BGer 2C.2/2000
 
BGer 2C.2/2000 vom 04.04.2003
Tribunale federale
{T 0/2}
2C.2/2000/dxc
Séance du 4 avril 2003
IIe Cour de droit public
Composition
MM. et Mme les Juges Wurzburger, Président,
Betschart, Hungerbühler, Yersin et Zappelli, juge suppléant.
Greffier: M. Langone.
Parties
X.________,
demanderesse,
représentée par Me Catherine Jaccottet Tissot, avocate, place Pépinet 4, case postale 3309, 1002 Lausanne,
contre
Etat de Vaud, 1014 Lausanne, représenté par
Me Etienne Laffely, avocat, rue St-Pierre 2,
case postale 2673, 1002 Lausanne.
Objet
dommages et intérêts,
procès civil direct contre Etat de Vaud.
Faits:
A.
X.________ est née le 21 juillet 1954. Titulaire d'un diplôme en travail social délivré par l'Institut d'études sociales de Genève, en 1993, et ayant notamment exercé une activité d'assistante sociale à l'hôpital de zone de St-Loup à Orbe, elle a été engagée comme assistante sociale à 50% au Service de protection de la jeunesse du canton de Vaud, dès le 1er juin 1992; elle a été affectée au groupe des placements familiaux. Le 1er novembre 1993, elle a été promue en qualité d'assistante sociale B (classe 17/19). Son traitement a été fixé dès cette date à 29'993 fr. Le 1er juin 1994, elle a été nommée fonctionnaire en cette qualité.
Le 1er février 1996, elle a été transférée dans le groupe des assistantes sociales du secteur de la Broye, dont la cheffe était A.________, avec qui elle a d'emblée entretenu des relations de travail tendues. Un rapport d'évaluation intermédiaire du travail de X.________, établi le 20 septembre 1996 par B.________, adjoint du chef de service, et par A.________, fait état à la charge de l'intéressée de quelques lacunes et conclut à la nécessité de son développement en matière de savoir-faire et de "savoir-être". Il est notamment relevé: "(...) La formation à l'approche systémique que suit Mme X.________ devrait permettre d'y contribuer. Toutefois, cette formation ne saurait remplacer l'engagement personnel de Mme X.________ dans cette évolution personnelle indispensable à la fonction d'assistante sociale au Service de protection de la jeunesse."
Le 17 avril 1997, X.________ a demandé à pouvoir travailler à 60%, ce qui lui a été refusé le 16 mai 1997 par B.________, qui a invoqué les mesures d'économie que l'Etat de Vaud se devait de réaliser. Une deuxième demande d'augmentation de son taux d'activité à 80%, formulée en novembre 1997, pour remplacer un collègue quittant son poste de Renens, a été également refusée. En février 1998, elle a, en vain, formulé une troisième demande d'augmentation de son taux d'activité à la suite du départ d'un collègue à la retraite.
B.
Les relations entre X.________ et sa supérieure hiérarchique, A.________, s'étant détériorées, il a été décidé le 13 mai 1998, lors d'un entretien avec C.________, chef du Service de protection de la jeunesse, qu'une enquête serait mise en oeuvre aux fins d'analyser la situation de l'intéressée au sein du service. Ce n'est cependant que le 30 mars 1999, les parties n'étant pas parvenues à se mettre d'accord plus tôt sur la personne des enquêteurs, que Francine Jeanprêtre, Conseillère d'Etat à la tête du Département de la formation et de la jeunesse, a mandaté Y.________, cheffe du bureau de l'égalité, et Z.________, ancien chef de service, pour mener une enquête administrative au sujet du mobbing dont X.________ se disait la victime au sein du Service de protection de la jeunesse. En juin, l'enquêteur Z.________ a été remplacé par W.________, responsable des relations humaines au Département de la sécurité et de l'environnement.
Entre-temps, dès le 2 juin 1998, X.________ avait été mise au bénéfice d'un certificat d'incapacité de travail pour cause de maladie. Le 1er octobre 1998, son médecin traitant, le psychiatre P.________, a attesté que sa patiente était "(...) pour des raisons médicales, incapable de travailler au Service de protection de la jeunesse, aussi longtemps que la procédure engagée à propos d'une suspicion de mobbing ne sera pas réglée", mais qu'elle était "capable de travailler dans un autre service de l'Etat, dès le 5 octobre 1998."
Le 30 septembre 1998, l'intéressée a demandé à être transférée dans un autre service de l'Etat. Son dossier de candidature a été traité par le responsable du bureau de réinsertion professionnelle qui a cherché, sans succès, à fournir des stages à l'intéressée, notamment au CHUV. Une place vacante à l'office du Tuteur général n'a pas trouvé l'agrément de X.________ en raison des contacts avec le Service de protection de la jeunesse que ce poste impliquait. Le 31 mars 1999, C.________ a proposé à l'intéressée de travailler sous sa responsabilité exclusive, ce que X.________ a refusé, disant craindre de ne pas être suffisamment encadrée et de se retrouver en contact avec A.________. De son côté et parallèlement aux démarches menées par l'Etat de Vaud, X.________ a recherché un emploi à l'intérieur et en dehors de l'administration, cela sans succès. Le 4 septembre 2000, elle a commencé un stage de réinsertion, financé par l'Etat, auprès de l'association "Appartenances", à raison d'un taux d'occupation de 80%, avec un salaire mensuel brut de 4'960 fr. Ce stage a pris fin à la fin février 2001. Depuis le 1er septembre 2001, X.________ travaille à mi-temps en qualité d'assistante sociale A au service de l'hôpital Bellevue, à Yverdon-les-Bains. Depuis le 1er mars 2002, elle travaille en outre à 50% pour l'Etat de Vaud en qualité d'assistante sociale A au sein de l'Ecole de perfectionnement, service de l'enseignement secondaire.
C.
En septembre 1999, les personnes désignées pour enquêter au sujet du mobbing ont déposé leur rapport. Elles concluent que "(...) Tant les témoignages que l'examen des pièces au dossier ont confirmé le fait que Mme X.________ a été victime d'un comportement illicite, provenant de sa cheffe de groupe, Mme A.________" en relevant que "(...) Ce comportement s'est manifesté par différents agissements qui se sont produits fréquemment, pendant une durée de 3 ans environ et dont on peut retenir les éléments suivants:
- une communication négative, non éthique
- une très grande agressivité
- une disqualification professionnelle permanente
- des abus de pouvoirs répétés
- des tracasseries de tout genre (horaires, vacances, etc.)
(...) Les dommages subis par la victime sont très graves:
Elle a été profondément agressée et humiliée
Elle est absente de son milieu professionnel depuis plus de 15 mois
Elle doute d'elle et de ses capacités professionnelles
Elle est en proie à une anxiété permanente
Elle n'arrive plus à se projeter dans l'avenir
Elle est exposée à une détérioration de ses conditions d'existence: baisse de ses revenus, incertitudes quant à son avenir professionnel
Elle subit une détérioration de sa santé (situation de stress post-traumatique) (...)."
A la suite de ce rapport, par lettre du 14 décembre 1999, X.________ a formulé ses prétentions relatives au préjudice matériel et moral qu'elle disait avoir subi. Par lettre du 21 février 2000 de Francine Jeanprêtre, le Département de la formation de formation et de la jeunesse a admis que X.________ avait été la victime d'un harcèlement psychologique et lui a fait part des offres de l'Etat de Vaud aux fins de réparer le dommage. Ces propositions ont été refusées et, durant le printemps 2000, les parties ont poursuivi leurs pourparlers. Lors de la séance réunissant les parties le 7 avril 2000, l'Etat a accepté de verser à X.________ une somme de 10'000 fr. à valoir sur la somme susceptible d'être versée au terme des négociations. Par lettre du 19 mai 2000, le Département de la formation et de la jeunesse a proposé le paiement de l'intégralité du salaire "jusqu'à ce jour", l'aide à la réinsertion professionnelle avec salaire jusqu'au 31 août 2000, pour un taux d'occupation de 50%, et une indemnité pour tort moral de 8'000 fr. Ces nouvelles propositions n'ont pas été acceptées par l'intéressée qui a déposé, le 12 juillet 2000, un recours administratif pour déni de justice auprès du Conseil d'Etat en se plaignant du défaut de décision la concernant.
D.
Le 4 octobre 2000, X.________ a saisi le Tribunal fédéral d'une demande de dommages-intérêts contre l'Etat de Vaud, au sens de l'art. 42 OJ. Elle conclut: "L'Etat de Vaud est le débiteur de X.________ et lui doit immédiat paiement de la somme de 148'946 fr. 80 (cent quarante-huit mille neuf cent quarante-six francs et huitante centimes) avec intérêts à 5% dès le 6 décembre 1999."
Dans sa réponse du 17 janvier 2001, l'Etat de Vaud conclut au rejet de l'action.
Les parties ont répliqué et dupliqué. Lors de la séance de débats préparatoires du 13 novembre 2001, la tentative de conciliation a échoué. Le juge délégué a cependant accordé aux parties une suspension de la procédure pour leur permettre de poursuivre des pourparlers transactionnels. Ceux-ci ayant échoué, la reprise de l'instruction de la cause a été ordonnée le 10 mai 2002. Les parties ont chacune déposé un mémoire complémentaire, respectivement les 12 juin et 4 juillet 2002.
Le 5 septembre 2002, la délégation de la Cour a entendu les témoins C.________, Y.________, K.________, E.________, F.________, G.________ et H.________. La demanderesse a produit une lettre du 23 juillet 2002 du médecin cantonal adjoint, faisant état de l'épuisement de X.________ provoqué par le cumul de ses deux postes à 50% dans deux sites différents.
La procédure préparatoire a été close. La demanderesse a expressément sollicité que des débats avec plaidoiries soient tenus.
Les 20 septembre et 10 octobre 2002, les parties se sont déterminées sur le procès-verbal de l'audience du 5 septembre 2002.
Les débats principaux avec plaidoiries ont eu lieu le 4 avril 2003.
Le Tribunal fédéral considère en droit:
1.
1.1 Selon l'art. 3 PCF, le Tribunal fédéral examine d'office la recevabilité de l'action.
Aux termes de l'art. 42 OJ - abrogé le 1er janvier 2001 (RO 2000 2719 ss), mais en vigueur au moment du dépôt de la demande et donc applicable à la présente espèce -, le Tribunal fédéral est compétent pour juger en instance unique de contestations de droit civil entre un canton d'une part et des particuliers d'autre part, lorsque l'une des parties le requiert en temps utile et que la valeur litigieuse est d'au moins 8'000 fr. Le tribunal, en ce cas, est compétent soit que, d'après la législation cantonale, la cause doive être traitée en la procédure ordinaire, soit qu'elle relève d'autorités spécialement désignées et statuant suivant une procédure spéciale. Sont des contestations de droit civil au sens de l'art. 42 al. 1 OJ, non seulement celles qui sont soumises au droit privé stricto sensu, mais également d'autres prétentions patrimoniales contre l'Etat, lorsque sa responsabilité légale, contractuelle ou quasi contractuelle est engagée en vertu du droit public. Cette notion large comprend notamment les actions en réparation du dommage causé par des actes de puissance publique, licites ou illicites, engageant la responsabilité légale du canton (ATF 118 II 206 consid. 2c; Jean-François Poudret, Commentaire de la loi fédérale d'organisation judiciaire, Berne 1990, vol. II, n. 2.1.1 ad art. 42). Selon la jurisprudence, l'action doit être considérée comme ayant été engagée en temps utile au sens de l'art. 42 al. 1 OJ, lorsque le demandeur s'adresse au Tribunal fédéral avant de saisir du même litige une autorité de jugement cantonale (ATF 121 III 204 consid. 1a; Poudret, op. cit., n. 2.4 ad art. 42 OJ; Thomas Hugi Yar, Direktprozesse, in Geiser/Peter/Münch, Prozessieren vor Bundesgericht, 2e éd., 1998, n. 7.9 p. 249).
1.2 Le défendeur estime que l'action est prématurée, car les prétentions pécuniaires de la demanderesse seront tranchées à l'issue des investigations et de la procédure d'évaluation la concernant qui sont en cours de réalisation au sein de l'Etat.
Or, il n'apparaît pas que les investigations et la procédure d'évaluation, au demeurant apparemment terminées à ce jour, aient eu pour objet de statuer sur les prétentions pécuniaires de X.________. Celle-ci a négocié avec l'Etat en vue d'obtenir réparation du dommage dont elle se plaint, cela depuis décembre 1999, soit dès que les parties ont eu connaissance du rapport d'enquête, et jusqu'en mai 2000. Le 19 mai 2000, l'Etat, par lettre du Département de la formation et de la jeunesse, a formulé une offre de règlement du litige qui n'a pas été acceptée. La position de l'Etat a été réaffirmée sur la question du taux d'activité de X.________ par courrier du 5 septembre 2000. Celle-ci a maintenu ses exigences par lettres des 15 septembre et 3 octobre 2000, avant d'ouvrir action auprès de la cour de céans le 4 octobre 2000.
Il n'y a donc pas eu de procédure engagée auprès d'une juridiction cantonale au sujet des prétentions de la demanderesse avant l'ouverture de la présente action.
Quant à la procédure introduite devant le Conseil d'Etat du canton de Vaud par recours administratif du 12 juillet 2000 fondé sur un prétendu déni de justice, sur le sort de laquelle, d'ailleurs, les parties n'ont pas informé la cour de céans, elle ne concerne que les questions de la garantie du droit au salaire au-delà du 31 août 2000 et de la reconnaissance d'un taux d'activité de 80% dès le 1er janvier 2000; elle ne recouvre donc pas les prétentions financières qui font l'objet de la présente procédure.
Il en résulte qu'il y a lieu d'entrer en matière sur l'action de X.________, introduite en temps utile au sens de l'art. 42 al. 1 OJ.
2.
En principe, les agents publics répondent de leurs actes illicites selon les dispositions ordinaires des art. 41 ss CO. Toutefois, la législation fédérale ou cantonale peut déroger à ces règles en ce qui concerne la responsabilité encourue par ces agents publics pour le dommage ou le tort moral qu'ils causent dans l'exercice de leur charge (art. 61 al. 1 CO). Lorsque de telles normes existent, la responsabilité des agents publics échappe au droit civil fédéral (ATF 122 III 101 consid. 2; arrêt non publié 2C.1/1999 du 12 septembre 2000, consid. 2a et la jurisprudence citée).
2.1 La demanderesse fonde son action sur la loi vaudoise du 16 mai 1961 sur la responsabilité de l'Etat, des communes et de leurs agents (ci-après: LREC) qui règle la réparation du dommage que les agents de l'Etat causent à des tiers d'une manière illicite (art. 4). Les actions fondées sur cette loi ressortissent aux tribunaux ordinaires (art. 14). A la différence du droit privé qui subordonne la responsabilité aquillienne à une faute (art. 41 CO), le texte de l'art. 4 LREC n'exige, pour engager la responsabilité de l'Etat, qu'un acte objectivement illicite, un dommage et un lien de causalité entre l'un et l'autre (arrêt 2C.2/1998 du 31 janvier 2000, consid. 3). Aux termes de l'art. 8 LREC, les dispositions du code des obligations relatives aux obligations résultant d'actes illicites sont applicables par analogie à titre de droit cantonal.
2.2 La loi précitée ne définit pas l'illicéité. La notion d'illicéité est la même en droit privé fédéral et en droit public cantonal (arrêt du Tribunal fédéral 4C.229/2000 du 27 novembre 2001, reproduit in SJ 2002 I 253, consid. 3a). D'une manière générale, l'acte illicite se définit comme un acte ou une omission objectivement contraire à une règle du droit écrit ou non écrit et qui porte atteinte soit à un droit absolu du lésé, soit à son patrimoine. Dans ce dernier cas toutefois, il faut encore que la norme violée ait pour but de protéger le bien juridique lésé, soit les droits patrimoniaux, pour que l'illicéité soit réalisée (voir notamment ATF 123 III 306 consid. 4a; 121 III 350 consid. 5b et la jurisprudence citée).
2.3 La demanderesse se plaint d'avoir été la victime de mobbing de la part de sa supérieure hiérarchique, A.________, et d'avoir été de ce fait atteinte dans sa santé au point d'être empêchée de travailler dans le poste qu'elle occupait au sein du Service de protection de la jeunesse en qualité d'assistante sociale. Elle demande à l'Etat la réparation du dommage matériel et du tort moral qu'elle dit avoir subis du fait de ces agissements.
Il y a mobbing, ou harcèlement psychologique, lorsque une ou des personnes cherchent à isoler, à marginaliser, voire à exclure une personne sur son lieu de travail, par un enchaînement de propos et/ou d'agissements hostiles, répétés fréquemment pendant une période assez longue (Jean-Bernard Waeber, Le mobbing ou harcèlement psychologique au travail, quelles solutions?, in AJP/PJA 1998 p. 792, et les références citées). L'arrêté du Conseil d'Etat du 23 juin 1999 relatif à la lutte contre le harcèlement au travail dans l'administration cantonale vaudoise définit à son art. 2 ce harcèlement comme un enchaînement de propos ou d'agissements hostiles qui altèrent le climat de travail et se traduisent, notamment, par des comportements, des paroles, des actes, des gestes, des écrits unilatéraux, répétés fréquemment pendant une certaine période, et par lesquels une ou plusieurs personnes cherchent à nuire ou portent atteinte à la personnalité, à la dignité ou à l'intégrité psychique ou physique d'une personne ou mettent en péril son emploi. En droit privé, les actes de mobbing sont prohibés par l'art. 328 al. 1 CO qui prescrit: "L'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu'ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes." L'employeur qui n'empêche pas que son employé subisse un mobbing contrevient à l'art. 328 CO (ATF 125 III 70 consid. 2a p. 73). La violation des obligations prévues à l'art. 328 CO entraîne l'obligation pour l'employeur de réparer le préjudice matériel et le tort moral causés par sa faute ou celle d'un autre employé (Gabriella Wennubst, Mobbing, le harcèlement psychologique analysé sur le lieu de travail, Lausanne 1999, p. 160, et les auteurs cités).
L'art. 328 CO n'est pas applicable comme tel aux rapports de droit public entre un fonctionnaire cantonal et l'Etat (art. 342 al. 1 CO). Les dispositions du code des obligations seraient tout au plus applicables par analogie, en cas de lacune dans les dispositions de droit public (ATF 75 II 329, p. 332; Rehbinder, Commentaire bernois, n. 4 ad art. 342 CO). Comme en droit privé cependant, l'Etat a le devoir de protéger ses agents pour leur permettre d'exercer leurs fonctions (Blaise Knapp, Précis de droit administratif, 4ème édition, Bâle 1991, n. 3082); il doit notamment éviter qu'ils ne subissent une atteinte illicite à leur personnalité, au sens des art. 28 ss CC. Selon l'arrêté du 23 juin 1999 précité (article premier), qui n'était pas encore en vigueur au moment des faits, le harcèlement psychologique et le harcèlement sexuel constituent une atteinte illicite à la personnalité et ne sont pas tolérés dans l'administration vaudoise.
2.4 En l'occurrence, au vu des conclusions de l'enquête menée en 1999, l'Etat de Vaud a, par lettre du 21 février 2000 du Département de la formation et de la jeunesse, expressément reconnu que X.________ avait été la victime d'un harcèlement psychologique de la part de sa supérieure directe. Durant toutes les tractations qui ont suivi cette reconnaissance, celle-ci n'a jamais été remise en question quant à son principe; seules les conséquences pécuniaires du mobbing ont fait l'objet de pourparlers, demeurés infructueux. Dans l'échange d'écritures au cours de la présente procédure, le défendeur a paru vouloir revenir sur la question de l'existence du mobbing qui, selon lui, aurait été admis de façon trop expéditive. Il ne l'a toutefois pas formellement contesté et n'a pas requis l'administration de preuves tendant à établir que le harcèlement dont se plaint la demanderesse n'aurait en réalité pas eu lieu. Lors des plaidoiries, le défendeur a du reste expressément reconnu l'existence du mobbing.
Il convient dès lors de retenir que la demanderesse a bien subi un harcèlement psychologique de la part de sa supérieure directe, A.________, ce qui constitue un acte illicite, et que l'Etat de Vaud doit réparer le préjudice en résultant.
3.
Au vu du renvoi de l'art. 8 LREC aux règles générales du CO, ce sont les art. 42 ss CO qui s'appliquent à la fixation du montant de l'indemnité et aux modalités de la réparation. Il en résulte que la demanderesse devra apporter la preuve de l'existence d'un dommage, lequel est défini de la même façon qu'en droit privé, et le déterminer de manière concrète.
Selon la définition émanant de la jurisprudence, le dommage juridiquement reconnu réside dans une diminution involontaire de la fortune nette; il peut consister en une réduction de l'actif, en une augmentation du passif ou dans un gain manqué; il correspond à la différence entre le montant actuel du patrimoine et le montant que celui-ci aurait atteint si l'événement dommageable ne s'était pas produit (ATF 127 III 73 consid. 4a, 403 consid. 4a; 126 III 388 consid. 11a). Le dommage doit en outre être certain, c'est-à-dire qu'il existe déjà ou qu'il se produira inévitablement (Pierre Engel, Traité des obligations en droit suisse, 2e éd., Berne 1997, p. 472 ss). Si la preuve précise concernant l'existence et le montant du dommage ne peut pas être fournie, l'art. 42 al. 2 CO prévoit que celui-ci puisse être établi par le juge sur la base des indices fournis par le dossier et compte tenu du cours ordinaire des choses. Dans ce cas également, le demandeur est tenu de fournir tous les éléments qui concourent à démontrer l'existence d'un préjudice et qui permettent d'en estimer le montant. Les faits allégués par la partie lésée doivent par conséquent être pour le moins propres à prouver l'existence d'un dommage et à rendre perceptible son ordre de grandeur. La conclusion selon laquelle un dommage d'une importance déterminée s'est avéré doit apparaître vraisemblable au juge. Il se justifie par conséquent de n'accorder une réparation du dommage que lorsque l'existence du préjudice invoqué par le demandeur apparaît comme pratiquement certaine et non seulement si elle apparaît comme possible (ATF 122 III 219 consid. 3a).
Enfin, pour qu'un dommage puisse être réparé, il faut qu'il existe entre celui-ci et les faits reprochés au défendeur un lien de causalité naturelle et adéquate. Selon la jurisprudence constante, un lien de causalité est adéquat quand un événement est propre, selon le cours ordinaire des choses et l'expérience générale de la vie, à produire ou à favoriser une conséquence semblable à celle qui s'est réalisée concrètement (ATF 121 III 350 consid. 7a; 119 Ib 334 consid. 4 et 5).
En cas de lésion corporelle, par quoi il faut entendre toute atteinte à la santé physique ou à la santé mentale de la victime (Deschenaux/ Tercier, La responsabilité civile, 2e éd., Berne 1982, p. 226, n. 6), le dommage consiste dans l'impossibilité pour la victime d'utiliser pleinement sa capacité de travail; il suppose que cette entrave cause un préjudice économique; ce qui est déterminant, est non pas l'atteinte à la capacité de travail comme telle, mais la diminution de la capacité de gain (ATF 127 III 403 consid. 4a). Le calcul concret des conséquences pécuniaires de l'incapacité de travail jusqu'au moment du jugement implique d'abord la détermination du gain que le lésé aurait obtenu par son activité professionnelle s'il n'avait pas subi de lésion, compte tenu des améliorations ou changements de profession probables. Puis, il y a lieu de déduire de ce gain le revenu effectif de l'activité professionnelle exercée durant la même période. La différence représente le dommage concret issu de l'incapacité de travail (ATF 99 II 214 consid. 3a).
3.1 Il n'est pas contesté que la demanderesse s'est trouvée, à la suite du harcèlement psychologique dont elle a été la victime, totalement incapable de travailler du 2 juin au 5 octobre 1998. Le 1er octobre 1998, son médecin traitant l'a déclarée "incapable de travailler au Service de protection de la jeunesse, aussi longtemps que la procédure engagée à propos d'une suspicion de mobbing ne sera pas réglée", mais en revanche, "capable de travailler dans un autre service de l'Etat, dès le 5 octobre 1998", cela sans restriction et donc à 100%.
Il reste à examiner si cette incapacité de gain relative causée par le mobbing a entraîné un dommage dont le défendeur devrait réparation.
A cet égard, la demanderesse fait valoir en substance qu'elle a subi un préjudice matériel consistant dans:
a) le non-paiement d'heures supplémentaires, pour le montant de 6'678 fr. 50 fr.;
b) le montant correspondant à des vacances non prises, soit 7'960 fr.;
c) la non-acceptation de ses demandes d'augmenter son taux d'activité en 1997, 1998, 1999 et 2000, soit en tout 57'701 fr.;
d) des retenues indues de salaire en 1999 et 2000, soit en tout 8'807 fr. 30;
e) les conséquences du défaut de promotion dans une fonction supérieure, soit 2'800 fr.;
f) les conséquences de la remise tardive d'un certificat de travail, soit 5'000 fr.;
g) l'atteinte à sa réputation professionnelle, chiffrée à 30'000 fr.;
Elle réclame en outre, à titre de réparation du tort moral, la somme de 30'000 fr.
L'ensemble de ses prétentions se monte donc à 148'946 fr. 80.
3.2 Le défendeur estime avoir en tout état de cause versé davantage que ce à quoi l'obligeait la loi et, de ce fait, ne plus rien devoir à la demanderesse, que ce soit à titre de réparation du dommage matériel ou pour le tort moral.
Pour décider si la demanderesse doit se voir allouer une réparation, il convient d'examiner s'il subsiste pour elle un dommage qui, on l'a vu ci-dessus (ch. 3), est égal à la différence entre le patrimoine du lésé si l'événement dommageable ne s'était pas produit et son patrimoine actuel.
3.2.1 Pour les années 2001 et 2002, la demanderesse n'allègue pas avoir été, en raison du mobbing, privée d'un revenu. Elle ne requiert dès lors aucune indemnité de ce chef pour ces années-là.
3.2.2 Pour la période s'étendant de juin 1998 à la fin décembre 2000, si elle n'avait pas été la victime d'un harcèlement, X.________ aurait touché, en travaillant à 50% - sans tenir compte de ses prétentions, dont le bien-fondé sera examiné ci-après, pour des heures supplémentaires, pour une hypothétique augmentation de son taux d'activité, pour les suites d'une hypothétique promotion et selon le calcul, en soi non contesté quant aux chiffres, produit par le défendeur -, un salaire net de 94'308.27 fr. au total entre juin 1998 et décembre 2000.
Or, elle a effectivement obtenu de l'Etat de Vaud le gain suivant:
- en 1998, le gain qu'elle aurait touché sans le mobbing, soit: 20'759.67 fr.;
- en 1999, 30'329.80 fr., au lieu de 34'694 fr.;
- en 2000, elle a gagné davantage que ce qu'elle aurait obtenu à 50%, mais elle a travaillé plus dès septembre 2000, cela pour un salaire de base sensiblement équivalent. Elle n'a donc pas bénéficié d'un enrichissement, lequel devrait être porté en déduction de son dommage (cf. par exemple: ATF 95 II 333 consid. 4; Alfred Keller, Haftpflichtrecht im Privatrecht, Vol. II, 2e éd., Berne 1998, p. 42), car elle a fourni une prestation supplémentaire en contrepartie de ce gain. Elle aurait touché 38'854 fr. 80 et elle a obtenu effectivement, sans tenir compte du travail supplémentaire, 5'920 fr. de moins, correspondant à la réduction de 20% du salaire appliquée de janvier à fin août 2000, soit 32'934 fr.;
X.________ a en outre obtenu de l'Etat le montant de 10'000 fr. à titre d'avance sur le dommage supposé.
Elle a donc touché, sans tenir compte de sa rétribution pour le travail excédant son taux d'emploi de 50%:
- 84'023 fr. (20'759 fr. 67 + 30'329 fr. 80 + 32'934 fr.) au titre de salaire net
- 10'000 fr. (avance sur le dommage supposé)
__________
94'023 fr.
Cela représente une différence à la charge de l'Etat de 285 fr. (94'308 fr. - 94'023 fr.).
4.
Il convient ici d'examiner le sort des autres prétentions de la demanderesse.
4.1 X.________ fait valoir qu'elle avait accompli, au moment où elle a cessé de travailler pour des motifs médicaux, 207 heures supplémentaires de travail qu'elle chiffre, compte tenu du salaire qu'elle touchait alors, à 33 fr. 20 l'heure, soit en tout 6'878 fr. 50.
Tout en relevant que la demanderesse n'a pas établi que ces heures supplémentaires aient été ordonnées par l'employeur, le défendeur n'en conteste pas l'existence; il estime cependant qu'elles seraient en tout état de cause compensées par le fait que la demanderesse a cessé de travailler dès le 2 juin 1998 et jusqu'au début du mois de septembre 2000.
La loi vaudoise du 9 juin 1947 sur le statut général des fonctions publiques cantonales (ci-après: StF/VD) (abrogée entre-temps, sous réserve de quelques articles, par la loi du 12 novembre 2001 sur le personnel de l'Etat de Vaud entrée en vigueur le 1er janvier 2003) prévoit à son art. 16 que lorsque les besoins du service l'exigent, tout fonctionnaire peut être astreint à des heures de travail supplémentaires (al. 1). Ces heures doivent être compensées dans les six mois par des congés, à défaut de quoi elles donnent droit à une rétribution supplémentaire dont le Conseil d'Etat arrête le mode et le taux par des dispositions générales (al. 2). Sauf en cas de nécessité absolue, le total des heures de travail supplémentaires effectuées par un fonctionnaire en une année ne doit pas dépasser les maxima fixés pour les relations d'emploi privé par les lois fédérales et cantonales (al. 3). Quant à l'arrêté du 22 décembre 1950 d'application du StF/VD (ci-après: l'Arrêté), il précise à son art. 15 que les heures supplémentaires ne sont ordonnées que dans les cas particuliers et justifiés (al. 1). Seules les heures supplémentaires expressément ordonnées peuvent faire l'objet d'une compensation ou d'une rétribution spéciale (1/2219 du traitement annuel, sous réserve d'un montant maximum fixé par le Conseil d'Etat): à défaut de compensation, l'heure supplémentaire donne droit à rétribution pour les titulaires de fonctions dont la classe maximum est égale ou inférieure à la classe 25 (al. 2). Sauf circonstances extraordinaires, le maximum d'heures de travail supplémentaires qui peuvent être exigées, qu'elles soient compensées ou rétribuées, est de 180 heures par année (al. 3).
En l'occurrence, X.________ était titulaire d'une fonction inférieure à la classe 25. Elle a donc en principe droit à la rétribution de ses heures supplémentaires. Il n'est pas possible de contrôler le nombre exact d'heures supplémentaires effectuées par l'intéressée autrement que par le décompte qu'elle a rempli elle-même. L'Etat de Vaud ne conteste cependant pas formellement les relevés établis par la demanderesse; il s'y réfère dans ses écritures, de sorte qu'il y a lieu d'admettre que de 1997 à juin 1998, X.________ avait, même si cela paraît considérable, bel et bien accompli 207 heures supplémentaires. En appliquant le mode de calcul indiqué par l'art. 15 de l'Arrêté, la demanderesse a droit à ce titre à 207 x 1/2219 de 36'718 fr. 50 (traitement annuel de 1998), soit à 3'425 fr.
Or, les heures supplémentaires effectuées par la demanderesse n'ont pas été expressément ordonnées par l'employeur. Celles-ci ne donnent donc aucun droit à une rétribution. Il ne faut cependant pas perdre de vue que durant cette période, la demanderesse a subi un mobbing de la part de sa supérieure directe et qu'elle a dû travailler dans des conditions particulièrement difficiles. Il est hautement probable que les heures supplémentaires aient été rendues nécessaires du fait du harcèlement psychologique, qui l'a empêchée de mener à bien ses tâches durant son temps de travail réglementaire. Compte tenu des circonstances très particulières du cas concret, on peut admettre que la demanderesse a droit au paiement des ses heures supplémentaires représentant un montant de 3'425 fr.
Il va de soi que cette somme est allouée dans la mesure où, comme on le verra ci-après (consid. 4.3), les prétentions pécuniaires de la demanderesse consécutives à une hypothétique augmentation de son taux d'activité à 60 ou à 80% n'ont pas été admises. En effet, si X.________ avait été en droit de travailler à 60% au moins dès l'été 1997 et jusqu'en juin 1998, elle n'aurait pas pu obtenir dans ce cas le paiement d'heures supplémentaires en plus du salaire qu'elle aurait touché en travaillant à 60, voire à 80%.
4.2 La demanderesse réclame ensuite 7'960 fr. au titre de vacances non prises, cinq semaines en 1998, quatre semaines en 1999 et deux semaines en 2000, soit en tout onze semaines.
Il est établi à cet égard que la demanderesse avait pris des vacances, annoncées officiellement du mercredi 10 au jeudi 25 août 2000, soit juste avant de commencer le stage que l'Etat de Vaud avait organisé pour elle. Or, dès la fin juillet, elle savait qu'elle allait commencer un stage au début septembre. Elle n'établit pas avoir été empêchée de prendre ses vacances avant le 10 août, soit à tout le moins dès le jour où elle a annoncé ses vacances par l'entremise de son avocat, le 4 août 2000, et cela jusqu'à la fin de la semaine précédant le début de son stage, c'est-à-dire durant 4 semaines. Il en résulte qu'elle n'avait en tout cas plus droit à des vacances en 2000.
Pour le reste, le droit aux vacances est réglé par l'art. 73 StF/VD et l'art. 55 de l'Arrêté. Selon l'art. 73 al. 1 StF/VD, les fonctionnaires ont droit, chaque année, à des vacances payées de quatre semaines au minimum. La demanderesse, née en 1954, avait droit à quatre semaines (art. 55 al. 1 de l'Arrêté). L'art. 55 de l'Arrêté précise encore que lorsque les absences pour cause de maladie, d'accident, de service militaire ou de congé prolongé ne comptant pas comme temps de service ont dépassé 60 jours par année, les vacances sont réduites de un douzième par mois complet d'absence, dès et y compris le deuxième mois d'absence (al. 2); lorsqu'une absence entraînant une réduction de vacances survient après les vacances de l'année en cours, la réduction s'opère sur les vacances de l'année suivante (al. 3); les vacances sont accordées et prises pendant l'année civile correspondante; elles peuvent exceptionnellement être reportées à l'année suivante au plus tard, moyennant l'autorisation expresse du responsable hiérarchique (al. 5).
En l'espèce, il n'est pas nécessaire de déterminer si la demanderesse dispose ou non d'un éventuel solde de vacances pour 1997 à 1999 et donc d'un droit à une compensation pour des vacances non prises. Car la demanderesse ne peut de toute manière pas faire valoir, comme on le verra ci-après, un droit aux vacances, quand bien même elle aurait vraisemblablement pu bénéficier normalement de ses vacances en 1998, 1999 et 2000, si elle n'avait pas été l'objet de mobbing.
Selon la définition admise en droit privé, qui doit trouver application en droit public, les vacances ont pour objectif le repos et la remise en forme du travailleur durant quelques semaines au moins, quatre semaines en général (ATF 128 III 271 consid. 4a/aa). Lorsque le travailleur, en cas de résiliation du contrat, est contraint de faire une recherche intensive d'emploi, le temps qu'il y consacre ne peut être assimilé à des vacances. En effet, le paiement des vacances se justifie lorsque le travailleur, privé de ses ressources, est obligé de rechercher un nouvel emploi et ne peut véritablement organiser et prendre des vacances. En revanche, lorsque le travailleur, comme en l'espèce, est indemnisé pendant une longue période au cours de laquelle il ne travaille pas, on peut admettre que cette indemnité inclut le droit aux vacances (ATF 117 II 270 consid. 3b; arrêt 4C.250/1996 du 21 octobre 1996 publié in SJ 1997 p. 149, consid. 3b/cc).
En l'occurrence, la demanderesse, qui a cessé de travailler dès juin 1998 et jusqu'au 4 septembre 2000 et qui était apte à travailler à 100% dès octobre 1998, même si elle a consacré un certain temps à des recherches d'emploi, aux côtés des efforts déployés à cet égard par son employeur, ainsi qu'à des tractations en vue de résoudre le litige, tout en continuant à percevoir son salaire, a pu amplement disposer du temps nécessaire, durant plus de deux ans, pour prendre des vacances, telles qu'elles sont définies par la jurisprudence précitée.
Il s'ensuit le rejet de ses prétentions à une indemnité de ce chef.
4.3 La demanderesse allègue l'existence d'un dommage consécutif au refus par l'Etat de Vaud d'augmenter son taux d'activité. A ce titre, elle expose qu'elle aurait pu travailler à 60% dès juillet 1997, puis à 80% dès le 1er octobre 1998 jusqu'au jour de la demande le 4 octobre 2000. Le refus de son employeur de donner suite à ses requêtes d'augmentation de son taux d'activité serait une composante du mobbing dont elle se plaint. Elle réclame de ce chef 3'303 fr. 65 pour 1997, 20'279 fr. 35 pour 1998, 20'898 fr. 80 pour 1999 et 13'219.20 fr. pour la période de janvier à août 2000.
Le défendeur conteste le bien-fondé de ces conclusions. Il allègue qu'il n'aurait pas pu donner suite à la première requête en raison des économies qu'il devait réaliser à l'époque et, pour les postes demandés en 1997/1998, parce que le premier de ceux-ci dépassait les compétences de l'intéressée et, pour le second, parce qu'il devait être occupé par un homme.
La réglementation cantonale en la matière n'oblige pas l'Etat à donner suite à une requête d'augmenter le taux d'activité d'un fonctionnaire. La faculté de nommer, ou de ne pas nommer un fonctionnaire, cela pour un taux d'activité donné, est un droit discrétionnaire de l'Etat, qui l'exerce en se gardant d'agir de manière arbitraire, ce qui serait contraire à l'art. 9 Cst. Dans le canton de Vaud, le Conseil d'Etat est compétent pour nommer et pour fixer le taux d'activité avec possibilité de délégation au département, voire de sous-délégation au sein de celui-ci (art. 6 StF/VD).
Si, en revanche, il peut être démontré que l'employé aurait certainement rempli les conditions d'une augmentation de son taux d'activité et que le refus par l'Etat d'y procéder relève de la pure chicane, assimilable à du mobbing, il pourrait exister une prétention à des dommages-intérêts.
En l'occurrence, entendu comme témoin le 4 octobre 2002, C.________, ancien chef du Service de protection de la jeunesse, a déclaré: "Concernant les demandes du taux d'activité de Mme X.________, le refus de l'accepter était dû essentiellement à la personne de Mme X.________ elle-même, dont l'appréciation positive de notre part s'est détériorée surtout dès le moment où sont apparus les problèmes d'intégration dans le groupe où se trouvait Mme A.________. Je dois expliquer que le travail dans notre service supposait un contrat de confiance; les employés avaient une grande autonomie et, dans le cas de Mme X.________, cela était problématique, car elle avait un constant besoin de soutien, ce qu'elle nous a d'ailleurs reproché. J'ai eu des entretiens avec Mme X.________ au cours desquels a été évoquée l'augmentation du taux d'activité, mais il n'y a pas eu d'entretien spécifiquement destiné à cette question (...) Je ne disposais pas, pour apprécier le cas de Mme X.________, uniquement des renseignements de Mme A.________, mais de divers collaborateurs. M. B.________, mon adjoint, était chargé de l'organisation du travail social et de la supervision du service; il disposait de renseignements provenant de diverses sources."
Il ressort de ces déclarations que le refus d'augmenter le taux d'activité de l'intéressée, en ce qui concerne en tout cas la première demande, n'était à tout le moins pas dû principalement à des soucis d'économie, mais à la personne de la demanderesse elle-même. Les doutes concernant les capacités de l'intéressée sont apparus au moment où surgissaient ses problèmes d'intégration. Le refus de donner suite aux requêtes de la demanderesse, en tout cas à la première, est donc lié chronologiquement au harcèlement dont elle a été la victime. Il n'est dès lors pas exclu que sans ces problèmes d'intégration, d'une certaine manière liés au mobbing, une demande d'augmentation du taux d'activité eût pu être admise.
L'hypothèse demeure cependant fragile. S'il y a lieu de reconnaître que la demanderesse a subi un harcèlement psychologique de la part de sa supérieure directe, cela ne signifie pas a contrario que son travail fût irréprochable et qu'une demande d'augmentation de son taux d'activité eût sans doute été acceptée. Des réserves ont été formulées quant à la qualité de son travail par le témoin C.________. Dans le rapport d'évaluation du 20 septembre 1996 sont relevées à cet égard les critiques de A.________, qu'il y a certes lieu d'apprécier avec retenue, compte tenu du contexte tendu entre ces deux personnes. Mais il y aussi les doutes de B.________, adjoint du chef de service, sur la capacité de l'intéressée à développer son savoir-faire et son savoir-être dans l'action sociale pour parvenir à dépasser le stade de l'analyse, de l'observation et de l'évaluation des problématiques pour passer activement à la mise en perspective et en oeuvre concrète de projets, d'objectifs et de ressources auprès et avec les familles et mineurs en danger. En conclusion, il était demandé à X.________ un engagement personnel dans cette évolution indispensable à la fonction d'assistante sociale au Service de protection de la jeunesse. Il est vrai que la demanderesse a contesté ces reproches. Consultée par l'intéressée, la Commission consultative du personnel (COCOP) a réagi à ce rapport d'évaluation en soulevant avant tout des objections de forme; elle demande que la phase d'évaluation ne se prolonge pas au-delà du premier trimestre 1997 et relève que "si les conclusions concernant le travail de l'intéressée devaient s'avérer globalement positives, (...) le SPJ confirme Mme X.________ dans son poste et la considère comme une employée à part entière (...)."
Quoi qu'il en soit, le fardeau de la preuve du dommage incombait à la demanderesse (art. 42 al. 1 CO). Or celle-ci n'a pas apporté la preuve, ni rendu suffisamment vraisemblable, que sans le mobbing dont elle a été la victime, elle eût donné satisfaction à l'Etat au point d'obtenir une augmentation de son taux d'activité. Cette hypothèse ne revêt en tout cas pas le caractère de certitude ou, à tout le moins, de forte probabilité exigée par la jurisprudence précitée (ATF 122 III 219 consid. 3). Il convient dès lors de rejeter la conclusion de la demanderesse tendant à une indemnité liée au refus d'une hypothétique augmentation du taux d'activité.
4.4 La demanderesse estime avoir subi des retenues indues sur son salaire. Elle réclame à ce titre
- 3'154 fr. 30 pour 1999 et
- 5'653 fr. pour 2000, soit en tout:
____________
8'807 fr.30, représentant les retenues de salaire de 20% que l'Etat a appliquées dès septembre 1999, conformément à l'art. 57 StF/VD.
Le défendeur conteste devoir ce montant. Il allègue en outre que X.________ a touché son plein salaire depuis juin 1998 jusqu'au 31 août 2000.
Or, il résulte du tableau produit dans le mémoire complémentaire du défendeur que l'Etat a bel et bien retenu 20% du salaire de la demanderesse dès juin 1999, soit en tout 4'395 fr., et 20% du salaire de janvier à août 2000, y compris sur le 13ème salaire, soit en tout 5'920 fr. 80. Ces chiffres corroborent les certificats de salaire produits par la demanderesse. Il est vrai que l'Etat avait admis le paiement du plein salaire au-delà de l'échéance légale, soit jusqu'au 31 août 2000. Il s'agissait cependant d'une "proposition", formulée parmi d'autres qui ont été refusées par la demanderesse au cours des pourparlers transactionnels, et par laquelle le défendeur n'était plus tenu à la suite de l'ouverture de la présente action.
Si la demanderesse n'avait pas été empêchée de travailler en raison du harcèlement dont elle a été la victime, elle aurait touché son plein salaire, comme on l'a vu au chiffre 3.2 ci-dessus. Elle a donc droit en principe au 20% du salaire qui lui a été retenu en application des dispositions légales. Il en a cependant déjà été tenu compte dans le calcul du dommage matériel résultant de la différence entre ce qu'aurait touché la demanderesse sans le mobbing et ce qu'elle a effectivement obtenu de l'Etat (ch. 3.2 ci-dessus).
4.5 La demanderesse allègue que, compte tenu de son expérience et de ses années de service, elle aurait dû être promue en qualité d'assistante sociale A dès juillet 1999. Elle chiffre le préjudice résultant de sa non-promotion à 200 fr. par mois, soit 1'200 fr. pour 1999 et 1'600 fr. jusqu'au 31 août 2000, soit en tout à 2'800 fr.
Le défendeur conteste devoir une indemnité de ce chef.
Selon l'art. 13 StF/VD, la promotion, soit la désignation d'un fonctionnaire à une fonction supérieure, n'intervient qu'en cas de vacance. Elle est soumise aux mêmes règles que la nomination. Toutefois, elle est immédiatement définitive. Et l'art. 10 de l'Arrêté précise que "l'avancement, soit le passage de la catégorie III à II, ou II à I, n'est possible qu'après six ans de fonction dans la catégorie inférieure et pour autant que le fonctionnaire ait fait preuve de réels mérites ou de connaissances particulières (...)."
La décision d'avancement, comme celle de nomination, sont laissées à la discrétion de l'Etat. Il n'y a donc pas d'avancement automatique ou obligatoire dans une fonction supérieure, ce que confirmait K.________ lors de l'entretien du 9 mai 2000. L'avancement après six ans de fonction n'est par conséquent que "possible", et il est assorti de conditions.
En l'espèce, la demanderesse a certes obtenu la promotion désirée puisqu'elle a été engagée en qualité d'assistance sociale A par l'hôpital d'Yverdon, mais cet avancement ne date que du 15 août 2001 et fait suite à un stage de six mois organisé par l'Etat auprès de l'association "Appartenances". La demanderesse n'établit pas qu'elle eût fait preuve des réels mérites ou des connaissances particulières lui assurant certainement ou au moins très vraisemblablement une promotion de la catégorie d'assistante sociale B à celle d'assistante sociale A dès juillet 1999 déjà.
Il s'ensuit le rejet de cette prétention.
4.6 La demanderesse allègue que la remise, tardive, d'un certificat de travail à ses yeux incomplet, le 27 juin 2000, l'a entravée dans ses démarches visant à rechercher un emploi. Elle réclame 5'000 fr. à ce titre, que le défendeur conteste lui devoir.
La demanderesse a demandé un certificat de travail intermédiaire, par lettre du 14 décembre 1999 qui contenait une série d'autres revendications pécuniaires. Le 21 février 2000, une offre a été formulée par Francine Jeanprêtre, Conseillère d'Etat, comportant la délivrance du certificat demandé. Le 3 mars 2000, l'intéressée a refusé cette offre et a réclamé des entrevues. Celles-ci ont eu lieu les 7 avril, 9 et 26 mai 2000. Lors de cette dernière séance, les parties sont tombées d'accord sur la délivrance d'un certificat, qui a été envoyé le 31 mai. Le 11 juillet 2000, la demanderesse a contesté la teneur de cette pièce, en exigeant davantage de précisions quant au travail accompli dans sa fonction et se plaignant de ce que ce certificat ne contienne aucune appréciation positive. Un nouveau certificat, contenant une appréciation, au demeurant modérément positive, sur la qualité du travail de l'intéressée, a été dressé le 8 décembre 2000.
La demanderesse pouvait exiger que le certificat porte une appréciation sur la qualité de son travail. L'art. 77 StF/VD précise en effet à cet égard qu'au moment où ils quittent leurs fonctions, les fonctionnaires peuvent exiger un certificat indiquant la nature et la durée de l'emploi (al. 1); ce certificat ne porte en outre sur la qualité du travail et sur la conduite du fonctionnaire que si celui-ci le demande expressément (al. 2), ce qu'a fait l'intéressée lors de la séance du 7 avril 2000. Elle ne pouvait en revanche exiger que cette appréciation fût "positive" que dans la mesure où ses qualités le justifiaient de façon objective.
Il y a lieu dès lors de reconnaître que la réponse de l'employeur sur ce point, si elle n'a pas été tardive, puisqu'elle a suivi rapidement les pourparlers concernant cet objet, a été incomplète, le certificat comportant quelques omissions. Mais il n'est pas établi que ces omissions aient causé un dommage à la demanderesse. Celle-ci a pu exercer une activité à près de 80% dès septembre 2000 et elle n'a élevé aucune prétention pécuniaire pour la période ultérieure. Le retard dans la délivrance dudit certificat était d'ailleurs dû en partie aux difficultés des pourparlers dont le défendeur, placé devant des revendications de plus en plus considérables, au point de se révéler excessives, ne saurait être tenu pour seul responsable.
Il en résulte que les prétentions de la demanderesse sur ce point doivent être rejetées.
4.7 La demanderesse allègue que le chef du Service de protection de la jeunesse a fourni des renseignements négatifs sur son compte auprès de divers employeurs potentiels ou, à tout le moins, ne l'a pas recommandée. De plus, l'Etat a refusé de diffuser toute information concernant la réhabilitation de l'intéressée en dehors de son service. La demanderesse réclame de ce chef une indemnité de 30'000 fr. motivée par une atteinte à sa réputation professionnelle.
Le défendeur conteste être responsable de l'éventuel préjudice allégué.
L'instruction a permis d'établir que la demanderesse a présenté, sans succès, de très nombreuses offres d'emploi auprès de diverses institutions et services sociaux du canton ainsi qu'auprès d'employeurs privés, cela dès 1995 déjà, soit avant que ne naisse le présent litige. Dès le début de 1998 et jusqu'en juillet 2000, elle a déposé vingt et une offres d'emploi qui n'ont pas été acceptées. L'Etat de Vaud a de son côté cherché des solutions aux fins de replacer la demanderesse; celle-ci demeurait en effet formellement attachée au Service de protection de la jeunesse, mais sans pouvoir y travailler, ce qui n'était pas plus satisfaisant pour l'Etat que pour l'employée. Un stage a finalement été trouvé par l'employeur, ce qui a permis de débloquer la situation.
C.________ a contesté avoir jamais donné des renseignements négatifs sur le compte de l'intéressée. Entendu en qualité de témoin par la délégation de la cour de céans, il a déclaré à cet égard: "J'ai eu des téléphones d'éventuels futurs employeurs de Mme X.________. (...) Je me suis toujours efforcé de donner des informations assez neutres. Je n'ai pas donné d'informations spontanément très positives, mais je n'ai pas donné d'informations négatives non plus. J'ai notamment été interpellé par la Fondation "Appartenances", où Mme X.________ a travaillé, ce qu'elle n'aurait pu faire si j'avais donné des renseignements négatifs (...)." A la question de la demanderesse évoquant le cas du directeur de l'institution "La Fontanelle", qui aurait reçu des renseignements négatifs, le témoin répond : "J'ignore ce fait, mais je doute que M. I.________, qui était très prudent, ait pu donner des renseignements tranchés sur Mme X.________."
Toujours au sujet de ces renseignements sur le compte de l'intéressée, entendu comme témoin le 5 septembre 2002, K.________, ancien conseiller personnel de Francine Jeanprêtre, a déclaré: "(...) objectivement, lorsque quelqu'un a été détruit par le mobbing, sa réinsertion est difficile. Les pires patrons disent que c'est 'une emmerdeuse' et les meilleurs qu'il sera difficile de l'employer. Dans le cas de Mme X.________, cela a été compliqué par le fait du milieu très particulier des assistants sociaux et du fait qu'il existait un secteur dans lequel elle ne pouvait pas travailler. Il apparaît certes dans certains documents qu'elle a refusé certaines choses, mais je pense que ces difficultés sont davantage inhérentes à la situation que dues à de la mauvaise volonté."
Quant au témoin E.________, conseiller du Bureau de réinsertion professionnelle rattaché au Service du personnel de l'Etat, il a précisé à ce sujet, lors de la même séance: "Je n'ai pas connaissance de mauvais renseignements donnés par l'Etat de Vaud sur Mme X.________ à d'éventuels futurs employeurs. Il est d'expérience générale que des personnes dans la situation de Mme X.________ aient le sentiment qu'on les empêche de trouver un autre emploi."
Il ressort de ces pièces et témoignages qu'il n'est pas établi que l'employeur ait eu un comportement propre à entraver la demanderesse dans ses recherches d'un nouvel emploi, à l'intérieur comme à l'extérieur de l'administration. Il est certes plausible que l'intéressée n'ait pas été chaudement recommandée à d'éventuels futurs employeurs et que la neutralité des renseignements fournis ait pu dissuader certains d'entre eux de retenir sa candidature. Compte tenu des doutes concernant les capacités de l'intéressée, cette neutralité ne peut être en soi reprochée à l'Etat qui avait au demeurant intérêt à ce que cette fonctionnaire, payée mais non productive, retrouve au plus vite un travail.
Quant au reproche de n'avoir pas expressément fait connaître la réhabilitation de l'intéressée en dehors de son service, il n'est pas justifié. Lors des négociations au sujet des revendications de la demanderesse, le 7 avril 2000, la question de sa réhabilitation fut abordée (6ème revendication) et il a été constaté que l'intéressée avait été réhabilitée au sein de l'administration, par une communication du Département. La demanderesse a alors exigé davantage, soit la publication d'un article dans la Gazette de l'Etat. Le représentant de l'Etat a souligné qu'une telle démarche, dans la mesure où une telle publication était réalisable, était susceptible d'entraîner des effets négatifs par la publicité accrue donnée à ce cas. L'avocate de l'intéressée a paru partager ces craintes mais la demanderesse a persisté dans sa requête.
La position de l'Etat à cet égard, par son souci de ne pas accroître la publicité donnée à ce cas, cela dans l'intérêt même de X.________, paraît raisonnable. C'est au contraire la publication d'un tel article qui eût été susceptible d'entraîner un dommage pour la demanderesse.
En définitive, l'Etat ne peut rien se voir reprocher sur ces points et la prétention de la demanderesse à une indemnité de 30'000 fr. doit être rejetée.
4.8 La demanderesse expose que sa santé a été gravement affectée par le mobbing dont elle a été l'objet. Elle estime qu'elle pourrait en subir des séquelles dans l'avenir, cela même si sa capacité de travail est aujourd'hui entière. Son préjudice aurait été accentué par l'inertie de l'Etat. La demanderesse fait à nouveau valoir à ce sujet la tardiveté de l'envoi d'un certificat de travail qualifié d'incomplet et de trompeur.
Elle réclame en conséquence 30'000 fr. à titre d'indemnité pour tort moral.
Le défendeur conteste entièrement cette prétention. Au cours des pourparlers transactionnels, l'Etat de Vaud avait cependant accepté de verser 8'000 fr. pour le tort moral sur les 20'000 fr. que la demanderesse réclamait alors à ce titre.
Selon l'art. 6 LREC, dont les termes sont analogues à ceux des art. 47 et 49 CO, le juge peut, en tenant compte de circonstances particulières, allouer à la victime de lésions corporelles, ou, en cas de mort d'homme, à la famille, une indemnité équitable à titre de réparation morale (al. 1); celui qui subit une atteinte dans ses intérêts personnels peut réclamer des dommages-intérêts et, en outre, une indemnité à titre de réparation morale lorsqu'elle est justifiée par la gravité particulière du préjudice subi (al. 2).
En l'occurrence, la demanderesse se plaint du tort moral causé à la fois par l'atteinte à sa santé physique et par l'atteinte à sa personnalité. En ce qui concerne l'atteinte à sa santé, celle-ci n'a pas été très grave et elle n'a eu qu'un caractère passager. L'intéressée a certes été empêchée de travailler durant quatre mois, mais dès le 5 octobre 1998, elle a été reconnue apte à travailler à 100% en dehors du cadre du Service de protection de la jeunesse. L'atteinte à sa santé due au mobbing avait été considérée, à dire de médecin, comme terminée. A cet égard, il n'est pas établi que la demanderesse risque de subir à l'avenir une incapacité de travail liée au mobbing dont elle a fait l'objet. Le docteur P.________, médecin traitant de l'intéressée, a certes écrit, le 1er mars 2000, que: "(...) Nul ne peut dire quelles seront à long terme les répercussions de cette atteinte sur la santé de Mme X.________ et sur sa capacité de travail. Il me semble que des réserves doivent être faites sur la responsabilité de l'Etat à cet égard, même si dans quelques mois peut-être Mme X.________ n'était plus employée de l'Etat (...)." Ces réserves, dictées par la prudence, ne suffisent pas pour admettre qu'il existe un risque concret d'atteinte future à la santé de la demanderesse, en relation de conséquence avec le mobbing, et ce d'autant plus que depuis l'établissement de ce certificat, elle a pu travailler normalement.
Quant à l'atteinte à la personnalité de la demanderesse, l'indemnité destinée à la compenser dépend avant tout de la gravité des souffrances physiques ou psychiques consécutives à l'atteinte subie par la victime (ATF 125 III 269 consid. 2a, concernant l'art. 49 CO). Une atteinte légère à la considération professionnelle d'une personne ne suffit pas à justifier une indemnité (ATF 125 III 70 consid. 3).
Les indemnités pour atteinte à la personnalité ne sont en général pas très élevées. Elles ne dépassent guère 2'000 fr. en cas d'atteinte à l'honneur, 5'000 à 7'000 fr. si la réputation de quelqu'un a été gravement et durablement touchée (cf. arrêts cantonaux reproduits in Jahrbuch des Schweizerischen Arbeitsrechts [JAR] 1996 p. 247 et 1999 p. 183, concernant le cas d'un harcèlement sexuel qui avait fortement et durablement affecté la santé psychique de la victime; Klaus Hütte/ Petra Ducksch, Die Genugtuung, 3e éd., Zurich, état 1999, Table XII/1). Dans l'arrêt 1C.1/1998 du 5 mars 2002, le Tribunal fédéral a accordé la somme de 10'000 fr. au titre de réparation morale pour atteinte à la personnalité à un père de famille gravement déconsidéré à la suite de l'accusation d'avoir abusé sexuellement de sa nièce et qui avait été rejeté par les habitants de son village, malgré son acquittement au bénéfice du doute.
En l'occurrence, la demanderesse a subi un harcèlement psychologique pendant plus de deux ans. Ses souffrances ont été réelles; elles ont été constatées par le groupe d'enquêteurs et par ses amis ainsi que par diverses personnes qui se sont occupées de son cas (témoignages de G.________, H.________, Y.________, F.________). Une indemnité pour tort moral du chef de l'atteinte à sa personnalité est donc justifiée. La demanderesse a cependant bénéficié de l'aide de l'Etat pour sa réhabilitation. Elle a en particulier trouvé une oreille attentive et bienveillante en la personne de Francine Jeanprêtre, Conseillère d'Etat à la tête du Département de la formation et de la jeunesse. Sa supérieure directe, A.________, s'est vu infliger une sanction. Le défendeur a déployé des efforts pour aider l'intéressée à se replacer. En 2000/2001, il lui a organisé un stage, convenablement rétribué, et en 2002, il a créé un emploi pour elle. Il a ainsi contribué à atténuer les souffrances de la demanderesse.
Tout compte fait, pour l'ensemble des atteintes qu'elle a subies (incapacité de travail durant quatre mois, harcèlement psychologique), il est équitable d'allouer à la demanderesse une indemnité de 12'000 fr. au titre de tort moral.
5.
Les prétentions de la demanderesse peuvent donc être admises pour:
- 3'710 fr. (3'425 fr. + 285 fr.) en ce qui concerne le préjudice matériel, avec intérêts à 5% l'an dès le 4 octobre 2000, date du dépôt de la demande et
- 12'000 fr. pour tort moral, avec intérêts à 5% l'an dès le 14 décembre 1999, date de la mise en demeure.
L'action doit dès lors être admise à concurrence de 15'710 fr. (3'710 fr. + 12'000 fr.) et rejetée pour le surplus.
La demanderesse a laissé entendre au cours de la procédure qu'elle se réservait le droit de réclamer un montant au titre de dommage matériel futur. Or il y a lieu de relever que les prétentions découlant du mobbing ont été définitivement tranchées dans le présent arrêt. Il incombait à la demanderesse d'augmenter ses conclusions dans le cadre de la présente procédure, si elle estimait avoir droit encore à un montant au titre de préjudice futur. Force est de constater que la demanderesse n'a pas dûment allégué et établi les éléments d'un tel poste du dommage, alors qu'elle aurait pu le faire dans cette procédure.
6.
Les frais et les dépens doivent être répartis, aucune des parties n'obtenant entièrement gain de cause (art. 156 al. 3 et 159 al. 3 OJ).
Une répartition purement proportionnelle des frais justifierait que la demanderesse, qui a pris des conclusions exagérément élevées, en supporte les 9/10. Il convient cependant de retenir que le défendeur a contesté toute dette envers la demanderesse qui a dû ouvrir action pour voir admettre, certes très partiellement, une partie de ses conclusions. Il paraît donc équitable de répartir les frais à raison de 2/5 à la charge de l'Etat de Vaud et de 3/5 à celle de la demanderesse. Celle-ci versera en outre à l'Etat de Vaud une indemnité à titre de dépens réduite dans la même proportion (2/5).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
L'action est partiellement admise. L'Etat de Vaud est condamné à payer à X.________ la somme de 15'710 fr. avec intérêts à 5% l'an, dès le 4 octobre 2000 sur le montant de 3'710 fr. et dès le 14 décembre 1999 sur le montant de 12'000 fr.
2.
L'émolument judiciaire de 10'000 fr. sera supporté à raison de 4'000 fr, par l'Etat de Vaud et de 6'000 fr. par X.________.
3.
X.________ versera à l'Etat de Vaud une indemnité de 6'000 fr. à titre de dépens.
4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties.
Lausanne, le 4 avril 2003
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le président: Le greffier: