BGE 128 III 156 |
28. Extrait de l'arrêt de la Chambre des poursuites et des faillites dans la cause S. (recours LP) |
7B.15/2002 du 26 mars 2002 |
Regeste |
Beschwerde gegen Entscheide über Disziplinarmassnahmen im Zwangsvollstreckungsrecht. |
Sachverhalt |
Sur la base d'un rapport officiel relatant divers dysfonctionnements et manquements à la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, à ses ordonnances d'exécution et à des normes de droit cantonal, l'autorité cantonale de surveillance des offices de poursuites et de faillites a prononcé la destitution de certains fonctionnaires en vertu de l'art. 14 al. 2 ch. 4 LP. Trois d'entre eux, dont S., ont recouru à la Chambre des poursuites et des faillites du Tribunal fédéral en invoquant l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation dans l'application de la disposition précitée. Leurs recours ont été déclarés irrecevables. Ils ont également exercé des recours de droit public. |
Extrait des considérants: |
1. a) Selon une jurisprudence constante, la Chambre des poursuites et des faillites examine la décision disciplinaire rendue par une autorité de surveillance seulement lorsque cette dernière n'était pas compétente pour prendre des mesures disciplinaires contre le fonctionnaire ou que la sanction n'était pas prévue par l'art. 14 al. 2 LP; elle ne peut en revanche examiner si la mesure disciplinaire était inopportune, excessive ou infondée (ATF 112 III 67 consid. 2a p. 70 s. et les références). Le recours selon l'art. 19 al. 1 LP n'étant pas ouvert à cet effet, celui de droit public est par contre recevable sous l'angle de l'art. 84 al. 2 OJ. |
Saisi d'un tel recours, le Tribunal fédéral n'intervient que si l'autorité cantonale de surveillance a commis un excès ou un abus dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, qui est large dans le cadre de l'application de l'art. 14 al. 2 LP (ATF 112 III 67 consid. 7a p. 73). Il y a excès ou abus du pouvoir d'appréciation lorsque la décision attaquée repose sur une appréciation insoutenable des circonstances de fait, qu'elle est inconciliable avec les règles du droit et de l'équité, qu'elle omet de tenir compte de tous les éléments de fait propres à fonder la décision ou encore lorsqu'elle prend au contraire en considération des circonstances qui ne sont pas pertinentes (ibidem; ATF 109 Ia 107 consid. 2c p. 109 et les références).
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b) La loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite a, dès le 1er janvier 1997, assimilé formellement le grief d'excès ou d'abus du pouvoir d'appréciation à celui de violation de la loi en l'inscrivant à son art. 19 al. 1. Elle n'a fait que reprendre la jurisprudence qui consacrait déjà cette assimilation (cf. Message concernant la révision de la LP du 8 mai 1991, FF 1991 III 43). La définition de l'excès ou de l'abus de droit retenue dans le cadre de l'art. 19 al. 1 LP rejoint cependant celle donnée à la même notion dans le cadre du recours de droit public (consid. 1a supra) et plus généralement celle de l'arbitraire (cf. SANDOZ-MONOD, Commentaire de la loi fédérale d'organisation judiciaire, vol. II, Berne 1990, p. 721 s. et la jurisprudence citée). On soutient pourtant en doctrine que le recours à la Chambre des poursuites et des faillites du Tribunal fédéral pour excès ou abus du pouvoir d'appréciation devrait également être ouvert en matière disciplinaire (cf. GILLIÉRON, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, n. 40 ad art. 14 LP; FRANK EMMEL, in Kommentar zum Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, Staehelin/Bauer/Staehelin, n. 13 ad art. 14 LP).
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Il y a donc lieu de revoir la situation.
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c) La décision susceptible d'être déférée au Tribunal fédéral au sens de l'art. 19 al. 1 LP est celle par laquelle l'autorité cantonale (supérieure) de surveillance statue sur les conclusions formulées contre une mesure (ou une omission) des autorités de poursuite ou de faillite, ou ordonne elle-même une telle mesure (SANDOZ-MONOD, loc. cit., p. 709 s. et les références). Par mesure, il faut entendre tout acte d'autorité accompli par l'office ou par un organe de la poursuite en exécution d'une mission officielle dans une affaire concrète (ATF 116 III 91 consid. 1 et les références). |
En droit de la poursuite, le Tribunal fédéral n'a pas de pouvoir disciplinaire et ne saurait en exercer un (C. JAEGER, Commentaire de la LP, n. 6 s. ad art. 14 LP; GILLIÉRON, op. cit., n. 39 ad art. 14 LP et la jurisprudence citée; FRANCO LORANDI, Betreibungsrechtliche Beschwerde und Nichtigkeit, n. 66 ad art. 14 LP et les références). Cette compétence est réservée aux seules autorités cantonales de surveillance (ATF 47 III 119). Celles-ci ont un pouvoir d'appréciation qui s'exerce dans le cadre des peines prévues par le droit fédéral, mais leurs décisions en la matière n'ont pas pour objet une contestation relative à un acte de poursuite (GILLIÉRON, op. cit., n. 48 ad art. 19 LP).
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Il faut noter par ailleurs que lorsque l'autorité qui prend la décision disciplinaire n'est pas l'autorité cantonale de surveillance ou que la peine infligée n'est pas prévue par le droit fédéral, il y a méconnaissance grave d'une norme - l'art. 14 LP - qui attribue clairement le pouvoir disciplinaire aux autorités cantonales de surveillance et dresse une liste précise et exhaustive des sanctions (cf. GILLIÉRON, op. cit., n. 20, 32 et 40 ad art. 14 LP; EMMEL, loc. cit., n. 5 s. ad art. 14 LP). Or, la méconnaissance grave d'une norme équivaut à l'arbitraire, qui peut être invoqué dans un recours de droit public (cf. notamment ATF 120 Ia 369 consid. 3a p. 373; ATF 118 Ia 129 consid. 2).
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Il suit de là que le recours de l'art. 19 al. 1 LP pour violation du droit fédéral et pour abus ou excès du pouvoir d'appréciation n'est pas recevable contre les décisions de mesures disciplinaires. Le seul moyen de droit à disposition contre de telles décisions est donc le recours de droit public pour violation de droits constitutionnels des citoyens au sens de l'art. 84 al. 1 let. a OJ.
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Il y a lieu toutefois d'excepter les cas où, comme dans l'espèce jugée à l' ATF 119 III 118 (consid. 4), l'autorité cantonale de surveillance, se prononçant non pas comme autorité disciplinaire, mais comme autorité de surveillance, examine la désignation ou la composition d'une administration spéciale (ATF 112 III 67 consid. 2b p. 72).
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