BGE 98 II 211 |
32. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 27 juin 1972 dans la cause Union des camionneurs de Renens contre Caisse d'épargne et de crédit, Carrosserie moderne SA et U. Emery et Cie. |
Regeste |
1. Art. 64 Abs. 2 OG: Das Bundesgericht kann von Amtes wegen die Eintragungen des Handelsregisters mit deren Veröffentlichung im SHAB berücksichtigen, da sie notorisch sind (Erw. 4 a). |
3. Art. 32 f. OR: Das Organ ist nicht Vertreter der juristischen Person, sondern drückt ihren Willen unmittelbar aus. Die natürliche Person kann, soweit ihre eigenen Interessen nicht in Frage stehen, zwischen zwei juristischen Personen, deren Organ sie ist, Rechtsgeschäfte abschliessen (Erw. 8). |
4. Art. 97 Abs. 1 OR: Der Aufbewahrer, der die hinterlegte Sache nicht zurückgeben kann, hat den daraus entstehenden Schaden zu ersetzen, wenn er nicht beweist, dass ihm keinerlei Verschulden zur Last falle (Erw. 9). |
5. Art. 44 und 99 Abs. 3 OR: Herabsetzung des Schadenersatzes, den eine juristische Person einer andern wegen Nichterfüllung des Vertrages schuldet, sofern letztere einer natürlichen Person, die Organ beider Parteien ist, zugerechnet werden muss (Erw. 10). |
Sachverhalt |
A.- Alcide Oppliger était administrateur unique d'A. Oppliger SA, entreprise de transports et de combustibles à Bussigny. Cette société a conclu un concordat par abandon d'actif, homologué le 3 septembre 1968. Elle est créancière pour une somme de 10 841 fr. de l'Union des camionneurs de Renens et environs (UCR). Celle-ci est une association régionale de maîtres camionneurs, fondée en 1957, dont Alcide Oppliger a été non seulement le président de 1965 à 1968, mais encore, en fait, le caissier jusqu'en mai 1968. La créance précitée ayant été contestée à l'inventaire par l'UCR, qui invoque la compensation, la Caisse d'épargne et de crédit, la Carrosserie Moderne SA et U. Emery et Cie, toutes à Lausanne, se sont fait céder les droits de la masse au sens de l'art. 260 LP.
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En sa qualité de président de l'UCR et au nom de celle-ci, Oppliger a commandé en 1967 et 1968 à Pétrole Distribution SA du carburant destiné aux membres de l'association. Comme cette dernière ne disposait ni de citerne ni de pompe, ce diesel était livré dans une citerne d'A. Oppliger SA, où certains membres venaient s'approvisionner eux-mêmes, indiquant sur une ardoise les quantités prélevées, qui leur étaient ensuite portées en compte par l'UCR, et généralement compensées avec le prix des transports qu'ils exécutaient pour le compte de celle-ci. A. Oppliger SA a prélevé une indemnité de 1 ct. par litre pour le contrôle et le pompage du diesel. Cette rémunération, qui figure sur une facture de la société anonyme à l'UCR du 30 novembre 1967 et dans un décompte de l'UCR à la société anonyme du 30 avril 1968, tous deux incontestés, aurait été décidée par Oppliger seul, à l'insu des autres membres de l'UCR.
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Oppliger s'est démis de sa fonction de président de l'UCR le 28 juin 1968. L'assemblée générale extraordinaire de cette association a accepté sa démission le 6 septembre suivant, mais elle a refusé de lui donner décharge pour sa gestion, n'ayant pu obtenir une reddition claire et complète des comptes. Ni Oppliger, ni sa société anonyme n'ont été en mesure de justifier les différences entre les quantités de diesel livrées pour le compte de l'UCR et celles qui ont été vendues aux membres de l'association. Aucune trace du carburant manquant n'a été découverte au cours du concordat. L'UCR estime sa perte à 12 412 fr. qu'elle entend mettre à la charge d'A. Oppliger SA et compenser avec les créances de la masse dont par ailleurs elle ne conteste pas le bien fondé. |
B.- Les demanderesses ont actionné solidairement l'UCR en paiement de factures échues pour 10 841 fr., plus intérêts et frais. Cette somme a été ramenée en cours d'instance à 10 197 fr. 80.
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C.- Par jugement du 4 février 1972, le Tribunal cantonal vaudois a admis la demande pour le montant réclamé.
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D.- L'UCR recourt en réforme au Tribunal fédéral. Elle maintient son exception de compensation et reprend ses précédentes conclusions.
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Les intimées concluent au rejet du recours.
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Extrait des considérants: |
Il est constant qu'aux termes de l'art. 22 des statuts de l'UCR, le comité représente l'association envers les tiers et que celle-ci est engagée par la signature du président avec un autre membre du comité.
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En ce qui concerne A. Oppliger SA, les deux parties prétendent l'une et l'autre ignorer qui aurait agi pour la société anonyme; il ne serait ni allégué ni prouvé qu'Oppliger avait les pouvoirs de l'engager seul et qu'il ait lui-même représenté la société anonyme. Cependant, l'autorité cantonale a constaté que le carburant était livré dans une citerne "de l'entreprise d'Alcide Oppliger, la société A. Oppliger SA". Il en résulte que la société anonyme était l'affaire d'Oppliger. De plus, il ne faut pas méconnaître la publicité et la notoriété que le législateur fédéral attache à l'inscription au registre du commerce et à sa publication dans la FOSC (art. 930 ss. CO). Selon l'art. 932 al. 2, l'inscription est opposable aux tiers dès la publication. L'art. 933 al. 1 dispose que les tiers ne peuvent se prévaloir de leur ignorance de l'inscription. Or il résulte de la FOSC du 20 mars 1952 qu'Alcide Oppliger était l'administrateur unique d'A. Oppliger SA, avec signature individuelle. |
b) "Au sein de l'UCR, Alcide Oppliger s'est occupé personnellement des commandes de carburant destiné aux membres." "En sa qualité de président de cette association, il a commandé du diesel... au nom de l'UCR" que le fournisseur "facturait à la défenderesse", qui le payait. Ces faits découlent explicitement du jugement déféré, et les parties au procès ne les mettent pas en doute. Le carburant livré à l'UCR était ainsi sa propriété et le restait jusqu'à sa revente aux membres de l'UCR.
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c) L'UCR "ne disposant d'aucune citerne ou pompe pour entreproser et livrer ce diesel, Pétrole Distribution SA le livrait dans une des citernes de l'entreprise d'Alcide Oppliger, la société A. Oppliger SA", où certains membres de l'association venaient "se servir". L'UCR ne disposait pas des installations indispensables à l'entreposage du mazout et à la livraison à ses membres. C'est pourquoi elle a recouru aux services de l'entreprise de son président A. Oppliger SA Celle-ci mettait ses propres installations à disposition. Oppliger ne pouvait l'ignorer. L'entreposage n'a pu se faire que sur l'ordre du propriétaire du carburant et avec l'accord nécessaire du propriétaire de la citerne et de la pompe. Ce dernier, selon les constatations souveraines du juge du fait, était la société anonyme, et non pas Oppliger personnellement. Cette société seule d'ailleurs était membre de l'UCR et non pas Oppliger, selon l'art. 5 des statuts de l'UCR.
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d) Il est constant qu'A. Oppliger SA a facturéle 30 novembre 1967 à l'UCR 350 fr. "pour pompe à mazout - 35 000 l." et que, dans un décompte du 30 avril 1968 de l'UCR, la société anonyme a été créditée de 643 fr. 20 "pour pompage et contrôle de 64 320 l. à 0,01". Le Tribunal cantonal vaudois constate encore que "la société A. Oppliger SA a prélevé à plusieurs reprises 1 ct. par litre de diesel à titre de frais de contrôle et de pompage". |
Il en découle qu'effectivement une rémunération de 1 ct. par litre de diesel a été exigée par la société anonyme et payée par l'UCR.
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a) L'hypothèse du prêt à usage doit être écartée d'emblée, du moment que par définition ce contrat comporte la cession gratuite de l'usage de la chose (art. 305 CO) et qu'en fait le caractère onéreux des arrangements pris est établi et constaté.
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b) N'est pas plus fondée la thèse du bail à loyer. Sans doute ce contrat est-il onéreux par définition (art. 253 CO). Mais il est surtout caractérisé par l'obligation du bailleur de céder pour un certain temps l'usage d'une chose au preneur, moyennant le paiement par celui-ci d'une location. L'élément essentiel du loyer fait ici défaut. Il faut entendre sous ce terme une rémunération à raison de la durée de l'usage de l'objet loué, payable aux termes fixés par le contrat, l'usage local ou la loi (art. 262 CO). Or aucune des parties n'a allégué qu'un loyer quelconque ait été convenu, ni même que la citerne et la pompe auraient été louées, moyennant une location déterminée payable à un terme fixé. Le paiement prouvé d'indemnités de 1 ct. par litre manipulé pour "frais de contrôle et de pompage" demeure inexplicable dans l'hypothèse d'un bail de la citerne. De plus, aucun indice au dossier n'indique que le prétendu bailleur aurait abandonné l'usage de la citerne et de la pompe et que le preneur en aurait pris possession (art. 254 al. 1 et 253 CO; RO 41 III 230 consid. 2 et 40 III 330). Cela apparaît d'autant plus invraisemblable que les installations mises à disposition restaient en fait sous la garde de l'entreprise A. Oppliger SA, qui seule en avait pratiquement le contrôle. L'UCR ne disposait pas elle-même de main-d'oeuvre; l'exploitation de cette activité de distributeur eût nécessité la mise sur pied d'une organisation dispendieuse pour le service de la station, alors que la société anonyme exploitait sur place un commerce qui la mettait à même d'assumer un certain contrôle sans grands frais ni inconvénients. Rien ne permet d'exclure non plus que la citerne n'ait pas été utilisée simultanément pour l'usage de la société anonyme. Celle-ci pouvait fort bien autoriser l'entreposage du carburant de l'UCR avec le sien propre, le décompte des quantités revenant à l'UCR résultant d'un simple contrôle comptable. Ainsi ni la délivrance de l'objet loué, ni l'existence d'un loyer, deux éléments nécessaires du bail, ne sont prouvées. |
c) Quant à l'hypothèse d'une gestion d'affaires, envisagée par les premiers juges, elle n'entre pas en ligne de compte dès lors qu'il existe un contrat valable entre la société anonyme et l'UCR. De toute manière, le gérant d'affaires aurait dû en tout état de cause passer lui-même pour le compte du maître un contrat qui eût été fatalement un bail, un prêt ou un dépôt.
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a) Il ne serait pas établi que la société anonyme "avait l'obligation de veiller sur les quantités de diesel livrées ... ni de contrôler les prélèvements de carburant faits par les membres de l'UCR". Un tel accord n'est toutefois pas un élément constitutif du dépôt. C'est la loi qui prescrit, à défaut de stipulations divergentes des parties, les effets du contrat de dépôt et les obligations réciproques des parties. Or le contrat de dépôt - régulier ou irrégulier - implique sans autre le droit du déposant de réclamer la restitution de la chose à la fin du contrat et le devoir corollaire du dépositaire de la rendre, à peine de dommages-intérêts (art. 475 CO; RO 58 II 351, 97 II 362 et cit.). Quant à l'obligation accessoire du contrôle des prélèvements, elle découle naturellement du système adopté par les parties d'un pompage du mazout à la colonne indiquant automatiquement au compteur les quantités prélevées. L'adoption de ce système résulte du reste incontestablement de la facture précitée de la société anonyme et du relevé de compte de l'UCR. |
b) N'est pas non plus décisif le fait que "l'instruction n'a pas établi que cette rétribution (de 1 ct. par litre de diesel entreposé) ait fait l'objet d'une convention entre A. Oppliger SA et l'UCR". En effet, le contrat de dépôt est présumé gratuit, une rémunération n'est due qu'en vertu d'une stipulation expresse ou si, eu égard aux circonstances, le dépositaire devait s'attendre à être rémunéré (art. 472 al. 2 CO). Ainsi l'absence d'une convention sur la rémunération ne saurait exclure la conclusion d'un contrat de dépôt.
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Il est d'ailleurs évident in casu que, s'agissant de professionnels des transports, une rétribution doit être considérée comme usuelle et que le juge devrait en déterminer l'importance même à défaut de convention. Il faut admettre dès lors que cette rémunération a été convenue ou ratifiée à tout le moins tacitement ou par actes concluants (art. 1er CO). Quant au montant de la rémunération, 1 ct. par litre de carburant entreposé et manipulé, il était parfaitement raisonnable et adéquat. Il est constant qu'aucun des intéressés ne l'a mis en doute, ni dans son principe ni dans sa quotité, si ce n'est les demanderesses, à l'audience du jugement seulement, pour les besoins de leur argumentation. Cette manifestation de volonté tardive ne saurait influencer la ratification qui est intervenue par l'UCR.
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c) Le fait qu'"il résulte du dossier pénal que ce pourcentage a été décidé par Alcide Oppliger seul, à l'insu des autres membres de l'UCR" importe peu quant à la qualification juridique du contrat. Cet argument ne met en cause que la qualité pour agir d'Oppliger pour le compte de l'UCR. L'autorité cantonale l'oppose à tort aux facture et relevé de compte précités, desquels il ressort qu'une rétribution a été facturée et encaissée sans réserve pour le contrôle et le pompage. |
La qualité d'administrateur unique d'Oppliger lui permettait d'engager valablement la société anonyme. L'art. 718 al. 1 CO l'autorisait à passer tous les actes que pouvait impliquer le but social, et l'al. 2 rendait la société anonyme responsable des actes illicites commis par lui dans sa gestion, ce qui sous-entend bien que la société anonyme reste liée envers les tiers par de tels actes. Tel serait le cas de dépassements de compétences d'une personne autorisée. Or, à l'évidence, la prise en dépôt de carburant était couverte par le but social.
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Les demanderesses n'ont même pas allégué qu'Oppliger aurait agi dans cette affaire d'une manière contraire aux intérêts et à la volonté de la société anonyme, ce qui n'était d'ailleurs visiblement pas le cas. Une ratification par la société anonyme n'était même pas nécessaire. L'eût-elle été, elle serait intervenue subséquemment par actes concluants, à savoir par l'encaissement des factures. Le contrat oblige donc la société.
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Il est superflu de rechercher si Oppliger avait le pouvoir d'agir seul au nom de l'UCR, du moment que cette association s'est toujours prévalue du contrat passé par son président. Le comportement de la défenderesse avant et en cours de procédure vaut ratification conformément à l'art. 38 CO (RO 93 II 307 consid. 4; 95 II 455 consid. 6).
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9. La nature du contrat étant un dépôt irrégulier de caractère onéreux, le dépositaire qui ne peut rendre la chose doit réparer les dommages qui en résultent, à moins de prouver qu'aucune faute ne lui est imputable, selon la règle générale de l'art. 97 al. 1 CO. L'obligation de rendre se transforme alors en celle d'indemniser (RO 43 II 646 consid. 1 i.f., 97 II 362 et cit.). |
Au cas particulier, les demanderesses n'ont pas établi ni même allégué qu'aucune faute ne serait imputable à la société anonyme. Au contraire, les constatations de fait de l'autorité cantonale démontrent que sa gestion a été déficiente et fautive. C'est moins le système choisi, qui reposait sur la confiance qui était faite aux membres de l'UCR qui prélevaient apparemment eux-mêmes le mazout dont ils avaient besoin, qui est critiquable, que le désordre patent qui régnait dans les affaires de la société anonyme et la gestion de son administrateur. La disparition de pièces comptables, la mauvaise tenue des archives et de la comptabilité, l'incapacité de justifier les différences, celle de rendre des comptes de façon claire et complète, sont autant de circonstances qui permettent de conclure à une faute imputable au dépositaire.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
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