94. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 20 août 1993 dans la cause Compagnie d'assurance X. contre Y. (recours en réforme)
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Regeste
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Art. 46 Abs. 1 VVG. Verjährung der Ansprüche des Versicherten bei der Rechtsschutzversicherung.
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BGE 119 II 468 (468): Extrait des considérants:
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a) Selon l'art. 46 al. 1 LCA, les créances qui dérivent du contrat d'assurance se prescrivent par deux ans à dater du fait d'où naît BGE 119 II 468 (469):
l'obligation. Le point de départ de la prescription est fixé de manière objective: peu importe donc le moment où l'assuré a eu connaissance des faits propres à justifier sa prétention (ATF 118 II 447 consid. 2b, p. 455 et les références citées). L'"obligation" visée par cette disposition est celle de l'assureur de verser les prestations convenues à raison de l'événement assuré (ATF 118 II 447 consid. 2b, p. 454). Dans le cas présent, la question litigieuse est de savoir quel est le "fait" d'où naît l'obligation de la recourante.
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b) Dans un arrêt rendu en 1935, le Tribunal fédéral a jugé que dans l'assurance responsabilité civile le délai de prescription de l'obligation de l'assureur d'indemniser ("Befreiungsanspruch") court dès le moment où l'assuré a été condamné à verser des dommages-intérêts au lésé (ATF 61 II 197). Sans trancher la question, il a toutefois laissé entendre que le dies a quo du délai de prescription de l'obligation de défendre l'assuré contre des prétentions injustifiées ("Rechtsschutzgewährung") pouvait être différent (p. 198).
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En matière d'assurance de protection juridique, la question de savoir quel est le dies a quo du délai de l'art. 46 al. 1 LCA est controversée. Pour une partie de la doctrine, la prescription court dès que le litige est liquidé par jugement passé en force ou transaction (MAURER, Schweizerisches Privatversicherungsrecht, 2e éd., Berne 1986, p. 379; BREHM, Le contrat d'assurance de responsabilité civile, Lausanne 1983, nos 785 ss; THALMANN, Die Verjährung im Privatversicherungsrecht, thèse Zurich 1940, p. 202 et 208 ss). Selon d'autres auteurs, qui se réfèrent à une décision du Tribunal de commerce du canton de Saint-Gall (RBA XI no 49 p. 281 ss), elle court dès le commencement du litige avec celui qui est appelé à devenir la partie adverse au procès (ROELLI/KELLER, Kommentar zum Schweizerischen Bundesgesetz über den Versicherungsvertrag, vol. I, Berne 1968, p. 668 n. 7; VIRET, Droit des assurances privées, 3e éd., Zurich 1991, p. 135; idem, De quelques aspects de l'assurance de la protection juridique, in Mélanges Assista, Genève 1989, p. 381; cf. ég. PÉTERMANN, La prescription des actions, RSA 1959/60 p. 399/400). La première opinion - à laquelle se sont ralliées les juridictions cantonales - est notamment fondée sur des considérations pratiques; on ne saurait exiger de l'assuré qu'il interrompe la prescription tant qu'il ignore l'issue du litige. L'assureur doit en outre assumer la protection juridique de son assuré tant que dure le procès; ce n'est qu'au terme de ce dernier que naît l'obligation de payer (BREHM, op.cit., no 788).
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c) Selon l'art. 1er de l'OCF sur l'assurance de la protection juridique du 9 avril 1986 (RS 961.22), les institutions d'assurance qui BGE 119 II 468 (470):
assument contre rémunération le risque de devoir supporter des frais occasionnés par des affaires juridiques ou fournir des services dans de telles affaires doivent avoir obtenu l'agrément pour l'exercice de l'assurance de la protection juridique. Se fondant sur ce texte, Viret (Mélanges Assista, p. 378) définit le risque pour cette catégorie d'assurance comme "la possibilité de la survenance d'un besoin d'assistance juridique".
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Dans l'assurance de protection juridique, l'assureur fournit, d'une part, un service sous forme d'assistance juridique et, d'autre part, une prestation pécuniaire (cf. VIRET, L'assurance de la protection juridique en Suisse, in Studien zur Rechtsschutzversicherung, Karlsruhe 1975, p. 163). Mais comme l'a jugé récemment le Tribunal fédéral, son obligation ne s'épuise pas dans le versement des frais encourus dans le cadre du litige. Il est en effet dans la nature de l'assurance de protection juridique que dès le début du litige l'assureur s'oblige à l'égard de son assuré à lui garantir le paiement de ces frais (ATF 119 II 368 ss consid. 3a, non publié). Une fois clos le litige, ce paiement ne constitue que l'exécution d'un engagement préexistant. Le "fait" d'où découle l'obligation de l'assureur au sens de l'art. 46 al. 1 LCA est la réalisation du risque (ATF 118 II 447 consid. 2b, p. 454), qui correspond à l'apparition du besoin d'assistance juridique.
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Ce point de départ n'expose pas l'assuré aux inconvénients pratiques que le Tribunal fédéral avait relevés pour l'assurance responsabilité civile (ATF 61 II 197, p. 198 ss) ou l'assurance contre les accidents (ATF 118 II 447 consid. 2b, p. 455). La décision d'assumer ou non les frais de défense de l'assuré ne dépend pas du bon vouloir de l'assureur. Dès la survenance du besoin d'assistance juridique, l'assuré peut au contraire prétendre à une garantie de couverture ("Kostengutsprache"), dans les limites prévues par la police. Cette garantie peut, il est vrai, ne s'étendre qu'à certaines phases du litige, par exemple les pourparlers en vue d'un règlement amiable ou la procédure en première instance. Mais il n'en demeure pas moins que la prétention de l'assuré à l'assistance juridique est une créance globale. Aussi, la garantie accordée par l'assureur pour une partie du litige équivaut au paiement d'un acompte (art. 135 ch. 1 CO), qui interrompt la prescription pour l'entier de la créance de l'assuré à raison de ses frais (ATF 119 II 377 consid. 7a, qui considère dès lors que la garantie pour la phase extrajudiciaire interrompt également la prescription de la prétention à l'assistance juridique pour la procédure judiciaire). Si, en revanche, l'assureur refuse de garantir les frais de BGE 119 II 468 (471):
défense de son assuré, celui-ci peut alors ouvrir action aux fins de l'y contraindre. Peu importe, en l'espèce, que cette action soit qualifiée de condamnatoire ou de constatatoire (ATF 119 II 370 consid. 2a); en effet, cette dernière est aussi interruptive de prescription (SPIRO, Die Begrenzung privater Rechte durch Verjährungs-, Verwirkungs- und Fatalfristen, vol. I, Berne 1975, § 133 et les références; BUCHER, Schweizerisches Obligationenrecht, Allgemeiner Teil, 2e éd., Zurich 1988, p. 466; GAUCH/SCHLUEP, Schweizerisches Obligationenrecht, Allgemeiner Teil, vol. II, 5e éd., Zurich 1991, no 3474; contra BÉGUELIN, FJS no 815 p. 2 in fine).
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d) En l'espèce, la Cour de justice a constaté les faits suivants (art. 63 al. 2 OJ): la recourante, avisée en août 1988 de l'accident qui avait coûté la vie à l'épouse de l'intimé, a informé ce dernier qu'elle ne pourrait intervenir en sa faveur, l'accident étant survenu en dehors du territoire couvert par la police; le 12 août 1988, elle a interpellé la société Z. AG pour connaître sa position; le 28 septembre suivant, elle a fait savoir à l'intimé que l'organisateur du voyage déclinait toute responsabilité, et qu'un éventuel litige avec celui-ci ne serait pas couvert par ses conditions générales; en automne 1988, l'intimé a mandaté un avocat genevois aux fins de procéder contre cette société, ce dont l'assureur fut avisé le 28 octobre.
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Selon les principes énoncés ci-dessus (let. c), la prescription a dès lors commencé à courir au plus tard en automne 1988. A ce moment-là, il existait pour le moins un conflit entre l'intimé et l'organisateur du voyage en raison du refus de celui-ci d'admettre les prétentions de sa partie adverse. Aussi bien l'intimé a-t-il mandaté un avocat pour intervenir contre le prétendu responsable, ce qui démontre que le besoin d'assistance juridique était en tout cas réalisé à ce moment. Il importe peu que le mandataire n'ait pas formulé d'emblée de conclusions chiffrées. Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de déterminer avec plus de précision le dies a quo, car l'action déposée en conciliation le 8 novembre 1991 est de toute manière tardive.
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Entre ces deux dates, aucun acte interruptif n'est en effet intervenu, et personne d'ailleurs ne le prétend. En particulier, la prescription n'a pas été interrompue par une reconnaissance de dette de l'assureur, qui a toujours clairement refusé d'assumer les frais de défense de son assuré dans le litige qui l'opposait à l'organisateur du voyage (ATF 118 II 447 consid. 4c, p. 458 et l'arrêt cité). L'intimé ne soutient pas non plus - à juste titre - que la recourante aurait excipé de la prescription contrairement aux règles de la bonne foi (ATF 113 II 264 consid. 2e, p. 269 et les références). Vu BGE 119 II 468 (472):
ce qui précède, le moyen libératoire de la recourante est dès lors fondé, de sorte qu'il y a lieu d'admettre le recours et rejeter l'action. Cela étant, il devient superflu d'examiner ses autres griefs.
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