BGer 4A_266/2011
 
BGer 4A_266/2011 vom 19.08.2011
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
{T 0/2}
4A_266/2011
Arrêt du 19 août 2011
Ire Cour de droit civil
Composition
Mme et MM. les Juges Klett, Présidente, Corboz et Kolly.
Greffier: M. Piaget.
Participants à la procédure
X.________, représentée par Me Pascale Erbeia,
recourante,
contre
1. Y.________, représentée par Me Mauro Poggia,
2. Z.________, représentée par Me Philippe Ducor,
intimées.
Objet
responsabilité du médecin; consentement éclairé,
recours contre l'arrêt de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre civile, du 18 mars 2011.
Faits:
A.
Y.________, née en 1953, est une patiente de X.________, médecin spécialiste FMH en gynécologie et obstétrique, depuis le 15 juin 1998.
Une mammographie effectuée le 8 décembre 1998 a révélé, dans le sein gauche de Y.________, de nombreuses micro-calcifications groupées suspectes.
Le 16 décembre 1998, X.________ a procédé à une biopsie du sein gauche en trois endroits. L'un des prélèvements a révélé un foyer de carcinome canalaire in situ, de type cribriforme, non high grade, sans nécrose. Il s'agit d'un cancer très localisé, qui n'a pas encore la capacité de produire des métastases comme le font les cancers invasifs.
Lors d'une consultation qui eut lieu le 22 décembre 1998, X.________ s'est entretenue de la situation avec Y.________. Il a été décidé de procéder à une mastectomie, c'est-à-dire à l'ablation, aussi bien du sein gauche que du sein droit avec reconstruction immédiate.
Le 4 janvier 1999, Y.________ a consulté Z.________, médecin spécialiste FMH en chirurgie plastique et reconstructive, afin de convenir des modalités de la mastectomie bilatérale avec reconstruction immédiate. Le médecin a noté que la patiente ne voulait absolument pas de prothèses en silicone. Il lui a expliqué qu'un changement subséquent des prothèses était possible, que ces dernières ne duraient pas toute une vie et qu'il y avait des risques, notamment de saignements, d'infections et de cicatrices. La patiente lui a affirmé que sa priorité était de mettre toutes les chances de son côté pour éviter une récidive.
Le 13 janvier 1999, Z.________, assistée de X.________, a procédé à une mastectomie bilatérale avec reconstruction par une prothèse sous-musculaire Arion.
Le soir de l'intervention, Y.________ s'est plainte de douleurs au niveau du sein droit, qui était gonflé. Ayant constaté l'existence d'un hématome, Z.________ a immédiatement pratiqué une intervention pour retirer le caillot de sang qui s'était formé.
L'examen histologique effectué à la suite de la mastectomie a confirmé la présence de l'élément cancéreux dans le sein gauche; en revanche, le sein droit ne présentait que des "modifications fibrokystiques bénignes florides avec micro-calcifications".
Les prothèses n'ayant pas donné satisfaction sur le plan esthétique, Z.________, assistée de X.________, a procédé, avec l'accord de la patiente, à leur changement le 1er juin 1999, mettant en place d'autres prothèses.
Le 22 juin 1999, Z.________ a procédé à la reconstruction des aréoles mammaires.
Par la suite, la patiente, qui paraissait inquiète et stressée, s'est plainte à plusieurs reprises de douleurs, ainsi que de l'aspect de ses seins.
A sa demande, Z.________ a procédé, le 1er octobre 1999, à un autre changement des prothèses.
Toujours insatisfaite de la situation et se plaignant de douleurs, Y.________ a consulté, le 9 juin 2000, A.________, professeur en chirurgie plastique et reconstructive. Celui-ci a estimé en substance que le volume des premières prothèses n'était pas adéquat, mais que le résultat final de la reconstruction était dans l'ensemble satisfaisant.
En 2001, Y.________ a consulté à plusieurs reprises B.________, spécialiste FMH en médecine interne, oncologie et hématologie. Ce médecin a constaté qu'il n'y avait aucun signe de récidive locale ou à distance du cancer du sein; en revanche, la patiente présentait un état dépressif marqué en relation avec son passé médical.
Y.________ a consulté un avocat, qui a pris contact avec X.________ et avec Z.________; ces dernières ont expliqué qu'il se justifiait de procéder à une mastectomie bilatérale, en raison du risque que le cancer se propage au sein droit et aussi pour assurer une symétrie des seins sur le plan esthétique.
Le 13 septembre 2004, les médecins C.________ et D.________, mandatés par l'assurance-invalidité, ont procédé à une expertise psychiatrique de Y.________. Ils ont conclu qu'elle présentait un syndrome douloureux somatoforme associé à un état dépressif d'intensité sévère. Ils ont considéré que son besoin d'être reconnue comme victime d'une erreur médicale pouvait être compris comme un mécanisme de défense contre l'effondrement dépressif.
A la demande de l'avocat de Y.________, le bureau d'expertises extrajudiciaires de la FMH a désigné deux médecins suisses alémaniques, E.________, gynécologue, et F.________, médecin en chirurgie plastique, esthétique et reconstructive, pour établir une expertise sur les reproches que la patiente adressait à Z.________ et à X.________. Ces médecins ont estimé en substance que la patiente avait été correctement informée et qu'il n'y avait pas eu de violation des règles de l'art. Ils ont toutefois signalé que la mastectomie droite ne s'imposait pas médicalement, tout en étant une option médicale reconnue.
A la demande de l'avocat de la patiente, B.________ a confirmé que les interventions proposées à Y.________ n'étaient pas justifiées, notamment s'agissant de l'intervention au niveau du sein droit.
Par la suite, l'assurance-invalidité a octroyé à Y.________ une rente entière dès le 1er février 2000.
B.
Par acte déposé au greffe du Tribunal de première instance de Genève le 5 septembre 2006, Y.________ a formé une demande en paiement dirigée contre X.________ et Z.________, réclamant à ces dernières solidairement la somme de 50'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 1er juin 1999 à titre de réparation du tort moral. Elle a également réclamé aux défenderesses de lui verser la somme de 5'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 5 septembre 2006 pour ses honoraires d'avocat avant le procès.
Les défenderesses se sont opposées à la demande.
Une expertise judiciaire a été confiée à G.________, médecin responsable du centre de service du sein, et H.________l, médecin en chirurgie plastique reconstructive, à Lausanne. Les experts ont conclu que la biopsie se justifiait compte tenu du résultat de la mammographie, qu'elle n'avait pas été correctement pratiquée en ce sens que X.________ avait omis un repérage préopératoire, que le résultat de l'examen du prélèvement justifiait une mastectomie totale du sein gauche, que la mastectomie bilatérale, c'est-à-dire également l'ablation du sein droit, ne s'imposait pas, que la mastectomie bilatérale dans le cas d'espèce n'était pas une option médicalement reconnue, que le choix des prothèses se justifiait, que l'apparition de l'hématome était une complication fréquente qui aurait pu être évitée ou prévenue, que le choix de changer les prothèses se justifiait, que les interventions se sont produites à des intervalles trop rapprochés sans que l'on puisse parler à ce sujet de violation des règles de l'art.
Par jugement du 16 septembre 2010, le Tribunal de première instance a débouté la demanderesse de toutes ses conclusions et l'a condamnée aux dépens.
Statuant sur appel le 18 mars 2011, la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève a annulé ce jugement. Adoptant les conclusions des experts judiciaires, la cour cantonale a estimé que l'ablation du sein droit ne se justifiait pas et que la patiente n'avait pas été correctement informée à cet égard. Elle a retenu qu'il en était découlé des souffrances psychiques et physiques importantes, le sein droit ayant été opéré quatre fois. Partant, la cour cantonale a condamné X.________ à payer à Y.________ la somme de 15'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 1er juin 1999 à titre d'indemnité pour le tort moral. Elle l'a condamnée également à payer la somme de 3'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 5 septembre 2006 pour les frais d'avocat avant le procès. Elle a réservé les droits de Y.________ quant à son dommage supplémentaire. Statuant sur les dépens, elle a mis le tiers des dépens à la charge de Y.________, la condamnant également au paiement d'une indemnité de procédure de 10'000 fr. pour les frais d'avocat de Z.________, qui a été libérée de toutes conclusions prises contre elle. Quant à X.________, les deux tiers des dépens ont été mis à sa charge, ainsi qu'une indemnité de procédure pour les frais d'avocat de Y.________ de 6'700 fr.
C.
X.________ exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre l'arrêt cantonal du 18 mars 2011. Invoquant une violation des art. 47, 49 et 97 CO, ainsi qu'une transgression des art. 7 et 176 de l'ancienne loi genevoise de procédure civile du 10 avril 1987 (ci-après: LPC/GE), elle conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué avec suite de dépens. Sa requête d'effet suspensif a été accordée, faute d'opposition, le 6 juin 2011.
Y.________ a conclu à l'irrecevabilité, subsidiairement au rejet du recours avec suite de dépens.
Z.________ a conclu à l'irrecevabilité, subsidiairement au rejet du recours avec suite de frais et dépens dans la mesure où il est dirigé contre elle.
Considérant en droit:
1.
1.1 Le recours est aussi dirigé contre Z.________ (ci-après: l'intimée n° 2) et il conclut à ce que l'arrêt attaqué soit annulé. Si cette conclusion était admise, il en résulterait que l'intimée n° 2 ne serait plus au bénéfice d'un jugement qui la libère des conclusions prises contre elle et surtout qu'elle ne bénéficierait plus de l'indemnité de procédure qui lui a été allouée et mise à la charge de l'autre intimée. C'est donc à juste titre que l'intimée n° 2 a considéré que ce recours l'obligeait à prendre position, afin d'en faire repousser les conclusions qui pourraient la toucher.
La recourante n'a pas pris de conclusions à l'encontre de l'intimée n° 2 dans la procédure cantonale et elle ne pourrait en prendre devant le Tribunal fédéral en raison de l'exclusion des conclusions nouvelles (art. 99 al. 2 LTF). Dès lors, on ne voit pas quel intérêt la recourante pourrait avoir à faire annuler un arrêt qui libère l'intimée n° 2 des conclusions prises contre elle par une tierce personne, à savoir l'autre intimée. On ne voit pas davantage quel intérêt la recourante pourrait avoir à faire annuler la condamnation d'un tiers, l'autre intimée, à payer une indemnité de procédure à l'intimée n° 2.
La recourante n'a donc aucun intérêt digne de protection à conclure à l'annulation de l'arrêt attaqué en tant qu'il concerne l'intimée n° 2; en conséquence, le recours, en tant qu'il est dirigé contre l'intimée n° 2, doit être déclaré irrecevable, faute d'un intérêt digne de protection (art. 76 al. 1 let. b LTF).
La recourante sera condamnée aux dépens de l'intimée n° 2 (art. 68 al. 1 et 2 LTF).
1.2 Le recours en matière civile étant un recours en réforme (cf. art. 107 al. 2 LTF), la partie recourante doit en principe prendre des conclusions sur le fond et non se borner à conclure à l'annulation de l'arrêt attaqué; elle ne peut s'abstenir de conclusions sur le fond que si le Tribunal fédéral, dans l'hypothèse où il admettrait le recours, ne serait pas en mesure de statuer lui-même sur le fond (ATF 134 III 379 consid. 1.3 p. 383; 133 III 489 consid. 3.1 p. 489 s.; 130 III 136 consid. 1.2 p. 139). En l'espèce, on ne voit pas ce qui empêcherait le Tribunal fédéral, s'il suivait l'argumentation de la recourante, de rejeter la demande. Les conclusions sont donc mal prises, en tant que le recours est dirigé contre la première intimée, puisque la recourante aurait dû conclure sur le fond au rejet de la demande formée contre elle par cette dernière. On comprend cependant qu'en concluant à l'annulation de la décision attaquée, la recourante voudrait supprimer les condamnations prononcées à son encontre; les conclusions devant être interprétées à la lumière de la motivation contenue dans le mémoire (ATF 127 IV 101 consid. 1 p. 102 s.), les arguments présentés confirment cette interprétation. Il serait donc excessivement formaliste de déclarer irrecevable le recours dirigé contre la première intimée pour ce défaut dans les conclusions.
Interjeté par la partie qui a succombé dans ses conclusions libératoires (art. 76 al. 1 LTF) et dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par une autorité cantonale de dernière instance statuant sur recours (art. 75 LTF) dans une affaire pécuniaire dont la valeur litigieuse - déterminée selon les dernières conclusions restées litigieuses devant l'autorité précédente (art. 51 al. 1 let. a LTF) - atteint le seuil de 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF), le recours en matière civile, en tant qu'il est dirigé contre la première intimée, est recevable, puisqu'il a été déposé dans le délai (art. 46 al. 1 let. a, 48 al. 1 et 100 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi.
1.3 Le recours peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Il peut donc également être formé pour violation d'un droit constitutionnel (ATF 136 I 241 consid. 2.1 p. 247; 136 II 304 consid. 2.4 p. 313). En revanche, il n'est pas ouvert pour se plaindre d'une violation du droit cantonal, hormis quelques exceptions qui n'entrent pas en considération en l'espèce (cf. art. 95 et 96 LTF; ATF 136 I 241 consid. 2.4 p. 249).
Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est donc limité ni par les arguments soulevés dans le recours, ni par la motivation retenue par l'autorité précédente; il peut admettre un recours pour un autre motif que ceux qui ont été invoqués et il peut rejeter un recours en adoptant une argumentation différente de celle de l'autorité précédente (ATF 135 III 397 consid. 1.4 p. 400; 134 III 102 consid. 1.1 p. 104). Compte tenu de l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués; il n'est pas tenu de traiter, comme le ferait une autorité de première instance, toutes les questions juridiques qui se posent, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui (ATF 135 III 384 consid. 2.2.1 p. 389; 135 III 397 consid. 1.4 p. 400).
Par exception à la règle selon laquelle il applique le droit d'office, le Tribunal fédéral ne peut entrer en matière sur la violation d'un droit constitutionnel ou sur une question relevant du droit cantonal ou intercantonal que si le grief a été invoqué et motivé de manière précise par la partie recourante (art. 106 al. 2 LTF).
1.4 Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire (ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62; 136 II 304 consid. 2.4 p. 314) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF).
La partie recourante qui entend s'écarter des constatations de l'autorité précédente doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées, faute de quoi il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui contenu dans la décision attaquée (ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62; 136 I 184 consid. 1.2 p. 187). Une rectification de l'état de fait ne peut être demandée que si elle est de nature à influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF).
En l'espèce, la recourante présente son propre état de fait, mais sans jamais démontrer, avec la précision requise, que les constatations cantonales seraient arbitraires. Le raisonnement doit donc être mené exclusivement sur la base des faits constatés par la cour cantonale.
1.5 Le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des parties (art. 107 al. 1 LTF). Toute conclusion nouvelle est irrecevable (art. 99 al. 2 LTF).
2.
2.1 La recourante s'en prend à la décision attaquée en tant qu'elle la condamne à verser à la première intimée (ci-après: l'intimée) la somme de 15'000 fr. à titre de réparation du tort moral.
2.1.1 Il ressort des constatations cantonales - qui lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF) - que l'intimée a chargé la recourante, en sa qualité de médecin, d'examiner son état et de prendre les mesures thérapeutiques adéquates; un tel accord constitue un contrat de mandat au sens de l'art. 394 al. 1 CO (ATF 132 III 353 consid. 3.1 p. 362).
Le mandataire (en l'occurrence: le médecin) est responsable envers le mandant de la bonne et fidèle exécution du mandat (art. 398 al. 2 CO). L'art. 398 al. 1 CO renvoie aux règles régissant la responsabilité du travailleur dans les rapports de travail, soit l'art. 321e CO. Cette disposition prévoit que le travailleur est responsable du dommage qu'il cause à l'employeur intentionnellement ou par négligence et elle détermine la mesure de la diligence requise (ATF 133 III 121 consid. 3.1 p. 123 s.). En cas d'inexécution ou de mauvaise exécution de son obligation de diligence, le mandataire est tenu de réparer le dommage qui en résulte, à moins qu'il ne prouve qu'aucune faute ne lui est imputable (art. 97 al. 1 CO).
La responsabilité du mandataire suppose la réunion de quatre conditions qui sont cumulatives: une violation d'un devoir de diligence, une faute, un dommage et une relation de causalité (naturelle et adéquate) entre la violation fautive du devoir de diligence et le dommage survenu; il appartient au demandeur d'apporter la preuve des faits permettant de constater que chacune de ces conditions est remplie (art. 8 CC), sauf pour la faute qui est présumée (art. 97 al. 1 CO) (TERCIER/FAVRE, Les contrats spéciaux, 4e éd. 2009, n° 5196 ss).
La recourante se réfère, dans son mémoire, à l'art. 41 CO. Il est vrai que l'action délictuelle, notamment en cas de lésions corporelles, concourt avec l'action contractuelle; toutefois, la demande a été fondée en l'espèce sur la violation du contrat et il n'y a donc aucune raison de se référer à l'art. 41 CO.
Selon l'art. 47 CO, le juge peut, en tenant compte de circonstances particulières, allouer à la victime de lésions corporelles ou, en cas de mort d'homme, à la famille, une indemnité équitable à titre de réparation morale. Lorsque - comme c'est le cas en l'espèce - la demande porte sur une indemnité pour tort moral, la partie demanderesse doit prouver non pas l'existence d'un dommage, mais d'un tort moral qui soit en relation de causalité avec la violation fautive du contrat.
La recourante se réfère dans son mémoire à l'art. 49 CO, mais cette disposition, qui concerne le tort moral en cas d'atteinte à la personnalité, n'est d'aucune utilité en l'espèce, puisque l'octroi d'une réparation morale en cas de lésions corporelles est prévu spécialement par l'art. 47 CO.
2.1.2 S'agissant plus précisément de la responsabilité contractuelle dans le domaine médical, il faut apporter quelques précisions quant au devoir de diligence du médecin.
Le médecin doit accomplir tous les actes qui paraissent appropriés, selon les règles de l'art médical, pour atteindre le but du traitement (arrêt 4A_403/2007 du 24 juin 2008 consid. 5.2 publié in RtiD 2009 I p. 696). Dans l'exécution de sa mission, le médecin doit mettre à disposition ses connaissances et ses capacités; il ne garantit cependant pas d'obtenir un résultat. L'étendue de son devoir doit être déterminée selon des critères objectifs; les exigences dépendent des particularités de chaque cas, telles que la nature de l'intervention ou du traitement et les risques qu'ils comportent, la marge d'appréciation, le temps et les moyens disponibles, la formation et les capacités du médecin (ATF 133 III 121 consid. 3.1 p. 124). Les règles de l'art médical, que le médecin doit suivre, constituent des principes établis par la science médicale, généralement reconnus et admis, communément suivis et appliqués par les praticiens; savoir si le médecin a violé son devoir de diligence est une question de droit; dire s'il existe une règle professionnelle communément admise, quel était l'état du patient et comment l'acte médical s'est déroulé relève du fait (ATF 133 III 121 consid. 3.1 p. 124).
Par ailleurs, le mandat confié au médecin implique pour lui un devoir d'information à l'égard du patient. Le médecin doit donner à celui-ci, en termes clairs, intelligibles et aussi complets que possible, une information sur le diagnostic, la thérapie, le pronostic, les alternatives au traitement proposé, les risques de l'opération, les chances de succès, éventuellement sur l'évolution spontanée de la maladie et les questions financières, notamment relatives à l'assurance; des exceptions ne sont admises que dans des cas très précis, par exemple lorsqu'il s'agit d'actes courants sans danger particulier et n'entraînant pas d'atteinte définitive ou durable à l'intégrité corporelle, s'il y a une urgence confinant à l'état de nécessité, si, dans le cas d'une opération en cours, il y a nécessité évidente d'en effectuer une autre ou encore si le patient a déjà subi une ou plusieurs opérations du même genre (pour autant qu'il ne s'agisse pas d'une intervention particulièrement délicate quant à son exécution ou à ses conséquences) (ATF 133 III 121 consid. 4.1.2 p. 129). C'est au médecin qu'il appartient de prouver qu'il a renseigné correctement le patient (ATF 133 III 121 consid. 4.1.3 p. 129).
2.1.3 Si le médecin a violé fautivement son devoir de diligence, le patient ne pourra obtenir des dommages-intérêts ou une indemnité pour tort moral que s'il prouve que cette violation est en relation de causalité naturelle et en relation de causalité adéquate avec la survenance d'un dommage, respectivement d'un tort moral (art. 8 CC, art. 97 al. 1 CO).
Un fait est la cause naturelle d'un résultat s'il en constitue une condition sine qua non; le constat de la causalité naturelle relève du fait (ATF 133 III 462 consid. 4.4.2 p. 470; 132 III 715 consid. 2.2 p. 718).
Un fait constitue la cause adéquate d'un résultat s'il est propre, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, à entraîner un résultat du genre de celui qui s'est produit; le constat de la causalité adéquate relève du droit (ATF 123 III 110 consid. 2 p. 111 et 3a p. 112).
2.1.4 Par tort moral, on entend des souffrances physiques ou psychiques (arrêt 4C.114/1993 du 27 décembre 1993 consid. 8a). Il incombe à la partie demanderesse d'en prouver l'existence (art. 8 CC). L'existence d'un tort moral relève des constatations de fait (arrêt 4C.114/1993 déjà cité consid. 8b).
L'indemnité pour tort moral a pour but exclusif de compenser le préjudice que représente une atteinte au bien-être moral; le principe d'une indemnisation du tort moral et l'ampleur de la réparation dépendent d'une manière décisive de la gravité de l'atteinte et de la possibilité d'adoucir de façon sensible, par le versement d'une somme d'argent, la douleur physique ou morale. La fixation de l'indemnité satisfactoire relève de l'appréciation du juge; il s'agit d'une question que le Tribunal fédéral ne revoit qu'avec retenue; il n'intervient que lorsque l'autorité cantonale s'écarte sans motif des critères fixés par la doctrine et la jurisprudence, prend en considération des faits sans pertinence ou, au contraire, ignore ceux qu'elle aurait dû prendre en compte ou encore lorsque, dans son résultat, le montant fixé apparaît manifestement inéquitable ou choquant (ATF 123 III 306 consid. 9b p. 315).
2.1.5 En l'espèce, la cour cantonale a choisi de suivre les constatations des experts qu'elle a elle-même désignés et dont les conclusions lui ont paru claires, précises et convaincantes. Il ne s'agit pas là d'une question de droit fédéral, mais d'une pure question d'appréciation des preuves, que le Tribunal fédéral ne saurait revoir en l'absence d'un grief d'arbitraire régulièrement formulé (art. 106 al. 2 LTF).
Se prononçant sur le contenu de l'art médical, les experts ont affirmé que l'ablation du sein droit ne s'imposait pas et ne constituait pas une option médicalement reconnue.
Les règles de l'art étant ainsi constatées - ce qui relève du fait -, il en découle, sans violation du droit fédéral que la recourante a manqué fautivement à son devoir de diligence en procédant à cette opération.
Il ressort d'ailleurs bien des constatations cantonales - qui lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF) - que la mammographie n'avait révélé aucune anomalie du sein droit et que la biopsie n'a pas porté sur le sein droit; en conséquence, au moment où l'ablation a été effectuée, il n'y avait aucun indice que ce sein soit malade; l'examen effectué ultérieurement a prouvé que ce sein n'était pas atteint d'un cancer. Ainsi, la recourante a procédé à l'ablation d'un organe qui n'était pas malade et dont elle n'avait aucune raison sérieuse de penser qu'il le soit. Admettre en pareilles circonstances qu'il y a eu violation fautive du devoir de diligence est conforme au droit fédéral.
Pour tenter de se justifier, la recourante fait valoir que le cancer aurait pu s'étendre un jour au sein droit. Ce risque étant connu, on peut raisonnablement penser que ce sein aurait fait l'objet d'un examen attentif et régulier; à la moindre apparition d'une anomalie, les experts ont relevé qu'il était possible d'intervenir avec une technique moins invasive, qui était déjà connue à l'époque. En suivant sur ce point l'opinion des experts judiciaires, la cour cantonale s'est prononcée sur le contenu de l'art médical, ce qui relève des constatations de fait qui, faute d'un grief d'arbitraire, n'ont pas à être revues par le Tribunal fédéral (art. 106 al. 2 LTF). Ainsi, la recourante a utilisé une méthode plus mutilante qu'il n'était nécessaire, de sorte que son argument ne supprime pas l'existence d'une violation fautive du devoir de diligence.
La recourante soutient que la double ablation répondait à un souci esthétique, pour assurer la symétrie des deux seins. La cour cantonale a cependant constaté - d'une manière qui lie le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF) - que la patiente avait expliqué qu'elle avait accepté la double ablation parce que "sa priorité était de mettre toutes les chances de son côté pour éviter une récidive" (arrêt attaqué p. 3). Il est donc clairement établi que la patiente a accepté la double ablation parce qu'elle craignait que le cancer n'atteigne le sein droit. Si la recourante avait informé sa patiente - comme elle le devait - que l'ablation du sein droit n'était pas imposée par des considérations médicales, mais pouvait se justifier pour des raisons esthétiques, il est évident que la situation se serait présentée d'une manière différente et il est fort possible que la patiente n'aurait pas accepté l'ablation de ce sein. Le devoir d'information du médecin impliquait que la patiente soit renseignée sur les alternatives thérapeutiques moins invasives et sur les motifs réels pour lesquels la recourante pensait l'intervention nécessaire. Il est manifeste que l'information due n'a pas été donnée, puisque la patiente a compris qu'elle devait accepter la double ablation pour se protéger contre une apparition du cancer dans le sein droit. Ainsi, l'argumentation présentée n'est pas propre à faire disparaître l'existence d'une violation fautive du devoir de diligence.
2.1.6 La cour cantonale a constaté que l'ablation du sein droit, qui n'aurait pas dû être effectuée, a provoqué chez la patiente d'importantes souffrances physiques (ce sein a été opéré quatre fois) et psychiques (stress lié aux opérations, sentiment d'être mal soignée et perte d'attributs de la féminité). Le constat d'un tort moral relève du fait et ne saurait être revu par le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF).
Les souffrances constatées par la cour cantonale résultent, pour moitié, de l'ablation du sein droit. Le rapport de causalité naturelle, dont la constatation relève du fait, ressortit à l'évidence et on ne saurait dire que la cour cantonale a perdu de vue de cette exigence légale.
La recourante tente de contester l'existence d'un rapport de causalité adéquate, mais son argumentation est dépourvue de toute consistance. Il tombe sous le sens que l'ablation d'un sein est propre, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, à entraîner des souffrances du genre de celles qui se sont produites. Le rapport de causalité adéquate a donc été admis sans violation du droit fédéral.
Quant à la quotité de l'indemnité, la cour cantonale s'est référée à un précédent, remontant à 1982, où le Tribunal fédéral, dans un cas d'ablation des deux seins, avait admis une indemnité pour tort moral de 25'000 fr. (ATF 108 II 59 consid. 4 p. 64). Il est vrai qu'en l'espèce l'ablation d'un seul sein est contraire aux règles de l'art, de sorte que le montant de l'indemnité doit être réduit de moitié. Il faut aussi tenir compte de la hausse du coût de la vie depuis 1982 pour revaloriser le montant alloué à cette époque. Même s'il est vrai que les deux cas ne sont pas identiques, on ne saurait dire que l'octroi en l'espèce d'une indemnité de 15'000 fr. procède d'un abus du large pouvoir d'appréciation accordé au juge en cette matière.
Ainsi, l'octroi de l'indemnité pour tort moral ne viole pas le droit fédéral et le recours doit être rejeté sur ce point.
2.2 La recourante reproche à la cour cantonale de l'avoir condamnée à verser 3'000 fr. à l'intimée pour ses frais d'avocat avant le procès.
En matière de responsabilité médicale, les procès sont souvent complexes et les chances de succès dépendent largement des faits que la partie demanderesse est en mesure de prouver. Il est donc raisonnable que l'intimée, avant d'ouvrir le procès, se soit renseignée auprès d'un avocat et que celui-ci, pour conseiller utilement sa cliente, se soit adressé aux médecins en cause et au bureau d'expertises de la FMH. Ces démarches préalables ne sauraient être qualifiées d'inutiles ou d'injustifiées. Dans la mesure où elle succombe sur le fond, il est légitime que la recourante, qui doit réparation, ait à en assumer une partie (cf. ATF 117 II 102 consid. 2 p. 4). On ne voit pas en quoi le chiffre de 3'000 fr. aurait été arrêté en violation du droit fédéral, de sorte que ce grief doit également être rejeté.
2.3 Se plaignant de la répartition des frais et dépens ainsi que de la "réserve des droits" de l'intimée, la recourante soutient qu'il y a eu violation des art. 7 et 176 LPC/GE.
Comme le procès était en cours devant l'autorité cantonale lorsque, le 1er janvier 2011, le Code de procédure civile du 19 décembre 2008 (CPC; RS 272) est entré en vigueur, la procédure cantonale s'est déroulée entièrement sous l'empire de l'ancien droit, c'est-à-dire le droit de procédure genevois (art. 404 al. 1 CPC). La recourante en est bien consciente puisqu'elle invoque exclusivement la violation de dispositions du droit cantonal.
Elle perd cependant de vue que le recours en matière civile n'est pas ouvert pour se plaindre d'une violation du droit cantonal (cf. supra consid. 1.3). Pour poser une question de droit fédéral, la recourante aurait certes pu invoquer, en relation avec l'application du droit cantonal, l'interdiction de l'arbitraire découlant de l'art. 9 Cst. (ATF 134 III 379 consid. 1.2 p. 382 s.; 133 I 201 consid. 1 p. 203; 133 III 462 consid. 2.3 p. 466). S'agissant d'un grief d'ordre constitutionnel, le Tribunal fédéral ne peut cependant l'examiner que si la violation du droit constitutionnel a été invoquée avec précision (art. 106 al. 2 LTF). Au moment de motiver son grief, à la page 22 du mémoire, la recourante n'invoque aucun droit constitutionnel; elle ne parle pas de l'interdiction de l'arbitraire, alors même que ce grief avait été annoncé dans le préambule non motivé de la page 4. Ainsi, la recourante n'a pas expliqué en quoi un droit constitutionnel déterminé aurait été violé (art. 106 al. 2 LTF); il n'est donc pas possible d'entrer en matière sur l'argumentation présentée qui a pour seul objet de se plaindre d'une violation du droit cantonal.
Ainsi, le recours, en tant qu'il est dirigé contre la première intimée, doit être rejeté dans la mesure où il est recevable.
Les dépens relatifs à ce recours doivent être mis à la charge de la recourante qui succombe (art. 68 al. 1 et 2 LTF).
3.
Les frais judiciaires sont mis à la charge de la recourante qui succombe (art. 66 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours, en tant qu'il est dirigé contre Z.________, est irrecevable.
2.
Le recours, en tant qu'il est dirigé contre Y.________, est rejeté dans la mesure où il est recevable.
3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.
4.
La recourante versera à chacune des intimées une indemnité de 2'500 fr. à titre de dépens.
5.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice du canton de Genève, Chambre civile.
Lausanne, le 19 août 2011
Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente: Klett
Le Greffier: Piaget