BGE 131 III 667 |
88. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile dans la cause A., B. et C. contre Transports Publics Genevois et X. (recours en réforme) |
5C.142/2005 du 30 septembre 2005 |
Regeste |
Art. 48 OG; subjektive Klagenhäufung; Teilentscheid. |
Sachverhalt |
Le 21 février 2002, à 15 h 28, D. a été percuté par un tramway venant de Genève et circulant en direction de la douane de Moillesulaz, alors qu'il traversait les voies à la hauteur du n° 35 de la rue de Chêne-Bougeries. Immédiatement conduit à l'hôpital, il est décédé dans la nuit des suites de ses blessures. |
Le 24 février 2003, A., B. et C. - soit respectivement l'ex-épouse et les filles de D. - ont ouvert action, devant le Tribunal de première instance du canton de Genève, en réparation du dommage (frais directement liés au décès et perte de soutien) et du tort moral qu'elles auraient subis ensuite du décès de D. Les conclusions de la demande, tendant au paiement d'une somme totale de 284'503 fr., étaient dirigées conjointement et solidairement contre la République et Canton de Genève (ci-après: l'Etat de Genève), propriétaire de l'ouvrage, recherché selon l'art. 58 CO, contre les Transports Publics Genevois (ci-après: les TPG), recherchés en vertu de la loi fédérale sur la responsabilité civile des entreprises de chemins de fer et de bateaux à vapeur et de La Poste Suisse (RS 221.112.742), et contre X., conductrice du tramway, recherchée sur la base de l'art. 41 CO. |
L'Etat de Genève, les TPG et X. ont conclu au rejet de l'action. Le 13 mai 2004, le Tribunal a remis la cause pour plaider sur la question du principe de la responsabilité des parties défenderesses.
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Par jugement du 28 octobre 2004, le Tribunal, considérant que la responsabilité des parties défenderesses dans l'accident qui avait coûté la vie à D. n'était pas engagée, a débouté les demanderesses de toutes leurs conclusions, avec suite de dépens.
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Statuant par arrêt du 15 avril 2005 sur appel des demanderesses, la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève a constaté que la responsabilité civile des TPG était engagée, au contraire de celle de l'Etat de Genève et de X. Elle a en outre retenu une faute concomitante de la victime entraînant une réduction de 75 % de toute éventuelle indemnité, renvoyé la cause au Tribunal de première instance pour qu'il statue sur le dommage dans le sens des considérants, confirmé le jugement de première instance pour le surplus et fixé les dépens.
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Contre cet arrêt, les demanderesses - qui contestaient la décision de la Cour de justice en tant qu'elle ne reconnaissait pas la responsabilité de X., conductrice du tramway, et en tant qu'elle retenait une faute concomitante de la victime entraînant une réduction de 75 % de toute éventuelle indemnité qui serait allouée par le Tribunal de première instance - ont exercé en parallèle un recours de droit public et un recours en réforme au Tribunal fédéral.
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À l'instar du recours de droit public, le recours en réforme a été jugé recevable (mais rejeté) dans la mesure où il se rapportait à l'action dirigée contre X.
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Extrait des considérants: |
1. Le Tribunal fédéral examine d'office et avec une pleine cognition la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 131 II 58 consid. 1; ATF 129 III 415 consid. 2.1; ATF 126 III 274 consid. 1 et les arrêts cités). |
1.3 Lorsqu'une décision rejette l'action dirigée contre un consort - ou, comme en l'espèce, les actions dirigées contre deux consorts - mais ne met pas fin à l'action dirigée contre un autre consort, on est en présence d'un jugement partiel (ATF 127 I 92 consid. 1a; ATF 129 III 25 consid. 1.1). Un tel jugement n'est pas considéré comme une décision finale visée par l'art. 48 OJ, bien que la pratique le distingue des décisions préjudicielles ou incidentes (ATF 127 I 92 consid. 1b; ATF 129 III 25 consid. 1.1). Le recours immédiat contre les jugements partiels est soumis à un régime particulier, dicté par des motifs d'économie de procédure: selon la jurisprudence, un jugement partiel peut ainsi faire l'objet d'un recours en réforme immédiat lorsqu'il tranche au fond le sort d'une prétention qui aurait pu faire à elle seule l'objet d'un procès distinct et dont le jugement est préjudiciel à celui des autres conclusions encore litigieuses (ATF 129 III 25 consid. 1.1; ATF 124 III 406 consid. 1a; ATF 123 III 140 consid. 2a; ATF 117 II 349 consid. 2a). |
Ces conditions visent toutefois le cas où plusieurs chefs de conclusions ont été pris contre la même partie défenderesse (cumul objectif d'actions), et ne peuvent être transposées sans autre à un jugement partiel par lequel il est statué sur l'action dirigée contre l'un de plusieurs consorts simples (cumul subjectif d'actions); en pareil cas, le Tribunal fédéral a admis la recevabilité du recours en réforme immédiat, en application par analogie de l'art. 50 OJ, lorsque l'étendue de la procédure probatoire dépend dans une mesure importante du point de savoir si tous les consorts ou seuls certains d'entre eux peuvent être recherchés (ATF 129 III 25 consid. 1.1; ATF 107 II 349 consid. 2).
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Enfin, le Tribunal fédéral a également jugé, s'agissant de la recevabilité d'un recours de droit public, qu'en présence d'un jugement partiel rendu dans le cadre d'un cumul subjectif d'actions dirigées contre des défendeurs liés par un rapport de consorité simple et qui tranche définitivement le sort de la prétention contre l'un des consorts, le principe de l'économie de la procédure, associé à celui de la proportionnalité et de l'intérêt bien compris des parties, justifie d'autoriser la partie à l'égard de laquelle il a été statué définitivement à saisir le Tribunal fédéral sans attendre la fin du procès contre les autres consorts, qui ne la concerne plus (ATF 127 I 92 consid. 1d; ATF 116 II 80 consid. 2b in fine).
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En revanche, le recours ne peut qu'être déclaré irrecevable dans la mesure où il se rapporte à l'action dirigée contre les TPG. En effet, il ne pourra de toute manière être statué sur cette action qu'après instruction sur le dommage éventuel subi par les demanderesses, si bien que la condition première d'un recours en réforme immédiat selon l'art. 50 OJ - à savoir que le Tribunal fédéral soit en mesure de mettre lui-même fin définitivement à la procédure en cas d'admission du recours (ATF 127 III 433 consid. 1c/aa; ATF 122 III 254 consid. 2a) - n'est pas remplie en l'espèce. Le Tribunal fédéral n'entrera par conséquent pas en matière sur les griefs par lesquels les demanderesses reprochent à la cour cantonale d'avoir retenu une faute concomitante de la victime entraînant une réduction de 75 % de toute indemnité que les TPG pourraient être condamnés à payer. |