfin, la situation de droit n'aurait pas changé, le RCCZ n'ayant pas été modifié depuis l'octroi du premier permis. La recourante estime par ailleurs qu'au vu de l'ensemble des décisions prises depuis le premier permis de construire, l'autorité communale aurait adopté un comportement contradictoire prohibé.
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7.1. Le principe de la bonne foi, ancré à l'art. 9 Cst., protège le citoyen dans la confiance placée dans les assurances reçues des autorités (lorsqu'il règle sa conduite d'après les décisions, les déclarations ou le comportement de l'administration); un renseignement ou une décision erronés peuvent contraindre l'administration à consentir à l'administré un avantage contraire à la réglementation en vigueur; il faut alors que l'autorité soit intervenue dans une situation concrète envers une personne particulière, qu'elle ait agi, ou soit censée avoir agi, dans les limites de ses compétences, que l'administré n'ait pas pu immédiatement réaliser l'inexactitude de l'information obtenue, qu'il se soit fondé sur les assurances ou sur le comportement dont il se prévaut pour prendre des dispositions auxquelles il ne peut renoncer sans subir de préjudice et que la loi n'ait pas changé depuis le moment où l'assurance a été donnée (ATF 143 V 95 consid. 3.6.2 p. 103; 141 V 530 consid. 6.2 p. 538; 137 II 182 consid. 3.6.2 p. 193 et les arrêts cités).
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7.2. La recourante ne saurait tirer aucun argument du permis qui lui a été accordé en 2005 et prolongé jusqu'en 2009. Celui-ci s'est en effet périmé faute d'avoir été utilisé dans les délais et l'ensemble des droits et prérogatives qui lui étaient attachés ont ainsi disparu. Les dispositions relatives à la caducité des autorisations de construire sont en effet fondées sur la considération qu'après un certain temps, les circonstances ayant présidé à l'octroi du permis peuvent avoir changé. Dès lors, même si elle portait sur un objet identique au premier, la nouvelle demande de permis de construire formée quelque dix ans plus tard devait faire l'objet d'un nouvel examen dans le cadre duquel l'autorité n'était pas liée par sa précédente décision. La recourante ne pouvait donc présumer de bonne foi que toute nouvelle demande concernant le même objet sera nécessairement admise. S'agissant de l'attitude des représentants de l'autorité durant les diverses séances et discussions menées avec la recourante, celle-ci ne pouvait en déduire des assurances quant à l'octroi d'une nouvelle autorisation de construire. Comme elle ne pouvait l'ignorer notamment en vertu du précédent permis, seul l'exécutif communal était compétent pour un tel octroi. La Ville de Sion a d'ailleurs officiellement communiqué à la recourante, le 25 novembre 2015 - soit un peu plus d'un mois après le dépôt de la demande - que le projet était incompatible avec les prescriptions de la zone industrielle. Il ne saurait cela étant être reproché aux services municipaux d'avoir instruit complètement la demande de permis en s'intéressant à tous les aspects du projet avant de statuer à son sujet.
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Compte tenu des réserves clairement exprimées par l'autorité compétente en début de procédure, la recourante ne pouvait déduire aucune assurance des diverses discussions intervenues avec les représentants des services communaux. Faute de toute promesse quant à l'octroi d'une autorisation de construire, le grief doit être écarté sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres conditions à une protection de la bonne foi.
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8. Sur le vu de ce qui précède, le recours est rejeté. Conformément à l'art. 66 al. 1 LTF, les frais judiciaires sont mis à la charge de la recourante qui succombe. Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : |
1. Le recours est rejeté.
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2. Les frais judiciaires, arrêtés à 6'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.
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3. Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, à l'Administration communale de Sion, au Conseil d'Etat du canton du Valais et au Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour de droit public.
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Lausanne, le 23 décembre 2019
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Au nom de la Ire Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président : Chaix
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Le Greffier : Kurz
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