65. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 13 septembre 1956 dans la cause Schlaeppi contre Schlaeppi.
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Regeste
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1. Innerhalb der durch Art. 2 Abs. 2 ZGB, betreffend Rechtsmissbrauch, gezogenen Schranken können die Ehegatten auf Grund von Art. 214 Abs. 3 ZGB durch Ehevertrag vereinbaren, dass der ganze Vorschlag des ehelichen Vermögens dem überlebenden Ehegatten zufalle. Eine solche Vereinbarung unterliegt keiner erbrechtlichen Herabsetzung. (Bestätigung der Rechtsprechung). (Erw. 1 und 2).
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Sachverhalt
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BGE 82 II 477 (478):
A.- Marc-Robert Schlaeppi, né le 2 janvier 1883, a eu deux enfants, Anne-Marie et Marc-René, du mariage qu'il a contracté avec Claire Müller le 5 avril 1909. Le divorce des époux Schlaeppi a été prononcé par jugement du 28 septembre 1932.
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Le 27 février 1936, Marc-Robert Schlaeppi s'est remarié avec Alice-Joséphine Verdan, née le 27 janvier 1899. Aucun enfant n'est issu de cette union.
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Marc-Robert Schlaeppi est décédé à Clarens le 16 janvier 1950. Il a laissé un testament olographe du 27 décembre 1948 qui contient notamment les dispositions suivantes:
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"Article 2.
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Je renvoie mes descendants à leur réserve légale et j'institue ma femme Alice Schlaeppi, née Verdan, comme mon héritière pour le maximum que la loi me permet de lui attribuer dans ma succession.
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Ma femme aura en outre le droit de choisir ceux de mes biens qu'elle décidera pour constituer sa part successorale et sa part aux biens matrimoniaux; elle pourra également, comme il lui conviendra, exiger que parties de ses droits soient exercés en usufruit sa vie durant sur ceux de mes biens qu'elle décidera.
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BGE 82 II 477 (479):
Article 3.
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Dans son lot, ma fille Anne-Marie aura le droit de demander l'attribution de la petite table à ouvrage venant de ma mère.
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Article 4.
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A titre de règle de partage, je prescris que ma femme Alice Schlaeppi, née Verdan, aura le droit, sa vie durant, d'habiter gratuitement l'appartement que nous occupons actuellement dans mon immeuble de Clarens; à cet effet, un droit d'habitation sera inscrit au Registre foncier pour lui garantir l'exercice de ses droits.
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Article 5.
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Je désigne comme mon exécuteur testamentaire Monsieur le notaire Georges Testaz à Montreux. .."
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Le lendemain de la rédaction de son testament, le 28 décembre 1948, Marc-Robert Schlaeppi a conclu avec sa seconde femme un contrat de mariage ainsi conçu:
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"Contrat de mariage
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Par devant Georges Testaz, notaire à Montreux, pour le district de Vevey, comparaissent:
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d'une part:
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M. Marc-Robert fils de Marc Schlaeppi, de Boudry (Neuchâtel) et Gadmen (Berne), ingénieur, domicilié à Clarens, et
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d'autre part:
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son épouse Mme Alice Joséphine Schlaeppi, fille de François Verdan, des mêmes lieux d'origine et de domicile que le prénommé,
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lesquels exposent préliminairement ce qui suit:
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I. Ils se sont mariés à Montreux, le vingt-sept février mil neuf cent trente-six et n'ont jamais passé entre eux de contrat de mariage; ils se sont en conséquence soumis au régime matrimonial légal de l'union des biens (articles 178 et 194 suivants du code civil suisse).
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II. Au moment du mariage, les apports des époux comparants étaient les suivants, ce que chacun d'eux accepte expressément, savoir:
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pour l'époux: un capital net de quarante-sept mille francs (47 000 fr.)
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pour l'épouse: une somme totale de six mille francs (6000 fr.) qu'elle a remise à son mari, ce dernier reconnaissant, par les présentes, devoir ladite somme à sa femme; la copie des présentes qui sera remise à l'épouse vaudra entre les mains de cette dernière comme reconnaissance de dette.
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Jusqu'à ce jour, les époux comparants n'ont pas fait d'autres apports en mariage, en titres, valeurs ou espèces.
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III. Les apports en mobilier des époux sont déterminés par les polices d'assurance contre l'incendie établies au nom de chacun des époux, les dites polices valant réciproquement comme reconnaissance d'apports entre les comparants.
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Ceci exposé, les comparants conviennent de ce qui suit:
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Article unique.
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Le bénéfice prévu à l'article 214 du code civil suisse appartiendra en entier à l'époux survivant.
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En paiement de ses apports et de sa part de bénéflce, l'époux BGE 82 II 477 (480):
survivant pourra demander l'attribution des biens matrimoniaux qu'il décidera.
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En cas de dissolution de l'union conjugale pour une autre cause que le décès de l'un des époux, ledit bénéfice appartiendra en entier au mari.
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Les comparants dispensent le notaire soussigné de faire inscrire le présent contrat au registre des régimes matrimoniaux."
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Ce contrat a été approuvé par la Justice de paix du cercle de Montreux, en sa qualité d'autorité tutélaire, le 22 janvier 1949.
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B.- Le 3 mars 1951, Anne-Marie et Marc-René Schlaeppi ont ouvert action contre dame Alice Schlaeppi-Verdan pour faire reconnaître leur part réservataire dans la succession de leur père, prononcer la nullité, subsidiairement la réductibilité de la disposition du contrat de mariage du 28 décembre 1948 attribuant la totalité du bénéfice de l'union conjugale à l'époux survivant et fixer la consistance du patrimoine paternel. Dame Alice Schlaeppi-Verdan a conclu à ce que le partage des biens laissés par son mari fût opéré conformément aux clauses du contrat de mariage et du testament.
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Par jugement du 7 avril 1956, la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois a notamment déterminé de quels biens se compose la succession et prononcé que les demandeurs sont héritiers réservataires de leur père, que leur part est, pour chacun d'eux, des 9/32 de la succession, que l'attribution à la défenderesse de la totalité du bénéfice de l'union conjugale constitue, à concurrence des 2/3 de ce bénéfice, une libéralité réductible, que l'attribution à la défenderesse des biens énumérés dans la police d'assurance incendie établie en son nom constitue une libéralité réductible, et que la défenderesse a le droit de prélever, dans la liquidation du régime matrimonial, ses apports en espèces par 6000 fr., les biens mobiliers dont elle établira qu'ils constituent ses apports et, réduction réservée, les biens énumérés dans la police d'assurance incendie à son nom et le bénéfice de l'union conjugale.
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C.- Contre ce jugement dame Alice Schlaeppi-Verdan a recouru en réforme au Tribunal fédéral. Elle conclut à BGE 82 II 477 (481):
ce qu'en modification de la décision attaquée il soit prononcé:
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"1. L'attribution à la recourante par le contrat de mariage litigieux du 28 décembre 1948, de la totalité du bénéfice de l'union conjugale est valable et maintenue dans tous ses effets, dite attribution ne constituant pas une libéralité réductible.
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2. Les droits des intimés, en leur qualité d'héritiers réservataires de feu Marc-Robert Schlaeppi, représentant pour chacun d'eux 9/32 (neuf trente-deuxièmes) de la succession, portent uniquement sur les apports du défunt, à l'exclusion du bénéfice réalisé au cours de l'union conjugale des époux Schlaeppi-Verdan, lequel bénéfice est attribué en entier à la recourante, avant tout partage.
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3. Les apports de feu Marc-Robert Schlaeppi devant faire l'objet du partage entre parties ne comprennent pas les biens et valeurs ci-après:
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a) 30 (trente) actions Ciba sur 60 (soixante) inventoriées au décès, ces trente actions rentrant dans le bénéfice de l'union conjugale.
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b) ..."
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Les intimés concluent au rejet du recours.
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Considérant en droit:
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Cette opinion est partagée par certains auteurs (GMÜR, Familienrecht, note 34 à l'art. 214, p. 612; ESCHER, Das Erbrecht, notes 6 à l'art. 462, p. 37/38, et 33 à l'art. 527, p. 459; ROSSEL et MENTHA, Manuel du droit civil suisse, vol. I, p. 374; LE FORT, Quotité disponible et réserve dans le code civil suisse, p. 118 et 121; DENZLER, Die Liquidation der Güterverbindung infolge Todes eines Ehegatten, p. 110/111; GUHL, Sicherung und Begünstigung der Ehegatten nach ehelichem Güterrecht und Erbrecht, Festschrift Tuor, p. 35) et combattue par d'autres (EGGER, Das Familienrecht, notes 18-20 à l'art. 214, p. 439; EGGER, Ehevertragliche Vereinbarungen über den Vorschlag, ZGB BGE 82 II 477 (482):
Art. 214 Abs. 3, Schweizerische Zeitschrift für Beurkundungs- und Grundbuchrecht, 33, 1952, p. 172/173; CAVIN, Régime matrimonial et droit de succession, Mélanges Guisan, p. 105 ss.; RÜSCH, Die Begünstigung des überlebenden Ehegatten, p. 24; SUTTER, Die Abgrenzung des Ehevertrages gegenüber dem Erbvertrag, p. 58 ss., 64, 74; DIENER, Vereinbarungen über Änderungen der Vorschlagsteilung, p. 76 ss.; MÜNCH, Die Ermittlung und Behandlung des Vor- und Rückschlages im ehelichen Güterrecht der Schweiz, p. 78/79; BLOCH, Vorschlagsverteilung der Ehegatten und Pflichtteilsrecht, Revue suisse de jurisprudence, 49, 1953, p. 1 ss.; VON AESCH, Zur Frage der Vorschlagsverteilung gemäss Art. 214 Abs. 3 ZGB, eod. loc., p. 189 ss.).
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Pour sa part, la Cour cantonale ne s'est pas ralliée à la jurisprudence précitée: elle estime que le contrat de mariage litigieux est une disposition à cause de mort valable en la forme, mais soumise à réduction en conformité de l'art. 522 CC; elle fonde notamment son point de vue sur les travaux préparatoires du code civil au titre concernant les régimes matrimoniaux.
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Les travaux préparatoires invoqués n'ont pas la portée ni le sens que leur attribue l'autorité cantonale, et l'on ne saurait en déduire que les dispositions du droit des successions sur l'action en réduction fussent applicables au contrat de mariage par lequel les époux conviennent d'une répartition du bénéfice de l'union conjugale différente de celle que prévoit l'art. 214 al. 1 CC. Certes, le projet de code civil du 28 mai 1904 contenait un article 204 ainsi conçu: "Les époux ne peuvent disposer par contrat de mariage, au préjudice de leurs descendants, de plus de la moitié des biens que chacun d'eux laissera au décès, et, sous le régime de la communauté universelle, de plus des trois quarts des biens communs existant à la même époque". Une disposition semblable figurait dans chacun des avantprojets (1893 art. 140, 1896 art. 222, 1900 art. 218, 1903 art. 218). Le Conseil national et le Conseil des Etats BGE 82 II 477 (483):
admirent le système du projet en ce qui concerne la communauté de biens et décidèrent en conséquence que les époux qui adopteraient ce régime devraient laisser aux descendants du conjoint prédécédé au moins le quart des biens formant la communauté au moment du décès; pour les autres régimes, ils modifièrent en revanche le projet et ajoutèrent à l'art. 204 un deuxième alinéa statuant que, hormis le cas de la communauté universelle, le droit des époux de disposer par contrat de mariage n'est limité que par les règles sur la réserve (Bulletin sténographique officiel de l'Assemblée fédérale 1905, Conseil national p. 691-695, Conseil des Etats p. 1103-1105). La disposition de ce deuxième alinéa ne figure cependant plus dans le texte définitif du code civil arrêté en vote final par les Chambres fédérales selon les propositions de la commission de rédaction, et le premier alinéa a passé au chapitre consacré à la communauté de biens où il est devenu le deuxième alinéa de l'art. 226 CC, les autres articles qui constituaient le chapitre sur le contrat de mariage étant placés dans les dispositions générales sur le régime matrimonial. La Cour cantonale considère que la disparition de ce deuxième alinéa de l'art. 204 du projet ne saurait signifier que la limitation du droit de disposer des époux eût été abandonnée. A son avis, comme le texte définitif de la loi se borne à fixer une réserve spéciale pour la communauté de biens, la réserve successorale ordinaire vaut pour les libéralités contenues dans des contrats de mariage conclus par des conjoints soumis à d'autres régimes. Elle estime en conséquence que, selon la genèse de la loi, les règles sur la réserve héréditaire doivent être considérées comme applicables aux contrats de mariage portant sur la répartition du bénéfice de l'union conjugale, conclus en conformité de l'art. 214 al. 3 CC.
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Cette conclusion ne peut être admise. Il ne suffit pas en effet d'examiner les travaux législatifs qui concernent l'art. 204 du projet du Conseil fédéral, mais il faut encore se pencher sur la genèse de l'art. 214 CC, en particulier BGE 82 II 477 (484):
de son troisième alinéa. Le premier avant-projet partiel de 1893 ne contient aucune disposition sur le partage du bénéfice par convention passée entre les époux mariés sous le régime de l'union des biens; il prévoit uniquement à l'art. 162 qu'en cas de prédécès du mari, la moitié du bénéfice échoit à la femme outre son droit de succession. L'art. 241 de l'avant-projet de 1896 attribue le bénéfice au mari ou à ses héritiers, mais réserve le droit de la femme ou de ses descendants d'en réclamer une quote-part, s'il provient, pour un quart au moins, des apports ou du travail de la femme; selon l'art. 243, à défaut de convention entre les époux, il appartient au juge de statuer sur les contestations touchant la part du bénéfice ou du déficit attribuée à la femme ou à ses héritiers. L'avant-projet du Département fédéral de justice et police de 1900 prévoit, à l'art. 242, que le bénéfice appartient au mari ou à ses héritiers, mais que la femme ou ses descendants peuvent en réclamer une part proportionnelle si le bénéfice provient aussi du revenu des apports ou du travail de la femme; aux termes de l'art. 244, la part de la femme ou de ses héritiers au bénéfice ou au déficit peut être réglée par une convention entre les époux, faute de quoi le juge statue librement sur les contestations. Selon l'Exposé des motifs de cet avant-projet (p. 176) "la forme du contrat de mariage n'est pas nécessaire pour une convention de cette sorte"; le rapporteur s'est exprimé dans le même sens à la Commission d'experts lors de l'examen des art. 240 à 244 de l'avant-projet (Commission d'experts 1901-1902, I p. 228). La Commission d'experts décida de revenir au système de la détermination fixe de la part au bénéfice de la femme ou de ses descendants et de celle du mari ou de ses héritiers, et supprima en conséquence l'art. 244 (loc. cit. p. 231, 232); à cette occasion, le rapporteur déclara que les conjoints pourraient modifier la répartition légale en observant la forme du contrat de mariage; la part du mari ou de ses ayants cause fut arrêtée aux deux tiers du bénéfice et celle de la femme ou de ses descendants, BGE 82 II 477 (485):
au tiers (loc. cit. p. 233). L'avant-projet de 1903 (art. 242) et le projet du Conseil fédéral (art. 230) adoptèrent cette proportion pour le partage du bénéfice, sans prévoir de disposition au sujet des modifications dont les époux pourraient convenir. Lors de la discussion du projet au Conseil national, il ne fuut pas question des stipulations passées entre époux au sujet de la répartition du bénéfice. C'est le Conseil des Etats qui ajouta à l'art. 230 du projet un troisième alinéa ainsi conçu: "On pourra convenir par contrat de mariage d'une autre répartition du bénéfice et du déficit". Le rapporteur de la commission exposa à ce propos que les règles de l'art. 230 n'étaient pas de droit impératif mais que les époux avaient la faculté de modifier par contrat de mariage, dans une proportion laissée à leur volonté ("in beliebigem Umfange"), la répartition du bénéfice ou du déficit (Bulletin sténographique officiel de l'Assemblée fédérale, 1905, Conseil des Etats, p. 1140). L'art. 230 du projet modifié par le Conseil des Etats est devenu, après des améliorations rédactionnelles, l'art. 214 CC. Si l'on rapproche cette déclaration reconnaissant la liberté des conjoints d'aménager à leur gré le partage du bénéfice de l'union conjugale du fait que les conventions portant sur cet objet ne sont jamais mentionnées dans les débats de la Commission d'experts ou des Chambres fédérales, ni dans l'Exposé des motifs ou le Message du Conseil fédéral, lorsqu'est traitée la question des limites fixées aux contrats de mariage par les règles sur la réserve, et qu'inversement il n'est fait aucune allusion à ces limites dans les discussions sur la répartition conventionnelle du bénéfice, on doit admettre que les travaux préparatoires ne permettent pas de conclure que l'attribution par contrat de mariage de la totalité du bénéfice à l'un ou l'autre conjoint soit soumise à réduction en vertu des dispositions sur la réserve.
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Au demeurant, selon les principes généraux d'interprétation du droit suisse, les travaux préparatoires ne sont pas décisifs; le sens et la portée de la loi doivent être dégagés BGE 82 II 477 (486):
de son texte, de sa logique interne et de son but (RO 80 II 79, 79 I 20, 79 II 434, 78 I 29/30).
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L'art. 214 al. 1 CC qui fixe la part de bénéfice revenant à chaque époux au décès de l'un d'eux n'est cependant pas de droit impératif. Il s'agit au contraire d'une règle de droit dispositif: aux termes de l'art. 214 al. 3 CC, les conjoints peuvent, par contrat de mariage, prévoir une autre répartition. Lorsque les époux ont fait usage de cette faculté, la répartition dont ils sont convenus fait seule règle et se substitue au mode légal de partage. La loi ne limite pas la liberté des époux et ne soumet la convention sur la répartition du bénéfice à aucune restriction. Par exemple, elle n'exige pas que les dispositions prises par les conjoints aient leur fondement dans telle ou telle circonstance particulière au regard de laquelle la répartition légale n'apparaîtrait pas justifiée. Elle ne s'occupe pas des BGE 82 II 477 (487):
mobiles qui peuvent amener les époux à régler conventionnellement le sort du bénéfice, mais elle leur confère le droit de conclure sur cet objet un contrat de mariage dont les dispositions prendront la place de la règle inscrite à l'art. 214 al. 1 CC. La réglementation conventionnelle établie par les époux en vertu des pouvoirs que la loi leur attribue expressément les lie, ainsi que leurs ayants cause, au même titre que la réglementation légale à laquelle elle est substituée.
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Le bénéfice de l'union conjugale est le solde actif qui reste après déduction des dettes grevant les diverses masses de biens, attribution en nature des apports encore existants et règlement des récompenses pour les apports non représentés. Il est un résultat comptable établi au moment de la liquidation du régime matrimonial. Les termes employés par l'art. 214 al. 1 CC ne sont dès lors pas adéquats: le bénéfice, comme résultat comptable, ne peut pas appartenir à l'un ou l'autre époux. En réalité, la situation des conjoints ou de leurs ayants cause est la suivante: Le mari est propriétaire des biens matrimoniaux qui ne sont pas des apports de la femme (art. 195 al. 2 CC). Le bénéfice étant la valeur nette des biens matrimoniaux qui ne sont ni des apports ni des remplois, les dettes de l'union conjugale déduites, le mari n'acquiert aucun droit nouveau lors de la dissolution du régime; après la dissolution, il continue à être propriétaire des biens qui lui appartiennent conformément à l'art. 195 al. 2 CC. En revanche, un nouveau droit naît en faveur de l'épouse, savoir le droit à une part du bénéfice. Pendant le mariage, la femme n'a aucun droit au bénéfice, car celui-ci n'existe pas avant la dissolution du régime matrimonial. C'est dès lors seulement au moment de cette dissolution que le droit de l'épouse à une part du bénéfice prend naissance. Ce droit consiste dans une créance pécuniaire contre le mari. Bien que le cas de la dissolution de l'union des biens visée par l'art. 214 CC soit le décès de l'un des conjoints et que le droit de l'épouse à une part du bénéfice naisse ainsi à la mort du mari, la BGE 82 II 477 (488):
créance qui lui appartient de ce chef est de nature matrimoniale. Elle naît du calcul du bénéfice entrepris ensuite de la dissolution de l'union des biens et a sa cause dans le régime matrimonial. Le montant de la créance dépend de la part de bénéfice à laquelle chacun des conjoints peut prétendre. Cette part est fixée soit par la loi à raison d'un tiers à la femme et de deux tiers au mari, soit par l'acte juridique que les époux sont habilités à conclure pour la déterminer selon leur volonté. La répartition du bénéfice convenue par contrat de mariage, en conformité de l'art. 214 al. 3 CC, a sa cause juridique dans le régime matrimonial au même titre que celle qui est prévue par la loi. Alors même que la convention attribue le droit à la totalité du bénéfice à l'époux survivant, comme c'est le cas en l'espèce, elle ne constitue pas un acte à cause de mort mais reste un contrat entre vifs de droit matrimonial. La mort de l'un des époux n'est pas la cause de la convention, elle n'est qu'un terme d'exécution; la cause réside dans le régime matrimonial. C'est dès lors à tort que la Cour cantonale a considéré le contrat de mariage litigieux comme une libéralité à cause de mort réductible en vertu de l'art. 522 CC.
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Par ailleurs, les libéralités à cause de mort ne peuvent être faites que par disposition pour cause de mort. Or, par disposition pour cause de mort le code civil entend exclusivement le testament et le pacte successoral (art. 481, 498, 512 CC; ESCHER, Das Erbrecht, p. 205, note 2). Il s'ensuit que l'attribution de la totalité du bénéfice à l'époux survivant par contrat de mariage ne saurait constituer une libéralité à cause de mort et qu'en conséquence les règles sur la réduction des dispositions pour cause de mort ne lui sont pas applicables.
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Le contrat de mariage conclu par les époux Schlaeppi-Verdan ne tombe pas non plus sous le coup de l'art. 527 CC qui énumère les libéralités entre vifs sujettes à réduction. Les ch. 1 et 2 qui visent les libéralités faites à titre d'avancement d'hoirie ou de liquidation anticipée de droits hériditaires BGE 82 II 477 (489):
n'entrent pas en considération. Il en est de même du début du ch. 3 qui concerne les donations que le disposant pouvait librement révoquer. La seconde partie du ch. 3, qui se rapporte aux donations exécutées dans les cinq années antérieures au décès, n'est pas non plus applicable. De la part de la femme, la convention attribuant la totalité du bénéfice au mari ne peut être une donation, puisqu'au moment de la conclusion du contrat elle ne possède aucun droit au bénéfice et que, selon l'art. 239 al. 2 CO, le fait de renoncer à un droit avant de l'avoir acquis ne constitue pas une donation. Or, on ne saurait, d'une part, admettre l'application de l'art. 527 ch. 3 CC lorsqu'au décès du mari la totalité du bénéfice revient à la femme et, d'autre part, la rejeter lorsque c'est le mari qui a droit à tout le bénéfice à la mort de la femme. Il s'ensuit que la convention sur la répartition du bénéfice de l'union conjugale ne rentre pas dans les prévisions de l'art. 527 ch. 3 CC. L'art. 527 ch. 4 CC qui déclare sujettes à réduction les aliénations faites dans l'intention manifeste d'éluder les règles concernant la réserve ne saurait de même être appliqué à ce contrat. En le concluant, les époux ne font qu'user d'une faculté qui leur est expressément conférée par l'art. 214 al. 3 CC. L'exercice de ce droit n'est soumis à aucune restriction par la disposition qui l'institue, de sorte qu'il ne peut être assimilé à un acte accompli dans l'intention manifeste d'éluder des obligations légales.
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Dans le régime de la communauté de biens, l'art. 226 CC confère aux époux le droit de prévoir par contrat de mariage un mode de partage autre que le partage par moitié; il ne limite leur liberté qu'en faveur des descendants du conjoint prédécédé, lesquels ont droit dans tous les cas au quart des biens communs existant lors du décès. Les contrats fixant seulement la répartition du bénéfice, conclus entre les époux mariés sous l'union des biens, ne sauraient être soumis à réduction et la liberté des conjoints, restreinte ainsi en cette matière au profit de tous BGE 82 II 477 (490):
les héritiers réservataires. Il y aurait en effet une contradiction, dont on ne peut admettre l'existence dans la loi, à n'assurer qu'aux descendants du conjoint prédécédé une part aux biens communs en cas de partage de l'ensemble des biens des époux et à considérer comme réductibles en faveur de tous les réservataires les conventions portant sur le seul bénéfice de l'union conjugale. Il suit de là que ces conventions ne tombent pas sous le coup des règles du droit successoral sur la réduction des dispositions du défunt.
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On ne peut par ailleurs appliquer par analogie l'art. 226 al. 2 CC à la répartition conventionnelle du bénéfice réalisé par des époux mariés sous le régime de l'union des biens, car cette disposition vise une situation qui est différente de celle de l'art. 214 al. 3 CC: en particulier, dans la communauté universelle, le partage des biens communs épuise tout le patrimoine des époux, ce qui justifie la réserve d'un quart établie par l'art. 226 al. 2 CC en faveur des descendants du conjoint prédécédé, tandis que la répartition du bénéfice, dans l'union des biens, n'affecte que les économies faites par les époux et non pas tous les biens matrimoniaux.
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La jurisprudence inaugurée par l'arrêt RO 58 II 1 doit dès lors être maintenue et le contrat de mariage attribuant la totalité du bénéfice à l'époux survivant, considéré comme un acte entre vifs de droit matrimonial qui n'est pas soumis à réduction en vertu des dispositions du droit successoral.
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Selon la jurisprudence (RO 53 II 98/99, 81 II 423/425), les contrats de mariage sont soumis, comme les autres actes juridiques, aux limites établies par l'art. 2 al. 2 CC. L'exercice d'un droit est manifestement abusif lorsqu'il est contraire au but de ce droit. La liberté contractuelle prévue par l'art. 214 al. 3 CC tend à permettre aux époux d'aménager la répartition du bénéfice de l'union conjugale en considération de leurs intérêts réciproques, en particulier de corriger les effets du régime légal pour le conjoint survivant et d'assurer sa situation au point de vue matériel. Le fait que les époux avaient l'intention, en concluant le contrat BGE 82 II 477 (491):
de mariage, de se favoriser mutuellement ne suffit pas pour justifier l'application de l'art. 2 al. 2 CC. Pour qu'il y ait un abus manifeste de droit, il est nécessaire que la fin recherchée par les époux soit étrangère au but normal de la convention sur le partage du bénéfice prévue par l'art. 214 al. 3 CC, notamment que les conditions dans lesquelles le contrat a été conclu excluent qu'il ait été passé en vue de produire des effets conformes à la loi. En l'espèce, il ressort des constatations de la Cour cantonale que Marc-Robert Schlaeppi, dont le caractère autoritaire et emporté, les habitudes d'indépendance et les excès de boisson et de langage avaient rendu souvent la vie difficile à sa famille, avait su gré à la recourante de sa patience et de sa compréhension; il avait déclaré à ses amis qu'il se faisait du souci pour l'avenir de sa femme et qu'il voulait l'assurer au mieux; s'il avait eu certaines difficultés avec ses enfants, en particulier avec son fils, il n'exprima cependant jamais l'intention de les dépouiller au profit de sa seconde femme. En fait, il a laissé une fortune sur laquelle les intimés peuvent faire valoir leurs droits d'héritier. De plus, Marc-Robert Schlaeppi a épousé la recourante en 1936; en 1948, lorsque le contrat de mariage litigieux a été conclu, la vie commune avait duré douze ans, de sorte que l'on peut admettre que l'épouse a concouru à la réalisation du bénéfice de l'union conjugale. En outre, le contrat n'a pas été passé à la veille de la mort du mari; Marc-Robert Schlaeppi a vécu encore plus d'un an après sa conclusion et, au moment de la stipulation, il ignorait qu'il était atteint d'un cancer. Il résulte de ces faits que le contrat litigieux ne tombe en aucune façon sous le coup de l'art. 2 al. 2 CC et qu'il est valable. Le jugement attaqué doit en conséquence être réformé en ce sens que la créance résultant pour la recourante de l'attribution de la totalité du bénéfice de l'union conjugale n'est pas réductible, que ce bénéfice ne fait pas partie de la succession de Marc-Robert Schlaeppi dans laquelle la réserve de chacun des intimés est de 9/32, et qu'il revient en entier à la recourante.
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BGE 82 II 477 (492):
3. Le troisième chef de conclusions du recours tend tout d'abord (litt. a) à faire prononcer que les apports de Marc-Robert Schlaeppi sur lesquels le partage doit porter ne comprennent pas trente actions Ciba sur les soixante qui ont été inventoriées au décès, ces trente action rentrant dans le bénéfice de l'union conjugale.
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Selon les constatations de la Cour cantonale, Marc-Robert Schlaeppi était propriétaire de dix actions Ciba lors de son mariage et, à son décès, il en possédait soixante; en 1940 ou 1943, il avait souscrit dix actions nouvelles en utilisant le droit de souscription attaché à chacune des dix actions apportées en mariage; ce droit de souscription était alors coté en bourse 1045 fr.; Marc-Robert Schlaeppi avait payé, pour libérer ces nouvelles actions, 2010 fr. le 26 janvier 1943 et 8000 fr. le 28 janvier 1947; par la suite, la société Ciba a augmenté son capital au moyen de ses fonds propres, portant la valeur nominale de chaque action de 1000 fr. à 1500 fr. sans versement de la part des actionnaires, et divisé, en 1948, chaque titre de 1500 fr. en trois actions de 500 fr. Le jugement attaqué considère toutes les actions Ciba inventoriées au décès comme des apports de feu Schlaeppi tout en admettant à la charge de celui-ci une récompense de 10 000 fr. en faveur de la masse constituée par le bénéfice.
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Cette opinion n'est pas fondée. Dans le régime de l'union des biens, le code civil distingue trois masses de biens: les apports, les biens matrimoniaux et les biens réservés. Ces derniers n'entrent pas en considération ici. Les apports de la femme sont les biens qui lui appartenaient lors de la conclusion du mariage ou qui lui échoient pendant le mariage par succession ou à quelque autre titre gratuit (art. 195 al. 1 CC) ainsi que les biens acquis à titre de remploi. Cette notion vaut également par analogie pour les apports du mari (RO 50 II 433). Les biens matrimoniaux sont constitués par les biens que les époux possédaient au moment de la célébration du mariage et ceux qu'ils acquièrent par la suite, les biens réservés exceptés (art. 194 CC). Le mari BGE 82 II 477 (493):
est propriétaire de ses apports et de tous les biens matrimoniaux qui ne sont pas des apports de la femme (art. 195 al. 2 CC).
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Les trente actions Ciba litigieuses n'appartenaient pas au mari lors de la conclusion du mariage. Il les a acquises ultérieurement. Le droit de souscription qu'il a exercé à cet effet faisait cependant déjà partie de chacune des dix actions qu'il a apportées en mariage. Le droit de souscription d'actions nouvelles n'est en effet ni un fruit, ni un produit de l'action, mais il est une partie de l'action. C'est la compensation d'une perte pécuniaire et d'une perte d'influence éventuelle. Il permet à l'actionnaire de maintenir sa position financière et de conserver l'influence qu'il détient dans l'administration. L'action gratuite est également une partie du droit primitif de l'actionnaire (ROSSET, Du droit préférentiel de souscription d'actions, Recueil de travaux Neuchâtel, p. 229, 236, 238, 240). C'est la raison pour laquelle, en cas d'usufruit, les actions nouvelles gratuites appartiennent au propriétaire des actions anciennes et non à l'usufruitier (RO 46 II 473). Il n'en reste pas moins qu'une fois acquises, les nouvelles actions ont une existence indépendante des anciennes. En l'espèce, la propriété de dix actions apportées par Marc-Robert Schlaeppi lors la conclusion du mariage n'impliquait pas nécessairement la souscription et la libération de dix nouvelles actions. Celles-ci sont juridiquement autre chose que les dix anciennes actions.
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Les dix actions nouvelles acquises en cours de mariage l'ont été non pas gratuitement mais à titre onéreux. Certes, le mari a pu user du droit de souscription attaché à chacune des dix actions constituant ses apports, mais pour obtenir les dix nouvelles il a dû verser 10 000 fr. et, selon les constatations de la Cour cantonale, son compte courant auprès du Crédit suisse a été débité de cette somme. Les nouvelles actions n'ont pas été acquises non plus à titre de remploi. Pour qu'il y ait remploi, il faut que, par la volonté des parties, les choses nouvelles aient remplacé dans la fortune de l'époux propriétaire d'autres valeurs du même BGE 82 II 477 (494):
genre vendues ou remboursées; le remploi est l'utilisation de deniers provenant de la réalisation d'un apport par l'achat de valeurs du même genre économique (RO 75 II 276/277). En l'espèce, les nouvelles actions n'ont pas remplacé d'autres titres du mari. Elles sont venues s'ajouter aux anciennes et n'ont pas été acquises avec des deniers appartenant aux apports, mais payées avec de l'argent frais que le mari s'est procuré par un emprunt. Il s'ensuit que les dix nouvelles actions Ciba souscrites et libérées en cours de mariage ne sont pas un apport de Marc-Robert Schlaeppi.
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Ces dix nouvelles actions de 1000 fr. qui sont devenues par la suite trente actions de 500 fr. constituent des biens matrimoniaux; comme elles ne sont pas des apports de la femme, elles appartiennent au mari (art. 195 al. 2 CC). Elles doivent cependant être prises en considération pour le calcul du bénéfice de l'union conjugale. Dans les biens matrimoniaux qui sont la propriété du mari il faut distinguer en effet ses apports des autres biens. Seuls les apports sont soustraits pour le calcul du bénéfice; les autres biens, savoir les produits ou revenus des apports des deux époux et les choses acquises à titre onéreux, sont en revanche portés en compte à leur valeur à la dissolution du régime matrimonial. Le bénéfice représente en effet la valeur nette des biens matrimoniaux après reprise des apports et déduction des dettes de l'union conjugale. Les trente actions Ciba qui ont été acquises par Marc-Robert Schlaeppi en cours de mariage et qui étaient sa propriété font ainsi partie de sa succession, mais doivent être comprises, à leur valeur au moment du décès, dans les biens sur lesquels se calcule le bénéfice de l'union conjugale revenant à la recourante. La succession de Marc-Robert Schlaeppi n'a pas droit par ailleurs à une récompense en raison des droits de souscription utilisés pour acquérir les nouvelles actions. Ces droits sont en effet remplacés dans le patrimoine du mari par les actions qu'ils ont permis d'obtenir et qui font partie de la masse successorale.
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