BGer 1P.535/2004 |
BGer 1P.535/2004 vom 11.10.2004 |
Tribunale federale
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{T 0/2}
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1P.535/2004 /col
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Arrêt du 11 octobre 2004
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Ire Cour de droit public
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Composition
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MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du Tribunal fédéral, Reeb et Féraud.
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Greffier: M. Zimmermann.
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Parties
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X.________,
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recourant, représenté par Me Jean Lob, avocat,
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contre
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Juge d'instruction de l'arrondissement de Lausanne, chemin de Couvaloup 6, 1014 Lausanne,
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Procureur général du canton de Vaud,
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rue de l'Université 24, case postale, 1014 Lausanne,
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Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud, route du Signal 8, 1014 Lausanne.
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Objet
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refus de mise en liberté provisoire,
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recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 6 septembre 2004.
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Faits:
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A.
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Le 27 novembre 2001, le Juge d'instruction de l'arrondissement de Lausanne a décerné un mandat d'arrêt à l'encontre de X.________.
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Le 8 juin 2004, il a clos l'instruction préparatoire.
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Le 1er septembre 2004, le Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud a renvoyé en jugement X.________, accusé d'infraction grave à la LStup, de blanchiment d'argent qualifié, de participation à une organisation criminelle, de mise en circulation de fausse monnaie, subsidiairement d'importation, d'acquisition et prise en dépôt de fausse monnaie, d'abus de confiance, d'escroquerie par métier, d'utilisation frauduleuse d'un ordinateur, alternativement d'escroquerie par métier, de faux dans les titres et de faux dans les certificats.
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X.________ est accusé d'avoir mis sur pied avec trois complices un trafic international de stupéfiants portant sur l'importation d'au moins 45 kg de cocaïne, d'avoir blanchi une partie du produit de ce trafic, d'avoir utilisé frauduleusement des cartes de crédit volées, d'avoir volé des voitures ou escroqué des sociétés de leasing, et tenté d'écouler de la fausse monnaie.
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Le 23 août 2004, X.________ a demandé sa libération provisoire. Le Juge d'instruction a rejeté cette requête le 27 août 2004.
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Le 6 septembre 2004, le Tribunal d'accusation a rejeté le recours formé par X.________ contre cette décision, qu'il a confirmée.
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B.
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Agissant par la voie du recours de droit public, X.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler la décision du 6 septembre 2004 et d'ordonner sa libération provisoire. Il invoque les art. 29 Cst. et 6 CEDH. Il requiert l'assistance judiciaire.
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Dans le délai de l'art. 89 al. 1 OJ, X.________ a complété le recours en produisant la copie de la citation à comparaître le lundi 28 février 2005 devant le Tribunal criminel de l'arrondissement de Lausanne, à raison des faits évoqués dans l'arrêt de renvoi.
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Le Tribunal d'accusation et le Juge d'instruction se réfèrent à la décision attaquée. Le Procureur général conclut au rejet du recours.
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Invité à répliquer, le recourant a maintenu ses conclusions.
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Le Tribunal fédéral considère en droit:
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1.
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Le recours de droit public ne produit qu'un effet cassatoire (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 129 I 129 consid. 1.2.1 p. 131/132, 173 consid. 1.5 p. 176; 128 III 50 consid. 1b p. 53, et les arrêts cités). Il est fait exception à ce principe lorsque l'admission du recours ne suffit pas à rétablir une situation conforme à la Constitution et qu'une mesure positive est nécessaire (ATF 129 I 129 consid. 1.2.1 p. 131/132). Tel est le cas notamment lorsqu'une mesure de détention préventive n'est pas - ou n'est plus - justifiée (ATF 115 Ia 293 consid. 1a p. 297; 107 Ia 256 consid. 1 p. 257; 105 Ia 26 consid. 1 p. 29). La conclusion tendant à la libération immédiate du recourant est ainsi recevable.
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2.
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A teneur de l'art. 59 CPP/VD, un prévenu peut être maintenu en détention préventive s'il présente un danger pour la sécurité ou l'ordre publics (ch. 1), si sa fuite est à craindre (ch. 2) ou si sa liberté offre des inconvénients sérieux pour l'instruction (ch. 3). Le recourant ne prétend pas que cette disposition aille au-delà de la protection de l'art. 10 al. 2 Cst. garantissant la liberté personnelle, dont nul ne peut être privé si ce n'est dans les cas prévus par la loi et selon les formes qu'elle prescrit (art. 31 al. 1 Cst.). Le Tribunal fédéral examine à la lumière de la garantie de la liberté personnelle si le maintien en détention d'un prévenu se justifie pour des raisons objectives. Les principes que la Convention européenne des droits de l'homme consacre, essentiellement à son art. 5, sont pris en considération pour l'interprétation et l'application de cette garantie en tant qu'ils la concrétisent (ATF 115 Ia 293 consid. 3 p. 299; 108 Ia 64 consid. 2c p. 66/67; 105 Ia 26 consid. 2b p. 29).
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La garantie de la liberté personnelle n'empêche pas l'autorité publique de procéder à l'incarcération d'un individu ou de le maintenir en détention, aux conditions toutefois que cette mesure particulièrement grave repose sur une base légale, qu'elle soit ordonnée dans l'intérêt public et qu'elle respecte le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 1 à 3 Cst.; ATF 123 I 268 consid. 2c p. 270; 114 Ia 281 consid. 3 p. 283; 107 Ia 148 consid. 2 p. 149; 106 Ia 277 consid. 3a p. 281, et les arrêts cités).
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3.
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En l'occurrence, le recourant ne discute pas les charges qui pèsent sur lui, ni les risques de récidive et de fuite. Sous l'angle de la proportionnalité, il estime que la durée de sa détention, soit deux ans et dix mois, serait excessive. Elle le serait d'autant plus que l'audience de jugement est fixée à fin février 2005. A cette date, il serait détenu depuis trois ans et trois mois.
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3.1 La durée de la détention préventive s'apprécie au regard de l'ensemble des circonstances concrètes du cas d'espèce (ATF 124 I 208 consid. 6 p. 215; 123 I 268 consid. 3a p. 273; 107 Ia 256 consid. 1b p. 257; arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme Contrada c. Italie, du 24 août 1998, par. 54, Muller c. France, du 17 mars 1997, Recueil 1997-II, par. 35 et W. c. Suisse, du 26 janvier 1993, Série A, vol. 254, par. 30). Elle est excessive lorsqu'elle se rapproche grandement de celle de la peine privative de liberté qui pourrait être prononcée, le cas échéant (ATF 126 I 172 consid. 5a p. 176/177; 124 I 208 consid. 6 p. 215; 123 I 268 consid. 3a p. 273; 107 Ia 256 consid. 2 et 3 p. 257ss). La durée probable de la peine qui pourrait être prononcée doit être évaluée avec la plus grande prudence, car il faut éviter que le juge de l'action pénale ne soit incité à prononcer une peine excessive pour la faire coïncider avec la détention préventive à imputer (ATF 116 Ia 143 consid. 5a p. 147). L'incarcération peut aussi être disproportionnée en cas de retard injustifié dans le cours de la procédure pénale (ATF 123 I 268 consid. 3a p. 273; 116 Ia 143 consid. 5a p. 147; 107 Ia 256 consid. 2 et 3 p. 257). A cet égard, l'Etat est tenu par une obligation de résultat; il ne saurait arguer des difficultés de l'organisation judiciaire pour faire échec aux prérogatives découlant de la liberté personnelle et de l'art. 5 par. 3 CEDH (arrêts 1P.540/2002 du 4 novembre 2002, consid. 4.1 et 1P.107/2002, du 7 mars 2002, consid. 4.2, concernant des décisions rendues par le Tribunal d'accusation).
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3.2 L'affaire porte sur un trafic de stupéfiants aux ramifications internationales, qui comprend la production de la drogue en Amérique latine, son traitement et son acheminement par le truchement de "mules" en Europe, la vente de la drogue, le blanchiment du produit de celle-ci, y compris la remise de sommes importantes à des trafiquants en Italie. Le recourant et ses complices occupent une position relativement élevée dans l'organisation mise en place.
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S'il devait être reconnu coupable des faits mis à sa charge, le recourant pourrait être exposé à une peine de réclusion de plusieurs années, compte tenu également de ses antécédents défavorables. Une procédure d'instruction de près de trois ans est assurément longue. Elle peut s'expliquer par la complexité de l'affaire, le grand nombre de faits à éclaircir, de témoins à entendre, d'informations à vérifier. Même si la limite de ce qui est compatible avec l'art. 31 al. 1 Cst. se rapproche, on peut admettre qu'en l'état, le principe de la proportionnalité est encore respecté.
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3.3 L'instruction préparatoire est terminée depuis le 8 juin 2004. Depuis cette date, la détention a été maintenue uniquement pour les besoins du jugement. En l'occurrence, la détention devrait être prolongée jusqu'au 28 février 2005, date de l'audience de jugement, soit pour une durée de neuf mois. Un tel délai - pour lequel aucune justification n'a été apportée - est manifestement disproportionné (arrêt 1P.540/ 2002, précité consid. 4.3; cf. l'arrêt 1P.750/1999 du 23 décembre 1999, consid. 2d/ee, concernant également une cause portée devant le Tribunal d'accusation). Il convient d'inviter les autorités cantonales à prendre les mesures nécessaires pour que le recourant puisse être jugé à bref délai. Le recours doit être admis sur ce point.
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4.
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Le recours doit être admis partiellement au sens du considérant qui précède, et rejeté pour le surplus. La demande de libération provisoire est rejetée. Il est statué sans frais (art. 156 OJ). L'Etat de Vaud versera au recourant une indemnité de 1000 fr. pour ses dépens (art. 159 OJ). La demande d'assistance judiciaire a perdu son objet.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
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1.
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Le recours est admis partiellement au sens du considérant 3.3. Il est rejeté pour le surplus.
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2.
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La demande de libération provisoire est rejetée.
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3.
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L'Etat de Vaud versera au recourant une indemnité de 1000 fr. à titre de dépens.
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4.
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La demande d'assistance judiciaire a perdu son objet.
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5.
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Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, ainsi qu'au Juge d'instruction de l'arrondissement de Lausanne, au Procureur général et au Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud.
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Lausanne, le 11 octobre 2004
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Au nom de la Ire Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le président: Le greffier:
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