Urteilskopf
112 Ib 65
11. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 18 juin 1986 dans la cause X. contre Département fédéral de justice et police (recours de droit administratif)
Regeste
Art. 21 und 49 BüG. Wiedereinbürgerungsgesuch; vorgängige Suche nach der Abstammung von einem schweizerischen Vorfahren.
1. Erste Voraussetzung für eine Wiedereinbürgerung bildet das Bestehen des Schweizerbürgerrechts vor dessen Verwirkung. Dieses muss strikte nachgewiesen werden. Die Beweislast obliegt dem Gesuchsteller, dem die kantonale Verwaltungsbehörde jedoch entsprechend dem Grundsatz von Treu und Glauben anzugeben hat, über welche Tatsachen genau er den Beweis zu erbringen hat (E. 2-5).
2. Der negative Entscheid der Behörde jenes Kantons, dessen Kantonsbürgerrecht in Frage steht (Art. 49 BüG), besitzt, einmal in Rechtskraft erwachsen, absolute Wirkung und nicht nur relative für das laufende Wiedereinbürgerungsverfahren (E. 6).
X. est né le 19 juin 1952 à Bucarest. Devenu réfugié politique roumain résidant en Suisse depuis juin 1975, il a demandé la réintégration dans la nationalité suisse le 27 septembre 1979, en vertu de l'art. 21 LN, au Département fédéral de justice et police (DFJP), nationalité qu'auraient encore possédée son grand-père et son père.
Interpellé sur ce problème du droit de la famille, le Service fédéral de l'état civil est arrivé à la conclusion que la filiation du requérant n'était pas suffisamment établie. Dès le 7 août 1980, X. avait requis le Département de l'intérieur du canton de Zurich de constater sa nationalité suisse (art. 49 LN). La requête a été rejetée le 8 avril 1981. L'Office fédéral de la police (OFP) a de nouveau demandé l'avis de cette autorité, se fondant sur l'art. 18 al. 2 LN. Le Département cantonal de l'intérieur a maintenu sa décision. L'OFP en a avisé le requérant et lui a rappelé que les difficultés venaient en premier lieu d'une question d'identité et d'état civil; il lui a proposé de laisser le dossier en suspens jusqu'à ce que soit enfin constatée sa descendance d'ancêtres suisses par des inscriptions idoines dans les registres de sa commune d'origine, ce qui ne serait sans doute possible que par une action judiciaire en constatation d'état civil.
Le 11 septembre 1985, l'OFP a confirmé sa position définitive. A la demande du requérant, le DFJP a rendu, le 19 décembre 1985, une décision susceptible de recours. Il a refusé d'entrer en matière sur la requête de réintégration.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, X. a demandé au Tribunal fédéral de prononcer sa réintégration. Le recours a été rejeté.
Extrait des considérants:
2. S'il avait acquis la nationalité suisse par filiation, le recourant l'a perdue par péremption le 19 juin 1974 (
art. 10 LN). Il demande sa réintégration en vertu de l'
art. 21 LN. Aux termes de cette disposition, peut être réintégré quiconque a omis, pour des raisons excusables, de s'annoncer ou de souscrire une déclaration comme l'exige l'art. 10 et a perdu, de ce fait, la nationalité suisse par péremption.
Si le Département jouit d'un certain pouvoir d'appréciation quant au caractère excusable des causes de l'omission et quant à la réintégration elle-même (arrêt non publié D, du 30 mai 1980, consid. 4),
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la condition première de la mesure, c'est l'existence de la nationalité suisse avant la péremption. Sur ce point fondamental, la preuve doit être stricte. Sans doute la jurisprudence admet-elle que la loi de 1952, après avoir battu en brèche la pérennité de la citoyenneté suisse, définit largement l'"annonce" au sens de l'
art. 10 al. 3 LN et exclut toute rigueur en matière d'appréciation des preuves et des indices, car la perte de la nationalité suisse par péremption ne devrait intervenir que dans des cas extrêmes (arrêt non publié D, du 13 février 1980, consid. 2). Elle concède aussi que l'ignorance de la loi, à moins qu'elle ne soit fautive, peut constituer une raison excusable au sens de l'
art. 21 LN (
ATF 105 Ib 156 /157 consid. 2,
ATF 101 Ib 121 ss). Mais ces aspects de la péremption et de la réintégration n'empêchent pas que le requérant doit d'abord avoir été citoyen suisse pour perdre, puis recouvrer cette nationalité.
3. En matière administrative, les faits doivent en principe être établis d'office et, dans la mesure où l'on peut raisonnablement exiger de l'autorité qu'elle procède à cette recherche, les règles sur la répartition du fardeau de la preuve ne s'appliquent pas. Certes, les parties sont tenues de collaborer à la constatation des faits dans une procédure qu'elles introduisent elles-mêmes (
art. 13 al. 1 lettre a PA), ce qui n'influence pas le fardeau de la preuve (GYGI, Bundesverwaltungsrechtspflege, 2e éd., p. 281). Mais le Département reconnaît que, hors le fait qu'il n'a pas ouvert une action civile d'état, le recourant a déployé avec ténacité de gros efforts pour éclaircir sa situation de famille, alors que les difficultés ne manquaient pas: ancienneté des faits, survenus dans un pays de l'Est dont le recourant est réfugié; manque de coopération du père en Suède; documents disparus dans un tremblement de terre qui aurait détruit sa maison paternelle le 4 mars 1977. Il n'en demeure pas moins que, lorsque les preuves font défaut, ou si l'on ne peut raisonnablement exiger de l'autorité qu'elle les recueille, la règle de l'
art. 8 CC est applicable par analogie (
ATF 106 Ib 80 /81 et les références;
ATF 104 V 211;
ATF 103 V 65 /66, consid. 2a; GYGI, op.cit., p. 280 ss; GRISEL, Traité de droit administratif, II p. 929/930; IMBODEN/RHINOW, Schweizerische Verwaltungsrechtsprechung, 5e éd., n. 2 B V c, p. 11). Pour les faits constitutifs d'un droit - donc la réintégration -, le fardeau de la preuve incombe au requérant (
ATF 106 Ib 75 ss consid. 5, 81). Ces principes doivent cependant s'appliquer conformément aux règles de la bonne foi. Ainsi, l'administration ne saurait faire supporter à l'administré les
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conséquences de la répartition du fardeau de la preuve, lorsque l'intéressé n'a aucune raison de savoir sur quel point particulier on attend de lui une preuve. Tel n'a pas été le cas en l'espèce: le Département a indiqué d'emblée, puis précisé en cours d'instruction, les preuves qu'il exigeait.
5. (résumé) Si le père du recourant n'est pas un enfant légitime du citoyen zurichois indiqué par X., une reconnaissance avec suite d'état civil par le père présumé ou un jugement déclaratif de paternité étaient exclus selon le droit suisse alors en vigueur (art. 304 aCC). Une éventuelle reconnaissance à l'étranger n'aurait porté aucun effet en Suisse. Un lien de filiation illégitime n'aurait donc en aucun cas conféré la nationalité suisse au père du recourant.
Reste alors la seule hypothèse d'un mariage bigame du grand-père paternel, le cas échéant jusqu'à la majorité du père, survenue le 21 mai 1940 (art. 1er al. 2 lettre a LN). Le Département estime que la preuve n'en a pas été rapportée, faute d'un acte de mariage (art. 28 OEC et 9 CC).
Ainsi qu'on l'a vu, la preuve de la nationalité suisse antérieure doit être stricte. L'administration se départira d'autant moins de cette rigueur lorsque cette nationalité ne saurait résulter que d'une situation aussi exceptionnelle - et contraire au droit suisse - que la bigamie entre un Suisse et une Roumaine: les intéressés ne se trouvaient pas, en l'espèce, en pays musulmans ou en Afrique noire, par exemple, ou encore dans un pays très éloigné de la Suisse, en distance et par sa culture. Il existe certes des indices de bigamie, mais ils ne sont pas suffisants.
6. Ainsi, les documents produits par le recourant ne sauraient fournir une preuve stricte du niveau d'un acte d'état civil.
a) Aux termes de l'art. 49 LN, en cas de doute sur la nationalité d'une personne, l'autorité du canton dont le droit de cité est en cause statue d'office ou sur demande; le Département fédéral de justice et police a également qualité pour présenter la demande.
En l'espèce, c'est le requérant à la réintégration qui a saisi la Direction de l'intérieur du canton de Zurich, le 7 août 1980 déjà. Cette autorité a jugé, le 8 avril 1981, que le recourant n'avait jamais possédé la citoyenneté de Zurich et Turbenthal ni, partant, la nationalité suisse; elle lui en avait déjà donné les raisons par lettre du 20 août 1980; à son avis, le citoyen zurichois indiqué par X. comme étant son grand-père paternel ne se trouvait même plus en Roumanie depuis 1915 et n'y serait plus retourné.
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Cette décision administrative, prise par l'autorité compétente, est définitive, n'ayant pas été attaquée, malgré l'indication de la voie de recours au Conseil d'Etat (cf. en outre l'art. 50 al. 1 ch. 2 lettre c LN). Elle a été rendue à titre principal, et non - comme jusqu'en 1940 (arrêtés gouvernementaux des 20 décembre 1940 et 11 novembre 1941) - à titre préjudiciel, pour le litige en cours uniquement. Une fois en force, elle a donc joui d'une autorité absolue, et non plus simplement relative à la procédure de réintégration en cours (AUBERT, Traité de droit constitutionnel suisse, I p. 369/370 Nos 987 et 988; GRISEL, L'autorité des décisions prises au sujet du droit de cité, Mélanges G. Sauser-Hall, Neuchâtel 1952, p. 94 à 96; ATF 75 I 287 consid. 2).
b) Quelle que soit la possibilité de réexaminer la décision négative du 8 avril 1981 (ATF 75 I 287 ss consid. 3; AUBERT, op.cit., p. 370 No 988; GRISEL, op.cit., p. 94/95), la suite de l'instruction de la requête de réintégration n'a pas révélé des faits ou documents nouveaux qui, on l'a vu, auraient dû conduire le Département à constater que la preuve stricte de l'indigénat suisse initial était rapportée. Aussi bien la Direction cantonale zurichoise de l'intérieur n'avait-elle pas changé d'avis lorsqu'elle adressa une nouvelle prise de position au Département, à sa requête, le 21 juin 1985. C'est donc l'échec de la preuve rigoureuse exigée que le recourant doit supporter.