BGer 1C_478/2014 |
BGer 1C_478/2014 vom 14.07.2015 |
{T 0/2}
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1C_478/2014
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Arrêt du 14 juillet 2015 |
Ire Cour de droit public |
Composition
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MM. les Juges fédéraux Merkli, Juge présidant,
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Karlen et Chaix.
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Greffière : Mme Kropf.
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Participants à la procédure
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A.________,
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représenté par Me Philippe Rossy, avocat,
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recourant,
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contre
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Service des automobiles et de la navigation
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du canton de Vaud.
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Objet
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Retrait de permis de conduire,
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recours contre l'arrêt de la Cour de droit administratif
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et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud
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du 2 octobre 2014.
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Faits : |
A. Par ordonnance pénale du 19 novembre 2013, le Préfet du Jura-Nord vaudois a condamné A.________ à une amende de 300 fr. pour infraction simple aux règles de la circulation routière (occupation accessoire en conduisant [art. 3 al. 1 de l'Ordonnance du 13 novembre 1962 sur les règles de la circulation routière (OCR; RS 741.11) ], empiètement sur la bande d'arrêt d'urgence [art. 36 al. 3 OCR] et conduite sans être porteur du permis de circulation [art. 10 al. 4 de la loi fédérale du 19 décembre 1958 (LCR; RS 741.01) ]). Ces infractions ont été réalisées le 16 octobre 2013 alors que A.________ roulait au volant de son camion avec remorque sur l'autoroute xxx. Aucune opposition n'a été déposée.
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Le 12 février 2014, le Service des automobiles et de la navigation du canton de Vaud (SAN) a considéré qu'il s'agissait d'une infraction moyennement grave et a ordonné le retrait pour un mois du permis de conduire de A.________. Cette décision a été confirmée sur réclamation le 3 juin 2014. Par arrêt du 2 octobre 2014, la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal vaudois a rejeté le recours intenté par l'intéressé contre cette décision.
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B. Par acte du 3 novembre 2014, A.________ forme un recours en matière de droit public contre ce jugement. Il conclut en substance à ce qu'aucune mesure ne soit prise à son encontre et, subsidiairement, à ce que seul un avertissement lui soit infligé. Il requiert également l'effet suspensif.
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Dans le cadre de l'examen de la demande d'effet suspensif, la cour cantonale a renvoyé à ses considérants, tandis que le SAN ne s'y est pas opposé. L'Office fédéral des routes a conclu au rejet du recours en se référant à la décision entreprise. Les parties n'ont pas déposé d'écritures supplémentaires.
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Par ordonnance du 3 décembre 2014, la requête d'effet suspensif a été admise.
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Considérant en droit : |
1. La voie du recours en matière de droit public, au sens des art. 82 ss LTF, est en principe ouverte contre une décision prise en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF) au sujet d'une mesure administrative de retrait du permis de conduire (art. 82 let. a LTF), aucune des exceptions mentionnées à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. Le recourant est particulièrement atteint par la décision attaquée, qui confirme le retrait de son permis de conduire pour une durée d'un mois; il a un intérêt digne de protection à son annulation. La qualité pour recourir doit donc lui être reconnue (art. 89 al. 1 LTF). Pour le surplus, les autres conditions de recevabilité du recours sont réunies et il convient donc d'entrer en matière.
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2. Le recourant ne conteste pas les trois violations des règles de la circulation retenues à son encontre dans le jugement pénal. Il reproche en revanche à l'autorité précédente d'avoir considéré que les infractions d'empiètement sur la bande d'arrêt d'urgence résulteraient de l'usage de son téléphone sans dispositif "mains libres". Il soutient à cet égard qu'il s'agirait d'infractions successives, indépendantes les unes des autres. Le recourant remet également en cause la qualification d'infraction moyennement grave, affirmant en substance n'avoir créé aucune mise en danger spécifique.
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2.1. Si les infractions reprochées au recourant figurent effectivement dans la liste permettant de les sanctionner par une amende d'ordre (cf. ch. 100.3, 311 et 328.1 de l'annexe 1 à l'Ordonnance du 4 mars 1996 sur les amendes d'ordre [OAO; RS 741.031]), le Préfet n'a pas opté pour cette procédure spéciale, choix que le recourant n'a pas contesté et qui ne peut être remis en cause dans le cadre de la procédure administrative de retrait du permis. En vertu de l'art. 16 al. 2 LCR, l'autorité administrative était donc en droit d'examiner une éventuelle mesure à son encontre.
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Au demeurant, il y a lieu de rappeler que cette procédure spéciale ne s'applique pas aux infractions dont l'auteur a mis en danger ou blessé des personnes ou causé des dommages matériels (art. 2 let. a de la loi fédérale du 24 juin 1970 sur les amendes d'ordre [LAO; RS 741.03]).
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2.2. Commet une infraction légère la personne qui, en violant les règles de la circulation, met légèrement en danger la sécurité d'autrui et à laquelle seule une faute bénigne peut être imputée (art. 16a al. 1 let. a LCR). Commet une infraction moyennement grave la personne qui, en violant les règles de la circulation, crée un danger pour la sécurité d'autrui ou en prend le risque (art. 16b al. 1 let. a LCR). Commet une infraction grave la personne qui, en violant gravement les règles de la circulation, met sérieusement en danger la sécurité d'autrui ou en prend le risque (art. 16c al. 1 let. a LCR).
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Le législateur conçoit l'art. 16b al. 1 let. a LCR comme l'élément dit de regroupement. Cette disposition n'est ainsi pas applicable aux infractions qui tombent sous le coup des art. 16a al. 1 ou 16c al. 1 let. a LCR. Dès lors, l'infraction est toujours considérée comme moyennement grave lorsque tous les éléments constitutifs qui permettent de la privilégier comme légère ou au contraire de la qualifier de grave ne sont pas réunis. Tel est, par exemple, le cas lorsque la faute est grave et la mise en danger bénigne ou, inversement, si la faute est légère et la mise en danger grave (ATF 136 II 447 consid. 3.2 p. 452 et les références). Il y a création d'un danger sérieux pour la sécurité d'autrui non seulement en cas de mise en danger concrète, mais déjà en cas de mise en danger abstraite accrue; la réalisation d'un tel danger s'examine en fonction des circonstances spécifiques du cas d'espèce (ATF 131 IV 133 consid. 3.2 p. 136; arrêt 1C_20/2013 du 28 mai 2013 consid. 4.4 et les arrêts cités).
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2.3. En l'espèce, il n'y a pas lieu de déterminer si les empiètements reprochés au recourant découlent - ou pas - de l'usage du téléphone sans dispositif "mains libres", même si un tel cas de figure ne semble pas exclu.
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En effet, la cour cantonale a retenu, dans une seconde motivation (cf. consid. 4b du jugement attaqué), que si les infractions avaient été commises de manière successive, l'usage d'un téléphone sans dispositif "mains libres" constituait - à lui seul - une infraction moyennement grave puisque cela entraîne une importante diminution de la concentration et de la vigilance. Le recourant prétend que tel serait le cas uniquement en présence de circonstances aggravantes. Or, à cet égard, l'autorité précédente a constaté, à juste titre, que le recourant circulait sur l'autoroute - où les vitesses sont élevées -, de surcroît au volant d'un train routier, comportant un camion et une remorque. Le recourant a lui-même relevé que la composition de son véhicule rendait sa conduite peu aisée (cf. la largeur de la remorque [ad let. f du mémoire de recours p. 11]). A suivre sa version, cela expliquerait les empiètements perpétrés. De telles circonstances exigent manifestement une attention accrue de la part d'un conducteur afin d'assurer sa propre sécurité, ainsi que celle des autres usagers. Le recourant, chauffeur professionnel, ne l'ignore d'ailleurs pas : il a ainsi mentionné dans son mémoire qu'un "conducteur de camion doit constamment adapter sa conduite par de légers changements de trajectoire pour éviter les sillons grevant la chaussée" (cf. ad let. f de son écriture p. 11). Pourtant, à peine quelques secondes après - non pas une - mais trois "rectifications" de trajectoire, il a répondu à un appel téléphonique sans utiliser un dispositif "mains libres".
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L'absence de véhicule tiers ou d'autre danger n'empêche pas de retenir que ce comportement est constitutif d'une mise en danger accrue - qualifiée dès lors d'abstraite - des autres usagers. Au vu des circonstances (autoroute et camion avec remorque), la mise en danger ne peut plus être considérée comme légère, un conducteur, de surcroît professionnel, devant vouer toute son attention aux conditions de circulation. Selon le recourant lui-même, celles-ci étaient loin d'être dénuées de difficultés puisque la conduite de son véhicule avec remorque lui aurait imposé, dans les secondes précédant l'appel télé-phonique, pas moins de trois "corrections" de trajectoire, manoeuvres par ailleurs constitutives d'infractions (empiètements sur la bande d'arrêt d'urgence).
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Par conséquent, la Cour de droit administratif et public pouvait, sans violer le droit fédéral, confirmer le retrait du permis de conduire d'une durée d'un mois, soit le minimum légal (art. 16 al. 3 et 16b al. 1 let. a LCR; ATF 132 II 234 consid. 2.3 p. 236 s.).
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3. Il s'ensuit que le recours est rejeté.
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Le recourant, qui succombe, supporte les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens (art. 68 al. 3 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : |
1. Le recours est rejeté.
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2. Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
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3. Il n'est pas alloué de dépens.
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4. Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Service des automobiles et de la navigation du canton de Vaud, à la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud et à l'Office fédéral des routes.
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Lausanne, le 14 juillet 2015
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Au nom de la Ire Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Juge présidant : Merkli
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La Greffière : Kropf
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