BGer 4C.431/2004 |
BGer 4C.431/2004 vom 02.03.2005 |
Tribunale federale
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{T 1/2}
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4C.431/2004 /ech
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Arrêt du 2 mars 2005
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Ire Cour civile
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Composition
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MM. et Mmes les Juges Corboz, président, Klett, Rottenberg Liatowitsch, Nyffeler et Favre.
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Greffier: M. Carruzzo.
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Parties
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Biscuits Bossy Sàrl,
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demanderesse et recourante, représentée par
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Me Philippe Nordmann,
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contre
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Société des Produits Nestlé SA,
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défenderesse et intimée, représentée par Me Ivan Cherpillod.
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Objet
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protection des marques; concurrence déloyale,
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recours en réforme contre le jugement de la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 5 février 2004.
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Faits:
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A.
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Biscuits Bossy Sàrl (demanderesse) exploite une petite fabrique de biscuits et de produits à tartiner dans le canton de Fribourg. Elle vend ses produits dans toute la Suisse. Depuis une vingtaine d'années, elle utilise le slogan "Biscuits c'est bon la vie!", notamment sur son papier à lettres et dans sa publicité. Cette expression figure aussi sur la façade de l'immeuble qu'elle occupe.
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Le 19 juin 2000, Marc Bossy a adressé une mise en demeure à la direction générale de Nestlé SA. Disant avoir constaté que ladite société utilisait, depuis quelque temps, le slogan "Nestlé ... c'est bon la vie!" pour sa publicité dans la presse et à la télévision, il l'informait que ce slogan était sa "propriété intellectuelle".
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La Société des Produits Nestlé SA (défenderesse) a reçu cette mise en demeure le lendemain. En date du 22 juin 2000, elle a déposé les marques verbales "Nestlé c'est bon la vie" et "c'est bon la vie" pour divers produits des classes 5, 29, 30 et 32, en particulier pour des denrées alimentaires. Il est usuel pour cette société de déposer des slogans comme marques. Les deux marques ont été enregistrées - sous le n° 485 817 et le n° 485 818 - dans le registre des marques de l'Institut fédéral de la propriété intellectuelle et publiées le 18 juillet 2001 dans la feuille officielle suisse du commerce n° 137. La classe internationale 30 comprend notamment des produits de boulangerie.
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B.
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B.a Le 7 mai 2001, la demanderesse a ouvert action contre la défenderesse. Ses conclusions, complétées dans la réplique, étaient ainsi formulées:
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"I. Il est constaté que l'utilisation, par la défenderesse ou par des tiers sur lesquels elle exerce une influence, de l'expression "c'est bon la vie" est illicite.
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II. Ordre est donné à la défenderesse de cesser ou de faire cesser par les tiers sur lesquels elle a une influence l'utilisation de l'expression "c'est bon la vie".
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III. (sic) Au versement d'un montant qui sera précisé en cours d'instance, à titre de dommages-intérêts et/ou remise du gain illicite.
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IV. Il est constaté que les marques de la défenderesse nos 485 817 et 485 818 sont nulles."
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La défenderesse a conclu au rejet de la demande.
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Le 20 février 2003, la demanderesse a retiré les conclusions II et III précitées.
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B.b Par jugement du 5 février 2004, la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud a rejeté la demande. Ce jugement repose, en substance, sur les motifs suivants:
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Le risque de confusion, au sens de l'art. 3 let. d LCD, qu'allègue la demanderesse, n'est étayé par aucun élément concret. En effet, non seulement les deux slogans se distinguent par un graphisme très différent, mais, de surcroît, chacune des parties utilise le slogan litigieux en le faisant précéder du nom de l'entreprise, l'une pour des produits de boulangerie et l'autre pour des yoghourts. Au demeurant, le slogan "c'est bon la vie!" est sans conteste une expression courante qui ne peut pas être monopolisée et qui constitue d'ailleurs aussi le titre d'une chanson ou d'un album de Nana Mouskouri. Il est avéré que la défenderesse s'en est servie avant d'avoir été mise en demeure par Marc Bossy et dans l'ignorance totale de l'usage qui en était fait par la demanderesse. On peut certes s'interroger sur la loyauté de son comportement consistant à déposer les marques incriminées deux jours après avoir été sommée de cesser d'utiliser ledit slogan. Toutefois, comme la demanderesse ne prétend pas que ce comportement aurait influé sur les rapports de concurrence existant entre les parties, il n'y a pas lieu de le taxer de déloyal. Enfin, la demanderesse ne peut se prévaloir d'aucun intérêt juridique à la constatation de la nullité des marques déposées par la défenderesse (art. 52 LPM).
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C.
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La demanderesse interjette un recours en réforme au Tribunal fédéral. Elle conclut à ce qu'il soit constaté, d'une part, que l'utilisation, par la défenderesse, ou par des tiers sur lesquels elle exerce une influence, de l'expression "c'est bon la vie!" est illicite dans la mesure où cette expression est utilisée pour des produits alimentaires et, d'autre part, que les marques n° 458 817 et n° 458 818 sont nulles, très subsidiairement que la marque n° 458 818 est nulle. A l'appui de son recours, la demanderesse fait grief à la cour cantonale d'avoir violé les art. 2 et 3 let. d LCD en refusant de reconnaître le caractère déloyal de l'utilisation, par la défenderesse, du slogan litigieux. Elle reproche également aux juges précédents de n'avoir tenu compte ni du fait que la défenderesse avait contrevenu aux règles de la bonne foi en déposant les deux marques susmentionnées, ni de l'impossibilité de monopoliser à titre de marque l'expression "c'est bon la vie!", qui relève du domaine public.
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La défenderesse conclut au rejet du recours.
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Le Tribunal fédéral considère en droit:
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1.
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Le présent recours en réforme vise une décision prise dans une contestation civile en matière de droit des marques et de concurrence déloyale dont la Cour de justice a connu en tant qu'instance cantonale unique (art. 58 LPM, art. 12 LCD). Il est donc recevable sans égard à la valeur litigieuse (art. 45 let. a OJ).
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1.1 Le recours a été déposé en temps utile (art. 54 al. 1 OJ) et la demanderesse y reprend les conclusions qu'elle avait soumises aux premiers juges. Rien ne s'oppose, dès lors, à ce que la Cour de céans entre en matière sur les violations du droit fédéral dont se plaint l'intéressée. Toutefois, comme la juridiction fédérale de réforme est liée par les faits constatés dans la décision attaquée - sauf exceptions qui ne sont pas invoquées en l'espèce -, elle fera abstraction des critiques dirigées contre les constatations des juges cantonaux ainsi que des griefs reposant sur un état de fait qui s'écarte de celui contenu dans le jugement déféré (ATF 130 III 102 consid. 2.2 p. 106; 127 III 73 consid. 6a ).
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1.2 L'impossibilité de remettre en cause, sauf exceptions, les constatations de la dernière instance cantonale (art. 43 al. 3 et 63 al. 2 OJ), qui implique l'interdiction de présenter des griefs contre ces constatations-là de même que des faits nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ), vaut non seulement pour la partie recourante mais également pour la partie intimée (art. 59 al. 3 OJ). Aussi le Tribunal fédéral ne prendra-t-il pas en considération, pour examiner les mérites du recours en réforme, le novum que constitue l'allégation de la défenderesse voulant que cette dernière ait requis, en date du 3 janvier 2005, la radiation de l'enregistrement de la marque n° 485 818 "c'est bon la vie!". Point n'est dès lors besoin de se demander si les pièces produites à l'appui de cette allégation suffiraient à l'étayer. Cela étant, le grief de la demanderesse, selon lequel la cour cantonale aurait violé les dispositions pertinentes de la LPM en ne constatant pas la nullité des deux marques litigieuses, devra être analysé aussi par rapport à la marque prétendument radiée.
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2.
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En vertu de l'art. 2 LCD, est déloyal et illicite tout comportement ou pratique commercial qui est trompeur ou qui contrevient de toute autre manière aux règles de la bonne foi et qui influe sur les rapports entre concurrents ou entre fournisseurs et clients. La clause générale de l'art. 2 LCD est concrétisée par la liste d'exemples figurant aux art. 3 à 8 LCD. Il ressort de cette clause que seul peut être qualifié de déloyal un comportement qui est objectivement apte à influencer le jeu de la concurrence ou le fonctionnement du marché (ATF 126 III 198 consid. 2c/aa p. 202 et les arrêts cités). Au demeurant, il n'est plus nécessaire de faire appel à la clause générale si le comportement reproché tombe sous le coup de l'une des dispositions spéciales précitées, raison pour laquelle il convient de commencer par examiner l'applicabilité de ces dernières (ATF 122 III 469 consid. 8 p. 483). Toutefois, il faut garder à l'esprit que celles-ci n'embrassent pas tous les comportements déloyaux possibles et imaginables, de sorte qu'un comportement donné peut mériter ce qualificatif même s'il n'entre pas dans leurs prévisions (ATF 122 III 469 consid. 9a p. 484 s.; 116 II 365 consid. 3b p. 368). En l'occurrence, il n'est pas contesté que les deux parties utilisent, respectivement ont utilisé, le slogan "c'est bon la vie!" pour promouvoir leurs produits respectifs.
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2.1 Agit de façon déloyale celui qui prend des mesures qui sont de nature à faire naître une confusion avec les marchandises, les oeuvres, les prestations ou les affaires d'autrui (art. 3 let. d LCD). En proscrivant ce type de comportements, la loi veut empêcher que l'estime dont jouit un concurrent auprès des consommateurs soit déloyalement mise à profit par un autre concurrent pour la vente de ses propres marchandises (ATF 125 III 401 consid. 5 p. 403). Pour en juger, il faut toujours se demander si tel signe est à ce point semblable à tel autre que les consommateurs risquent de confondre les marchandises désignées par les deux signes (ATF 128 III 146 consid. 2a et l'arrêt cité). C'est sensiblement à la même aune qu'il convient de déterminer l'existence d'un risque de confusion entre deux signes dans les différentes branches du droit des signes distinctifs (voir, p. ex., l'ATF 127 III 160 consid. 2b et c). Cependant, les circonstances particulières à prendre en considération pour dire si pareil risque existe ou non varient en fonction du genre de protection juridique que réclame le titulaire du signe distinctif (Eugen Marbach, Markenrecht, p. 112, in SIWR vol. III, Kennzeichenrecht). Ainsi, sous l'angle du droit de la concurrence, le risque de confusion s'apprécie en fonction du conditionnement des marchandises et de l'ensemble des circonstances propres à individualiser celles-ci dans l'esprit d'un acheteur doué d'une attention moyenne (ATF 116 II 365 consid. 4 p. 370).
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2.2 La demanderesse est d'avis que ses marchandises pourraient être confondues avec celles de la défenderesse si les deux entreprises utilisaient le slogan "c'est bon la vie!" pour promouvoir les produits qu'elles offrent sur le marché des denrées alimentaires. Toutefois, comme elle le souligne elle-même à juste titre, le slogan en question constitue une expression commune, voire banale, qui est susceptible d'être prononcée par toute personne voulant exprimer sa joie de vivre. Or, un signe faisant partie du domaine public ne peut, en principe, pas être monopolisé, si bien que son utilisation par plusieurs concurrents est licite et ne devient déloyale que dans des circonstances particulières (ATF 117 II 199 consid. 2b). Selon les constatations souveraines des premiers juges, la demanderesse n'a pas établi l'existence de telles circonstances. Au demeurant, les signes relevant du domaine public n'ont aucune force distinctive, s'ils ne se sont pas imposés sur le marché, et la demanderesse ne fournit aucun élément concret, dans son acte de recours, qui justifierait de déroger à la règle générale. Elle n'indique notamment pas pour quels produits concrets elle aurait fait état, devant les juges cantonaux, d'un long usage du slogan en cause, qui aurait amené le public à associer ces produits à son entreprise. Les faits constatés dans le jugement attaqué ne fournissent d'ailleurs aucun indice permettant d'inférer que les articles de boulangerie commercialisés par la demanderesse pourraient être confondus avec les yoghourts mis en vente par la défenderesse au cas où le même slogan appartenant au domaine public serait utilisé pour les deux types de produits. Ledit jugement ne fait pas non plus ressortir d'éventuelles imprécisions dans la publicité de la défenderesse ou d'autres éléments concrets de nature à établir un risque de confusion entre les deux entreprises (cf. Magda Streuli-Youssef, SIWR vol. V/1, Lauterkeitsrecht, 2e éd., p. 86, 142 ss).
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2.3 Il reste à examiner si la défenderesse a agi de façon déloyale, au sens de l'art. 2 LCD, en déposant, deux jours après avoir reçu la mise en demeure de la demanderesse, les deux marques verbales contenant le slogan "c'est bon la vie!", utilisé seul ou en liaison avec sa raison sociale, resp. sa marque de haute renommée. Sur ce point, on ne peut pas suivre la cour cantonale lorsqu'elle admet que l'enregistrement d'une marque n'est pas propre à influencer le jeu de la concurrence. Certes, l'enregistrement d'un signe en tant que marque n'autorise pas nécessairement à prêter à celui qui y procède l'intention d'utiliser un tel signe à l'avenir pour toutes les marchandises visées par cet enregistrement (ATF 127 III 160 consid. 1b p. 164). Le simple dépôt de la marque n'est pas non plus propre en soi à créer un risque de confusion, seule circonstance déterminante du point de vue du droit de la concurrence (cf. ATF 129 III 353 consid. 3.3 p. 358 s.). Il n'en demeure pas moins que l'enregistrement d'un signe comme marque confère au titulaire de celle-ci des droits exclusifs spécifiques (cf. art. 13 LPM), susceptibles d'influer sur les rapports entre concurrents.
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3.
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La cour cantonale considère que la demanderesse ne peut faire valoir aucun intérêt juridique à la constatation de la nullité des marques n° 485 817 "Nestlé c'est bon la vie!" et n° 485 818 "c'est bon la vie!".
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3.1 Toute personne établissant qu'elle a un intérêt juridique, au sens de l'art. 52 LPM, à une telle constatation a qualité pour faire constater par le juge l'existence ou l'inexistence d'un droit ou d'un rapport juridique prévu par ladite loi. Cet intérêt juridique doit revêtir une certaine importance (ATF 120 II 144 consid. 2a p. 147). Il doit être admis, en principe, lorsqu'une incertitude touchant les relations juridiques des parties pourrait être éliminée par la constatation judiciaire requise et que la persistance de cette situation n'est plus supportable pour la partie demanderesse. Pareil intérêt fait, en revanche, défaut si celle-ci dispose d'une action condamnatoire, d'une action formatrice ou d'une action en interdiction ou en cessation de trouble (ATF 123 III 49 consid. 1a p. 51; 120 II 20 consid. 3a p. 22).
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La demanderesse utilise le slogan "c'est bon la vie!" pour les biscuits qu'elle produit dans sa fabrique. La défenderesse a fait enregistrer ce slogan comme marque pour des marchandises appartenant notamment à la classe 30, laquelle comprend le pain, la pâtisserie et la confiserie, entre autres choses (RS 0.232.112.8). Par conséquent, la demanderesse a un intérêt juridique à faire constater que la défenderesse ne peut pas réclamer la protection spécifique du droit des marques pour le slogan contesté. Qu'elle puisse continuer, le cas échéant, à utiliser elle-même ce slogan dans la même mesure que jusqu'ici, en vertu de l'art. 14 LPM, n'y change rien, contrairement à l'avis de la cour cantonale, étant donné que ce droit de poursuivre l'usage est clairement circonscrit et restreint à l'usage du signe tel qu'il a été effectué antérieurement.
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3.2 Sont exclus de la protection des marques, conformément à l'art. 2 let. a LPM, les signes appartenant au domaine public, sauf s'ils se sont imposés comme marques pour les produits ou les services concernés. Ce motif d'exclusion se justifie tant par la volonté de laisser certains signes à la libre disposition des acteurs de la vie économique que par le souci de n'assurer la protection des marques qu'à des signes qu'il est possible d'individualiser en raison de leur force distinctive (cf. l'arrêt 4C.311/2004 du 10 décembre 2004, destiné à la publication, consid. 4.1). Il n'est pas possible de décréter a priori que tel ou tel signe doit être assujetti au besoin de libre disposition, car on ne peut en juger qu'en fonction du contexte économique dans lequel le signe examiné est utilisé. A cet égard, il paraît douteux que l'expression commune "c'est bon la vie!" puisse être monopolisée, en particulier pour des produits alimentaires; il semblerait, au contraire, que la libre disposition d'un tel signe corresponde à un besoin prépondérant du marché. Quoi qu'il en soit, semblable expression n'est à l'évidence pas propre à individualiser des marchandises; elle est ainsi dépourvue de toute force distinctive. Aussi la conclusion constatatoire de la demanderesse est-elle manifestement fondée en ce qui concerne la marque n° 458 818 "c'est bon la vie!". S'agissant de la marque n° 458 817, il n'est pas nécessaire d'examiner plus avant si l'ajout de la marque de la défenderesse - considérée isolément, la marque "Nestlé" constitue une marque de haute renommée (ATF 130 III 748 consid. 1.2) - suffirait à justifier le maintien de l'enregistrement de la marque litigieuse (cf., sur ce point, l'arrêt 4C.3/1999 du 18 janvier 2000, publié in sic! 3/2000 p. 194, consid. 4c). En effet, la demanderesse ne conteste pas expressément que cette dernière possède un pouvoir distinctif suffisant lorsqu'elle est associée à la raison sociale de la défenderesse (cf., à ce sujet, Marbach, op. cit., p. 35). Elle s'en prend uniquement à la régularité de l'enregistrement de ladite marque sous l'angle de la concurrence déloyale, resp. de l'abus de droit.
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3.3 Deux jours seulement après avoir reçu la mise en demeure de la demanderesse, la défenderesse a fait enregistrer comme marque pour un grand nombre de marchandises - en particulier pour des articles de boulangerie - le slogan utilisé de longue date par la demanderesse en l'accolant à sa propre marque de haute renommée. La demanderesse taxe ce comportement de déloyal et en déduit le caractère illicite de l'enregistrement de la marque n° 485 817. Agit de façon déloyale celui qui, après la fin de leur collaboration, fait enregistrer comme marque le signe utilisé en premier lieu par son partenaire commercial et continue à l'utiliser, créant ainsi un risque de confusion entre les deux entreprises (ATF 129 III 353 consid. 3.4 p. 359; voir aussi l'ATF 107 II 356 consid. 4 p. 362 s.). D'une manière générale, la doctrine considère comme déloyal l'enregistrement comme marque d'un signe distinctif non enregistré mais utilisé antérieurement par un concurrent, si cet enregistrement vise à procurer à son auteur des avantages indus, si le concurrent s'en trouve pénalisé ou encore s'il en résulte un risque de confusion (Christian Hilti, Der Schutz nicht registrierter Kennzeichen, in SIWR, vol. III, Kennzeichenrecht, p. 471; Mario M. Pedrazzini/Federico A. Pedrazzini, Unlauterer Wettbewerb, 2e éd., p. 85 s.; Ivan Cherpillod, La notion de marque, in La nouvelle loi fédérale sur la protection des marques, p. 35; François Dessemontet, Droit à la marque, in dernier op. cit., p. 52 s.; Kamen Troller, Manuel du droit suisse des biens immatériels, tome II, 2e éd., p. 921). Que la défenderesse ait déposé comme marque, notamment pour des produits de boulangerie, le slogan "c'est bon la vie!" utilisé depuis des années par la demanderesse, et ce immédiatement après avoir été sommée par celle-ci de ne plus en user, fait présumer l'existence d'une intention déloyale, ainsi que le souligne pertinemment la cour cantonale. A cet égard, le risque que la demanderesse, du fait qu'elle utilise depuis des années ce slogan, puisse être considérée comme faisant partie du groupe auquel appartient la défenderesse ne peut pas être écarté d'un revers de main (cf. l'ATF 109 II 483 consid. 5 p. 489). Or, la demanderesse n'est pas tenue de s'accommoder d'un tel risque, ni d'ailleurs de souffrir, le cas échéant, qu'il soit fait obstacle à l'utilisation, par elle, de l'expression "c'est bon la vie!", qu'elle juge attractive, pour la promotion de ses produits. Dès lors, à supposer qu'il n'existe pas un besoin de libre disposition absolu pour de telles expressions banales ou communes appliquées à des denrées alimentaires et à des produits courants de la vie quotidienne, l'enregistrement, en tant que marque, du slogan "c'est bon la vie!", accolé à la raison sociale de la défenderesse, apparaît en tout cas déloyal dans les circonstances où il a été requis. Le recours en réforme interjeté par la demanderesse s'avère ainsi fondé dans cette mesure. Il y a lieu, partant, de constater que la marque n° 485 817, déposée par la défenderesse est nulle à l'instar de la marque n° 485 818. Aussi le présent arrêt sera-t-il communiqué à l'Institut fédéral de la propriété intellectuelle afin qu'il procède à la radiation de ces deux marques (art. 54 LPM). Pour le surplus, la demande doit être rejetée.
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4.
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Aucune des parties n'obtenant entièrement gain de cause, il convient de répartir les frais proportionnellement entre elles (art. 156 al. 2 OJ). On y procédera en tenant compte du fait que la conclusion de la demanderesse relative à la nullité des marques litigieuses, qui a été admise, revêt une importance plus grande que la conclusion constatatoire qui a été rejetée. Il se justifie, dans ces conditions, de mettre les 2/3 de l'émolument judiciaire à la charge de la défenderesse et d'allouer à la demanderesse des dépens réduits (art. 159 al. 3 OJ). Enfin, la cause sera renvoyée aux juges précédents pour qu'ils statuent à nouveau sur les frais et dépens de la procédure cantonale.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
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1.
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Le recours est admis partiellement et le jugement attaqué est annulé. Il est constaté que les marques n° 485 817 et n° 485 818 déposées par la défenderesse sont nulles. La demande est rejetée pour le surplus.
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2.
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Un émolument judiciaire de 5'100 fr. est mis pour 2/3 à la charge de la défenderesse et pour 1/3 à la charge de la demanderesse.
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3.
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La défenderesse versera à la demanderesse une indemnité de 2'000 fr. à titre de dépens réduits.
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4.
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Le dossier est renvoyé à la cour cantonale pour nouvelle décision sur les frais et dépens de la procédure cantonale.
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5
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Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties, à la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud et à l'Institut fédéral de la propriété intellectuelle.
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Lausanne, le 2 mars 2005
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Au nom de la Ire Cour civile
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du Tribunal fédéral suisse
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Le président: Le greffier:
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