Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
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9C_110/2020
Arrêt du 9 mars 2020
IIe Cour de droit social
Composition
M. le Juge fédéral Parrino, Président.
Greffier : M. Berthoud.
Participants à la procédure
A.________,
représentée par Me Michael Rudermann, avocat,
recourante,
contre
Département de la sécurité, de l'emploi et de la santé (DSES),
rue de l'Hôtel-de-Ville 14, 1204 Genève,
intimé.
Objet
Assurance-maladie,
recours contre le jugement du Tribunal administratif fédéral, Cour III, du 21 janvier 2020 (C-6055/2018).
Faits :
A.
Le 21 janvier 2020, le Tribunal administratif fédéral a rendu un arrêt qui retient en substance les faits suivants. Par arrêté du 22 juillet 2015, le Département de la sécurité, de l'emploi et de la santé du canton de Genève (ci-après: DEAS, puis DSES) avait autorisé A.________ a exercer dans ce canton la profession de médecin à titre indépendant ou dépendant sous sa propre responsabilité. Par arrêté du même jour, le DEAS n'avait pas autorisé la prénommée à pratiquer à charge de l'assurance obligatoire des soins, en application notamment de l'ordonnance sur la limitation de l'admission des fournisseurs de prestations.
Par lettre du 11 mai 2016, complétée le 3 août 2018, A.________ a requis de la Direction générale de la santé du canton de Genève (ci-après: DGS) la reconsidération de la décision du 22 juillet 2015 et l'octroi d'une autorisation de pratiquer à charge de la LAMal. Le 23 août 2018, la DGS a confirmé l'arrêté du 22 juillet 2015 refusant le droit de pratiquer à charge de la LAMal. Invitée par A.________ à rendre une décision formelle dans la mesure où une demande de reconsidération motivée lui avait été adressée les 11 mai 2016 et 3 août 2018, la DGS a répondu qu'elle n'était pas tenue de rendre une telle décision sujette à recours, en l'absence de tout élément nouveau en l'espèce.
B.
Le 23 octobre 2018, A.________ a saisi le Tribunal administratif fédéral d'un recours pour déni de justice, en concluant à ce que le DSES, soit pour lui la DGS, fût enjoint à statuer formellement sur la demande de reconsidération du 11 mai 2016. Dans l'arrêt du 21 janvier 2020, le Tribunal administratif fédéral a déclaré le recours du 23 octobre 2018 irrecevable pour cause de tardiveté.
C.
A.________ interjette un recours en matière de droit public contre cet arrêt dont elle demande l'annulation, en concluant au renvoi de la cause au Tribunal administratif fédéral pour qu'il entre en matière sur son recours.
Considérant en droit :
1.
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (art. 29 al. 1 LTF; ATF 144 V 280 consid. 1 p. 282 et les références).
2.
Le recours en matière de droit public (art. 82 let. a LTF) suppose que la décision rendue dans une cause de droit public ne tombe pas sous le coup de l'une des exceptions prévues à l'art. 83 LTF. Aux termes de l'art. 83 let. r LTF, la compétence du Tribunal fédéral est exclue s'agissant des décisions en matière d'assurance-maladie qui ont été rendues par le Tribunal administratif fédéral sur la base de l'art. 34 de la loi fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal administratif fédéral (LTAF; RS 173.32). Certes, l'art. 34 LTAF a été abrogé. Cette disposition a toutefois été remplacée par l'art. 53 al. 1 LAMal (auquel se réfère l'art. 83 let. r LTF: ATF 141 V 361 consid. 1.3 p. 364), selon lequel le Tribunal administratif fédéral est notamment compétent pour connaître des décisions des gouvernements cantonaux visés à l'art. 55a LAMal et qui concernent la limitation de l'admission à pratiquer à charge de l'assurance-maladie. L'exclusion du recours en matière de droit public avait été justifiée en raison d'un risque de surcharge du Tribunal fédéral et du besoin d'accéder à un règlement rapide des litiges par une instance fédérale unique (MARTIN ZOBL, Basler Kommentar, Krankenversicherungsgesetz, n. 67 ad art. 53 LAMal). La restriction de l'art. 83 LTF vaut également pour les décisions de nature procédurale, notamment les décisions d'irrecevabilité rendues par le Tribunal administratif fédéral (ATF 137 I 371 consid. 1.1 p. 373 et les références; FLORENCE AUBRY GIRARDIN, Commentaire de la LTF, 2e éd., n° 17 ad art. 83).
3.
La recourante relève que l'acte attaqué constitue une décision finale rendue dans une cause de droit public (art. 90 LTF), de sorte que le recours en matière de droit public est en principe ouvert en vertu de l'art. 82 let. a LTF. Elle mentionne ensuite l'exception figurant à l'art. 83 let. r LTF. Cela exposé, la recourante rappelle en citant FLORENCE AUBRY GIRARDIN (op. cit., n° 18 ad art. 83) que lorsque la décision a été rendue dans un domaine certes exclu par l'art. 83 LTF, mais qu'elle est traitée pour elle-même, dans une procédure séparée, sa recevabilité sera appréciée indépendamment de la cause à laquelle elle se rapporte. Comme l'objet du recours formé devant le Tribunal administratif fédéral était circonscrit à une pure question de droit de procédure, soit un recours pour déni de justice qui fait l'objet d'un procès séparé, elle en déduit que ce dernier ne relève pas du champ d'application de l'art. 83 let. r LTF. Elle ajoute que la décision d'irrecevabilité rendue par un juge unique (en vertu de l'art. 23 al. 1 let. b LTAF), sans qu'elle puisse faire l'objet d'un contrôle judiciaire supérieur, viole la garantie de l'accès au juge (art. 29a Cst. et 6 § 1 CEDH).
4.
Le Tribunal administratif fédéral a considéré que si la lettre de la DGS du 23 août 2018 n'était pas explicitement désignée comme étant une décision et ne contenait pas de voies de droit, elle émanait d'une autorité compétente et réglait la situation de la recourante de manière irrévocable, rejetant la demande de reconsidération et maintenant le refus de l'octroi de l'autorisation de pratiquer à charge de la LAMal. Compte tenu de son contenu juridique et de ses caractéristiques structurelles, le Tribunal administratif fédéral a admis qu'il s'agissait d'une décision au sens de l'art. 5 al. 1 let. c PA.
Contrairement à ce que soutient la recourante, on ne se trouve pas en présence d'une procédure séparée qui justifierait que sa recevabilité soit appréciée indépendamment de la cause à laquelle elle se rapporte. La recourante ne conteste d'ailleurs pas que l'écriture du 23 août 2018 concernait sa demande de reconsidération de la décision du 22 juillet 2015, ces documents portant tous deux sur le refus de l'autorisation de pratiquer à charge de l'assurance obligatoire des soins. Si l'on suivait le raisonnement de la recourante, le recours en matière de droit public serait ouvert à la partie qui aurait manqué le délai de recours au Tribunal administratif fédéral et qui reviendrait à charge par le biais d'un recours pour déni de justice auprès de cette autorité judiciaire, contournant ainsi l'art. 83 LTF. Dès lors que le cas d'espèce entre dans le champ des exceptions prévues par cette disposition légale (soit l'art. 83 let. r LTF), le recours est irrecevable.
Pour le même motif, le Tribunal fédéral n'est pas non plus compétent pour examiner la question de la garantie de l'accès au juge invoquée par la recourante dans la présente affaire (cf. art. 29a Cst. et 6 § 1 CEDH), car il n'existe pas de voie de droit ordinaire (art. 83 let. r LTF) ou subsidiaire (art. 113 LTF a contrario) contre l'arrêt du Tribunal administratif fédéral du 21 janvier 2020.
5.
La recourante, qui succombe, supportera les frais de la procédure (art. 66 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Président prononce :
1.
Le recours est irrecevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 300 fr., sont mis à la charge de la recourante.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal administratif fédéral, Cour III, et à l'Office fédéral de la santé publique.
Lucerne, le 9 mars 2020
Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Parrino
Le Greffier : Berthoud