Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
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8C_708/2019
Arrêt du 10 janvier 2020
Ire Cour de droit social
Composition
MM. les Juges fédéraux Maillard, Président, Wirthlin et Abrecht.
Greffière : Mme Fretz Perrin.
Participants à la procédure
Secrétariat d'Etat à l'économie (SECO), Marché du travail et assurance-chômage,
TCJD, Holzikofenweg 36, 3003 Berne,
recourant,
contre
A.________,
intimée,
Office cantonal de l'emploi,
Service juridique, rue des Gares 16, 1201 Genève.
Objet
Assurance-chômage (suspension du droit à l'indemnité; recherche de travail insuffisante),
recours contre le jugement de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, du 23 septembre 2019 (A/734/2019 ATAS/837/2019).
Faits :
A.
A.________, née en 1993, est titulaire d'un diplôme de commerce obtenu dans le cadre d'une maturité professionnelle. Elle a également obtenu un bachelor en marketing et communication. En marge de ses études, elle travaillait à un taux de 50 % au service de la société B.________ depuis le 11 juillet 2017. Le 28 mai 2018, elle a résilié le contrat de travail avec effet au 30 juin suivant.
La prénommée s'est inscrite auprès de l'Office régional de placement (ORP) de Genève le 15 octobre 2018 et a requis l'octroi d'indemnités de chômage à compter de cette date.
Par décision du 13 novembre 2018, l'Office cantonal de l'emploi (ci-après: OCE) a suspendu le droit de l'assurée à l'indemnité de chômage pour une durée de 9 jours à compter du 15 octobre 2018, au motif que ses recherches d'emploi étaient quantitativement insuffisantes pendant les trois mois précédant son inscription au chômage, soit entre le 15 juillet et le 15 octobre 2018.
Saisi d'une opposition, l'OCE l'a rejetée par décision du 4 février 2019.
B.
A.________ a recouru contre cette décision sur opposition devant la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice de la République et canton de Genève, en demandant l'annulation de la sanction. La cour cantonale a ordonné la comparution personnelle des parties le 6 mai 2019.
Par jugement du 23 septembre 2019, la juridiction cantonale a partiellement admis le recours et a réduit la sanction de 9 jours à 6 jours.
C.
Le Secrétariat d'Etat à l'économie (SECO) interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement dont il demande l'annulation.
A.________ conclut implicitement au rejet du recours, tandis que l'OCE conclut à l'admission du recours.
Considérant en droit :
1.
D'après l'art. 89 al. 2 let. a LTF, ont notamment qualité pour interjeter un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral la Chancellerie fédérale, les départements fédéraux ou, pour autant que le droit fédéral le prévoie, les unités qui leur sont subordonnées, si l'acte attaqué est susceptible de violer la législation fédérale dans leur domaine d'attributions. En l'occurrence, le SECO peut se prévaloir de la qualité pour recourir devant le Tribunal fédéral contre les jugements rendus par les tribunaux cantonaux des assurances, que lui confère l'art. 102 al. 2 LACI (RS 837.0) dans le domaine de l'assurance-chômage.
Par ailleurs, le recours est dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière de droit public (art. 82 ss LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d LTF). Il a été déposé dans le délai (art. 100 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi. Il est donc recevable.
2.
Le litige porte sur le point de savoir si la cour cantonale était fondée à réduire de 9 à 6 jours la durée de la suspension du droit de l'intimée à l'indemnité de chômage prononcée par l'OCE en raison de recherches d'emploi insuffisantes avant le début du chômage.
3.
3.1. Selon l'art. 30 al. 1 let. c LACI, le droit de l'assuré à l'indemnité est suspendu lorsqu'il est établi que celui-ci ne fait pas tout ce que l'on peut raisonnablement exiger de lui pour trouver un travail convenable. Cette disposition doit être mise en relation avec l'art. 17 al. 1 LACI, aux termes duquel l'assuré qui fait valoir des prestations d'assurance doit entreprendre tout ce que l'on peut raisonnablement exiger de lui pour éviter ou réduire le chômage. Sur le plan temporel, l'obligation de rechercher un emploi prend naissance avant le début du chômage. En conséquence, l'assuré a le devoir de rechercher un emploi pendant son délai de congé, dès la signification de celui-ci (cf. ATF 139 V 524 consid. 2.1.2 p. 526).
3.2. Pour trancher le point de savoir si l'assuré a fait des efforts suffisants pour trouver un travail convenable, il faut tenir compte aussi bien de la quantité que de la qualité des démarches entreprises (ATF 124 V 225 consid. 4a p. 231). Sur le plan quantitatif, la jurisprudence considère que dix à douze recherches d'emploi par mois sont en principe suffisantes (cf. ATF 124 V 225 précité consid. 6 p. 234; arrêt C 258/06 du 6 février 2007 consid. 2.2). On ne peut cependant pas s'en tenir de manière schématique à une limite purement quantitative et il faut examiner la qualité des démarches de l'assuré au regard des circonstances concrètes, des recherches ciblées et bien présentées valant parfois mieux que des recherches nombreuses (arrêt C 176/05 du 28 août 2006 consid. 2.2; BORIS RUBIN, Commentaire de la loi sur l'assurance-chômage, 2014, n° 26 ad. art. 17 LACI).
4.
4.1. Selon l'art. 30 al. 3 LACI, la durée de la suspension du droit à l'indemnité de chômage est proportionnelle à la gravité de la faute. En vertu de l'art. 45 al. 3 OACI, elle est de 1 à 15 jours en cas de faute légère. En tant qu'autorité de surveillance, le SECO a adopté un barème (indicatif) à l'intention des organes d'exécution. Un tel barème constitue un instrument précieux pour ces organes d'exécution lors de la fixation de la sanction et contribue à une application plus égalitaire dans les différents cantons. Cela ne dispense cependant pas les autorités décisionnelles d'apprécier le comportement de l'assuré compte tenu de toutes les circonstances - tant objectives que subjectives - du cas concret, notamment des circonstances personnelles, en particulier celles qui ont trait au comportement de l'intéressé au regard de ses devoirs généraux d'assuré qui fait valoir son droit à des prestations (cf. arrêt 8C_601/2012 du 26 février 2013 consid. 4.1, non publié in ATF 139 V 164 et les références). Elles pourront le cas échéant aller en dessous du minimum prévu par le barème indicatif (cf. arrêts 8C_2/2012 du 14 juin 2012 consid. 3.2; 8C_64/2012 du 26 juin 2012 consid. 3.2).
4.2. Contrairement au pouvoir d'examen du Tribunal fédéral, celui de l'autorité judiciaire de première instance n'est pas limité dans ce contexte à la violation du droit (y compris l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation), mais s'étend également à l'opportunité de la décision administrative ("Angemessenheitskontrolle"). En ce qui concerne l'opportunité de la décision en cause, l'examen du tribunal porte sur le point de savoir si une autre solution que celle que l'autorité a adoptée dans le cas concret, dans le cadre de son pouvoir d'appréciation et en respectant les principes généraux du droit, n'aurait pas été plus judicieuse quant à son résultat. Le juge des assurances sociales ne peut pas, sans motif pertinent, substituer sa propre appréciation à celle de l'administration. Il doit s'appuyer sur des circonstances de nature à faire apparaître sa propre appréciation comme la mieux appropriée (ATF 137 V 71 consid. 5.2 p. 73; cf. aussi, parmi d'autres, arrêt 8C_767/2017 du 31 octobre 2018 consid. 4.3).
5.
En l'espèce, la juridiction cantonale a motivé la réduction de la quotité de la suspension du droit à l'indemnité de chômage par le fait qu'il se justifiait d'interpréter le barème du SECO en ce sens que la sanction prévue était proportionnelle au nombre de mois durant lesquels l'assurée n'avait pas effectué suffisamment de recherches d'emploi, et non à la durée totale du délai de congé. Cette solution était plus conforme au principe de l'égalité de traitement, dès lors qu'un assuré ne fournissant aucune recherche d'emploi durant un délai de congé de deux mois était mieux traité (8 à 12 jours de suspension selon le barème du SECO) qu'un assuré au bénéfice d'un délai de congé de trois mois qui ne fournissait aucune recherche d'emploi durant le premier mois du délai de congé mais un nombre de recherches d'emploi suffisant et adéquat durant les deux derniers mois du délai de congé (9 à 12 jours de suspension).
Le SECO reproche à la Chambre des assurances sociales d'avoir violé le principe relatif au calcul du nombre de recherches d'emploi avant l'inscription au chômage en réduisant de 9 à 6 jours la durée de la suspension du droit à l'indemnité de l'intimée.
6.
6.1. Selon le barème du SECO, si les recherches d'emploi sont insuffisantes pendant un délai de congé d'un mois, le nombre de jours de suspension prévu est de 3 à 4 jours; il est de 6 à 8 jours pour un délai de congé de 2 mois et de 9 à 12 jours pour un délai de congé de 3 mois et plus. Le barème évoque la durée du délai de congé car dans la plupart des cas, le chômeur revendique les prestations pour la période qui suit immédiatement la fin du délai de congé. Lorsque, comme en l'espèce, l'assuré ne s'inscrit pas immédiatement au chômage, c'est la durée entre la date du congé et le début de la première période de chômage contrôlé qui sera déterminante (RUBIN, op. cit., n° 11 ad art. 17 LACI).
6.2. S'il est vrai que le barème du SECO fait preuve d'un certain schématisme en tant que la durée de la suspension est fonction de la durée du délai de congé, il n'en demeure pas moins que les autorités décisionnelles doivent fixer la sanction en tenant compte de toutes les circonstances du cas d'espèce (cf. consid. 4.1 supra). C'est ainsi que si le délai de congé est de trois mois ou plus et que sur l'ensemble de cette période, l'assuré n'a pas fait des recherches d'emploi quantitativement et/ou qualitativement suffisantes, la sanction est comprise entre 9 et 12 jours selon le barème du SECO. Cependant, si en dépit de recherches insuffisantes, il est établi que l'assuré a régulièrement postulé pour des emplois au cours de la période précédant son chômage et qu'il a en outre intensifié ses recherches à mesure que la période de chômage effective se rapprochait, l'autorité devra en tenir compte et diminuer le nombre de jours de suspension, le barème n'ayant à cet égard qu'un caractère indicatif (cf. consid. 4.1 supra). Ainsi, pour reprendre l'exemple cité par la juridiction cantonale, un assuré qui, au cours d'un délai de congé de trois mois, ne fournit aucune recherche d'emploi durant le premier mois du délai de congé mais un nombre de recherches d'emploi suffisant durant les deux derniers mois du délai de congé pourrait se voir infliger une sanction inférieure à neuf jours (entre 1 et 8 jours) afin de tenir compte des circonstances du cas d'espèce. Contrairement à ce que soutient la juridiction cantonale, l'assuré ne fournissant aucune recherche d'emploi durant un délai de congé de deux mois ne serait pas mieux traité puisque dans ce dernier cas, la sanction ne pourrait en principe pas être inférieure à 8 jours, conformément au barème (cf. consid. 5 supra); en effet, en cas d'absence complète de recherches d'emploi pendant toute la période du délai de congé, on ne voit pas quelles circonstances pourraient jouer en faveur de l'assuré et amener ainsi les autorités décisionnelles à fixer une sanction en dessous du minimum prévu par le barème.
6.3. En l'occurrence, en fixant à 9 jours la suspension du droit à l'indemnité de chômage, l'OCE a infligé la sanction minimale prévue par le barème du SECO pour les administrés ayant effectué un nombre de recherches d'emploi insuffisant pendant un délai de congé de trois mois. Or par rapport à d'autres situations, les circonstances du cas d'espèce ne présentent pas de singularités qui justifieraient de s'en écarter, ce barème tendant précisément à garantir une égalité de traitement entre les administrés. En effet, non seulement l'assurée a fait un nombre de recherches d'emploi insuffisant au cours de la période considérée dans son ensemble mais elle n'a, plus particulièrement, fait aucune recherche depuis le moment où elle a donné son congé jusqu'au 4 août 2018, ainsi qu'entre le 11 août et le 5 septembre 2018. Le Tribunal fédéral a eu l'occasion de juger que sous l'angle de l'obligation générale de diminuer le dommage ancré à l'art. 17 al. 1 LACI, le requérant de prestations avait l'obligation de postuler régulièrement à un emploi durant la période précédant son inscription à l'assurance-chômage. Ainsi, un assuré ayant fait une pause dans ses recherches d'emploi pendant plus d'un mois au cours de la période de congé devait être sanctionné quand bien même il avait fait des recherches d'emploi quantitativement et qualitativement suffisantes au cours de l'ensemble de la période précédant son chômage (cf. ATF 139 V 524 consid. 4.2 p. 530 s.). On ajoutera que l'assurée a sensiblement relâché ses efforts à mesure que son chômage devenait imminent puisqu'au cours de la période du 1
er au 15 octobre 2018, elle n'a fait qu'une seule recherche d'emploi. Partant, on doit admettre dans ces circonstances qu'en réduisant la suspension à 6 jours, la juridiction cantonale a substitué sa propre appréciation à celle de l'administration sans motif pertinent (cf. consid. 4.2 supra).
6.4. Vu ce qui précède, le recours se révèle bien fondé et le jugement attaqué doit être annulé.
7.
L'intimée, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Dans sa réponse au recours, e lle n'a pas demandé le bénéfice de l'assistance judiciaire. En outre, son indigence n'est pas établie. Par ailleurs, contrairement à ses conclusions, le recourant ne saurait prétendre des dépens (art. 68 al. 3 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est admis. Le jugement de la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 23 septembre 2019 est annulé et la décision sur opposition de l'Office cantonal de l'emploi du 4 février 2019 est confirmée.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge de l'intimée.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à l'Office cantonal de l'emploi et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales.
Lucerne, le 10 janvier 2020
Au nom de la Ire Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Maillard
La Greffière : Fretz Perrin