BGE 104 III 95 |
22. Arrêt de la IIe Cour civile du 23 mai 1978 dans la cause H. et Cie contre G. |
Regeste |
Wechselbetreibung: nicht bewilligter Rechtsvorschlag. |
2. Art. 182 Ziff. 4 SchKG, Art. 4 BV. Der Entscheid, durch den die Bewilligung des Rechtsvorschlages verweigert wird mit der Begründung, die Forderungssumme sei spätestens in der erstinstanzlichen Verhandlung, d. h. vor der Urteilsfällung, zu hinterlegen, verstösst nicht gegen Art. 4 BV (E. 2). |
Sachverhalt |
Le 27 janvier 1978, le président du Tribunal civil de Delémont a repoussé l'opposition, pour la raison, notamment, que, soulevant des moyens fondés sur l'art. 1007 CO, l'opposante n'avait pas déposé le montant de l'effet en espèces ou autres valeurs, comme l'exige l'art. 182 ch. 4 LP. |
Le 6 février 1978, H. et Cie a interjeté appel auprès de la Cour d'appel du canton de Berne, déposant le même jour la somme de 26565.- fr. au greffe du Tribunal de Delémont.
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Le 16 mars 1978, la Cour d'appel a déclaré l'opposition irrecevable, par le motif que le dépôt du montant de l'effet doit être effectué, au plus tard, au cours des débats de première instance, soit avant le prononcé du jugement.
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H. et Cie a formé un recours de droit public, pour violation de l'art. 4 Cst.
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Considérant en droit: |
Le présent recours est dès lors recevable.
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2. a) Selon le texte français de l'art. 182 ch. 4 LP, l'opposant qui allègue un autre moyen fondé sur l'art. 1007 CO "est tenu de déposer au préalable le montant de l'effet en espèces ou autres valeurs". Le texte allemand et le texte italien posent des conditions moins strictes: le dépôt doit être fait simultanément ("gegen gleichzeitige Hinterlegung der Forderungssumme", "se è simultaneamente depositata... la somma per cui si procede"). Se conformant à la jurisprudence des tribunaux bernois, la Cour d'appel s'en est tenue à la lettre du texte français. |
b) La recourante voit là un formalisme excessif. La Cour d'appel du canton de Berne, dit-elle, a un pouvoir d'examen étendu, qui lui permet de revoir la cause dans son entier, en se substituant, jusque dans le moindre détail, au juge de première instance; elle a d'ailleurs accepté, à titre de moyen de preuve, l'exposé présenté par l'appelante: il serait incompréhensible qu'elle ait appliqué des mesures différentes selon qu'il s'est agi, en deuxième instance, du dépôt à faire par l'opposante ou de la présentation des moyens de preuve.
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Ce raisonnement repose sur une confusion. Découlant du droit fédéral, le dépôt de l'art. 182 ch. 4 LP est, on l'a vu, un paiement anticipé qui éteint la dette (ATF 42 III 364365). On ne se trouve donc pas dans le cadre d'une règle de procédure cantonale, simple prescription formelle, dont l'interprétation trop restrictive complique de manière insoutenable l'application du droit matériel (ATF 96 I 318, 523 consid. 4; ATF 95 I 4 consid. 2 et les arrêts cités). La décision de la Cour d'appel ne doit pas être examinée dans l'optique du formalisme excessif, équivalant à un défi de justice formel, mais sous l'angle de l'arbitraire: il s'agit de savoir si l'interprétation conforme à la lettre du texte français va manifestement à l'encontre du sens et du but qu'a la disposition légale (ATF 91 I 167), conduisant ainsi à des résultats que le législateur ne peut pas avoir voulus et qui heurtent le sens de la justice et le principe de l'égalité de traitement (ATF 103 Ia 229 c et les arrêts cités).
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c) La recourante parle d'une "rigueur que l'on rencontre rarement" et, relevant que, dans certains cantons, la jurisprudence admet le dépôt après le jugement, ou même en seconde instance, elle voit une inégalité de traitement choquante dans le fait que le droit fédéral n'est pas appliqué de manière uniforme dans tous les cantons.
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aa) Certes, dans sa tendance générale, la doctrine considère que l'expression "au préalable" ne doit pas être interprétée dans un sens strict, admettant que l'opposant consigne le montant de l'effet dans un court délai après le jugement, voire en seconde instance seulement (JAEGER, n. 13 ad art. 182 LP; RIEMER, op. cit., p. 102; FAVRE, Fiche juridique suisse 699 p. 4; FRITZSCHE, Schuldbetreibung und Konkurs, 2e éd., II p. 25).
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Mais il n'y a pas arbitraire du seul fait qu'une autre solution serait concevable, ou même préférable; il faut que la solution adoptée par l'autorité cantonale soit insoutenable (ATF 99 Ia 346 consid. 1; ATF 96 I 627 consid. 4). Tel n'est pas le cas en l'espèce. L'interprétation littérale des mots "au préalable", qui, ainsi entendus, signifient que le dépôt doit être effectué avant le jugement (ATF 90 I 205 consid. 2), n'est pas manifestement contraire à l'esprit de l'art. 182 ch. 4 LP: on peut concevoir qu'on la juge plus conforme aux exigences de la poursuite pour effets de change et qu'on craigne de par trop diminuer la protection accordée par la loi au créancier contre d'éventuelles manoeuvres dilatoires du débiteur (cf. l'arrêt du Tribunal fédéral partiellement reproduit in RJB 59 (1923) 432/433). |
bb) On peut sans doute regretter qu'en une matière où l'application uniforme du droit fédéral est particulièrement souhaitable le débiteur ne soit pas traité de la même façon dans tous les cantons. Mais il n'y a pas là inégalité de traitement contraire à l'art. 4 Cst.: ce n'est le cas que lorsque la même autorité soumet, sans motifs sérieux, deux situations semblables à des règles juridiques différentes (ATF 96 I 201 consid. 2 et les références). Or, en l'espèce, la cour cantonale s'en est tenue à sa jurisprudence constante (cf. RJB 96 (1960) 201 et les arrêts cités).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
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