Urteilskopf
91 I 279
43. Arrêt du 29 septembre 1965 dans la cause Aeberhard contre Canton de Vaud.
Regeste
Doppelbesteuerung. Zulässigkeit der staatsrechtlichen Beschwerde. Art. 46 Abs. 2 BV, 84 und 88 OG.
1. Wenn der erstinstanzliche Entscheid durch den zweitinstanzlichen ersetzt wird, kann nur der letztere Gegenstand der staatsrechtlichen Beschwerde sein (Erw. 1).
2. Auch im Falle der Einigung zweier Kantone über die Steuerausscheidung kann der Steuerpflichtige wegen Doppelbesteuerung Beschwerde führen, sofern er der Auffassung ist, die Abmachung beeinträchtige ihn, wobei eine virtuelle Doppelbesteuerung und Beeinträchtigung genügt (Erw. 2).
3. Steuerort für ein von einem Privaten auf einem fremden Grundstück erstelltes Weekend-Häuschen. Dauer- oder Fahrnisbaute im Sinne des Zivilrechts? Frage offen gelassen. Massgebend sind die wirtschaftlichen Verhältnisse, und nach diesen ist das streitige Häuschen wie ein am Ort seiner Lage besteuertes Grundstück zu behandeln (Erw. 3).
A.- Le 17 novembre 1962, Hugo Aeberhard, domicilié à Bolligen près de Berne, loua à la commune de Bellerive (canton de Vaud) une parcelle dont celle-ci est propriétaire au bord du lac de Morat. Il fut autorisé par le bail à édifier sur le terrain une "maison de plage", "complètement démontable" et dépourvue de tout "caractère d'un bâtiment au sens des dispositions sur le registre foncier". Usant de cette autorisation, il fit construire une maison de vacances, qui est immatriculée au registre foncier au plan folio 3, no 58.
B.- Le 10 décembre 1964, l'Administration des impôts
BGE 91 I 279 S. 281
du canton de Berne envoya à Aeberhard un bordereau de taxation l'informant que son chalet de vacances était considéré comme un immeuble et était par conséquent imposable dans le canton de Vaud. De fait, le 23 décembre 1964, l'Administration des impôts du canton de Vaud adressa à Aeberhard deux bordereaux concernant les contributions qu'elle lui réclamait pour le chalet de vacances.
C.- Contre ces deux bordereaux, Aeberhard a formé un recours à la Commission vaudoise de recours en matière d'impôt et un recours de droit public. La procédure devant le Tribunal fédéral a été suspendue jusqu'à droit connu sur le premier de ces recours. L'autorité vaudoise a statué le 28 juin 1965 en rejetant le recours qui lui avait été adressé. Le 4 août, Aeberhard en a informé le Tribunal fédéral et l'a prié "der staatsrechtlichen Beschwerde die gesetzliche Folge zu geben". Il se plaint d'une violation de l'interdiction de la double imposition.
L'Administration des impôts du canton de Vaud conclut au rejet du recours.
Considérant en droit:
1. La Commission cantonale de recours en matière d'impôt statue librement. Son prononcé a remplacé la décision de l'autorité de taxation contenue dans les deux bordereaux (RO 90 I 20/21, 107). Il peut seul dès lors être attaqué par la voie du recours de droit public. Le recours formé par Aeberhard est dirigé contre les deux bordereaux. Après la décision de la Commission cantonale, le recourant s'est borné à demander au Tribunal fédéral de donner à ce recours la suite qu'il comportait selon la loi. En revanche, il n'a pas déclaré expressément vouloir attaquer aussi la décision de la Commission cantonale. On doit toutefois admettre que telle est bien son intention. Sinon, il aurait retiré son recours.
2. Les cantons de Berne et de Vaud considèrent l'un et l'autre que le chalet du recourant doit être imposé dans le canton de Vaud. La jurisprudence n'exclut cependant pas le droit de recours en pareille hypothèse. Elle considère en effet que, même en cas d'accord entre les cantons sur la répartition de l'impôt, le contribuable conserve le droit de recourir en invoquant l'art. 46 al. 2 Cst., s'il se sent lésé par la convention intervenue (arrêt non publié Staub, du 11 septembre 1936,
BGE 91 I 279 S. 282
cité par LOCHER, Doppelbesteuerung, § 1, III A, 2, no 4). En matière de violation de l'art. 46 al. 2 Cst., la jurisprudence admet que le recours de droit public est recevable déjà en cas de double imposition virtuelle (RO 83 I 106, 262, 332). Il suffit dès lors que la lésion soit virtuelle. Tel est le cas en l'espèce où il n'est pas exclu que le canton de Berne ne vienne un jour à revendiquer la souveraineté fiscale sur le chalet qu'impose le canton de Vaud. L'existence de cette lésion suffit à ouvrir la voie du recours de droit public. Le recourant cherche avant tout à faire juger par le Tribunal fédéral que son chalet est un immeuble, de manière à pouvoir ensuite obliger la commune de Bellerive à remplacer le contrat de bail relatif au terrain par l'octroi d'un droit de superficie. Le Tribunal fédéral n'a pas à se préoccuper du but ainsi poursuivi par le recourant. Il a exclusivement à examiner si le recourant est victime d'une double imposition virtuelle.
3. Selon le recourant, la solution du conflit dépend de la nature juridique de son chalet: celui-ci, dit-il, doit être imposé dans le canton de Vaud s'il est un immeuble et dans le canton de Berne s'il est une construction mobilière (art 677 CC).
Il est exact que, d'après la jurisprudence, le contribuable doit être imposé à son domicile pour sa fortune mobilière et au lieu de situation de la chose en ce qui concerne sa fortune immobilière (LOCHER, Doppelbesteuerung, § 6, I A, 7, I A, 1). Mais, en vertu d'un principe constamment appliqué par le Tribunal fédéral, le partage des souverainetés fiscales de deux cantons ne repose pas nécessairement sur le statut que les objets à imposer possèdent selon les règles du droit civil. Il peut être opéré sur la base de la situation économique de la chose, de son utilisation et de sa destination réelles, et cela même si, en soumettant la chose à certaines règles du droit privé, le contribuable n'a pas eu en vue d'éluder l'impôt (RO 85 I 99). La combinaison de ces divers principes permet de laisser indécise en l'espèce la question de la nature juridique du chalet litigieux. En effet, ainsi qu'on va le voir, le sort du recours sera le même, quelle que soit la solution adoptée.
Supposé que ce chalet soit un immeuble au sens des règles du droit privé, il devrait être imposé à son lieu de situation, c'est-à-dire dans le canton de Vaud, conformément au principe rappelé ci-dessus. Ce serait dès lors à bon droit que les autorités
BGE 91 I 279 S. 283
vaudoises auraient envoyé au recourant les bordereaux d'impôt que celui-ci a attaqués. Ce serait à juste titre aussi que le canton de Berne aurait renoncé à exercer sa souveraineté fiscale relativement au chalet.Supposé au contraire que ce chalet soit une construction mobilière au sens des règles du droit civil, il faudrait alors tenir compte de la réalité économique. Le recourant affirme lui-même "dass diese Ferienhäuser alle mehr oder weniger stabil gebaut sind und sich seit Jahren auf dem Terrain befinden". Sa déclaration - cela n'est pas douteux - vise notamment son propre chalet. Il a d'ailleurs produit une photographie de ce dernier qui, bien que monté sur pilotis, se présente comme une construction robuste, destinée à durer et qui ne serait pas moins compliquée à démonter que beaucoup de chalets de montagne. D'ailleurs, le recourant qualifie sa construction de "Ferienhäuschen". Il habite Bolligen près de Berne, c'est-à-dire à courte distance des bords du lac de Morat. Il est clair dès lors que, quoiqu'il ne le dise pas, il utilise son chalet fréquemment, non seulement durant les vacances, mais aussi pendant les week-ends et les autres jours de loisir. Du reste, cette maison existe depuis plusieurs années et le nouveau bail que le recourant a signé le 29 mars 1965 lui permet de la garder nombre d'années encore. Ainsi, dans la réalité des choses, le chalet litigieux est conçu comme une construction immobilière et utilisé comme telle. Dans cette mesure, il doit être imposé à son lieu de situation, c'est-à-dire par les autorités vaudoises.
Ainsi, que la maison soit un immeuble ou une construction mobilière au sens des règles du droit civil, elle est soumise du point de vue des principes de la double imposition à la souveraineté fiscale du canton de Vaud. Le recours est dès lors mal fondé.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral,
Rejette le recours.