BGE 133 III 527 |
67. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit civil dans la cause A. contre X. Assurances (recours en matière civile) |
4A_168/2007 du 16 juillet 2007 |
Regeste |
Taggeldversicherung nach VVG und UVG; Recht des Versicherers, auf die Taggelder die Rente anzurechnen, die der Versicherte von der Invalidenversicherung geltend machten könnte; Art. 61 VVG, Art. 156 OR und Art. 51 Abs. 2 UVV. |
Bei einer dem UVG unterstehenden Taggeldversicherung ergibt sich das Recht des Versicherers, seine Leistungen um den von der Invalidenversicherung geschuldeten Betrag zu reduzieren, aus Art. 51 Abs. 2 UVV (E. 4). |
Sachverhalt |
A. A., née en 1945, bénéficie depuis 1997 auprès de X. Assurances (ci-après: l'assureur) d'une assurance-accidents obligatoire selon la loi fédérale sur l'assurance-accidents (LAA; RS 832.20) ainsi que d'une assurance-accidents complémentaire à la LAA, prévoyant le versement d'indemnités journalières en cas d'accident. Elle est en outre au bénéfice, auprès du même assureur, d'une "assurance collective d'une indemnité journalière en cas de maladie", soumise à la loi fédérale sur le contrat d'assurance (LCA; RS 221.229.1), qui prévoit le droit à des indemnités journalières correspondant à 80 % du salaire assuré (150'000 fr. par an) pendant 730 jours, moins le délai d'attente de 30 jours. |
A la suite d'un accident survenu le 5 novembre 2002, l'assureur a versé à l'assurée des indemnités journalières sur la base de l'assurance-accidents obligatoire et complémentaire. Dès le 18 septembre 2003, il a considéré que les troubles persistants relevaient de la maladie et a versé à l'assurée des indemnités journalières sur la base de l'assurance perte de gain maladie.
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Le 7 janvier 2005, l'assureur a invité son assurée à déposer une demande de prestations d'invalidité et à le lui confirmer avant le 31 janvier 2005. Le 23 février 2005, il a informé son assurée que son droit aux indemnités journalières en cas de maladie serait épuisé le 1er septembre 2005; il a par ailleurs réitéré sa demande d'annoncer le cas à l'assurance-invalidité, tout en précisant qu'à défaut, il imputerait une "pseudo-rente d'invalidité" sur les prestations dues. |
L'assurée ayant contesté l'obligation de former une demande de prestations d'invalidité, l'assureur a maintenu sa position et a calculé les prestations encore dues compte tenu de la déduction d'une rente d'invalidité hypothétique de 1'500 fr. dès le 1er novembre 2003.
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Le 20 juin 2005, l'assurée a été victime d'un nouvel accident, pour lequel l'assureur a accordé des indemnités journalières sur la base de l'assurance-accidents obligatoire et complémentaire jusqu'au 30 septembre 2005, en déduisant toutefois de ces prestations une rente d'invalidité hypothétique de 1'479 fr. 30.
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B. Le 20 juillet 2006, l'assurée a actionné l'assureur en paiement de la somme de 49'239 fr., plus intérêts, à titre d'indemnités journalières de l'assurance-accidents complémentaire et de l'assurance perte de gain maladie pour la période du 18 septembre 2003 au 18 avril 2006.
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Par arrêt du 4 avril 2007, le Tribunal cantonal des assurances sociales du canton de Genève a partiellement admis la demande et a condamné la défenderesse à payer à la demanderesse la somme de 3'772 fr. 05 plus intérêts.
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C. Le Tribunal fédéral a rejeté le recours en matière civile interjeté par la demanderesse contre cet arrêt.
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Extrait des considérants: |
Erwägung 2 |
2.1 Les juges cantonaux ont considéré que la défenderesse était en droit d'imputer sur ses prestations la rente AI hypothétique, correspondant au montant maximal prévu par la loi fédérale du 19 juin 1959 sur l'assurance-invalidité (LAI; RS 831.20), à laquelle la demanderesse aurait pu prétendre à compter du mois de mars 2004 si elle avait formé une demande AI en mars 2005, comme cela pouvait être exigé d'elle. Selon l'autorité cantonale, l'obligation de s'annoncer à l'assurance-invalidité - entraînant la réduction des prestations en cas de violation de cette obligation - pouvait en effet être imposée à l'assurée tant dans le cadre de l'assurance perte de gain maladie, en vertu de l'obligation de diminuer le dommage (art. 61 al. 1 LCA), que dans le cadre de l'assurance-accidents complémentaire, en vertu de l'art. 51 al. 2 de l'ordonnance du 20 décembre 1982 sur l'assurance-accidents (OLAA; RS 832.202), applicable par renvoi des conditions générales d'assurance. |
Erwägung 3 |
La demanderesse soutient ensuite qu'à supposer qu'elle ait eu l'obligation de s'annoncer à l'assurance-invalidité en vertu de l'art. 61 al. 1 LCA, les juges cantonaux auraient dû déterminer si l'assureur était en droit de réduire ses prestations en application de l'art. 61 al. 2 LCA. En n'examinant pas si la demanderesse avait agi d'une manière inexcusable au sens de cette disposition, soit si une faute grave pouvait lui être reprochée, l'autorité cantonale aurait violé son devoir minimum d'examiner et de traiter les problèmes pertinents, découlant de l'art. 29 al. 2 Cst. En tout état, la demanderesse conteste avoir commis une faute grave.
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Enfin, la demanderesse soutient qu'il résulterait des conditions générales d'assurance, interprétées selon les principes généralement reconnus en matière d'interprétation des contrats (cf. art. 18 CO), que les indemnités journalières doivent être versées, dans les limites de la durée maximale prévue, sans considération d'un quelconque droit à une rente AI, et que les parties n'ont prévu ni l'obligation pour l'assuré de s'annoncer à l'AI, ni le droit pour l'assureur d'imputer sur ses prestations des rentes hypothétiques. |
Erwägung 3.2 |
Dans des arrêts qui concernaient comme ici une assurance collective d'indemnités journalières selon la LCA (arrêt 5C.211/2000 du 8 janvier 2001, consid. 4c non publié à l' ATF 127 III 106; arrêt 5C.176/1998 du 23 octobre 1998, consid. 2c), le Tribunal fédéral a considéré que l'art. 61 LCA était l'expression du même principe général dont le Tribunal fédéral des assurances déduisait, en matière d'assurance d'indemnités journalières soumise au droit des assurances sociales, l'obligation de l'assuré de diminuer le dommage par un changement de profession lorsqu'un tel changement peut raisonnablement être exigé de lui, pour autant que l'assureur l'ait averti à ce propos et lui ait donné un délai adéquat (cf. ATF 111 V 235 consid. 2a; ATF 114 V 281 consid. 3a; voir aussi VINCENT BRULHART, L'assurance collective contre la perte de gain en cas de maladie, in Le droit social dans la pratique de l'entreprise - questions choisies, 2006, p. 95 ss, 107). Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral des assurances, lorsque l'assuré doit envisager un changement de profession en regard de l'obligation de diminuer le dommage, la caisse doit l'avertir à ce propos et lui accorder un délai adéquat - pendant lequel l'indemnité journalière versée jusqu'à présent est due - pour s'adapter aux nouvelles conditions ainsi que pour trouver un emploi; dans la pratique, un délai de trois à cinq mois imparti dès l'avertissement de la caisse doit en règle générale être considéré comme adéquat (arrêt K 14/99 du 7 février 2000, publié in Assurance-maladie et accidents [RAMA] 2000 n° KV 112 p. 122, consid. 3a; voir aussi JEAN-LOUIS DUC, Assurance sociale et assurance privée, 2003, p. 109-111). |
Cette manière de voir est erronée. A la différence d'un changement de profession, qui permet à l'assuré de diminuer son dommage - car c'est bien le dommage subi par l'ayant droit qui est déterminant - en mettant à profit une capacité de travail qui n'existe plus dans sa profession actuelle, le fait de percevoir des prestations d'un tiers, telles qu'une rente d'invalidité, n'a pas pour effet de diminuer le dommage. Celui qui, bénéficiant d'une assurance d'indemnités journalières en cas de maladie ou d'accident selon la LCA, perçoit, en raison du même événement dommageable, des prestations d'un autre assureur, privé ou social, voire d'un tiers responsable, ne diminue pas son dommage. L'assureur ne saurait par conséquent invoquer l'obligation de diminuer le dommage selon l'art. 61 al. 1 LCA pour imposer à l'assuré de faire valoir les prétentions que celui-ci pourrait avoir contre un autre assureur, ou contre un tiers responsable, et pour réduire le cas échéant ses prestations en application de l'art. 61 al. 2 LCA.
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3.2.4 Lorsque le contrat d'assurance prévoit le versement à l'assuré d'une indemnité journalière forfaitaire - constituant ce que l'on désigne en langue allemande par l'expression Taggeld - qui ne suppose pas que l'assuré subisse une perte effective sur le plan économique, mais qui est versée en fonction du seul degré de l'incapacité de travail de l'assuré, il s'agit d'une assurance de sommes (arrêt 4C.83/1998 du 11 juin 1998, consid. 3d; ROLAND BREHM, L'assurance privée contre les accidents, 2001, n. 14 p. 42, n. 221 p. 126 et n. 376 p. 191; BRULHART, op. cit., p. 110; WILLY KOENIG, Schweizerisches Privatversicherungsrecht, 3e éd. 1967, p. 467; cf. ATF 119 II 361 consid. 4). |
Erwägung 3.3 |
Il apparaît ainsi clairement que le droit à une indemnité journalière n'est nullement subordonné à ce que l'assuré subisse une perte effective sur le plan économique, dès l'instant où un montant journalier forfaitaire est prévu en fonction du seul degré de l'incapacité de travail de l'assuré. On est donc en présence d'une assurance de sommes (cf. consid. 3.2.4 supra), dans le cadre de laquelle la prestation de l'assureur est due indépendamment du point de savoir si l'ayant droit reçoit des prestations de la part d'autres assureurs, sous réserve de dispositions particulières des conditions générales d'assurances sur ce point (cf. consid. 3.2.5 supra). |
Les juges cantonaux ont considéré qu'il ressort clairement de cette disposition que le simple droit hypothétique à une prestation d'une assurance sociale n'est pas suffisant pour que l'assureur puisse l'imputer sur les indemnités journalières dues; par conséquent, il ne saurait être déduit des conditions générales d'assurance que la défenderesse est en droit d'imputer sur ses prestations celles auxquelles l'assuré peut prétendre de la part des assurances sociales, s'il n'annonce pas le cas à celles-ci.
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3.3.3 Force est de constater, avec l'autorité cantonale, que les conditions générales d'assurance ne prévoient pas l'obligation pour l'assuré qui aurait droit à une rente d'une assurance sociale ou d'une assurance d'entreprise de solliciter cette rente, ni le droit pour l'assureur d'imputer sur ses propres prestations la rente hypothétique à laquelle l'assuré pourrait prétendre. Seul est prévu le droit pour l'assureur d'imputer sur les indemnités journalières assurées les rentes effectivement servies par une assurance sociale ou par une assurance d'entreprise. Il s'agit ainsi d'un droit qui est soumis à la condition que l'assuré perçoive une telle rente. Cela étant, comme la condition est réputée accomplie quand l'une des parties en a empêché l'avènement au mépris des règles de la bonne foi (art. 156 CO), on peut se demander si la demanderesse s'est comportée de manière contraire à la bonne foi en refusant de solliciter une rente de l'assurance-invalidité. |
Pour juger si un comportement déterminé enfreint les règles de la bonne foi, il convient de l'apprécier en tenant compte de toutes les circonstances du cas d'espèce, en particulier des motifs et du but poursuivi; il faut se garder d'interpréter trop largement l'art. 156 CO, car, en convenant d'une condition, les parties ont introduit dans leurs relations un élément d'incertitude qu'elles doivent assumer; elles n'ont pas l'obligation de favoriser l'avènement de la condition, et la bonne foi n'exige pas qu'elles sacrifient leurs propres intérêts à cette fin (arrêts 4C.281/2005 du 15 décembre 2005, publié in SJ 2006 I p. 174, consid. 3.5, et C.254/1987 du 16 novembre 1987, publié in SJ 1988 p. 158, consid. 2a, et les références citées; cf. ATF 117 II 273 consid. 5c p. 281 et les arrêts cités).
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En l'espèce, le refus de la demanderesse de solliciter une rente de l'assurance-invalidité, alors qu'elle y avait été invitée par la défenderesse et qu'elle y aurait eu droit selon les constatations de l'autorité précédente, n'apparaît guère compréhensible, et la demanderesse n'expose aucun motif digne de protection à l'appui de ce refus. Si elle affirme qu'un assuré peut avoir des motifs légitimes à ne pas solliciter une rente de l'assurance-invalidité, car cela empêcherait par exemple l'assuré d'obtenir le versement de son capital de prévoyance professionnelle, elle ne prétend pas que telle serait en l'espèce la raison de son refus, étant observé au surplus que l'institution de prévoyance peut prévoir dans son règlement que les ayants droit peuvent choisir une prestation en capital en lieu et place d'une rente de vieillesse, de survivants ou d'invalidité (art. 37 al. 4 let. a LPP [RS 831.40]).
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Dans ces circonstances, il convient d'admettre que la demanderesse s'est comportée de manière contraire à la bonne foi en refusant sans motif légitime de solliciter une rente de l'assurance-invalidité, empêchant ainsi l'avènement de la condition à laquelle la défenderesse aurait pu réduire ses prestations, conçues selon les conditions générales d'assurance comme subsidiaires à celles de l'assurance-invalidité.
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3.3.4 Il résulte de ce qui précède que l'arrêt attaqué est conforme au droit fédéral dans son résultat en tant qu'il retient que la défenderesse était en droit d'imputer sur ses prestations dues au titre de l'assurance d'indemnités journalières en cas de maladie la rente AI hypothétique à laquelle la demanderesse aurait pu prétendre à compter du mois de mars 2004. |
Erwägung 4 |
Ce grief est mal fondé. Les conditions générales d'assurance applicables prévoient clairement l'application des dispositions de la LAA. L'art. 24 desdites conditions générales n'est d'aucun secours à la demanderesse, puisqu'il ne prévoit l'application de la LCA qu'"en complément aux présentes dispositions". C'est donc à raison que l'autorité cantonale a appliqué l'art. 51 al. 2 OLAA, lequel autorise l'assureur à réduire ses prestations du montant des prestations qui seraient probablement dues par l'assurance-invalidité (JEAN-MAURICE FRÉSARD/MARGIT MOSER-SZELESS, L'assurance-accidents obligatoire, in Ulrich Meyer [éd.], Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht, vol. XIV, Soziale Sicherheit, 2e éd. 2007, p. 825 ss, n. 404 p. 956).
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