Urteilskopf
109 III 69
20. Extrait de l'arrêt de la Chambre des poursuites et des faillites du 4 août 1983 dans la cause W. et H. (recours LP)
Regeste
Zuschlag eines im Ausland eingetragenen Luftfahrzeuges. Ausbleiben der Bezahlung des Restes des Zuschlagpreises. Widerruf des Zuschlags. Nachfrist.
1. Bei der Verwertung eines Luftfahrzeuges ist die Regel anzuwenden, wonach das Betreibungsamt den Zuschlag widerrufen und eine neue Versteigerung ansetzen muss, wenn die Bezahlung während der festgesetzten Frist ausbleibt (E. 1).
2. Der Ersteigerer darf die Bezahlung des Restes des Zuschlagpreises nicht von der Zusicherung abhängig machen, dass das ihm zugeschlagene Luftfahrzeug in den Registern des ausländischen Landes, wo es eingetragen ist, gelöscht werde. Unterscheidung zwischen dem Luftfahrzeugregister und dem Luftfahrzeugbuch (E. 2 und 3).
3. Die Gewährung einer Nachfrist zur Bezahlung des Restes des Zuschlagpreises wäre unnütz, wenn der Gegenstand des Zuschlags bereits in die Konkursmasse des Schuldners gefallen ist. Dies trifft zu, wenn über den Schuldner nach dem Entscheid des Betreibungsamtes, womit der Zuschlag widerrufen wurde, aber noch vor dem diesen Widerruf bestätigenden Beschwerdeentscheid der Aufsichtsbehörde der Konkurs eröffnet worden ist (E. 4).
A.- Dans le cadre d'une poursuite no 9'340'980, dirigée par X. contre la société italienne Y., ayant son siège dans la province de Turin, l'Office des poursuites de Genève a saisi et réalisé un aéronef Piper PA 31 Navajo I-Rore, qui a été mis aux enchères le 24 mars 1982 et adjugé pour le prix de 116'000 francs à W. et H. en copropriété, chacun pour moitié. Conformément aux conditions de vente, les adjudicataires ont versé comptant une somme de 60'000 francs, un délai de deux mois leur étant accordé pour le règlement du solde du prix d'adjudication.
Les 18/19 mai 1982, l'Office s'est adressé au Registre aéronautique italien pour demander l'exmatriculation de l'aéronef en Italie, de façon qu'il puisse être immatriculé en Suisse au bénéfice des acquéreurs. L'Office relevait, dans sa requête aux autorités italiennes, que l'acquisition de la propriété des adjudicataires sur l'aéronef serait définitive après complet paiement, entre ses mains, du prix d'adjudication. Une longue correspondance eut lieu à ce sujet, au terme de laquelle, le 20 septembre 1982, le service compétent pour l'exmatriculation en Italie déclara à l'Office que, dès qu'il recevrait confirmation que la propriété a définitivement passé aux adjudicataires, le Ministère italien procéderait le jour même à la radiation de l'aéronef dans ses registres.
Après plusieurs prolongations de délai accordées, sans résultat, aux acquéreurs pour leur permettre de régler le solde du prix d'adjudication, l'Office leur a signifié, le 5 octobre 1982, que s'ils
BGE 109 III 69 S. 71
ne s'acquittaient pas du montant restant dû dans un délai échéant le 18 octobre 1982, l'adjudication serait considérée comme caduque et une nouvelle vente serait fixée.
B.- Le 18 octobre 1982, W. et H. ont déposé plainte à l'Autorité de surveillance contre la décision du 5 octobre 1982 de l'Office. Ils ont conclu à l'annulation de cette dernière et à ce que l'Office soit invité à n'exiger le paiement complet de la somme représentant le solde du prix d'adjudication qu'après avoir obtenu des autorités italiennes la radiation de l'immatriculation de l'aéronef dans le registre ad hoc. L'effet suspensif a été accordé à leur plainte.
La faillite de la débitrice poursuivie Y. a été prononcée le 21 octobre 1982, ce dont le syndic de la faillite a averti l'Office des poursuites par lettre du 31 mai 1983. Dans cette même lettre, il était relevé que les actes d'exécution portant sur l'avion Piper de la faillie devenaient dès lors caducs. Par lettre du 10 juin 1983, l'Office a contesté ce point de vue, en faisant valoir que le transfert de propriété sur l'avion remontait au 18 mai 1982, date à laquelle l'autorité italienne compétente avait été requise de procéder à la radiation de l'aéronef dans ses registres, voire au 24 mars 1982, date de l'adjudication, soit en tous les cas avant le jugement de faillite, de sorte que si l'adjudication était confirmée, elle serait antérieure à la faillite et par conséquent opposable aux créanciers de la faillie, vu l'art. 199 LP.
Par arrêt du 22 juin 1983, l'Autorité de surveillance du canton de Genève a rejeté la plainte de W. et H. Elle a considéré que la demeure des adjudicataires de payer le solde du prix de vente rendait l'enchère caduque, de sorte que la décision de l'Office du 5 octobre 1982 devait être confirmée.
C.- En temps utile, W. et H. recourent à la Chambre des poursuites et des faillites du Tribunal fédéral en concluant principalement que les décisions précitées, tant de l'Autorité de surveillance que de l'Office des poursuites, soient annulées, en ce sens que l'Office ne peut exiger le paiement complet des sommes dues ensuite de l'adjudication qu'après avoir obtenu des autorités italiennes la radiation de l'immatriculation dans ses registres de l'aéronef en cause. Subsidiairement, les recourants concluent à l'annulation de l'adjudication du 24 mars 1982, l'acompte de 60'000 francs qu'ils ont versé leur étant restitué avec intérêt légal à compter du jour de l'adjudication.
Les recourants demandent en outre que l'effet suspensif soit
BGE 109 III 69 S. 72
octroyé à leur recours et qu'un délai supplémentaire de dix jours dès l'arrêt de la Chambre de céans leur soit imparti pour acquitter le solde du prix d'adjudication dans l'hypothèse où le recours serait rejeté.
Extrait des motifs:
1. Selon les conditions de vente du 25 janvier 1982 émises par l'Office des poursuites concernant l'enchère de l'aéronef litigieux, un délai de deux mois pouvait être accordé à l'adjudicataire pour le règlement du prix d'adjudication, moyennant le versement comptant de 60'000 francs (art. 10). A défaut d'observation de ce délai, et à moins que tous les intéressés ne donnent leur consentement à une prolongation dudit délai, l'adjudication devait aussitôt être révoquée et une nouvelle enchère ordonnée (art. 12). Ces clauses correspondent au système de la loi, qui prévoit, tant en ce qui concerne la vente aux enchères d'objets mobiliers que l'adjudication d'immeubles, qu'à défaut de paiement dans le délai imparti, l'Office doit révoquer l'adjudication et ordonner une nouvelle enchère (cf. art. 129 al. 3, 143 al. 1 LP et 63 ORI; voir également
ATF 75 III 13). De tels principes sont également applicables en cas de réalisation d'un aéronef, que celui-ci soit inscrit au registre des aéronefs et puisse dès lors faire l'objet d'une réalisation suivant les règles de l'exécution forcée en matière d'immeubles (règles auxquelles renvoient les art. 52 et suivants de la loi du 7 octobre 1959 sur le registre des aéronefs) ou qu'il soit soumis, en l'absence d'une telle inscription, aux règles de l'exécution forcée applicables aux objets mobiliers (cf. circulaire no 35 de la Chambre de céans du 16 octobre 1961 sur l'exécution forcée portant sur des aéronefs, ch. I).
On peut tout d'abord se demander, la décision attaquée n'indiquant pas que l'aéronef litigieux fût inscrit au registre des aéronefs - ou à un registre correspondant - en Italie, si c'est à bon droit que l'Office a procédé à la réalisation en suivant les formes prévues pour l'exécution forcée des immeubles plutôt que celles applicables à la réalisation forcée d'objets mobiliers. Cette question n'a toutefois pas besoin d'être résolue ici, dans la mesure où les règles sur la demeure de l'adjudicataire et sur le devoir de l'Office de révoquer l'adjudication à défaut de paiement sont, ainsi qu'on vient de le voir, substantiellement les mêmes dans l'un et l'autre cas.
BGE 109 III 69 S. 73
On peut également se demander, au vu des conditions de vente et des dispositions légales et réglementaires précitées, si l'Office, en accordant plusieurs délais supplémentaires de paiement aux adjudicataires - la première fois par lettre du 2 juin 1982, la dernière fois dans sa décision du 5 octobre 1982 - a agi correctement. Ce point peut toutefois, lui aussi, rester indécis, du moment que les décisions de l'Office y relatives n'ont pas été attaquées en son temps par les personnes intéressées à la poursuite.
2. Les recourants voudraient que leur obligation de payer le solde du prix d'adjudication soit différée jusqu'à ce qu'ils obtiennent la garantie formelle que l'aéronef litigieux sera bien exmatriculé des registres italiens; à défaut d'une telle garantie, prétendent-ils, ils ne sauraient être assurés de pouvoir disposer de l'aéronef qui leur a été adjugé.
S'il est exact que, conformément à l'art. 52 al. 2 lettre a de la loi sur la navigation aérienne, l'aéronef doit être exmatriculé en Italie avant de pouvoir être immatriculé en Suisse, on doit relever que l'Office s'est employé à obtenir cette radiation des registres italiens et qu'il a obtenu l'accord de principe de l'autorité compétente italienne, à la seule condition, en définitive, que l'adjudication ne puisse plus être révoquée faute de paiement du prix d'adjudication. La condition ainsi posée par l'autorité italienne correspond aux obligations de l'adjudicataire découlant de la loi suisse. Les recourants ne sauraient y échapper en faisant valoir que l'autorité italienne compétente pour accorder l'exmatriculation la refusera peut-être, malgré ses déclarations antérieures, au moment où ils auront versé à l'Office la somme qu'ils doivent. Un tel versement à l'Office ne préjuge en rien du sort des espèces versées pour le cas où l'Office serait hors d'état de leur transférer, le moment venu, le droit de disposer de l'aéronef vendu. Au moment où la décision critiquée de l'Office a été rendue et la plainte déposée, rien ne permettait d'admettre que l'aéronef réalisé ne serait pas exmatriculé en Italie et partant ne pourrait être immatriculé en Suisse, au nom des adjudicataires, sitôt le paiement de ceux-ci opéré en main de l'Office, et que ce dernier ne serait pas à même de transférer aux adjudicataires le droit de disposer de l'objet acquis. En refusant de payer le solde du prix d'adjudication dans le délai fixé, les recourants ont non seulement méconnu les obligations découlant pour eux de l'adjudication, mais encore ont empêché par leur fait l'Office de les mettre en état de disposer de l'objet qui leur avait été adjugé. Leur prétention d'obtenir une
BGE 109 III 69 S. 74
exmatriculation préalable en Italie est donc dépourvue de tout fondement, voire abusive.
3. La circulaire no 35 sur l'exécution forcée portant sur des aéronefs, à laquelle se réfèrent les recourants à l'appui de leur point de vue, ne leur est pas d'un plus grand secours. En effet, cette dernière dispose, à son ch. II al. 4 que, s'agissant de la réalisation d'un aéronef immatriculé à l'étranger, l'Office doit exiger "une attestation certifiée conforme délivrée par l'autorité étrangère compétente". Or, il ressort de l'ensemble du texte de ladite circulaire que l'attestation mentionnée ne concerne nullement la radiation de l'immatriculation d'un aéronef dans un pays étranger ensuite de vente forcée, mais qu'elle doit servir uniquement à déterminer si l'aéronef à réaliser est ou non inscrit au registre des aéronefs dans le pays concerné; grâce à elle, l'Office sait s'il doit appliquer à l'aéronef en cause la procédure de réalisation en matière mobilière ou immobilière.
On ne saurait au reste confondre le registre des immatriculations, soit le registre matricule tel qu'il est notamment défini par les art. 52 et suivants de la loi sur la navigation aérienne du 21 décembre 1948, avec le registre des aéronefs, régi par la loi du 7 octobre 1959 citée précédemment. Le registre matricule a pour objet de déterminer les conditions d'utilisation de l'aéronef (art. 52 al. 2 lettre b, 56, 57 de la loi sur la navigation aérienne), de le soumettre à des contrôles (art. 58), de déterminer ses marques distinctives (art. 59) et de lui conférer la qualité d'aéronef suisse (art. 55). Le registre des aéronefs, quant à lui, a pour objet d'organiser la publicité des droits réels inscrits (
art. 4 et 13 de la loi sur le registre des aéronefs) et comporte les annotations et mentions dont l'inscription peut être requise (art. 5 et 6); il détermine en outre les effets de l'inscription (art. 14 et suivants). Seul un avion immatriculé peut être porté au registre des aéronefs, mais tous les avions immatriculés ne sont pas obligatoirement inscrits à ce registre (cf. art. 1 de la loi sur le registre des aéronefs). L'application des règles sur la réalisation forcée des immeubles prévue par l'art. 52 de la loi sur le registre des aéronefs s'impose précisément par l'analogie existant entre le registre des aéronefs et le registre foncier, du point de vue de la publicité des droits réels. Une telle analogie n'existe nullement en ce qui concerne le registre matricule, seul en cause dans la présente affaire.
Ainsi, la circulaire invoquée ne charge nullement l'Office de se préoccuper du transfert de l'immatriculation de l'aéronef étranger
BGE 109 III 69 S. 75
en Suisse, et les recourants n'invoquent aucun autre texte qui imposerait un tel devoir à l'Office.
4. La question se pose ensuite de savoir si la faillite de la poursuivie Y. intervenue - comme le constate la décision attaquée - le 21 octobre 1982, soit postérieurement à la décision de l'Office et au dépôt de la plainte à l'autorité de surveillance, peut avoir une influence sur l'adjudication prononcée le 24 mars 1982.
Les recourants ont acquis la propriété de l'aéronef par l'adjudication (AMONN, p. 211 no 3 et 228 in fine). Il s'agit d'une acquisition originaire de la propriété, soumise au droit public, le président des enchères conférant la propriété au dernier enchérisseur en vertu de ses fonctions officielles (
ATF 93 III 43). Cette acquisition de la propriété ne peut être révoquée que par l'admission d'une plainte contre l'adjudication (
art. 136bis LP, également applicable aux meubles -
ATF 106 III 23). Lorsqu'elle s'applique, la réalisation forcée portant sur des aéronefs (art. 52 et suivants de la loi sur le registre des aéronefs) obéit au même principe (art. 60). La convention du 19 juin 1948 relative à la reconnaissance internationale des droits sur aéronefs prévoit le même principe, tout en portant le délai de plainte à six mois (art. VII al. 3; cf. également circulaire no 35 sur l'exécution forcée portant sur des aéronefs, ch. I dernier alinéa). Cette convention prévoit en outre expressément à son art. VIII que la vente forcée d'un aéronef conformément aux dispositions de l'art. VII transfère la propriété de l'aéronef libre de tous droits non repris par l'acquéreur.
Il suit de là que les recourants ont acquis la propriété de l'avion litigieux dès le 24 mars 1982, l'adjudication n'ayant comme telle fait l'objet d'aucune plainte dans les six mois qui l'ont suivie, soit jusqu'au 24 septembre 1982, antérieurement au prononcé de faillite du 21 octobre 1982 contre Y. A ce moment-là, l'avion litigieux était bien sorti du patrimoine de la société poursuivie tombée en faillite et ne pouvait dès lors rentrer dans sa masse, contrairement à ce que pensent les recourants qui se réfèrent sur ce point à la lettre du syndic de la masse en faillite du 31 mai 1983. Le prononcé de faillite en question n'a donc eu aucune incidence sur l'adjudication elle-même et les adjudicataires conservaient la possibilité de s'acquitter du solde du prix de vente, tant que la décision de révocation n'était pas devenue définitive (
ATF 109 III 40,
ATF 75 III 13/14).
A cet égard, l'Office a accordé aux adjudicataires un délai au
BGE 109 III 69 S. 76
18 octobre 1982 pour payer le solde du prix d'adjudication et les frais. Ce délai a été prolongé par l'Autorité de surveillance, qui a accordé l'effet suspensif à la plainte déposée le 18 octobre 1982, en ce sens que l'adjudication ne serait pas révoquée jusqu'à droit connu sur la plainte. Les recourants n'ont toutefois pas payé le solde dû jusqu'à l'expiration du délai ainsi prolongé. Dans leur plainte comme dans le présent recours, ceux-ci déclarent expressément ne pas vouloir payer avant d'avoir obtenu l'exmatriculation de l'avion en Italie. Ils n'ont pas davantage manifesté leur intention de payer lorsqu'ils ont été informés de la faillite de Y. La décision de révocation de l'enchère est ainsi entrée en force avec la communication de la décision dont est recours (
art. 36 LP). En conséquence, les recourants ont perdu la propriété qu'ils avaient acquise par l'adjudication et l'aéronef litigieux, dont la réalisation n'était pas terminée, est tombé dans la masse de la société faillie Y.
C'est vainement, à ce propos, que les recourants reprochent à l'autorité cantonale de ne pas leur avoir accordé un délai supplémentaire pour s'acquitter du solde dû. Outre le fait qu'ils ne l'avaient pas eux-mêmes requis, l'octroi d'un tel délai n'était plus justifié. Si, dans l'arrêt 109 III 40 déjà cité, l'Autorité de surveillance a prolongé d'une dizaine de jours l'effet suspensif accordé à la plainte, c'est en considération du fait que, la décision de révocation entraînant la fixation de nouvelles enchères, l'adjudicataire eût sans cela perdu le bénéfice de ses enchères. Il n'en va toutefois pas de même dans la présente espèce; en effet, compte tenu de la faillite intervenue entre-temps, la fixation de nouvelles enchères était impossible de sorte que la possibilité de fait de payer après la révocation de l'adjudication n'existe pas.
Vu ce qui précède, la critique des recourants selon laquelle l'Office des poursuites aurait mis en vente forcée un objet sans valeur est dénuée de tout fondement. Comme on l'a vu, les adjudicataires ont acquis la propriété de l'aéronef dès le 24 mars 1982, propriété qu'ils auraient conservée s'ils avaient encore payé dans le délai prolongé par l'octroi de l'effet suspensif à leur plainte. Leur demeure, dont on n'a par ailleurs pas à rechercher si elle est fautive (ATF 75 III 14), est donc la seule cause de la révocation de l'adjudication.