146 III 358
Urteilskopf
146 III 358
38. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit civil dans la cause V. et consorts contre W. et consorts, Fédération turque de football et Fédération Internationale de Football Association (recours en matière civile)
4A_486/2019 du 17 août 2020
Regeste
Art. 190 Abs. 2 lit. e IPRG; Art. 6 Ziff. 1 EMRK; internationale Schiedsgerichtsbarkeit; verfahrensrechtlicher Ordre public; Öffentlichkeit der Verhandlung.
Eine Missachtung von Art. 6 Ziff. 1 EMRK als solche begründet nicht zwingend eine Verletzung des verfahrensrechtlichen Ordre public, und die Beschwerdeführer zeigen nicht auf, inwiefern die Weigerung, öffentlich zu verhandeln, den verfahrensrechtlichen Ordre public verletzt (E. 4.1).
Die Garantien von Art. 6 Ziff. 1 EMRK sind ohnehin nicht anwendbar, da keine zivilrechtlichen Ansprüche und Verpflichtungen der Beschwerdeführer betroffen sind; sie handeln als blosse Anzeigesteller und haben keinen Anspruch darauf, dass ein Disziplinarverfahren gegen einen gegnerischen Club eröffnet wird (E. 4.2).
V. et W. sont deux clubs de football de première division en Turquie. Ils ont terminé à égalité de points le championnat de la saison 2010/2011 mais W. bénéficiait d'une différence de buts favorable dans les confrontations directes. W. a été sacré champion de Turquie, V. terminant deuxième.
En raison d'irrégularités survenues dans les matchs de cette saison, V. a entrepris des démarches tendant à ce W. fût sanctionné et à ce que lui-même obtînt le titre de champion. V. s'est adressé à la Fédération turque de football, à la Fédération Internationale de Football Association (FIFA) et à l'Union des Associations Européennes de Football (UEFA).
Ces organisations ont ouvert des procédures disciplinaires contre W. et certains de ses dirigeants; V. n'a toutefois pas été autorisé à y prendre part. Aucune sanction n'a été infligée à W.
V. et deux consorts ont saisi le Tribunal arbitral du sport d'un appel le 8 mai 2018. Parmi d'autres conclusions, les appelants requéraient le tribunal d'ordonner à la Fédération turque de football de sanctionner W. conformément au règlement de compétition applicable et de corriger le classement de l'édition 2010/2011 du championnat, en ce sens que V. fût premier et que le titre de champion 2010/2011 lui fût décerné avec tous les avantages économiques et symboliques y relatifs.
Le Tribunal arbitral du sport a informé les parties qu'il tiendrait audience le 15 mars 2019 afin de discuter diverses objections de procédure soulevées par les parties appelées. Il a rejeté une requête que les appelants fondaient notamment sur l'art. 6 par. 1 CEDH, tendant à ce que l'audience fût publique. Le tribunal a tenu audience à huis clos.
Le tribunal a rejeté l'appel par sentence du 30 juillet 2019, pour défaut de qualité pour agir.
BGE 146 III 358 S. 360
Le Tribunal fédéral a rejeté, dans la mesure où il était recevable, le recours en matière civile exercé contre cette sentence.
(résumé)
Extrait des considérants:
4. (...) les recourants font grief au tribunal arbitral d'avoir violé le principe de publicité des audiences tel que garanti par l'art. 6 par. 1 CEDH, en violation de l'ordre public procédural au sens de l'art. 190 al. 2 let. e LDIP (RS 291).
4.1 Il sied de rappeler, à titre liminaire, qu'une partie à la convention d'arbitrage ne peut pas se plaindre directement, dans le cadre d'un recours en matière civile au Tribunal fédéral formé contre une sentence arbitrale internationale, de ce que les arbitres auraient violé l'art. 6 par. 1 CEDH, même si les principes découlant de cette disposition peuvent servir, le cas échéant, à concrétiser les garanties invoquées sur la base de l'art. 190 al. 2 LDIP (ATF 142 III 360 consid. 4.1.2; arrêt 4A_268/2019 du 17 octobre 2019 consid. 3.4.3). En effet, les motifs de recours sont énoncés de manière exhaustive à l'art. 190 al. 2 LDIP. C'est donc à tort que les recourants invoquent directement la violation de l'art. 6 par. 1 CEDH qui fonde, selon eux, un grief sui generis venant s'ajouter implicitement aux motifs de recours prévus à l'art. 190 al. 2 LDIP en relation avec l'art. 77 al. 1 LDIP.
Alternativement, ils prétendent qu'une violation de l'art. 6 par. 1 CEDH implique - eo ipso - une violation de l'ordre public procédural au sens de l'art. 190 al. 2 let. e LDIP, dans la mesure où cette disposition doit être interprétée à l'aune de la jurisprudence de la CourEDH. Or, une violation du droit conventionnel ne coïncidant pas per se avec une violation de l'ordre public au sens de l'art. 190 al. 2 let. e LDIP, il incombe aux recourants de démontrer en quoi la prétendue violation de l'art. 6 par. 1 CEDH constituerait une violation de l'ordre public procédural, ce qu'ils ont omis de faire au mépris de l'art. 77 al. 3 LTF.
4.2 En l'espèce, l'applicabilité des garanties procédurales de l'art. 6 par. 1 CEDH est d'emblée exclue, dans la mesure où les recourants ne sont pas affectés dans leurs "droits et obligations de caractère civil", ni ne font l'objet d'une accusation en matière pénale. Ils ne peuvent être assimilés à des sportifs parties à un litige concernant
BGE 146 III 358 S. 361
leurs droits et obligations ou contre lesquels une procédure disciplinaire est engagée. Il s'agit plutôt de simples dénonciateurs, qui ne sont pas eux-mêmes affectés dans leurs droits. Il n'existe pas de droit à ce qu'une procédure disciplinaire soit ouverte à l'encontre d'un autre club. En outre, les recourants ne peuvent être qualifiés de tiers directement touchés par une éventuelle disqualification de leur concurrent, étant établi qu'ils n'en bénéficieraient pas automatiquement. Partant, le présent litige échappe au champ d'application ratione materiae de l'art. 6 par. 1 CEDH.Referenzen
BGE: 142 III 360
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