Urteilskopf
81 I 219
35. Arrêt du 13 juillet 1955 dans la cause Rotner contre Herzig et Juge de paix du cercle de Vevey.
Regeste
Art. 59 Abs. 1 BV.
Eine durch ein dingliches Recht gesicherte Forderung kann beim Richter des Orts, wo sich das Pfand befindet, geltend gemacht werden, wenn der Schuldner nicht nur das Pfand- oder Retentionsrecht, sondern auch die Höhe der Forderung bestreitet,es sei denn, dass der Gläubiger mit der Geltendmachung des Pfandrechts offensichtlich Art. 59 Abs. 1 BV zu umgehen sucht. - Gilt auch, wenn die Forderung den Wert des Pfandes übersteigt.
Jean Herzig a ouvert contre Jacques Rotner une poursuite en réalisation de gage pour le montant de 618 fr., invoquant un droit de rétention sur deux pneus usagés qui se trouvaient en sa possession. Rotner a fait opposition jusqu'à concurrence de 468 fr. au commandement de payer de l'Office des poursuites de Vevey qui lui a été notifié à Zurich le 24 mars 1955, et a contesté le droit de gage. Par exploit du 1er avril 1955, Herzig a ouvert action contre Rotner et conclu au paiement de la somme de 468 fr. avec intérêt à 5% dès le 24 avril 1952, à la mainlevée de l'opposition pour ce montant et à la reconnaissance de son droit de rétention sur les deux pneus usagés.
Par lettre du 21 avril 1955, l'avocat du défendeur, Me von Büren, a contesté la compétence du Juge de paix de Vevey et informé ce magistrat que Rotner ne se présenterait en conséquence pas à son audience. Il a fait valoir que Rotner avait son domicile à Zurich et qu'il devait être recherché devant le juge de ce lieu, le fait que Herzig prétendait posséder un droit de gage n'ayant pas pour effet de créer un for à Vevey.
Statuant le 11 mai 1955 par défaut contre le défendeur qui ne s'était pas présenté, le Juge de paix de Vevey a considéré "qu'une créance garantie par un gage mobilier perd le caractère d'une réclamation personnelle au sens de l'art. 59 CF", a admis sa compétence et accueilli les conclusions du demandeur.
Rotner a formé en temps utile contre ce jugement, dont il demande l'annulation, un recours de droit public pour
BGE 81 I 219 S. 221
violation de l'art. 59 Cst. Il fait valoir qu'il est domicilié à Zurich et que la réclamation qui lui est adressée est purement personnelle.L'intimité a conclu à l'irrecevabilité du recours et subsidiairement à son rejet.
Considérant en droit:
1. Le recours pour violation de la garantie du juge du domicile (art. 59 Cst.) n'exige pas l'épuisement préalable des moyens de droit cantonal (art. 86 al. 2 OJ). Rotner n'a, d'autre part, pas renoncé par son attitude dans la procédure à se prévaloir de ce droit constitutionnel. Son recours est partant recevable.
2. L'intimé a ouvert contre le recourant, devant le Juge de paix de Vevey, une action tendant à la fois au paiement de sa créance et à la reconnaissance du droit de rétention sur les deux pneus en sa possession qui la garantit. Contrairement à l'opinion du recourant une telle action n'est pas une réclamation personnelle au sens de l'art. 59 al. 1 Cst. D'après la jurisprudence constante du Tribunal fédéral (RO 17 p. 376 et les arrêts cités, 23 p. 38), une réclamation garantie par un droit réel peut être valablement portée devant le juge du lieu de situation de l'objet du gage lorsque le débiteur, comme c'est le cas en l'espèce, conteste non seulement l'existence du droit de gage ou de rétention, mais encore le montant de la créance garantie. Il ne pourrait en être autrement que si le demandeur en faisant valoir un droit de gage cherchait manifestement à éluder l'application de l'art. 59 al. 1 Cst. Mais le recourant n'allègue pas que tel serait le cas. Le dossier de la cause n'autorise notamment pas à croire que les pneus usagés sur lesquels le droit de rétention est exercé soient des choses sans valeur, ce qui pourrait être un indice du dessein du demandeur de tourner la disposition constitutionnelle. Il ressort au contraire de la correspondance échangée entre les parties que le recourant attribue de la valeur aux deux pneus, puisqu'il en réclame avec insistance la restitution.
Bien que la valeur des objets soumis au droit de rétention soit certainement inférieure au montant de la créance garantie, on doit admettre que le Juge de paix de Vevey pouvait statuer valablement à la fois sur l'existence du gage et sur l'étendue de la créance. Dans l'arrêt RO 23 p. 38 consid. 6, le Tribunal fédéral a, il est vrai, laissé indécise la question de savoir si le juge du lieu où se trouve le gage a le droit de se prononcer, sans limitation, sur le montant de la créance alors que celle-ci n'est pas couverte par le gage mais en dépasse la valeur. Cette réserve n'est toutefois pas justifiée, l'insuffisance du gage ne portant pas atteinte au caractère non personnel de l'action dans les cas où le droit de gage n'est pas revendiqué en vue d'éluder manifestement l'art. 59 al. 1 Cst. Il serait d'ailleurs dans la plupart des cas impossible de fixer la limite jusqu'à laquelle le juge du lieu de situation de la chose pourrait statuer sur la créance, car la valeur exacte du gage n'est en général révélée qu'au moment de sa réalisation, laquelle suppose un jugement passé en force sur le fond.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
Le recours est rejeté.