130 III 723
Urteilskopf
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98. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile dans la cause A.X. contre B.Y. et consorts ainsi que Tribunal administratif du canton de Vaud (recours de droit administratif)
5A.12/2003 du 6 avril 2004
Regeste
Art. 23 Abs. 3 und Art. 70 IPRG ; Anerkennung eines ausländischen Urteils betreffend die Feststellung des Kindesverhältnisses und Gesetzesumgehung.
Art. 23 Abs. 3 und Art. 70 IPRG wollen die Entstehung von Rechtsverhältnissen vermeiden, die nur von einem Staat anerkannt werden. Der Erwerb einer ausländischen Staatsangehörigkeit, um ein ausländisches Urteil über die Feststellung des Kindesverhältnisses zu erlangen, verletzt diese Bestimmungen nicht und ist in der Schweiz zu anerkennen (E. 3).
A.X., citoyen suisse, né le 24 août 1955, est issu de l'union libre de F.X., et de H.Y., citoyen français d'origine juive, décédé le 3 décembre 1999 à Genève. Il est inscrit au Registre d'état civil de sa commune d'origine comme fils de F.X. et de père inconnu.
Le 12 février 2001, A.X. a saisi le Tribunal des affaires familiales de Haïfa d'une action en reconnaissance de paternité dirigée contre l'exécuteur testamentaire et administrateur d'office de la succession de H.Y. Par jugement du 22 juillet 2001, ce tribunal, attestant de la citoyenneté israélienne du demandeur, a reconnu la paternité de H.Y. sur la base d'une expertise ADN, effectuée à Genève sur commission rogatoire de l'Etat d'Israël.
Le 11 octobre 2001, A.X. a requis la transcription du jugement israélien du 22 juillet 2001 dans les registres de l'état civil, en application du droit international privé suisse. Dans le cadre de l'instruction de cette demande, l'état civil cantonal a obtenu la production de l'attestation d'entrée en force du jugement précité et a invité les héritiers légaux de H.Y. à se déterminer sur la requête. Ceux-ci se sont opposés à la reconnaissance du jugement et à la transcription de celui-ci dans les registres de l'état civil.
Par décision du 25 juin 2002, le Service de la population a ordonné la transcription, dans les registres des familles et des naissances, du jugement israélien constatant que A.X. est le fils de H.Y.
Par arrêt du 19 mai 2003, le Tribunal administratif du canton de Vaud a admis le recours interjeté par les héritiers légaux potentiels de H.Y., annulé la décision attaquée du 25 juin 2002 et constaté que le jugement du Tribunal des affaires familiales de Haïfa du 22 juillet 2001 reconnaissant la paternité de H.Y. à l'égard de A.X. ne pouvait être reconnu en Suisse. Il a jugé en bref que, même si l'ensemble des conditions des art. 25 à 27 LDIP étaient réalisées, l'autorité inférieure aurait dû refuser la transcription du jugement étranger, dès lors que celui-ci avait été obtenu dans le but d'éluder la loi et plus particulièrement l'art. 308 aCC qui prévoit un délai de péremption d'une année à compter de la naissance pour une action en paternité.
A.X. forme un recours de droit administratif au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 19 mai 2003. Il demande la reconnaissance en Suisse et la transcription dans les registres des familles et des
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naissances du jugement du Tribunal des affaires familiales de Haïfa du 22 juillet 2001.Le Tribunal fédéral a admis le recours dans la mesure où il est recevable.
Extrait des considérants:
3.1 Invoquant une violation de l' art. 27 al. 2 let. a et b LDIP , les intimés soutiennent que, selon le droit français, ils auraient dû être parties au procès dans le cadre de l'action en reconnaissance de paternité menée en Israël, qu'il n'était pas possible de leur substituer l'administrateur officiel suisse de la succession, qui n'a pas qualité pour défendre à une telle action, et qu'ils n'ont par conséquent pas eu la possibilité de faire valoir leurs moyens.
Ce faisant, les intimés invoquent, devant le Tribunal fédéral, des faits nouveaux qu'il leur appartenait, en vertu de leur devoir de collaboration, de faire valoir devant les juridictions inférieures déjà. De tels allégués sont tardifs et donc irrecevables (cf. supra, consid. 1.2; FRITZ GYGI, Bundesverwaltungsrechtspflege, 2e éd., p. 259). En effet, les intimés n'ont pas fait valoir le grief de violation de l'ordre public procédural, ni devant le Service de la population du Département des institutions et des relations extérieures du canton de Vaud, ni devant le Tribunal administratif et aucune des instances cantonales n'a donc instruit, ni constaté les faits à ce sujet, la conformité de la décision à reconnaître à l'ordre public procédural n'étant pas examinée d'office (ATF 116 II 625 consid. 4b p. 630).
3.2 Les intimés soutiennent que la demande de reconnaissance du jugement israélien doit être rejetée, au motif que le recourant ne possède pas ou plus la nationalité israélienne, qu'il n'aurait démontrée que par la production d'une carte d'identité et non pas au moyen d'un passeport israélien ou d'une carte d'immigrant.
3.2.1 L'art. 22 LDIP précise que la nationalité d'une personne physique se détermine d'après le droit de l'Etat dont la nationalité est en cause. Chaque Etat détermine ainsi la nationalité de ses propres ressortissants.
Selon l'art. 25 LDIP, une décision étrangère est reconnue en Suisse si la compétence des autorités judiciaires de l'Etat dans lequel elle a été rendue était donnée, si elle n'est plus susceptible de recours ordinaire ou si elle est définitive et s'il n'y a pas de motif de refus
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au sens de l'art. 27 LDIP. Selon l'art. 26 al. 1 LDIP, la compétence des autorités étrangères est notamment donnée si elle résulte d'une disposition de la LDIP. L'art. 70 al. 3 LDIP, qui traite de la compétence indirecte, dispose que les décisions étrangères relatives à la constatation et à la contestation de la filiation sont reconnues en Suisse lorsqu'elles ont été rendues, notamment, dans l'Etat national de l'enfant. L'art. 23 al. 3 LDIP précise que si la reconnaissance d'une décision étrangère en Suisse dépend de la nationalité d'une personne, la prise en considération d'une des nationalités suffit.
3.2.2 Conformément aux constatations cantonales, la nationalité israélienne de A.X. a été établie par une copie de sa carte d'identité et attestée par le juge israélien lui-même, de sorte que cette question ne saurait être remise en cause dans la présente procédure. Pour le reste, les intimés ne contestent pas que le juge israélien était compétent pour se prononcer sur l'action en paternité en application des dispositions précitées, ni que le jugement israélien a été déclaré définitif et exécutoire le 10 mars 2002 par le Tribunal des affaires familiales de Haïfa.
3.3 Se plaignant d'une violation des art. 23 al. 3 et 70 LDIP , le recourant conteste avoir commis une fraude à la loi en ouvrant une action en paternité devant un tribunal israélien, puis en demandant la reconnaissance de la décision étrangère devant les autorités suisses.
3.3.1 Le législateur - contrairement à ce qu'il a fait à l'art. 45 LDIP - n'a pas introduit une clause de fraude à la loi en ce qui concerne la reconnaissance des jugements étrangers en constatation ou en contestation de la paternité.
3.3.2 Dans chaque cas, il convient d'examiner si la conception de la règle de conflit applicable permet d'avoir recours à la réserve de la fraude à la loi. La réponse dépend de la ratio de la règle de conflit. Il ne peut y avoir fraude en droit international privé que si le sujet de droit veut par la modification de l'état de fait - par exemple l'acquisition d'une nationalité - soumettre sa cause à la compétence d'un autre ordre juridique et n'observe que la lettre (formelle) de la loi mais viole la ratio de la norme en question. Il ne peut, en principe, y avoir fraude lorsque le rattachement est le domicile, car il n'est pas possible de transférer le centre de son existence de manière frauduleuse. La fraude est également exclue lorsque la loi autorise expressément le choix du droit applicable. Il
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ne peut pas non plus y avoir fraude lorsque le favor divortii fait partie de la conception fondamentale de la loi; dans ce cas, le changement de la nationalité pour obtenir le divorce n'est pas critiquable. Lorsque la règle de conflit prévoit comme rattachement la nationalité, il y a lieu d'examiner si la ratio consiste en premier lieu en des considérations d'ordre général comme par exemple l'harmonie des décisions, ou si la cause de ce rattachement est le lien effectif de l'acquéreur de la nouvelle nationalité avec l'Etat qui la lui a conférée. Dans le premier cas, on tiendra compte de la nouvelle nationalité, alors que, dans le second cas, on ne prendra pas en considération la nouvelle nationalité purement formelle, acquise sans animus mutandi (VISCHER, Zum Problem der rechtsmissbräuchlichen Anknüpfung im internationalen Privatrecht, in Aequitas und Bona fides, Festgabe zum 70. Geburtstag von August Simonius, p. 401 ss, spéc. 403 à 405; VISCHER, IPRG Kommentar, n. 14 ad art. 17 LDIP). Lorsqu'une nationalité est régulièrement acquise, il est rare que le rattachement à celle-ci soit jugé abusif (KNOEPFLER/SCHWEIZER, Droit international privé suisse, 2e éd., n. 337, p. 153).
3.3.3 En matière de reconnaissance de jugements rendus à l'étranger, le droit international privé suisse est moins exigeant qu'en matière de for ou de droit applicable. Lorsqu'une personne a plusieurs nationalités, l'art. 23 LDIP dispose, en ce qui concerne le for, que seule la nationalité suisse est prise en compte (al. 1). Au sujet du droit applicable, cet article prévoit de tenir compte de la nationalité de l'Etat avec lequel le justiciable en cause a les relations les plus étroites (al. 2). En revanche, lorsque la reconnaissance d'une décision étrangère dépend de la nationalité d'une personne, la prise en considération d'une de ses nationalités suffit (al. 3). Dans ce dernier cas, la loi renonce à exiger une relation effective entre le justiciable et l'Etat dont la nationalité est prise en compte; elle opte ainsi pour le principe du favor recognitionis, la non-reconnaissance d'une décision étrangère pouvant conduire à augmenter le nombre de rapports juridiques boiteux (DUTOIT, Droit international privé, Commentaire de la loi fédérale du 18 décembre 1987, n. 4 ad art. 23 p. 84). En matière de contestation ou de constatation de la filiation, la loi prévoit des rattachements en cascade en ce qui concerne le for (art. 67 LDIP) et le droit applicable (art. 68 LDIP), alors que pour la reconnaissance d'un jugement rendu à l'étranger sont prévus des rattachements alternatifs. L'art. 70 LDIP dispose en effet
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que les décisions étrangères relatives à la constatation ou à la contestation de la filiation sont reconnues en Suisse lorsqu'elles ont été rendues dans l'Etat de la résidence habituelle de l'enfant ou dans son Etat national ou dans l'Etat du domicile ou dans l'Etat national de la mère ou du père. Ainsi, la loi exprime aussi le principe du favor recognitionis en matière de contestation et de constatation de paternité. En présentant un tel éventail de rattachements, la loi veut éviter des situations boiteuses. La ratio de cette règle de conflit est ainsi l'harmonisation de la situation en Suisse avec des décisions prises à l'étranger. Le lien effectif du justiciable avec l'Etat dont il a acquis la nationalité ne joue pas de rôle dans le choix de ce rattachement (cf. Message concernant une loi fédérale sur le droit international privé du 10 novembre 1982, n° 82.072, in FF 1983 I 255 ss, n° 215.6 p. 314 et n° 242.3 p. 358; Bundesgesetz über das internationale Privatrecht: Schlussbericht der Expertenkommission zum Gesetzenentwurf, p. 151; DUTOIT, op. cit., n. 4 ad art. 23 LDIP, n. 1 ad art. 70 LDIP; VISCHER, IPRG Kommentar, n. 16 ad art. 23 LDIP).Au vu de ce qui précède, le fait d'acquérir la nationalité israélienne pour soumettre sa cause au droit israélien et ainsi obtenir un jugement en constatation de paternité ne viole pas la ratio des art. 23 et 70 LDIP . Partant, on ne peut reprocher au recourant d'avoir commis une fraude à la loi et le jugement israélien doit être reconnu.
Referenzen
BGE: 116 II 625
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