BGer 5C.257/2004 |
BGer 5C.257/2004 vom 09.03.2005 |
Tribunale federale
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{T 0/2}
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5C.257/2004 /frs
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Arrêt du 9 mars 2005
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IIe Cour civile
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Composition
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M. et Mmes les Juges Raselli, Président,
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Nordmann et Hohl.
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Greffier: M. Braconi.
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Parties
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X.________,
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demandeur et recourant, représenté par Me Danièle-Christine Magnin, avocate,
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contre
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Y.________,
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défenderesse et intimée, représentée par Me Pierre Ochsner, avocat,
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Objet
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retrait de la garde,
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recours en réforme contre la décision de l'Autorité de surveillance des tutelles du canton de Genève du 10 novembre 2004.
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Faits:
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A.
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Z.________, née à Vienne (Autriche) le 17 décembre 1997, est la fille de X.________, originaire de Genève, et de Y.________, de nationalité polonaise, tous deux domiciliés à Genève. Le 24 octobre 1999, les parents ont signé une convention relative à l'enfant, portant, notamment, sur son entretien. La mère est titulaire de l'autorité parentale sur sa fille.
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B.
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B.a Le 10 février 2003, X.________ a demandé au Tribunal tutélaire du canton de Genève de retirer à la mère la garde sur sa fille et de la lui confier, la mère étant investie d'un droit de visite et condamnée à verser une contribution d'entretien en faveur de l'enfant. L'audition des nombreux témoins a confirmé le grave conflit divisant les parents et le fait que l'enfant y avait été impliquée pour avoir assisté à des scènes mettant aux prises ses père et mère.
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Par ordonnance du 5 avril 2004, le Tribunal tutélaire a débouté le père de ses conclusions tendant au retrait de la garde et à l'instauration d'une garde alternée (ch. 1 et 2), réservé au père un droit de visite s'exerçant, à défaut d'accord entre les parties, à raison d'un week-end sur deux, du vendredi après-midi à la sortie de l'école au lundi matin au début de l'école et durant la moitié des vacances scolaires (ch. 3), dit qu'il incombait au père d'aller chercher sa fille le vendredi à la sortie de l'école et de l'y ramener ponctuellement le lundi matin (ch. 4), confirmé la curatelle de surveillance des relations personnelles instaurée sur mesures provisoires (ch. 5), décliné sa compétence pour connaître du montant de la contribution d'entretien revenant à la mère (ch. 6) et débouté les parties de toutes autres ou contraires conclusions (ch. 7). En bref, après avoir apprécié les témoignages recueillis et tenu compte des observations du Service du Tuteur général, le Tribunal a considéré qu'il n'y avait matière ni à un retrait de garde, ni à une limitation des relations personnelles.
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B.b Le père a recouru contre cette décision à l'Autorité de surveillance des tutelles du canton de Genève, concluant principalement au retrait du droit de garde de la mère, à l'octroi de ce droit à lui-même, à un droit de visite en faveur de la mère, à la confirmation de l'institution de la curatelle et à la condamnation de la mère à verser une contribution d'entretien de 500 fr. par mois, allocations familiales non comprises, jusqu'à ce que l'enfant atteigne l'âge de neuf ans. A titre subsidiaire, il a réclamé un droit de visite à raison d'une semaine sur deux et de la moitié des vacances scolaires; en outre, la mère devait être invitée à lui remettre le passeport de l'enfant en vue de l'exercice du droit de visite et à respecter, ainsi que son entourage, les sentiments légitimes de l'enfant à son égard; enfin, il devait être autorisé à téléphoner à sa fille deux fois par semaine durant la semaine où elle demeurait auprès de sa mère.
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De son côté, la mère a conclu à ce que le droit de visite à réserver au père soit arrêté, sauf entente contraire, à un week-end sur deux, du vendredi à la sortie de l'école jusqu'au dimanche soir, ainsi qu'à la moitié des vacances scolaires, l'ordonnance attaquée étant confirmée pour le surplus.
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B.c Le 28 mai 2004, le Service du Tuteur général a fait savoir que l'exercice des relations personnelles entre le père et l'enfant se passait régulièrement et sans incident; néanmoins, il exprimait son inquiétude quant à l'avenir de l'enfant en raison de l'âpreté du conflit qui opposait ses parents, ajoutant qu'une évaluation approfondie ou une expertise devait être effectuée. Le 16 juin suivant, l'Autorité de surveillance a entendu les parents en comparution personnelle et a essayé de les amener à trouver un terrain d'entente dans l'intérêt de leur fille; le père a persisté à réclamer le retrait du droit de garde, affirmant que la mère et son nouveau compagnon étaient des alcooliques.
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B.d Le 21 octobre 2004, le père a déclaré maintenir ses conclusions principales et subsidiaires, demandant préalablement que la mère soit soumise à une expertise psychiatrique et médicale; à titre plus subsidiaire, il a conclu à ce que les relations personnelles s'exercent tous les mercredis depuis la sortie de l'école à sa reprise le jeudi matin, un week-end sur deux et la moitié des vacances scolaires.
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Le 28 octobre 2004, la mère a confirmé ses conclusions, précisant qu'il incombait au père de venir chercher sa fille et de la ramener.
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C.
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Par décision du 10 novembre 2004, l'Autorité de surveillance a rejeté le recours et confirmé l'ordonnance attaquée.
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D.
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Agissant par la voie du recours en réforme au Tribunal fédéral, X.________ conclut à l'annulation de cette décision et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour complément de la procédure probatoire.
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L'intimée propose, en substance, le rejet du recours.
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E.
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Le recourant a déposé parallèlement un recours de droit public.
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Le Tribunal fédéral considère en droit:
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1.
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Aux termes de l'art. 57 al. 5 OJ, il est sursis en règle générale à l'arrêt sur le recours en réforme jusqu'à droit connu sur le recours de droit public. La jurisprudence déroge toutefois à cet ordre de priorité dans des situations particulières qui justifient l'examen préalable du recours en réforme. Il en est ainsi, notamment, lorsque l'arrêt sur le recours de droit public est dépourvu d'incidence sur le sort du recours en réforme (ATF 123 III 213 consid. 1 p. 215; 122 I 81 consid. 1 p. 82/83; 120 Ia 377 consid. 1 p. 379) - ce qui est le cas, en particulier, lorsque le recours en réforme apparaît irrecevable (ATF 117 II 630 consid. 1a p. 631) - ou, inversement, lorsque le recours en réforme paraît devoir être accueilli indépendamment des griefs soulevés dans le recours de droit public (ATF 122 I 81 consid. 1 p. 83; 120 Ia 377 consid. 1 p. 379). Cette dernière hypothèse étant réalisée en l'occurrence, il convient de traiter le recours en réforme en premier.
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2.
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Après avoir rappelé les principes que le Tribunal fédéral a posés en matière de maxime inquisitoire (ATF 128 III 411 consid. 3.2.1 p. 413), la cour cantonale a retenu que le père n'avait allégué aucun fait précis établissant en quoi une expertise serait nécessaire en rapport avec les abus d'alcool de l'intimée, ni en quoi ceux-ci porteraient préjudice à l'enfant. Il n'est pas non plus opportun d'ordonner une expertise: d'une part, l'enfant paraît avoir conservé son équilibre en dépit du conflit qui oppose ses parents; d'autre part, cette mesure ne ferait que prolonger la procédure et envenimer davantage le conflit. S'agissant du retrait du droit de garde, la juridiction cantonale a considéré que la cause n'avait pas révélé de faits précis permettant d'affirmer que l'intimée aurait failli à son rôle de mère, ou qu'elle-même et son nouveau compagnon auraient commis des abus d'alcool susceptibles d'exercer une influence négative sur la fillette. Dans son recours, le père n'a mis en évidence aucun élément ressortant des témoignages recueillis et propres à faire admettre que le développement de l'enfant serait compromis auprès de sa mère, ou que celle-ci adopterait un comportement contraire à ce que requiert le bien-être de l'enfant.
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2.1 Quoi qu'en dise l'intimée, le recourant se plaint ici d'une violation du droit fédéral (Messmer/Imboden, Die eidgenössischen Rechtsmittel in Zivilsachen, Zurich 1992, ch. 87 et les références citées en note 54); il fait valoir que l'autorité précédente a méconnu la maxime d'office et la maxime inquisitoire en écartant les mesures probatoires sollicitées.
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2.2 La procédure concernant les mesures de protection de l'enfant est régie à tous ses stades par la maxime inquisitoire (arrêt 5C.112/2001 du 30 août 2001, consid. 2c/aa, in: FamPra.ch 2002 p. 405). Le juge a donc le devoir d'éclaircir les faits et de prendre en considération d'office tous les éléments qui peuvent être importants pour rendre une décision conforme à l'intérêt de l'enfant, même si ce sont les parties qui, en premier lieu, lui soumettent les faits déterminants et les offres de preuve; il peut instruire selon son appréciation, en particulier administrer des moyens de preuve de façon inhabituelle et, de son propre chef, solliciter des rapports, même si cette manière de faire n'est pas prévue par la procédure cantonale. Partant, le juge n'est lié ni par les faits allégués, ni par les faits admis, ni par les moyens de preuve invoqués par les parties; il ordonne d'office l'administration de tous les moyens de preuve propres et nécessaires à établir les faits pertinents (ATF 128 III 411 consid. 3.2.1 p. 413).
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2.3 Il ressort de l'arrêt entrepris que les parents se disputent depuis longtemps déjà sur les questions de la garde et du droit de visite. Le Service du Tuteur général avait relevé dans sa lettre du 28 mai 2004, adressée à l'autorité cantonale et à laquelle celle-ci se réfère dans la décision attaquée, que l'exercice des relations personnelles entre le père et sa fille intervenait régulièrement; néanmoins, il avait exprimé son «inquiétude quant à l'avenir de l'enfant du fait de l'âpreté du conflit opposant ses parents», ajoutant qu'«une évaluation approfondie ou une expertise» devait être effectuée afin de déterminer si un droit de visite élargi en faveur du père serait souhaitable pour l'enfant dans le climat relationnel actuel qu'entretiennent les parents et d'indiquer les conditions nécessaires pour qu'une extension du droit de visite puisse être envisagée; de surcroît, l'enquête devait s'exprimer sur la question de savoir si une modification du droit de garde pourrait être bénéfique pour l'enfant. Par la suite, ledit Service a proposé que ces évaluations soient établies, notamment, par une expertise. Dans son recours à la cour cantonale, le recourant a exposé avoir requis le Tribunal tutélaire d'ordonner une expertise psychologique de l'intimée «sur les motifs qui président à l'expression de ses ambitions», ainsi qu'une «expertise médicale attestant - ou non - de son alcoolisme»; de plus, il a déclaré avoir accepté de se soumettre à «une expertise systémique, analysant les interrelations des différents membres de cette famille déchirée». Il a, conséquemment, réitéré ses réquisitions probatoires.
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Compte tenu du conflit opposant les parties, des allégations du père et des craintes manifestées par le Service du Tuteur général, l'autorité précédente ne pouvait se prononcer sur le droit de garde, le droit de visite ainsi que les autres mesures de protection de l'enfant sans procéder préalablement à une expertise psychiatrique de l'intimée, voire des deux parents. En refusant d'ordonner une telle mesure en raison d'une motivation lacunaire du recourant, elle a enfreint les devoirs que lui impose la maxime inquisitoire (supra, consid. 2.2). Il s'ensuit que la décision attaquée doit être annulée et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour qu'elle complète l'instruction et statue à nouveau dans le sens des considérants (art. 64 al. 1 OJ).
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3.
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L'issue du litige étant incertaine, il convient de répartir les frais de justice par moitié entre les parties et de compenser les dépens (art. 156 al. 3 et art. 159 al. 3 OJ).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
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1.
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Le recours est admis, la décision attaquée est annulée et la cause est renvoyée à l'autorité cantonale pour complément d'instruction et nouvelle décision dans le sens des considérants.
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2.
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Un émolument judiciaire de 1'500 fr. est mis par moitié à la charge de chacune des parties.
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3.
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Les dépens sont compensés.
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4.
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Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à l'Autorité de surveillance des tutelles du canton de Genève.
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Lausanne, le 9 mars 2005
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Au nom de la IIe Cour civile
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président: Le Greffier:
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