Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
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1B_48/2020
Arrêt du 13 février 2020
Ire Cour de droit public
Composition
MM. les Juges fédéraux Chaix, Président,
Fonjallaz et Kneubühler.
Greffière : Mme Kropf.
Participants à la procédure
A.________, représenté par Me Ludovic Tirelli, avocat,
recourant,
contre
Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens.
Objet
Détention provisoire,
recours contre l'arrêt de la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 17 décembre 2019 (1014 PE19.017633-LAS).
Faits :
A.
A.________ est prévenu dans le cadre de trois enquêtes instruites par les autorités de poursuite pénales vaudoises (P_1, P_2 et PE19.017633).
Dans la première des procédures précitées (P_1), il lui est reproché d'avoir, à U.________, le 8 juin 2019, circulé sans permis de conduire valable au volant d'un véhicule immatriculé au moyen de plaques dérobées, d'avoir - à la suite d'une perte de maîtrise - causé un accident ayant fait un blessé, puis d'avoir pris la fuite en courant et d'avoir transporté dans cette voiture 319 g de haschich et deux autres jeux de plaques dérobées.
Il est également reproché à A.________ d'avoir, dans la nuit du 2 au 3 juillet 2019, avec B.________, C.________ et D.________, commis un brigandage contre E.________ (P_2). En résumé, les quatre comparses se seraient rendus en voiture à V.________, en bordure de forêt, en compagnie de E.________ que B.________ connaissait depuis quelques jours; ils auraient poussé E.________ jusqu'à ce que celui-ci tombe à terre et l'auraient attaché à un arbre avant de lui faire les poches. C.________ se serait ensuite rendu au domicile de la victime où il aurait emporté une montre ainsi que 2'480 fr., pendant que les trois autres seraient restés sur place afin de surveiller la victime; A.________ aurait donné des coups au niveau de la poitrine à E.________ et l'aurait menacé avec un bâton, lui indiquant que s'il bougeait, il le frapperait. Au retour de C.________, celui-ci aurait pris la ceinture de E.________ et la lui aurait serrée à trois reprises autour du cou afin qu'il leur indique où se trouvait son porte-monnaie; les quatre prévenus auraient finalement décidé de détacher la victime afin qu'elle puisse aller chercher ce porte-monnaie et celle-ci en aurait profité pour prendre la fuite. Des marques de ligatures, ainsi que d'autres marques sur la poitrine et le ventre de E.________ ont été constatées par la police lors de son audition du 3 juillet 2019.
A.________ est enfin mis en prévention pour un brigandage perpétré dans la nuit du 30 au 31 juillet 2019, à U.________, en compagnie de F.________ et de B.________ au préjudice de G.________ (PE19.017633). Au cours de la soirée, les trois comparses auraient décidé de commettre un brigandage et de se partager le butin à parts égales; dans ce but, ils se seraient munis de cagoules, d'une arme factice, d'un couteau et d'un spray au poivre. Vers 01h15, alors qu'ils avaient aperçu G.________ - qu'ils ne connaissaient pas - cheminer sur une place de jeux, ils auraient décidé de passer à l'action et, en faisant preuve de menaces et de violences, seraient parvenus à dérober, dans les poches de la victime, son porte-monnaie et son téléphone portable; les trois prévenus auraient en outre pris possession des chaussures de G.________.
B.
Dans le cadre de l'enquête PE19.017633 (référencée sous PE_3 avant disjonction), A.________ a été arrêté le 31 juillet 2019. Le 2 août 2019, le Tribunal des mesures de contrainte (Tmc) a ordonné son placement en détention provisoire pour un mois, retenant l'existence de soupçons suffisants de culpabilité - malgré les dénégations de l'intéressé -, ainsi que celle d'un risque de collusion.
Le 20 août 2019, A.________, par l'intermédiaire de son mandataire d'office, a demandé sa libération. Le Ministère public vaudois a conclu au rejet de cette requête et a sollicité la prolongation de la détention provisoire pour trois mois. Par ordonnances du 30 août et du 2 septembre 2019, le Tmc a rejeté la demande de libération et a prolongé la détention provisoire jusqu'au 30 novembre 2019.
Par requête du 18 novembre 2019 (cause PE19.017633), le Ministère public a requis la prolongation de la détention provisoire. Il a indiqué que la cause P_1 allait prochainement être jointe à la procédure PE19.017633, a renvoyé à sa demande du 1er août 2019 s'agissant des faits relatifs à la cause PE19.017633 et a résumé ceux des procédures P_1 et P_2; en se fondant sur ces trois causes, le Procureur a notamment invoqué l'existence de risques de collusion et de réitération. A.________ s'est déterminé le 22 novembre 2019 et, le 29 suivant, le Tmc a prolongé la détention provisoire de trois mois, soit jusqu'au 29 février 2020. Cette autorité a retenu l'existence de soupçons suffisants, ainsi que d'un risque de collusion, ce dernier étant suffisant pour justifier la détention provisoire sans qu'il soit nécessaire d'examiner le danger de réitération invoqué par le Procureur. Le Tmc a également considéré qu'aucune mesure de substitution n'était à apte à pallier le risque retenu et que la durée de la détention subie restait proportionnée au vu des charges pesant sur le prévenu et de la peine encourue.
C.
Le 17 décembre 2019, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté le recours formé par A.________ contre cette décision. Relevant être saisie uniquement dans le cadre de la procédure PE19.017633 (cf. consid. 2), la cour cantonale a retenu l'existence de soupçons suffisants d'infractions de la part du recourant eu égard aux faits examinés dans cette procédure (cf. consid. 3.3). Elle a ensuite écarté le risque de collusion invoqué par le Ministère public dès lors que celui-ci concernait les mesures d'instruction en lien avec la procédure P_2 (cf. consid. 4.2), mais a retenu l'existence d'un danger de réitération au regard de l'implication hautement vraisemblable du recourant lors des événements du 2 au 3 juillet 2019 - ce qui constituait un antécédent - et de la montée en puissance que ceux du 30 au 31 juillet 2019 semblaient démontrer (cf. consid. 5.3). La juridiction cantonale a enfin considéré qu'il n'existait aucune mesure de substitution susceptible de pallier le risque existant et que le principe de proportionnalité, vu la peine encourue, était respecté (cf. consid. 6.3).
D.
Par acte du 27 janvier 2020, A.________ forme un recours en matière pénale contre cet arrêt, concluant à sa réforme en ce sens que sa libération immédiate soit ordonnée, moyennant le prononcé des mesures de substitution suivantes : (1) en dehors de ses heures de travail, assignation à résidence, le cas échéant mesure surveillée au moyen d'un bracelet électronique et (2) interdiction formelle d'entretenir, de quelque façon que ce soit, des relations avec les prévenus et personnes appelées à donner des renseignements dans le cadre des affaires PE19.017633 et PE_3, B.________, C.________, F.________ et D.________, et de les contacter d'une quelconque manière. Il demande aussi le renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision et l'octroi de l'assistance judiciaire.
Le Ministère public et l'autorité précédente ont renoncé à déposer des déterminations, se référant aux considérants de la décision entreprise. Le 7 février 2020, le recourant n'a pas formé d'observations complémentaires, produisant cependant deux documents actualisant les informations en lien avec une activité professionnelle au sein de l'entreprise de son père et une possibilité de résidence chez ses parents en cas de libération.
Considérant en droit :
1.
1.1. Le recours en matière pénale (art. 78 al. 1 LTF) est ouvert contre une décision relative à la détention provisoire. Le recourant, prévenu actuellement détenu, dispose d'un intérêt juridique à la modification ou à l'annulation de la décision attaquée qui confirme la prolongation de sa détention provisoire (art. 81 al. 1 let. a et b ch. 1 LTF). Au surplus, le recours a été formé en temps utile (art. 45 al. 1 et 100 al. 1 LTF) contre une décision rendue par une autorité statuant en tant que dernière instance cantonale (art. 80 LTF) et les conclusions présentées sont recevables au regard de l'art. 107 al. 2 LTF. Il y a donc lieu d'entrer en matière.
1.2. Les attestations produites le 7 février 2020 sont datées des 6 et 7 février 2020. Étant ultérieures à l'arrêt attaqué, elles sont irrecevables (art. 99 al. 1 LTF).
2.
Le recourant ne conteste pas l'existence de soupçons suffisants de la commission d'infractions, celle d'un danger de réitération et la durée de la détention provisoire subie eu égard à la peine encourue.
Il reproche en revanche à l'autorité précédente d'avoir considéré qu'il n'existerait aucune mesure de substitution propre à pallier le danger de récidive existant. A cet égard, il se prévaut notamment d'une violation de son droit d'être entendu et fait grief à la cour cantonale de n'avoir pas motivé cette question.
2.1. Le droit d'être entendu garanti à l'art. 29 al. 2 Cst. (cf. art. 3 al. 2 let. c, 101 et 107 CPP) implique notamment le devoir pour l'autorité de motiver sa décision. Selon la jurisprudence, il suffit que le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause. L'autorité n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à l'examen des questions décisives pour l'issue du litige (ATF 145 IV 99 consid. 3.1 p. 109; 143 III 65 consid. 5.2 p. 70 s.; 141 IV 244 consid. 1.2.1 p. 246). Dès lors que l'on peut discerner les motifs qui ont guidé la décision de l'autorité, le droit à une décision motivée est respecté même si la motivation présentée est erronée. La motivation peut d'ailleurs être implicite et résulter des différents considérants de la décision. En revanche, une autorité se rend coupable d'un déni de justice formel lorsqu'elle omet de se prononcer sur des griefs qui présentent une certaine pertinence ou de prendre en considération des allégués et arguments importants pour la décision à rendre (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1 p. 565).
2.2. A teneur de l'art. 197 al. 1 CPP, les mesures de contrainte ne peuvent en particulier être ordonnées que si les buts poursuivis ne peuvent pas être atteints par des mesures moins sévères (let. c) et si elles apparaissent justifiées au regard de la gravité de l'infraction (let. d). Le principe de proportionnalité implique donc que la détention provisoire doit être en adéquation avec la gravité de l'infraction commise et la sanction prévisible (ATF 142 IV 389 consid. 4.1 p. 395). La détention avant jugement ne doit en outre pas durer plus longtemps que la peine privative de liberté prévisible (art. 212 al. 3 CPP).
Le principe de proportionnalité impose également d'examiner les possibilités de mettre en oeuvre d'autres solutions moins dommageables que la détention (règle de la nécessité; cf. art. 36 Cst. et 212 al. 2 let. c CPP). Cette exigence est concrétisée par l'art. 237 al. 1 CPP, qui prévoit que le tribunal compétent ordonne une ou plusieurs mesures moins sévères en lieu et place de la détention si ces mesures permettent d'atteindre le même but que la détention. Selon l'art. 237 al. 2 CPP, font notamment partie des mesures de substitution la fourniture de sûretés (let. a), la saisie des documents d'identité et autres documents officiels (let. b), l'assignation à résidence ou l'interdiction de se rendre dans un certain lieu ou un certain immeuble (let. c), l'obligation de se présenter régulièrement à un service administratif (let. d), l'obligation d'avoir un travail régulier (let. e), l'obligation de se soumettre à un traitement médical ou à des contrôles (let. f) et/ou l'interdiction d'entretenir des relations avec certaines personnes (let. g).
Cette liste est exemplative et le juge de la détention peut également, le cas échéant, assortir les mesures de substitution de toute condition propre à en garantir l'efficacité (ATF 142 IV 367 consid. 2.1 p. 370). S'agissant en particulier du port d'un bracelet électronique, cette mesure ne permet généralement qu'un contrôle rétroactif, n'ayant ainsi qu'un effet préventif (arrêts 1B_362/2019 du 17 septembre 2019 consid. 3.3.1 destiné à la publication; 1B_344/2017 du 20 septembre 2017 consid. 5.2 [risque de fuite]). Dans le contexte d'une assignation à résidence, ce type de surveillance permet notamment de s'assurer que la personne sous surveillance est bien à l'emplacement prescrit aux heures prévues (arrêt 1B_142/2018 du 5 avril 2018 consid. 2.1 [danger de réitération]). En tout état de cause, son adéquation doit être évaluée en fonction de toutes les circonstances d'espèce, en particulier l'intensité du risque en cause, la gravité des infractions examinées, la nécessité de garantir la présence des parties dans la procédure et la durée de la détention provisoire et pour des motifs de sûreté (arrêts 1B_362/2019 du 17 septembre 2019 consid. 3.3.2 destiné à la publication).
Dans l'éventualité d'une violation des obligations imposées, la révocation des mesures de substitution et un nouveau placement du prévenu en détention peuvent entrer en considération (cf. art. 237 al. 5 CPP; arrêt 1B_470/2019 du 16 octobre 2019 consid. 3.2).
2.3. La cour cantonale a considéré qu'aucune mesure de substitution n'était propre à remédier concrètement le risque de réitération existant, précisant que celles proposées par le recourant, dont en particulier celle consistant à lui interdire de prendre contact avec certaines personnes, visaient à contenir le danger de collusion.
2.4. Ce raisonnement ne saurait être suivi. En effet, il ne peut être reproché au recourant d'avoir proposé des mesures visant avant tout à pallier un danger de collusion, dès lors que c'est ce danger qui avait été retenu par le Tmc; ce risque n'a été écarté - eu égard au défaut de jonction des différentes causes concernant pourtant un même prévenu (art. 29 CPP) - que par l'autorité précédente.
En outre, les mesures proposées par le recourant (assignation à domicile avec bracelet électronique, interdiction de contacts avec les co-prévenus, les témoins et personnes appelées à donner des renseignements, contrôle des communications ou interdiction de périmètre [cf. ad D p. 8 et la conclusion IV p. 9 du mémoire cantonal]) peuvent aussi entrer en considération pour réduire un danger de réitération puisqu'elles visent en substance à contrôler l'activité du recourant. Elles peuvent ainsi tendre à assurer sa présence à certains endroits et/ou à certaines heures (assignation à résidence et/ou restriction de périmètre), ainsi qu'à l'empêcher de préparer de nouvelles infractions en restreignant ses communications (interdiction de contacts avec notamment ses anciens comparses). On relève de plus que le recourant a indiqué, dans son mémoire cantonal, la possibilité d'être à nouveau engagé par l'entreprise familiale, qui lui offrait "un cadre propice à le détourner de toute potentielle activité délictuelle"; l'hypothèse d'une activité professionnelle n'est de loin pas non plus dénuée de toute pertinence pour réduire le risque de la commission de nouvelle infraction, problématique sur laquelle la juridiction précédente ne s'est pourtant pas prononcée.
Il s'ensuit que la violation du droit d'être entendu est admise. La cause doit donc être renvoyée à l'autorité précédente pour qu'elle examine s'il existe, au vu des circonstances d'espèce (gravité et fréquence des infractions en cause, antécédent (s), durée de la détention provisoire subie, situation personnelle du recourant, éventuelle activité professionnelle, etc.) et en tenant compte de l'ensemble des procédures (cf. art. 29 al. 1 CPP), des mesures de substitution propres à réduire suffisamment le danger de récidive existant, puis rende une nouvelle décision motivée sur cette question.
Pour éviter, toute critique relative à la violation du principe de célérité prévalant tout particulièrement en matière de détention (art. 5 al. 2 CPP), l'instance précédente devra statuer à brefs délais.
3.
Le recours est admis dans la mesure où il est recevable. L'arrêt attaqué est annulé dans la mesure où il exclut sans motivation le prononcé de mesures de substitution. La cause est renvoyée à l'autorité précédente pour qu'elle procède au sens des considérants et qu'elle rende une nouvelle décision.
Le recourant, qui obtient gain de cause avec un avocat, a droit à des dépens pour la procédure fédérale à la charge du canton de Vaud (art. 68 al. 1 LTF). Il n'est pas perçu de frais judiciaires (art. 66 al. 4 LTF). La requête d'assistance judiciaire est ainsi sans objet.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est admis dans la mesure où il est recevable. L'arrêt du 17 décembre 2019 de la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois est annulé dans la mesure où il exclut sans motivation le prononcé de mesures de substitution. La cause est renvoyée à l'autorité précédente pour qu'elle procède au sens des considérants.
2.
La requête d'assistance judiciaire est sans objet.
3.
Une indemnité de dépens, fixée à 2'000 fr., est allouée au mandataire du recourant à la charge du canton de Vaud.
4.
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Ministère public central du canton de Vaud et à la Chambre des recours pénale Tribunal cantonal du canton de Vaud.
Lausanne, le 13 février 2020
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Chaix
La Greffière : Kropf