BGer 1B_91/2020 |
BGer 1B_91/2020 vom 04.03.2020 |
1B_91/2020 |
Arrêt du 4 mars 2020 |
Ire Cour de droit public |
Composition
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MM. les Juges fédéraux Chaix, Président,
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Haag et Müller.
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Greffier : M. Parmelin.
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Participants à la procédure
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A.________, représenté par Me Ismael Fetahi, avocat,
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recourant,
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contre
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Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens.
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Objet
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Procédure pénale; refus de retrancher une pièce du dossier,
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recours contre l'arrêt de la Chambre des recours
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pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 16 janvier 2020 (38 - PE19.008850-EMM).
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Considérant en fait et en droit : |
1. Le 17 mai 2019, le Ministère public central du canton de Vaud a ouvert une instruction pénale contre A.________ pour traite d'êtres humains, subsidiairement usure, et infraction à la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration. Il le suspectait d'avoir, contre paiement, procuré des fausses pièces d'identité à des ressortissants du Bangladesh, de les avoir aidés à venir en Suisse, de leur avoir fourni logement et travail, d'avoir, notamment sous la menace de perdre leur permis de séjour, conservé leur salaire et de les avoir empêchés d'aller et venir à leur guise.
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Lors de l'audition de confrontation du 5 novembre 2019, l'un des plaignants a produit à titre de moyen de preuve une clé USB qui contenait une vidéo enregistrée en 2015 ou 2016, relatant une discussion avec le prévenu sur la manière dont celui-ci avait obtenu le faux passeport établi au nom de B.________.
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Le 18 novembre 2019, A.________ a requis le retranchement immédiat de cette pièce du dossier.
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Le Ministère public central a rejeté la requête au terme d'une décision rendue le 9 décembre 2019 que le prévenu a vainement contestée auprès de la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud.
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Agissant par la voie du recours en matière pénale, A.________ demande au Tribunal fédéral de réformer l'arrêt rendu par cette juridiction le 16 janvier 2020 en ce sens que son recours est admis, que l'ordonnance du Ministère public central du 9 décembre 2019 est réformée en ce sens que la clé USB et le document présenté comme la traduction écrite de son contenu sont retirés du dossier puis détruits en application de l'art. 141 al. 5 CPP et que les frais d'arrêt ainsi que l'indemnité due à son défenseur d'office sont laissés à la charge de l'Etat. Il requiert l'assistance judiciaire.
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Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures.
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2. Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis.
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2.1. Une décision relative à l'exploitation de moyens de preuve (art. 140 et 141 CPP) ne met pas fin à la procédure pénale et revêt un caractère incident. Le recours en matière pénale contre une telle décision n'est dès lors recevable qu'aux conditions de l'art. 93 al. 1 let. a LTF, soit en présence d'un préjudice irréparable, l'art. 93 al. 1 let. b LTF n'étant généralement pas applicable en matière pénale (ATF 141 IV 284 consid. 2 p. 286).
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En ce domaine, le préjudice irréparable se rapporte à un dommage de nature juridique qui ne puisse pas être réparé ultérieurement par un jugement final ou une autre décision favorable au recourant. Le seul fait qu'un moyen de preuve dont la validité est contestée demeure au dossier ne constitue en principe pas un tel préjudice, dès lors qu'il est possible de renouveler ce grief jusqu'à la clôture définitive de la procédure. En particulier, la question de la légalité des moyens de preuve peut être soumise au juge du fond (art. 339 al. 2 let. d CPP), autorité dont il peut être attendu qu'elle soit en mesure de faire la distinction entre les moyens de preuve licites et ceux qui ne le seraient pas, puis de fonder son appréciation en conséquence. Les motifs retenus par le juge de première instance peuvent ensuite être contestés dans le cadre d'un appel (cf. art. 398 ss CPP) et, en dernier ressort, le prévenu peut remettre en cause ce jugement devant le Tribunal fédéral (art. 78 ss LTF; ATF 141 IV 284 consid. 2.2 p. 287).
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Cette règle comporte toutefois des exceptions. Tel est le cas lorsque la loi prévoit expressément la restitution immédiate, respectivement la destruction immédiate, des preuves illicites (cf. par exemple les art. 248, 271 al. 3, 277 et 289 al. 6 CPP). Il en va de même quand, en vertu de la loi ou de circonstances spécifiques liées au cas d'espèce, le caractère illicite des moyens de preuve s'impose d'emblée. De telles circonstances ne peuvent être admises que dans la situation où l'intéressé fait valoir un intérêt juridiquement protégé particulièrement important à un constat immédiat du caractère inexploitable de la preuve (ATF 144 IV 127 consid. 1.3.1 p. 131).
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En vertu de l'art. 42 al. 1 LTF, il incombe au recourant d'alléguer les faits qu'il considère comme propres à fonder sa qualité pour recourir et ceux permettant de démontrer l'existence d'un préjudice irréparable lorsque celui-ci n'est pas d'emblée évident (ATF 141 IV 284 consid. 2.3 p. 287).
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2.2. Le recourant soutient que l'enregistrement litigieux aurait été obtenu par le biais d'une tromperie illicite au sens de l'art. 140 al. 1 CPP et que ce moyen de preuve serait absolument inexploitable en application de l'art. 141 al. 1 CPP, de sorte que son maintien au dossier pénal lui causerait un préjudice irréparable.
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La procédure pénale contient des dispositions sur les méthodes d'administration des preuves interdites (art. 140 CPP) et sur l'exploitation des moyens de preuves obtenus illégalement (art. 141 CPP). Elle ne règle en revanche pas de manière explicite dans quelle mesure ces dispositions s'appliquent quand les moyens de preuve sont récoltés, non pas par les autorités, mais par des personnes privées. Dans une telle situation, il n'existe donc pas d'interdiction de principe de les exploiter (arrêt 1B_76/2016 du 30 mars 2016 consid. 2.1). Cela étant, selon la jurisprudence, de tels moyens de preuve sont uniquement exploitables si, cumulativement, ils auraient pu être obtenus par les autorités de poursuite pénale conformément à la loi et si une pesée des intérêts en présence justifie leur exploitation. En tout état de cause, au stade de l'instruction, il convient de ne constater l'inexploitabilité de ce genre de moyen de preuve que dans des cas manifestes (arrêt 1B_234/2018 du 27 juillet 2018 consid. 3.1 et les références citées; voir aussi arrêt 6B_1188/2018 du 26 septembre 2019 consid. 2.1 destiné à la publication).
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2.3. La Chambre des recours pénale a constaté que l'enregistrement litigieux avait été effectué sans l'accord du recourant et qu'il devait être considéré comme illicite. Elle a jugé que l'absence d'accord du prévenu ne suffisait pas à retenir que les conditions de l'art. 140 CPP étaient réalisées et que le simple fait de cacher un appareil enregistreur sur soi ne constituait pas une tromperie au sens de cette disposition. L'enregistrement litigieux n'était ainsi qu'une preuve illicite ordinaire au sens de l'art. 141 al. 2 CPP, dont l'admission au dossier pouvait être admise dès lors qu'il aurait pu être obtenu licitement par l'autorité pénale.
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Les arguments que le recourant fait valoir à l'encontre de cette motivation ne permettent pas de conclure à l'existence d'un préjudice irréparable. Il ne ressort pas de l'état de fait de l'arrêt attaqué que l'enregistrement vidéo litigieux aurait été réalisé à la suite de menaces, de contrainte ou d'une tromperie qui le rendrait absolument inexploitable au regard de l'art. 140 al. 1 CPP. Le recourant se contente d'affirmer avoir été mis en confiance par le plaignant en raison des liens d'amitié qu'il entretenait alors avec celui-ci, sans qu'il ne se rende compte qu'il était filmé; l'existence d'une relation d'amitié n'est pas établie et peut raisonnablement être mise en doute au regard de la gravité des faits qui lui sont reprochés. Les allégations du recourant ne suffisent manifestement pas à établir que le plaignant aurait fait usage de tromperie pour l'amener à s'exprimer. Pour le surplus, il reviendra au juge de fond de procéder à la pesée des intérêts requise pour savoir si ce moyen de preuve, recueilli illicitement, pouvait être considéré comme exploitable étant donné que les conditions posées à l'utilisation licite d'un dispositif technique de surveillance aux fins d'enregistrer une conversation privée par l'autorité ne sont pas d'emblée exclues au regard des art. 197 al. 1 let. b, 269, 280 et 281 CPP et de la gravité notamment de l'infraction de traite d'êtres humains reprochée au recourant. Que l'enquête pénale n'était pas encore ouverte lorsque l'enregistrement a été réalisé importe peu, seul étant décisif le fait qu'il existait à ce moment-là de graves soupçons laissant présumer que les infractions de traite d'êtres humains, voire d'usure par métier ont été commises, ce qui était le cas en 2015 et 2016 puisque, selon l'état de fait non contesté retenu dans l'arrêt attaqué, le plaignant - auteur de l'enregistrement vidéo litigieux - est arrivé en Suisse en 2012 ou 2013 et aurait travaillé en cuisine, durant cette période, dans le même restaurant que le prévenu sans être payé (cf. arrêt 6B_911/2017 du 27 avril 2018 consid. 1.2.2). Le recourant ne prétend au surplus pas que cet enregistrement constituerait l'unique moyen de preuve à sa charge et qu'il aurait de ce fait un intérêt particulier à ce que la question de son exploitabilité soit tranchée sans délai.
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Partant, l'inexploitabilité du moyen de preuve en cause au sens des art. 140 et 141 al. 1 CPP n'est, en l'état, pas manifeste et un risque de préjudice irréparable pour le recourant n'est pas démontré. Il s'ensuit que l'arrêt attaqué ne saurait être contesté immédiatement auprès du Tribunal fédéral.
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3. Le recours doit par conséquent être déclaré irrecevable selon la procédure simplifiée prévue par l'art. 109 al. 2 let. a LTF. Vu l'issue du recours, la demande d'assistance judiciaire sera rejetée (art. 64 al. 1 et 2 LTF). Le recourant, qui succombe, prendra en charge les frais du présent arrêt, lesquels seront fixés en tenant compte de sa situation financière (art. 65 et 66 al. 1 LTF). Il n'y pas lieu d'allouer des dépens aux parties plaignantes qui n'ont pas été invitées à se déterminer sur le recours.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : |
1. Le recours est irrecevable.
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2. La demande d'assistance judiciaire est rejetée.
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3. Les frais judiciaires, arrêtés à 300 fr., sont mis à la charge du recourant.
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4. Il n'est pas alloué de dépens.
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5. Le présent arrêt est communiqué aux mandataires du recourant et des parties plaignantes, ainsi qu'au Ministère public central et à la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud.
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Lausanne, le 4 mars 2020
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Au nom de la Ire Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président : Chaix
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Le Greffier : Parmelin
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