113 II 424
Urteilskopf
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75. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 28 octobre 1987 dans la cause S. et consorts contre Commune de X. (recours en réforme)
Regeste
Haftung aus dem Betrieb eines Schwimmbads.
1. Betreibt eine Gemeinde ein der Öffentlichkeit zugängliches Schwimmbad, so haftet sie nach Bundeszivilrecht (E. 1a).
2. Rechtsnatur des zwischen der Gemeinde und dem Benützer abgeschlossenen Vertrags. Haftung für Hilfspersonen. Beweislast bei Vertragsverletzung (E. 1b).
3. Umfang der einem Bademeister obliegenden Sorgfaltspflicht (E. 1c). Deren Verletzung ist im vorliegenden Fall nicht nachgewiesen (E. 1d).
A.- La commune de X. est propriétaire d'une piscine essentiellement ouverte aux écoles, mais également accessible au public durant quelques heures par jour, moyennant une finance d'entrée. Elle a commis à la surveillance de cette piscine un gardien qui a qualité de fonctionnaire et doit remplir les tâches fixées dans un cahier des charges détaillé.
Charles S. et son épouse Alice ont eu quatre filles; la plus âgée, Cindy, est née le 5 mars 1976.
Le 4 juillet 1984, Alice S. et ses quatre filles se sont rendues, pour la première fois, à la piscine de X. Elles se sont présentées vers 15 h à la caisse, où dame S. a payé les entrées, puis se sont dirigées ensemble vers les vestiaires. Cindy s'est empressée de mettre son maillot de bain et, pendant que sa mère aidait ses soeurs à mettre le leur, a déclaré qu'elle allait "guigner" dans la piscine; elle avait
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pris avec elle son masque de plongée, à l'insu de sa mère. Une fois la cadette en costume de bain, Alice S. et ses trois filles se sont approchées des bassins. Comme elles ne voyaient pas Cindy, elles se sont mises à la chercher et c'est alors qu'Alice S. a entendu une fillette dire à sa mère qu'il y avait une petite fille dans l'eau.Le corps de Cindy a été découvert aux environs de 15 h 20. Il a été retiré du bassin par le gardien N. à un endroit où la profondeur de l'eau atteint 1 m 80. Le gardien est immédiatement intervenu, dès que la présence du corps d'un enfant au fond de la piscine lui eut été signalée par une autre fillette.
On ignore dans quelles circonstances Cindy est entrée dans le grand bassin de la piscine. Ni le gardien ni aucun baigneur - une cinquantaine de personnes se trouvaient alors dans l'enceinte de la piscine - n'ont eu leur attention attirée par un comportement anormal de la fillette. Celle-ci ne savait pratiquement pas nager, état de choses que sa mère connaissait.
Le gardien a d'emblée pratiqué la respiration artificielle sur Cindy, et fait appeler un médecin, atteint à 15 h 25. Amenée au CHUV, à Lausanne, à 16 h, l'enfant inconsciente a fait l'objet de manoeuvres de réanimation majeures, mais son décès est survenu à 16 h 56, suite à un arrêt cardio-respiratoire irréversible, en rapport direct avec l'asphyxie due à l'immersion.
Selon une expertise médico-légale du Dr Gujer, il n'est pas possible de dire si la mort a été la conséquence d'une noyade ou d'une hydrocution, cette dernière hypothèse semblant cependant plus probable.
L'enquête pénale ouverte à la suite de cet accident a été close le 26 septembre 1985 par une ordonnance de non-lieu.
B.- Le 28 novembre 1985, Charles et Alice S., ainsi que leurs trois enfants, ont ouvert action contre la commune de X. Chacun des époux a conclu au paiement, par la défenderesse, d'une indemnité de 25'000 fr. à titre de réparation morale; la demande tendait également au paiement de 7'000 fr. par enfant du même chef. Les parents ont réclamé en outre le paiement de 4'200 fr., en remboursement des frais funéraires.
Par jugement du 23 mars 1987, la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud a rejeté les conclusions des demandeurs. Elle a considéré, en substance, que ceux-ci n'avaient pas établi une violation des obligations contractuelles de la part de la commune de X. ou de son auxiliaire. Dans une argumentation subsidiaire, elle a encore constaté l'absence de
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preuve d'un lien de causalité naturelle entre le comportement du gardien et la mort de la fillette.
C.- Les demandeurs recourent en réforme au Tribunal fédéral en reprenant leurs conclusions de première instance. En bref, ils reprochent à la cour cantonale d'avoir renversé indûment le fardeau de la preuve de la faute qu'ils imputent à la défenderesse et qui consisterait en une organisation manifestement défectueuse de la surveillance de la piscine.
La défenderesse et intimée propose le rejet du recours.
Extrait des considérants:
1. a) L'exploitation de la piscine de la commune de X., lorsque cette dernière est ouverte au public, n'entre pas dans le cadre d'une activité étatique ayant un caractère de souveraineté. Elle ne procède pas de l'exercice de la puissance publique. La responsabilité découlant de cette exploitation est donc fondée sur le droit privé fédéral (art. 61 al. 2 CO; cf. ATF 102 II 47 et les arrêts cités).
b) Avec les premiers juges, on doit admettre que celui qui entre à la piscine moyennant finance conclut un contrat qui n'est pas spécialement prévu par le code des obligations; ce contrat, qui s'apparente à quelques contrats régis par ce code, peut être qualifié de convention sui generis voisine du "Gastaufnahmevertrag" dont fait état l'arrêt ATF 71 II 114 /115 consid. 4 (arrêt non publié du 31 octobre 1961 en la cause Société fermière de la patinoire et piscine de Montchoisi et commune de Lausanne c. Rossier; cf. WEBER, Zivilrechtliche Haftung öffentlicher und privater Badeanstalten, thèse Berne 1977, p. 82 ss).
L'exploitant qui n'accomplit pas ou accomplit mal les obligations inhérentes à ce contrat est tenu de réparer le dommage résultant de cette inexécution ou de cette exécution imparfaite, s'il ne prouve qu'aucune faute ne lui est imputable (art. 97 CO). Lorsqu'il exécute ses obligations, comme en l'espèce, par l'entremise d'auxiliaires, il répond du comportement de ceux-ci comme du sien propre, en vertu de l'art. 101 CO; il ne peut donc se libérer de sa responsabilité du chef des actes de ses auxiliaires qu'en prouvant que s'il avait agi comme ses auxiliaires on ne pourrait lui reprocher aucune carence (ATF 107 Ia 170 /171 consid. 2c; ATF 92 II 19 et 239; ENGEL, Traité des obligations en droit suisse, p. 501; KELLER, Haftpflicht im Privatrecht, 3e éd., p. 316;
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CUENDET, La faute contractuelle et ses effets, thèse Lausanne 1970, p. 185/186, ch. 381 et 382).Certes, conformément à l'art. 97 CO, il n'appartient pas au créancier lésé par une violation du contrat d'établir une faute de son débiteur ou de l'auxiliaire de celui-ci, mais il incombe au débiteur de démontrer qu'aucune faute ne lui est imputable. Cependant, les demandeurs, qui rappellent ce principe, perdent de vue que s'ils sont effectivement dispensés de prouver une faute du débiteur, ils doivent établir, au préalable, l'inexécution ou la violation positive du contrat, ainsi que la relation de causalité entre cette violation et le dommage (ATF 113 II 251 consid. 7 in fine, ATF 95 II 138; cf. GAUCH/SCHLUEP, 4e éd., II, n. 1648).
c) A l'instar de l'aubergiste dans le "Gastaufnahmevertrag", l'exploitant d'une piscine publique doit laisser l'usager utiliser les installations mises à sa disposition sans qu'il en résulte un préjudice pour sa santé ou son intégrité corporelle; s'il ne prend pas toutes les mesures commandées par les circonstances pour lui assurer la sécurité voulue, il n'accomplit pas ses obligations contractuelles (cf. ATF 71 II 114 /115 et l'arrêt du 31 octobre 1961 déjà cité).
Outre la sécurité des installations, la surveillance des usagers et de leurs actes, en particulier aux endroits les plus dangereux, tels que les bassins et les plongeoirs, est essentielle (cf. WEBER, op.cit., p. 86/87). Cela implique, de la part du gardien, une attention soutenue, depuis le bord ou à proximité de la piscine, à l'égard de tout acte ou événement insolite ou pouvant présenter un danger, pour autant qu'il soit perceptible, ainsi qu'une intervention immédiate sitôt qu'une anomalie ou un danger lui est signalé par toute personne l'ayant perçu. Comme le relève la cour cantonale, l'exploitant, soit son gardien, doit interdire les bousculades, veiller à ce que les baigneurs ne se poussent pas à l'eau et s'assurer que celui qui tombe dans un bassin sait bien nager. Mais la diligence à observer dans la surveillance ne peut pas raisonnablement porter sur tous les actes des usagers, même lorsqu'ils sont dans l'eau. Ainsi que le dit le jugement attaqué, il n'incombe pas au gardien de vérifier que chaque baigneur reste en surface, ou, s'il est sous l'eau, qu'il remonte à temps. Le risque lié à l'usage normal de l'eau, ou à son usage apparemment normal, doit être assumé par le nageur lui-même ou par ceux qui ont une autorité directe sur lui, l'exploitant n'ayant à intervenir que s'il constate que le risque couru se concrétise.
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Pour remplir les tâches de surveillance ainsi définies, on peut admettre, avec la cour cantonale, que la présence d'un gardien, surveillant effectivement les lieux, est suffisante pour une piscine enregistrant quotidiennement une cinquantaine d'entrées, et pouvant même compter cinquante personnes immergées. Le parallèle avec la plage et piscine de Bellerive, à Lausanne, s'il n'est pas absolument déterminant à cet égard, fournit un point de comparaison qui démontre au moins que l'avis de la cour cantonale n'a rien d'aberrant (Bellerive: 20 gardiens pour 10'000 visiteurs les jours d'affluence).
d) Au vu des exigences ainsi posées et des constatations de fait souveraines de la cour cantonale, on ne peut pas retenir que la défenderesse, soit son auxiliaire, ait violé l'obligation de surveillance qui lui incombait. A tout le moins, les demandeurs n'ont rien prouvé à cet égard. Ils n'ont établi ni que le gardien ne se serait pas trouvé à son poste au bord du bassin, ni qu'un événement apparemment dangereux ou insolite concernant le comportement ou la personne de l'enfant Cindy lui aurait échappé, puisque les circonstances dans lesquelles la fillette est entrée dans l'eau ne sont pas connues. Quant au fait que l'enfant serait restée de longues minutes sous l'eau, il pourrait certes constituer un événement insolite et perceptible qui n'eût pas dû échapper à un gardien vigilant, mais il n'a nullement été établi et n'a pas été retenu par les premiers juges. En effet, aucune indication n'a été fournie quant au laps de temps durant lequel l'enfant est demeurée sous l'eau. Les affirmations différentes et les supputations ou calculs des demandeurs au sujet de ce laps de temps ne sont que des critiques irrecevables visant les constatations de fait de la cour cantonale (art. 43 al. 3, 55 al. 1 lettre c, et 63 al. 2 OJ). Enfin, aucun manquement ne peut être imputé au gardien à partir du moment où la présence de l'enfant au fond de la piscine lui a été signalée, puisqu'il est intervenu immédiatement.
Une violation des obligations contractuelles de la part de la défenderesse, ou de son auxiliaire, n'a donc pas été établie. L'action fondée sur les art. 97 et 101 CO et, partant, le recours ne peuvent dès lors qu'être rejetés, le jugement entrepris devant, en conséquence, être confirmé.
Referenzen
BGE: 102 II 47, 107 IA 170, 92 II 19, 113 II 251 mehr...
Artikel: art. 97 CO, art. 101 CO, art. 61 al. 2 CO