103 II 204
Urteilskopf
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35. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 30 juin 1977 dans la cause Gaudard contre Nieuw Rotterdam
Regeste
Art. 20, Art. 21 VVG . Teilweises Ausbleiben der Bezahlung einer Versicherungsprämie. Für den nachfolgenden Zeitabschnitt bezahlte Prämie. Zahlungsaufforderung durch den Versicherer mit der Androhung, dass die Haftung zu ruhen beginnen würde, wenn die frühere, unbezahlte Prämie nicht binnen 14 Tagen, von der Absendung der Mahnung an gerechnet, beglichen werden sollte.
Die Sistierung trifft die Leistungspflicht des Versicherers als solche: Weder die Fälligkeit noch die Zahlung einer späteren Prämie haben zur Folge, dass die Haftung des Versicherers wieder auflebt (Erw. 4 und Erw. 5a, b); dies gilt auch dann, wenn die mit der Androhung der Säumnisfolgen verbundene Mahnung nach Zahlung einer später fällig gewordenen Prämie zugestellt wird (Erw. 5c).
Le 20 juin 1969, Roger Gaudard contracta, auprès de la compagnie d'assurances Nieuw Rotterdam, un contrat d'assurance combiné l'assurant, comme détenteur d'une voiture Peugeot 204, en responsabilité civile et en casco intégrale. Ce contrat expirait le 30 juin 1970; il se renouvelait par tacite reconduction d'année en année, sauf dénonciation trois mois à l'avance. La prime était échue le 1er juillet. Les deux assurances et le montant des primes respectives sont mentionnées séparément au contrat.
Le 12 novembre 1971, Gaudard ayant remplacé sa Peugeot par une BMW 2002, un avenant fut établi.
Le 18 mai 1973, la Nieuw Rotterdam adressa à Gaudard un avis l'invitant à payer, dans les 60 jours, la somme de 205 fr., dans le cadre de sa police d'assurance en responsabilité civile. Ce montant représentait un complément de prime pour l'année 1971-1972, dû ensuite d'une augmentation de tarif survenue en 1972, qui avait été l'objet d'un recours de droit administratif au Tribunal fédéral, lequel, après avoir suspendu l'autorisation accordée par le Bureau fédéral des assurances, avait rejeté le recours le 2 février 1973 (ATF 99 Ib 51 ss). L'avis ne contenait aucun décompte, mais précisait que la compagnie d'assurances donnerait les renseignements qui pourraient lui être demandés. Gaudard ne requit aucune explication et ne paya pas.
En juin 1973, la Nieuw Rotterdam envoya à Gaudard l'avis d'échéance de sa prime au 1er juillet 1973 pour la période d'assurance courant du 1er juillet 1973 au 30 juin 1974, par 1'981 fr. 40. Gaudard paya le 2 août 1973.
Par envoi recommandé du 14 septembre 1973, la Nieuw Rotterdam adressa à Gaudard une sommation de payer concernant le complément de prime de 205 fr., vainement réclamé en mai. Cette sommation indiquait qu'à défaut de paiement dans les quatorze jours dès la date de l'envoi la garantie serait suspendue, ce dont le Service des automobiles vaudois serait avisé (art. 68 al. 2 LCR).
Le 29 septembre 1973, Gaudard, conduisant sa BMW, se tua dans un accident de la circulation en France. Son passager, Roland Roecker, âgé de 15 ans, fut également tué.
La Nieuw Rotterdam conclut avec la mère de Roland Roecker une transaction aux termes de laquelle elle payait 35'000 fr. pour perte de soutien.
Dissociant les deux risques assurés, la compagnie d'assurances invoqua, pour la responsabilité civile, la suspension de la garantie et annonça son intention d'exercer le droit de recours de l'art. 65 al. 3 LCR contre les héritiers légaux de Gaudard, savoir sa veuve, Claudie Gaudard, et son fils posthume, François Gaudard. A titre transactionnel, elle offrit de renoncer à exercer ce droit de recours et de se borner à opérer compensation avec l'indemnité due en vertu de l'assurance casco, par 12'280 fr., abandonnant ainsi la différence de 22'720 fr. Elle précisait qu'en cas de procès elle ferait valoir intégralement sa prétention. Elle se prévalait subsidiairement de la faute grave de l'assuré.
Contestant que l'assurance fût suspendue, Claudie et François Gaudard ouvrirent action le 26 septembre 1975, réclament paiement de l'indemnité prévue par l'assurance casco.
La défenderesse conclut à libération et, reconventionnellement au paiement de 22'720 fr., plus intérêt à 5% dès le 9 mai 1974.
Le 21 février 1977, la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois rejeta les conclusions des demandeurs et admit celles, tant libératoires que reconventionnelles, de la défenderesse.
Les demandeurs recourent en réforme au Tribunal fédéral. Ils persistent dans les conclusions qu'ils ont prises en première instance.
Extrait des considérants:
1. Selon l'art. 20 LCA, si la prime n'est pas payée à l'échéance, le débiteur doit être sommé par écrit d'en effectuer le paiement dans les quatorze jours à partir de l'envoi de la sommation. La sommation doit rappeler les conséquences du retard. Si elle reste sans effet, l'obligation de l'assureur est suspendue à partir de l'expiration du délai légal.
L'assureur a alors le choix (art. 21 LCA): il peut, dans les deux mois, poursuivre le paiement de la prime en souffrance, son obligation reprenant alors effet dès le paiement; il peut aussi se départir du contrat et renoncer au paiement de la prime arriérée, cette résiliation se présumant à défaut de poursuite dans les deux mois.
Gaudard s'étant acquitté en août 1973 de sa prime pour la période d'assurance courant du 1er juillet 1973 au 30 juin
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1974, le problème posé par le présent recours est de savoir si la garantie de l'assureur pouvait être suspendue pour une période d'assurance pour laquelle la prime avait été payée, en raison du retard de paiement partiel d'une prime relative à une période écoulée (complément de prime pour 1971/1972).Il n'y a aucune discussion possible quant à l'imputation des paiements: de par la volonté de l'assureur, acceptée par le preneur, c'est la prime 1973/74 que Gaudard a payée le 2 août 1973. L'assureur n'a jamais prétendu utiliser partiellement ce paiement pour le complément de 1971/72.
2. Le contrat litigieux ayant été conclu le 20 juin 1969 pour un an, avec clause de tacite reconduction d'année en année, on pourrait se demander si on a affaire à un contrat unique dont seule la durée est prolongée ou à autant de contrats qu'il y a de renouvellements. Dans ce dernier cas, la suspension n'affecterait que le contrat en cours, et partant le contrat en vigueur quand le sinistre s'est produit ne serait pas atteint par la suspension.
Sous ch. 34 des conditions générales, auxquelles se réfère la police, il est prévu qu'à défaut de dénonciation le contrat "se renouvelle tacitement d'année en année". Toutefois, ce "renouvellement" du contrat signifie, non pas la conclusion tacite d'un nouveau contrat, comportant novation, mais la simple prorogation du contrat primitif (ATF 11 p. 84, 16 p. 788/789; KOENIG, Schweizerisches Privatversicherungsrecht, 3e éd., Berne 1967, p. 87; ROELLI/KELLER, Kommentar zum schweizerischen Bundesgesetz über den Versicherungsvertrag, Berne 1968, I p. 678/79).
On est ainsi bien en présence d'un contrat unique.
3. Selon la Cour cantonale, la suspension, valablement provoquée par la sommation comminatoire du 14 septembre 1973, concerne la garantie de l'assureur d'une façon générale. Cette couverture est globale et s'étend à toute la durée du contrat. Pas plus que le paiement d'une prime subséquente postérieurement à la sommation ne saurait avoir d'influence sur la suspension, le paiement d'une prime subséquente avant la sommation n'empêche cette dernière de produire ses effets.
Les recourants, au contraire, font valoir en substance que le contrat se divise en périodes: la prime étant payée pour une période déterminée, la couverture est garantie pour cette période. Gaudard s'étant acquitté pour la période du 1er juillet
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1973 au 30 juin 1974, ils s'estiment couverts pour les conséquences de l'accident qui se situe pendant ce laps de temps.
4. La doctrine suisse se prononce clairement dans le sens admis par la Cour cantonale. Les auteurs enseignent que la suspension n'est pas limitée à la période d'assurance en cours: elle continue à produire ses effets au-delà de l'échéance de la prime pour la période postérieure (J. HOFSTETTER, Der Prämienzahlungsverzug nach schweizerischem Versicherungsvertragsrecht, thèse Berne 1935, p. 96; KOENIG, op.cit., p. 122; ROELLI/KELLER, op.cit., I p. 363 n. 1).
Telle est également l'opinion de la doctrine et de la jurisprudence allemandes (BRUCK/MÖLLER, Kommentar zum Versicherungsvertragsgesetz, 8e éd., Berlin 1961, I n. 34 ad par. 39, p. 507; Bundesgerichtshof, 27 mai 1957, Neue Juristische Wochenschrift 1957 p. 1230 s., et 24 janvier 1963, Neue Juristische Wochenschrift 1963, p. 1055).
La jurisprudence française est en sens contraire: la suspension est limitée à l'échéance d'une nouvelle prime, car c'est une disposition exceptionnelle, instituant une sanction rigoureuse, dont il convient de donner une interprétation restrictive pour en limiter les effets (cf. PICARD ET BESSON, Les assurances terrestres en droit français I, 4e éd., Paris 1975, No 112, p. 198 et la jurisprudence citée n. 86).
5. On ne peut que se rallier à la solution adoptée par la doctrine suisse, ainsi que par la jurisprudence et la doctrine allemandes: elle est conforme au système de la loi.
a) L'art. 20 LCA institue une mise en demeure qualifiée ayant un effet spécifique clairement exprimé à l'art. 20 al. 3: l'obligation de l'assureur est suspendue, le contrat demeurant en vigueur aux conditions de l'art. 21.
La raison de cette règle, qui n'est pas particulière au droit suisse, est évidente. Elle procède du principe élémentaire que, la garantie de l'assureur étant la contrepartie de la prime, elle tombe à défaut de paiement de la prime. La loi ne pouvait s'en tenir aux seules règles générales des art. 107 ss CO. L'arme de la résolution du contrat est en effet trop lourde: l'existence de nombreux contrats d'assurance serait mise en cause à la suite de retards dans le paiement d'une prime, dus le plus souvent à la négligence, portant sur de petites sommes et d'ordinaire rapidement rattrapés. Il convenait de permettre à l'assureur de se prémunir d'une façon à la fois simple et
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efficace contre de tels retards, vraisemblablement fréquents dans la pratique.Quant à ses modalités, l'art. 20 LCA n'est pas plus rigoureux que le droit commun. Comme l'art. 107 CO, il suppose la demeure du débiteur et il institue un délai de grâce. Ses effets entraînent une simple suspension de la garantie, et non la résolution du contrat.
Il est d'ailleurs loisible à l'assuré de mettre fin en tout temps à la suspension en payant la prime due et échue, ce qui, dans les cas ordinaires, représente une somme relativement modique, pour les assurances contre les dommages tout au moins.
b) La suspension affecte l'obligation de l'assureur comme telle. La loi n'en limite nullement l'effet à une période déterminée, notamment pas à la période afférente à la prime en souffrance. La notion de "période d'assurance", dont les recourants se prévalent, n'implique pas un découpage des obligations de l'assureur dans le temps. Elle n'est utilisée par la loi que relativement au calcul de l'unité de prime, soit à une simple modalité de l'obligation de l'assuré.
Il s'ensuit que la suspension ne prend fin qu'après paiement de la dette qui a fait l'objet de la sommation: l'obligation de l'assureur "reprend effet à partir du moment où la prime arriérée a été acquittée avec les intérêts et les frais" (art. 21 al. 2 LCA).
Dès lors, l'échéance d'une nouvelle prime ne saurait faire cesser la suspension, qui continue aussi longtemps que l'assuré est en demeure.
Admettre le contraire reviendrait à priver la sommation comminatoire de beaucoup de son efficacité chaque fois que l'assureur, comme en l'espèce, fait preuve de patience ou lorsque les primes sont payables par courtes périodes. L'assuré négligent n'aurait plus d'intérêt à mettre fin à la suspension, une fois terminée la "période" pour laquelle il est en demeure et au cours de laquelle aucun sinistre ne s'est produit.
Le paiement d'une prime subséquente ne saurait non plus avoir pour conséquence que la garantie de l'assureur soit remise en vigueur. Le texte de la loi est formel; l'art. 21 al. 2 LCA n'accorde cet effet qu'au paiement de la prime arriérée.
On ne peut pas davantage déduire de l'acceptation par
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l'assureur de la prime nouvelle qu'il serait réputé renoncer au bénéfice de la suspension de garantie pour la période antérieure au paiement ou d'une façon générale. L'assureur est tenu d'accepter le paiement régulier de la prime nouvelle (art. 91 CO), qu'il n'a pas le droit de refuser, à moins qu'il n'entende se départir du contrat, ce à quoi on ne saurait l'obliger. Un tel paiement ne libère que partiellement le débiteur, savoir pour la prime afférente à la période d'assurance postérieure. La demeure subsiste pour le solde, avec tous les effets que la loi attache à la sommation comminatoire de l'art. 20 LCA.c) Il n'y a aucune raison de s'écarter de ces principes quand, comme en l'espèce, la sommation comminatoire est notifiée après le paiement d'une prime subséquente, soit au cours d'une nouvelle période d'assurance. Il est logique, en pareil cas également, que l'assuré se trouve sans garantie parce qu'une prime antérieure est demeurée, intégralement ou partiellement, impayée: c'est la conséquence de la demeure, qui, subsistant, entraîne la suspension de la garantie comme telle. Par ailleurs, l'assuré qui entend bénéficier de la garantie peut, en général, aisément prendre ses dispositions: il connaît longtemps à l'avance le montant qu'il devra payer à l'échéance, il jouit encore d'un délai de grâce de quatorze jours après sommation et, s'agissant des cas courants, les primes d'assurances ne représentent pas des sommes considérables. La demeure persistant au-delà du délai fixé par la sommation est, le plus souvent, le produit d'une simple négligence.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
Rejette le recours et confirme le jugement attaqué.
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