100 II 278
Urteilskopf
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40. Arrêt de la IIe Cour civile, du 7 novembre 1974, dans la cause P contre P
Regeste
Art. 262 Abs. 1 ZGB; Art. 139 OR
1. Der im Zivilstandsregister eingetragene Vater ist berechtigt, vom Richter die Nichtigerklärung der Anerkennung eines ausserehelichen Kindes wegen Irrtums oder Täuschung zu verlangen, wenn er nachweisen kann, dass seine Vaterschaft ausgeschlossen ist (Erw. 1).
2. Die Anfechtungsfrist beginnt in diesem Fall von der Entdeckung des Irrtums oder der Täuschung an zu laufen (Erw. 2a).
3. Ist die Verwirkungsfrist des Art. 262 ZGB anzuwenden? Frage offen gelassen (Erw. 2b).
4. Zeitpunkt, in dem die Umstände, welche die Unmöglichkeit der Vaterschaft beweisen, bekannt geworden sind (Erw. 2c und d).
5. Anwendung von Art. 139 OR (Erw. 3).
A.- En été 1963, P. et B. ont accompli à Losone (Tessin) une école de recrues comme caporaux. A la plage, ils ont fait la connaissance de dame C. Bien que mariée et mère d'une fillette, dame C. n'a pas tardé à accorder ses faveurs à B. P. l'a su.
En juin 1964, P. est revenu à Losone pour accomplir une école de recrues comme lieutenant. Il a revu dame C. et a entretenu des relations intimes avec elle dès le mois de juillet 1964. Le 2 ou le 3 août, B., qui était de passage à Losone, a eu lui aussi des rapports sexuels avec C., à l'insu de P.
A la fin du mois d'août 1964, dame C. a annoncé à P. qu'elle était enceinte de ses oeuvres. P. ne l'a pas mis en doute. Le 16 avril 1965, elle a accouché d'un garçon qui a été prénommé A. et inscrit dans les registres de l'état civil (registre des naissances; registres des familles) comme enfant légitime des époux C.
Bien que l'enfant ait eu, comme B., des cheveux roux, dame C. a été d'emblée persuadée de la paternité de P. A dire de tiers, l'enfant lui ressemblait de façon frappante. D'autre part, des cousins de dame C. avaient les cheveux roux; elle-même avait aussi, d'après son médecin, une nuance rousse dans la couleur de ses cheveux.
A B. - qui l'a questionnée à plusieurs reprises -. elle a toujours affirmé que l'enfant était le fils de P.
Pour régulariser la situation, celui-ci a poussé sieur C. au divorce, qui a été prononcé le 2 août 1966. En cours de procédure, dame C. a encore certifié sous serment que l'enfant était le fils naturel de P.
P. et dame C. se sont mariés le 23 septembre 1967. Ils étaient toujours persuadés que le petit A. était leur fils. Aussi, toujours en vue de régulariser la situation, P. a financé une action en désaveu, qui a été introduite au nom de l'enfant par un curateur ad hoc. Le désaveu a été prononcé le 10 mars 1969 et, le 24 avril, P. et sa femme ont légitimé l'enfant.
Au début de l'année 1970, le petit A. a dit à ses grandsparents
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paternels, puis à des amis de la famille, que P. n'était pas son vrai père. Ces propos ont fait réfléchir celui-ci. Il a fait procéder à une expertise. Le rapport d'analyse des sangs, du 7 août 1970, lui a révélé que sa paternité était exclue avec une probabilité confinant à la certitude. A la suite du dépôt de ce rapport, la femme de P. lui a avoué pour la première fois avoir eu des relations intimes avec B. en août 1964.Le 14 octobre 1970, il a en outre introduit une action en désaveu devant le Tribunal cantonal neuchâtelois, Neuchâtel étant un de ses lieux d'origine. Il a demandé au tribunal de constater qu'il n'était pas le père du petit A., d'annuler la légitimation intervenue le 24 avril 1969 et d'ordonner la rectification des registres de l'état civil.
Le 19 novembre 1970, le Tribunal de première instance de Genève a prononcé le divorce des époux P. Il a confié à la mère la garde du petit A. et la puissance paternelle sur lui, et a donné acte aux parties de l'engagement de P. de verser une contribution à l'entretien de l'enfant jusqu'à droit connu sur le sort de l'action ouverte à Neuchâtel.
Le 1er mai 1972, le Tribunal cantonal de Neuchâtel a déclaré la demande de P. irrecevable pour cause d'incompétence à raison du lieu.
C.- Après avoir requis à nouveau la nomination d'un curateur pour l'enfant, P. a alors ouvert devant le Tribunal de première instance de Genève une nouvelle action, dans laquelle il a pris des conclusions identiques à celles qu'il avait formulées devant le Tribunal cantonal neuchâtelois, demandant toutefois, en plus, à être liberé de l'engagement de contribuer aux frais d'entretien de l'enfant.
Le 22 mars 1973, le Tribunal de Genève a rejeté l'action en annulation de légitimation et maintenu la pension en faveur de l'enfant fixée par le jugement de divorce.
D.- Sur recours de P., par arrêt du 3 mai 1974, la Deuxième Chambre de la Cour de justiice du canton de Genève a réformé le jugement de première instance, prononcé l'annulation de la légitimation, ordonné la modification correspondante des registres de l'état civil, liberé P. dès l'entrée en force de chose jugée de l'arrêt, de son obligation d'entretien envers l'enfant, fixée par le jugement de divorce du 19 novembre 1970, et compensé les dépens.
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E.- Contre cet arrêt, qui a été notifié aux parties le 13 mai 1974, l'enfant A., représenté par son curateur, a recouru en réforme au Tribunal fédéral. Il conclut à la réforme de l'arrêt déféré, au rejet de l'action en annulation de la légitimation, au maintien de l'obligation d'entretien de l'intimé selon le jugement de divorce du 19 novembre 1970, frais et dépens à la charge de l'intimé pour les instances cantonales et la procédure devant le Tribunal fédéral.
L'intimé conclut au rejet du recours et à la confirmation de l'arrêt attaqué, avec suite de frais et dépens.
L'assistance judiciaire gratuite a été accordée au recourant pour la procédure de réforme, le 24 juin 1974.
Considérant en droit:
1. Selon l'art. 262 al. 1 CC, les héritiers présomptifs des père et mère et l'autorité compétente du canton d'origine du père peuvent attaquer la légitimation dans les trois mois à compter du jour où ils en ont eu connaissance; ils ont à établir que l'enfant n'est pas issu de ses prétendus parents. Cette disposition ne mentionne pas les parents qui ont légitimé l'enfant parmi les personnes qui ont qualité pour intenter l'action en annulation de la légitimation. Mais la jurisprudence et la doctrine leur ont reconnu cette qualité lorsque leur déclaration est entachée d'un vice de la volonté, causée par l'erreur, le dol ou la violence (art. 23 ss. CO, applicable en vertu de l'art. 7 CC; RO 40 II 299, 86 II 449/450; SILBERNAGEL, n. 2, EGGER, n. 3 et HEGNAUER, n. 11 ad art. 262 CC; cf., pour l'action en annulation de reconnaissance, RO 79 II 28 et les arrêts cités et, en matière de passé-expédient sur une action en recherche en paternité, RO 82 II 192).
Le fait que l'enfant ne soit en réalité pas issu de son prétendu père ne constitue pas une cause de nullité absolue, mais une cause d'annulabilité de la légitimation (RO 86 II 449 consid. 4).
En l'espèce, il est constant que l'intimé était dans l'erreur lorsqu'il a déclaré à l'officier de l'état civil qu'il était le père du recourant et qu'il l'avait eu avec son épouse avant le mariage (art. 259 al. 1 CC, 98 OEC). Il ressort des faits retenus par la cour cantonale qu'aussi bien P. que sa femme étaient convaincus que le recourant était leur fils commun.
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Même si l'on devait admettre que la légitimation, comme la reconnaissance d'un enfant naturel, emporte renonciation à l'exceptio plurium et à l'exception d'inconduite, le père selon les registres de l'état civil est en droit de faire prononcer par le juge l'annulation de ces actes pour cause d'erreur ou de dol, en prouvant que sa paternité est exclue (RO 79 II 30, 82 II 193).
L'intimé dispose dès lors d'une action en annulation de la légitimation pour vice de la volonté.
2. a) L'action en annulation d'une légitimation de l'art. 262 al. 1 CC est soumise à un délai de péremption de trois mois à compter du jour où les personnes ayant qualité pour agir selon cette disposition ont eu connaissance de la légitimation. Cependant, lorsque l'action est fondée sur un vice de la volonté invoqué par la personne qui, selon les registres de l'état civil, est présumée être le père, le délai court dès que l'erreur ou le dol a été découvert (cf. art. 31 al. 2 CO; SILBERNAGEL, n. 4, EGGER, n. 5 et HEGNAUER, n. 17 ad art. 262 CC).
b) Le Tribunal fédéral a jugé que l'action en annulation d'une reconnaissance d'un enfant naturel intentée pour cause de vice de la volonté par l'auteur de la reconnaissance n'est pas soumise au délai de péremption de trois mois prévu à l'art. 306 CC pour l'action conférée aux tiers (autorité du canton d'origine du père; tout intéressé) mais, en vertu de l'art. 7 CC, aux dispositions du code des obligations, soit à l'art. 31 CO; elle doit ainsi être introduite dans l'année à partir de la découverte de l'erreur ou du dol.
Dans la mesure où l'intimé a ouvert instance en annulation de la légitimation dans les trois mois dès la découverte de l'erreur dont il se prétend victime, respectant ainsi le délai de l'art. 262 CC, il n'est pas nécessaire de déterminer si le benéfice du délai d'un an de l'art. 31 CO peut être invoqué par le demandeur à une action en annulation de la légitimation pour cause d'erreur.
c) Dans l'action en annulation de la reconnaissance d'un enfant naturel, fondée sur l'erreur ou le dol, le père selon les registres de l'état civil doit établir qu'il ignorait des circonstances prouvant l'impossibilité de sa paternité (RO 79 II 30 consid. 2 et les arrêts cités).
Les mêmes principes sont applicables à l'action en annulation
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d'une légitimation par mariage subséquent intentée par le mari pour vice de la volonté. L'action ne peut aboutir que si le demandeur prouve que sa paternité est exclue et qu'il l'ignorait, ensuite d'une erreur ou d'un dol, lors de sa déclaration à l'officier de l'état civil. C'est au moment où le demandeur dispose des éléments lui permettant d'attaquer la légitimation que commence à courir le délai dans lequel l'action doit être introduite (cf., en matière de désaveu, RO 91 II 155/156 et les arrêts cités et, au sujet de l'art. 31 CO, dans le cadre de l'invalidation d'un contrat entaché d'erreur, RO 82 II 425 ss. consid. 8). De simples incertitudes sur la paternité, résultant de l'ignorance de certains faits ou d'une représentation inexacte des circonstances, ne suffisent pas si elles ne reposent pas sur des indices précis (RO 79 II 30 consid. 2). Il peut cependant, suivant les cas, incomber au demandeur de s'informer sur les faits pertinents, de manière à acquérir une certitude (RO 91 II 156 consid. 2 i.f.).d) Le curateur du recourant invoque que l'intimé savait que dame C. avait été la maîtresse de B. en 1963, que celui-ci était venu au Tessin en 1964, que l'enfant avait comme lui les cheveux roux et que les gens de l'endroit avaient jasé à ce sujet. Le représentant légal du recourant relève en outre que dame C., mariée à l'époque, n'était ni fidèle ni constante dans ses relations masculines.
Ces circonstances pouvaient être de nature à susciter chez l'intimé quelques doutes au sujet de sa paternité. Toutefois, selon les constatations de fait de la juridiction cantonale qui lient la cour de réforme, dame C. était persuadée, lors de la légitimation, de la paternité de l'intimé et celui-ci n'avait aucun doute à cet égard. Il ignorait que sa femme avait revu B. et avait entretenu des relations sexuelles avec lui au début d'août 1964; dame C. le lui avait caché.
L'intimé n'a eu des doutes au sujet de sa paternité qu'après avoir eu connaissance des propos tenus par le petit A. à ses grands-parents paternels, puis à des amis de la famille au début de 1970. Mais ces doutes étaient insuffisants pour permettre d'introduire une action en annulation de la légitimation. C'est par l'expertise excluant sa paternité que l'intimé a disposé des éléments nécessaires pour motiver son action en annulation de la légitimation. La cour cantonale a admis ainsi avec raison que le délai dans lequel cette action devait être
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introduite n'a couru que dès le moment où l'intimé a eu connaissance de cette expertise, soit dès le 7 août 1970, ou dans les jours qui ont suivi. Il n'a en effet pas été allégué ni prouvé qu'il aurait été en mesure d'agir plus rapidement.
3. L'intimé a introduit, le 15 octobre 1970, une action en désaveu de paternité devant le Tribunal cantonal de Neuchâtel, soit au for de l'un de ses lieux d'origine (art. 8 LRDC). Constatant que cette action visait en réalité à l'annulation d'une légitimation par mariage subséquent, la cour neuchâteloise s'est déclarée incompétente ratione loci le 1er mai 1972. C'était avec raison, le for de l'action étant celui du domicile des parents (art. 262 CC; RO 95 II 392), soit Genève, en l'espèce. Le 14 juin 1972, l'intimé a alors ouvert une nouvelle action devant le Tribunal de première instance de Genève.
La première action a été ouverte moins de trois mois après que l'intimé a eu connaissance de l'expertise du 7 août 1970, soit avant l'expiration du délai fixé par l'art. 262 al. 1 CC, donc en temps utile. Le point de savoir si le délai annal de l'art. 31 CO s'applique à l'action en annulation de la légitimation pour cause d'erreur peut dès lors rester indécis.
Il n'est pas non plus nécessaire de déterminer si l'intimé a ou non la possibilité d'invoquer en sa faveur le délai supplémentaire de l'art. 257 al. 3 CC. En effet, l'art. 139 CO institue un délai supplémentaire de soixante jours lorsque l'action a été introduite devant un juge incompétent, ou qu'elle a été écartée en raison d'un vice réparable, et que le délai de prescription est expiré dans l'intervalle. Cette disposition s'applique aux délais de péremption ou de déchéance prévus par le droit fédéral (RO 93 II 369 consid. 3 et les arrêts cités). Or l'action en annulation de la légitimation portée le 14 juin 1972 par l'intimé devant le Tribunal de première instance de Genève, soit au for du domicile des parents, a été ouverte dans le délai de soixante jours de l'art. 139 CO.
Le recourant prétend à tort que l'intimé ne pouvait pas bénéficier du délai supplémentaire de l'art. 139 CO, parce qu'il ne s'est pas trompé de for mais d'action. En effet, dans la demande dont il a saisi le Tribunal cantonal neuchâtelois, l'intimé a allégué les faits nécessaires à l'appui de ses conclusions tendantes à l'annulation, pour cause d'erreur, de la légitimation intervenue le 24 avril 1969 et à la rectification des registres de l'état civil. Il n'importe pas qu'il se soit trompé sur
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l'intitulé de l'action, car le juge doit appliquer d'office le droit et statuer sur le mérite des conclusions indépendamment de l'argumentation des parties (RO 90 II 40).
4. C'est avec raison également que, sur la base des faits retenus, la cour cantonale a admis que l'intimé se trouvait sous l'empire d'une erreur essentielle (art. 23 et 24 al. 1 ch. 4 CO). Il était en effet convaincu d'être le père de l'enfant lorsqu'il l'a légitimé devant l'officier d'état civil et ce n'est qu'après coup que sa paternité s'est révélée exclue.
Si l'intimé avait su que sa paternité était exclue et que le père était un autre homme, il n'aurait sans doute pas légitimé le recourant. La paternité de l'intimé était ainsi un fait qui, pour lui comme pour sa femme, constituait un élément essentiel de la légitimation.
En légitimant l'enfant, l'intimé n'a pas non plus renoncé à invoquer les circonstances rendant sa paternité incertaine. Il était convaincu d'être le père du recourant; dame C. partageait ouvertement cette certitude et il n'y avait pas de motif suffisant de la mettre en doute.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
Rejette le recours.
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