BGer 2C_8/2011 |
BGer 2C_8/2011 vom 03.03.2011 |
Bundesgericht
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Tribunal fédéral
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Tribunale federale
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{T 0/2}
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2C_8/2011
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Arrêt du 3 mars 2011
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IIe Cour de droit public
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Composition
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MM. les Juges Zünd, Président,
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Seiler et Donzallaz.
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Greffier: M. Dubey
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Participants à la procédure
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X.________,
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représentée par Me Claude Brügger, avocat,
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recourante,
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contre
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Département de la Santé, des Affaires sociales, du Personnel et des Communes du canton du Jura, faubourg des Capucins 20, 2800 Delémont,
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Swissmedic, Institut suisse des produits thérapeutiques, Hallerstrasse 7, case postale, 3000 Berne 9.
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Objet
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Interdiction de fabriquer des médicaments; restitution de l'effet suspensif,
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recours contre le jugement du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Chambre administrative, du 1er décembre 2010.
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Faits:
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A.
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Par décision du 12 octobre 2010, le Département de la Santé, des Affaires sociales et des Ressources humaines du canton du Jura (actuellement le Département de la Santé, des Affaires sociales, du Personnel et des Communes; ci-après: le Département) a interdit à titre provisoire à X.________ de composer des médicaments. Cette interdiction sanctionnait la fabrication par cette dernière de capsules surdosées de méthadone dont l'une avait causé l'intoxication accidentelle de A.________. Il était apparu par la suite que plusieurs capsules, qui devaient contenir 10 mg de méthadone, n'en contenaient que 7,3, alors que d'autres en contenaient près de 384 mg au lieu des 7 mg prescrits, voire même jusqu'à 403, 408 et 411,9 mg, la dose mortelle se situant à environ 50 mg pour une personne non habituée. Dans sa décision, le Département a retiré l'effet suspensif à un éventuel recours formé contre cette décision. La recourante demeure néanmoins libre d'exercer toutes ses autres activités professionnelles à l'exclusion de la fabrication de médicaments.
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Le 25 octobre 2010, X.________ a déposé un recours auprès de la Chambre administrative du Tribunal cantonal du canton du Jura (ci-après: le Tribunal cantonal) contre la décision du 12 octobre 2010. Elle a conclu à titre préjudiciel à la restitution de l'effet suspensif. Selon elle, en effet, la procédure s'était étalée sur plusieurs mois durant lesquels elle n'avait pas été privée du droit de fabriquer des médicaments. D'une manière générale en outre, elle ne représentait pas une menace pour la santé publique. Enfin le retrait de l'effet suspensif lui causait des effets très graves et préjudiciables, son employeur l'ayant suspendue puis licenciée.
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Par jugement du 1er décembre 2010, le Tribunal cantonal a refusé de restituer l'effet suspensif au recours.
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B.
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Agissant par la voie du recours en matière de droit public, parvenu au Tribunal fédéral le 5 janvier 2011, X.________ demande l'annulation du jugement du 1er décembre 2010 et la restitution de l'effet suspensif au recours formé contre la décision du Département.
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Le Tribunal cantonal et le Département concluent au rejet du recours.
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Considérant en droit:
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1.
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Le Tribunal fédéral examine d'office la recevabilité des recours (art. 29 al. 1 LTF). Il contrôle donc librement la recevabilité des recours qui sont déposés devant lui (ATF 136 I 43 consid. 1 p. 43).
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2.
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Le jugement attaqué a pour objet le refus de restituer l'effet suspensif. Il s'agit d'une décision incidente qui ne porte ni sur la compétence ni sur la récusation au sens de l'art. 92 LTF. Seul trouve application par conséquent l'art. 93 LTF.
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2.1 Selon l'art. 93 al. 1 let. a LTF, les décisions préjudicielles et incidentes qui ont été notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours lorsqu'elles peuvent causer un préjudice irréparable. Cette réglementation constitue une exception au principe selon lequel le Tribunal fédéral en tant que cour suprême ne doit en principe s'occuper qu'une seule fois d'un procès (arrêt 4A_92/2007 du 8.6.2007). Un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF doit être de nature juridique et donc ne pas pouvoir être ultérieurement réparé ou entièrement réparé par une décision finale favorable au recourant (ATF 134 III 188 consid. 2.1 et 2.2 p. 190 ss; 133 II 629). L'existence d'un préjudice irréparable doit faire l'objet d'une analyse circonstanciée tenant compte de la nature de la décision attaquée (ATF 133 IV 139, arrêt dans lequel l'existence d'un tel préjudice a été nié). Dans certaines situations, un tel dommage constitue un effet réflexe du refus d'effet suspensif, notamment en matière de privation de liberté à des fins d'assistance (arrêt 5A_537/2007 du 3.10.2007) ou en matière d'expulsion (arrêt 4P.315/2004 du 9.3.2005), dès lors que le recourant s'exposerait simplement à une évacuation forcée (arrêt 4D_30/2010 du 25.3.2010, consid. 1.1).
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2.2 Selon la jurisprudence, conformément à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, dans la mesure où elles ne sont pas immédiatement données, la partie recourante doit exposer en quoi les conditions de recevabilité sont réunies. Il appartient notamment à la partie recourante d'alléguer et d'établir la possibilité qu'une décision incidente lui cause un dommage irréparable (ATF 134 III 426 consid. 1.2 p. 428 s. et les références citées), à moins que celui-ci ne fasse d'emblée aucun doute (arrêt 2C_687/2009 du 17.2.2010, consid. 1.3.2).
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2.3 En l'espèce, l'existence d'un dommage irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF n'est pas d'emblée évidente. Il incombait donc à la recourante d'exposer concrètement en quoi le refus de restituer l'effet suspensif l'exposait à subir un préjudice irréparable, ce qu'elle n'a pas fait, se bornant à affirmer que le retrait de l'effet suspensif aurait des effets très graves et préjudiciables pour elle (page 2 du recours). A cela s'ajoute que le préjudice allégué par la recourante, mais insuffisamment motivé est de nature essentiellement économique et qu'en ce domaine le caractère irréparable d'un préjudice, s'il n'est pas exclu, n'en est pas moins fort rare. Dans ces conditions, ne répondant pas aux exigences de motivation de l'art. 42 al. 2 LTF, le recours est déjà pour ce motif irrecevable.
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3.
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3.1 La décision relative à une requête d'effet suspensif est une mesure provisionnelle au sens de l'art. 98 LTF (ATF 120 Ia 260, consid. 2) même si le prononcé cantonal sur l'effet suspensif ne peut, par la force des choses, pas être revu avec la décision finale au fond (arrêt 5P.233/2006 du 21.8.2006, en matière de recours de droit public). Seule peut être invoquée par conséquent la violation des droits constitutionnels (art. 98 LTF), qui doit être motivée conformément aux exigences accrues de l'art. 106 al. 2 LTF.
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3.2 Or, en l'espèce, le recours conteste de manière appellatoire les faits retenus par le Tribunal cantonal ainsi que leur appréciation, ce qui ne répond pas aux exigences de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF en matière d'arbitraire. Pour le surplus, les arguments de la recourante sur le retrait de l'effet suspensif se rapportent en réalité au fond de la cause (inégalité de traitement avec la pharmacienne responsable; défaut de preuve; appréciation arbitraire des preuves; écoulement du temps; procédure déloyale, etc.). Ils pourront, le cas échéant, être formulés contre un jugement au fond.
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4.
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Les considérants qui précèdent conduisent à l'irrecevabilité du recours. Succombant, la recourante doit supporter les frais de la procédure fédérale (art. 66 al. 1 LTF). Elle n'a pas droit à des dépens (art. 68 al. 1 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
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1.
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Le recours est irrecevable.
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2.
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Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.
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3.
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Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, au Département de la Santé, des Affaires sociales, du Personnel et des Communes du canton du Jura, à Swissmedic, Institut suisse des produits thérapeutiques et à la Chambre administrative du Tribunal cantonal du canton du Jura.
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Lausanne, le 3 mars 2011
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Au nom de la IIe Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président: Le Greffier:
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Zünd Dubey
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