BGer 4A_513/2016
 
BGer 4A_513/2016 vom 18.04.2017
4A_513/2016
 
Arrêt du 18 avril 2017
 
Ire Cour de droit civil
Composition
Mmes les Juges fédérales
Kiss, Présidente, Hohl et Niquille.
Greffier : M. Piaget.
Participants à la procédure
1. X.________ SA,
2. F.Y.________,
toutes les deux représentées par Me Nathalie Fluri,
recourantes,
contre
A.________, représentée par Me Jean-Claude Perroud,
intimée.
Objet
action en fixation du loyer initial (art. 270 al. 2 CO); rendement net et, faute des pièces nécessaires à ce calcul, fixation du loyer admissible;
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour d'appel civile, du 4 mai 2016.
 
Faits :
A. Par contrat du 8 mai 2006, X.________ SA (ci-après: X.________) et F.Y.________ ont remis à bail à A.________ un appartement de 2,5 pièces, d'une surface de 64 m2 (le balcon étant pris en considération à raison de la moitié de sa surface) à partir du 1er septembre 2006. Le loyer mensuel net convenu était de 1'420 fr. Un acompte de chauffage, eau chaude et frais accessoires de 100 fr. et un loyer de 130 fr. pour la place de parc intérieure étaient dus en sus.
La formule officielle imposée par l'art. 270 al. 2 CO n'a pas été remise à la locataire. Il a été établi que les précédents locataires payaient un loyer identique, l'acompte provisionnel pour les frais accessoires étant de 75 fr.
Par courrier du 11 août 2012, la locataire a demandé aux bailleresses une nouvelle fixation du loyer initial, le loyer convenu étant nul, faute de communication de la formule officielle de notification du loyer initial.
B. Le 4 septembre 2012, par requête de conciliation adressée à la Commission de conciliation du district de Nyon, la locataire a ouvert action en contestation de la nullité du loyer initial, en fixation de celui-ci et en restitution du trop-perçu contre ses bailleresses.
Elle a déposé sa demande devant le Tribunal des baux le 1er novembre 2012, concluant à ce que le loyer soit considéré comme excessif, qu'il soit fixé à 420 fr. par mois dès le 1er septembre 2006, puis réduit en raison de la baisse du taux hypothécaire de 8,26% par mois à partir du 1er septembre 2013, puis, dans ses conclusions finales, réduit encore de 6,03% dès la prochaine échéance du bail en raison de la nouvelle baisse du taux hypothécaire.
La cause a été suspendue jusqu'à droit connu sur le sort du recours en matière civile dans une affaire concernant un autre appartement (d'une surface de 91,47 m2 avec balcon de 10,1 m2) situé dans le même immeuble.
Par jugement du 2 septembre 2015, le Tribunal des baux du canton de Vaud a notamment fixé le loyer initial net à 800 fr. par mois, l'a réduit ensuite, pour tenir compte de l'évolution du taux hypothécaire de référence et de l'indice suisse des prix à la consommation, à 743 fr. dès le 1er septembre 2013, puis à 697 fr. dès le 1er septembre 2016 et a condamné les bailleresses à rembourser solidairement le trop-perçu.
Statuant le 4 mai 2016, la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud a rejeté l'appel des bailleresses et confirmé le jugement attaqué.
C. Contre cet arrêt, les bailleresses exercent un recours en matière civile au Tribunal fédéral, concluant principalement à ce que le loyer initial net soit fixé à 1'420 fr. par mois, puis réduit à 1'319 fr. dès le 1er septembre 2013 et à 1'310 fr. dès le 1er septembre 2016 et, subsidiairement, à son annulation et au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Elles reprochent à l'autorité précédente d'avoir violé leur droit à la preuve en rejetant leur requête d'expertise (art. 29 Cst., art. 8 CC et art. 152 CPC) et d'avoir abusé de son pouvoir d'appréciation en fixant le loyer initial à 150 fr./m2 (chiffre calculé sur une année entière) alors que quelques mois auparavant, dans une autre affaire concernant un appartement dans le même immeuble, elle avait admis un montant de 186 fr./m2.
La locataire intimée conclut au rejet du recours.
La cour cantonale se réfère aux considérants de son arrêt.
Les parties ont encore déposé chacune des observations.
 
Considérant en droit :
1. Interjeté en temps utile, compte tenu des féries d'été (art. 100 al. 1 et 46 al. 1 let. b LTF), par les bailleresses qui ont succombé dans leurs conclusions (art. 76 LTF) et dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu sur appel par un tribunal cantonal supérieur (art. 75 LTF) dans une affaire pécuniaire dont la valeur litigieuse atteint le seuil de 15'000 fr. requis en matière de bail à loyer (art. 74 al. 1 let. a LTF), le recours en matière civile est recevable au regard de ces dispositions.
Alors que dans leur appel cantonal, les bailleresses concluaient à ce que le loyer soit fixé à 1'420 fr., puis à 1'319 fr. dès le 1er septembre 2013, elles concluent désormais à ce qu'il soit fixé à 1'420 fr., puis à 1'319 fr. dès le 1er septembre 2013 et à 1'310 fr. dès le 1er septembre 2016. Dans la mesure où elles réduisent ainsi de 9 fr. leurs conclusions précédentes pour la dernière période, cette modification des conclusions est recevable (art. 99 al. 2 LTF; arrêts 4A_264/2008 du 23 septembre 2008 consid. 2.3; 5A_520/2011 du 13 décembre 2011 consid. 1.2 et les arrêts cités).
2. 
2.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 137 I 58 consid. 4.1.2; 137 II 353 consid. 5.1) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).
Le Tribunal fédéral se montre réservé en matière de constatations de fait et d'appréciation des preuves, vu le large pouvoir qu'il reconnaît en ce domaine aux autorités cantonales (ATF 120 Ia 31 consid. 4b; 104 Ia 381 consid. 9 et les références). Il n'intervient, du chef de l'art. 9 Cst., que si le juge du fait n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, a omis sans raisons objectives de tenir compte des preuves pertinentes ou a effectué, sur la base des éléments recueillis, des déductions insoutenables (ATF 137 III 226 consid. 4.2; 136 III 552 consid. 4.2; 134 V 53 consid. 4.3; 133 II 249 consid. 1.4.3; 129 I 8 consid. 2.1).
La critique de l'état de fait retenu est soumise au principe strict de l'allégation énoncé par l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 140 III 264 consid. 2.3 p. 266 et les références). La partie qui entend attaquer les faits constatés par l'autorité précédente doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 p. 18 et les références). Si la critique ne satisfait pas à ces exigences, les allégations relatives à un état de fait qui s'écarterait de celui de la décision attaquée ne pourront pas être prises en considération (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 p. 18). Les critiques de nature appellatoires sont irrecevables (ATF 130 I 258 consid. 1.3 p. 261 s.).
Les faits nouveaux sont irrecevables devant le Tribunal fédéral (art. 99 al. 1 LTF).
2.2. Le Tribunal fédéral applique en principe d'office le droit (art. 106 al. 1 LTF) à l'état de fait constaté dans l'arrêt cantonal (ou à l'état de fait qu'il aura rectifié). Compte tenu de l'obligation de motiver imposée aux parties par l'art. 42 al. 2 LTF, il ne traite que les questions qui sont soulevées par elles devant lui, à moins que la violation du droit ne soit manifeste (ATF 140 III 115 consid. 2 p. 116; 140 III 86 consid. 2; 133 III 545 consid. 2.2; arrêt 4A_399/2008 du 12 novembre 2011 consid. 2.1 non publié in ATF 135 III 112).
Il ne revoit qu'avec réserve la décision d'équité prise par la cour cantonale. Il intervient lorsque celle-ci s'écarte sans raison des règles établies par la jurisprudence en matière de libre appréciation, ou lorsqu'elle s'appuie sur des faits qui, dans le cas particulier, ne devaient jouer aucun rôle, ou à l'inverse, lorsqu'elle n'a pas tenu compte d'éléments qui auraient absolument dû être pris en considération; il sanctionnera en outre les décisions rendues en vertu d'un pouvoir d'appréciation lorsqu'elles aboutissent à un résultat manifestement injuste ou à une inéquité choquante (ATF 130 III 28 consid. 4.1 p. 32, 213 consid. 3.1 p. 220 et les arrêts cités). Il convient de préciser que, de manière générale, les éventuelles comparaisons avec des décisions judiciaires rendues dans des causes que les parties tiennent pour similaires à la leur doivent être appréciées avec circonspection.
3. Il n'est pas contesté que, faute de communication de la formule officielle de notification du loyer initial lors de la conclusion d'un nouveau bail, le loyer convenu est nul (art. 270 al. 2 CO; ATF 140 III 583 consid. 3.2 et 3.3). Les recourantes ne contestent pas non plus que le loyer initial convenu doit être contrôlé selon la méthode absolue et que, s'agissant d'un immeuble qui ne peut être qualifié d'ancien, le critère absolu du rendement net non excessif est prééminent par rapport au critère absolu des loyers usuels dans le quartier (ATF 124 III 310 consid. 2; arrêts 4A_295/2016 du 29 novembre 2016 consid. 5.1.1; 4A_517/2014 consid. 5.1.1; 4A_645/2011 du 27 janvier 2012 consid. 3.2).
3.1. Pour déterminer si la chose louée procure au bailleur un rendement net excessif (art. 269 CO), il est nécessaire de connaître le rapport entre les fonds propres réellement investis dans la chose remise à bail et le loyer, après déduction des charges d'exploitation et des intérêts débiteurs sur les capitaux empruntés. Pour déterminer le montant des fonds propres investis, il faut partir du coût de revient effectif de l'immeuble, sauf si le prix d'acquisition est manifestement exagéré, et soustraire le montant des fonds étrangers (emprunts garantis ou non par hypothèque). Le coût de revient comprend notamment les frais d'acquisition du terrain et le coût de la construction de l'immeuble, ou de son amélioration. Si l'immeuble a été acheté construit, le prix effectivement payé par l'acheteur est en principe déterminant, même s'il est inférieur à la valeur du marché. La prise en considération d'un prix préférentiel n'est admise que dans des circonstances particulières, par exemple si l'immeuble a été acquis dans le cadre du partage d'une succession ou par une donation mixte (arrêt 4A_129/2011 du 28 avril 2011 consid. 3.2 et les nombreux arrêts cités; pour le calcul détaillé, cf. arrêts 4A_147/2016 du 12 septembre 2016 consid. 2 et les arrêts cités; 4A_465/2015 du 1er mars 2016 consid. 4).
3.2. Lorsqu'il n'est pas possible de faire un calcul sur la base de la valeur de rendement, sans que le défaut des pièces nécessaires puisse être imputé au bailleur, il faut fixer le loyer initial admissible en tenant compte de toutes les circonstances (ATF 124 III 62 consid. 2b p. 64; arrêt 4A_517/2014 précité consid. 5.1). Le juge peut notamment tenir compte des statistiques qui, faute de mieux, permettront d'établir le loyer admissible, le cas échéant en pondérant les chiffres en fonction des caractéristiques concrètes de l'appartement litigieux, du loyer payé par le précédent locataire ou de l'expérience du juge (arrêt 4A_461/2015 du 15 février 2016 consid. 3.3.2; ATF 142 III 568 consid. 2.1 Le juge dispose à cet égard d'une grande marge d'appréciation (art. 4 CC). Le Tribunal fédéral ne revoit qu'avec retenue la décision qu'il prend à ce sujet (arrêts 4A_517/2014 déjà cité consid. 5.1; 4A_461/2015 déjà cité consid. 3.3.2).
4. En l'espèce, à la suite du Tribunal des baux, la cour cantonale a fixé le loyer initial au montant de 800 fr. par mois. Les bailleresses recourantes requièrent qu'il soit fixé au montant de 1'420 fr. par mois, comme convenu contractuellement.
4.1. Les recourantes soutiennent que la méthode du rendement net aurait dû être appliquée.
4.1.1. En ce qui concerne le rendement net, la cour cantonale a considéré que toutes les pièces permettant ce calcul n'ont pas été produites. Elle en a déduit qu'il ne sert à rien de requérir une expertise de la valeur de la quote-part de Mme F.Y.________ au moment où elle a reçu sa part en donation en juillet 1993, puisqu'il ne s'agit que d'une donnée nécessaire pour le calcul du rendement net et qu'il en manque d'autres.
4.1.2. Les recourantes affirment que les comptes et justificatifs ont été produits, que la valeur de ceux-ci est parfaitement probante et qu'on pouvait se fonder sur des montants usuels et forfaitaires au vu de la difficulté à réunir des pièces à ce sujet. Elles exposent qu'en ce qui concerne X.________, la valeur de l'immeuble n'a jamais été amortie et qu'elles ne disposent plus des pièces justificatives relatives aux fonds propres investis et aux travaux de construction, ce qui ne saurait leur être reproché; ces pièces avaient été confiées à une fiduciaire et ne sont plus disponibles après le délai de garde. Elles estiment que seule faisait défaut la valeur de la part de la bailleresse F.Y.________, acquise par donation en juillet 1993 et qui aurait dû être estimée par expertise à la valeur du prix du marché à ce moment-là. Elles reprochent aux premiers juges de s'être focalisés sur le prix d'acquisition du terrain en 1987 et les coûts de construction entre 1987 et 1988, et non sur le prix effectif de l'immeuble en juillet 1993. Elles reprochent donc à la cour cantonale d'avoir violé leur droit d'être entendues en refusant d'ordonner cette expertise (art. 29 al. 2 Cst., art. 8 CC et art. 152 CPC) et, partant, d'avoir violé l'art. 269 CO.
4.1.3. F.Y.________Ce faisant, les recourantes ne satisfont pas au principe d'allégation applicable aux constatations de fait (art. 106 al. 2 LTF). Alors que la cour cantonale a retenu qu'il manquait encore d'autres pièces (en sus de la valeur de la quote-part de Mme F.Y.________) pour effectuer le calcul du rendement net, elles se bornent à affirmer que les pièces qu'elles ont produites sont suffisantes. Elles n'offrent par là aucune démonstration qui permettrait au Tribunal fédéral de se convaincre que les pièces produites sont suffisantes pour calculer la valeur de rendement; purement appellatoire, leur grief est irrecevable.
Elles n'indiquent pas non plus en quoi il serait erroné de considérer que la valeur de la quote-part de Mme F.Y.________ en juillet 1993 n'était qu'une seule des données à prendre en considération; les premiers juges avaient d'ailleurs retenu que dame F.Y.________ avait simplement succédé à H.Y.________ qui avait acheté l'immeuble avec X.________ en 1987. Partant, leur grief de violation de leur droit à une expertise de la valeur de la quote-part (art. 29 al. 2 Cst., art. 8 CC et art. 152 CPC) est infondé.
En tant qu'elles invoquent la transgression de l'art. 269 CO, elle méconnaissent qu'une violation du droit matériel doit reposer sur les faits établis, et non sur un état de fait modifié.
4.2. Le rendement net n'ayant ainsi pas pu être établi, la cour cantonale a contrôlé la fixation de loyer effectuée par le tribunal des baux. Les bailleresses recourantes se plaignent d'arbitraire.
4.2.1. Le tribunal des baux a calculé le loyer en se basant, d'une part, sur le jugement rendu dans l'affaire de l'appartement de 91,47 m2 avec balcon de 10,1 m2, situé dans le même immeuble et, d'autre part, sur le récapitulatif produit sous pièce n° 123 - correspondant aux allégations des bailleresses, non prouvées à satisfaction de droit - et duquel il a déduit un loyer annuel de 146 fr. par m2.
La cour cantonale, même si elle ne l'a pas dit explicitement, a appliqué la jurisprudence valable lorsque le défaut de production des pièces nécessaires pour établir la valeur de rendement net n'est pas imputable à faute au bailleur, dès lors que les premiers juges n'avaient pas tenu compte d'un manque de collaboration des bailleurs dans leur appréciation des preuves, celle-ci se fondant sur d'autres éléments comme les statistiques et l'expérience des juges.
La cour précédente a considéré que le loyer payé par le précédent locataire - 1'420 fr. - est un élément parmi d'autres, mais qu'il ne suffit pas à lui seul à établir un loyer non abusif et qu'il n'est pas insoutenable de se baser sur un jugement rendu dans une cause récente portant sur un appartement dans le même immeuble et sur les allégations des bailleresses - le récapitulatif sous pièce n° 123 -, les données statistiques produites ne permettant pas de déduire quelque chose. Elle a donc jugé que le tribunal des baux n'a pas violé le droit, ni abusé de son pouvoir d'appréciation et elle a confirmé le résultat auquel celui-ci est parvenu, un résultat qui n'avait pas été contesté en tant que tel par les bailleresses appelantes.
4.2.2. Les recourantes estiment que la cour cantonale a fait preuve d'arbitraire en fixant le loyer sur la base (annuelle) de 150 fr. par m2. Elles lui reprochent d'avoir procédé à un calcul approximatif, sans méthode ni expérience: son calcul approximatif aurait dû être étayé en faisant référence au loyer généralement applicable à un appartement de 2,5 pièces doté d'un équipement et d'une situation comparables. Selon elles, les prix par m2 se situent entre 350 fr. et 450 fr. par m2 par année, de sorte qu'un montant minimum de 350 fr. par m2 aurait dû être retenu, d'où un loyer de 1'867 fr. par mois (350 fr. x 64 m2/12). Elles qualifient d'arbitraire la réduction du montant de 186 fr. par m 2, appliqué dans l'affaire précédente concernant un 3,5 pièces, au montant de 150 fr. par m2, dans le présent litige relatif à un 2,5 pièces, une telle différence de 20% ne pouvant être justifiée pour un appartement plus petit.
4.2.3. Force est de constater que la cour cantonale a explicitement désigné le motif pour lequel elle a jugé que - même si la cause avait été suspendue jusqu'à droit connu sur le sort du recours en matière civile dans l'affaire concernant l'autre appartement dans le même immeuble - il n'était en l'espèce pas insoutenable de réduire le montant de 186 fr. par m2 qui avait été retenu dans l'affaire précédente: elle s'est en effet fondée sur les propres allégations des bailleresses portant sur le calcul du rendement excessif et le résultat de 146 fr. par m2 par an et a fait appel à son expérience, pour pondérer le montant de 186 fr. par m2 et finalement le porter à 150 fr. par m2 (arrêt entrepris consid. 3.3 p. 13; jugement de première instance consid. II.e.bb p. 13).
Comme le relève la cour cantonale, les bailleresses n'ont pas contesté en appel le calcul effectué par le tribunal des baux sur la base de la pièce 123. Elles s'étaient en effet limitées à invoquer l'application du critère des loyers usuels et le loyer du précédent locataire: selon elles, les loyers usuels sont situés entre 350 fr. et 450 fr. par m2 et il n'existe pas d'appartement de ce standing pour 800 fr. (réduit encore à 743 fr et 697 fr. en raison de la baisse du taux hypothécaire).
Les recourantes avaient certes invoqué en appel qu'il était choquant que dans le même immeuble un montant de 186 fr. par m2 soit admis dans la précédente affaire et un loyer de 150 fr. par m2 dans la présente affaire; elles se limitaient toutefois à cette seule affirmation. Désormais, elles ne démontrent pas en quoi la cour cantonale aurait abusé de son pouvoir d'appréciation en se fondant sur des chiffres qu'elles ont elles-mêmes produits dans leur tableau récapitulatif et dont elles n'ont pas critiqué le calcul et le résultat en appel. Elles ne sauraient non plus taxer d'arbitraire (ou d'abus du pouvoir d'appréciation) la différence au m2 de 20% (150 fr. par m2) par rapport à l'affaire précédente (186 fr. par m2), dès lors que leur critique n'était pas étayée et qu'elles invoquent désormais des faits nouveaux pour la justifier.
Les recourantes méconnaissent enfin que le loyer payé par le précédent locataire n'est à lui seul pas déterminant dans le cadre de la méthode de calcul absolue du loyer et que le critère des loyers usuels du quartier nécessite soit des statistiques officielles, soit la production de cinq logements de comparaison (ATF 141 III 569 consid. 2; arrêt 4A_295/2016 du 29 novembre 2016 consid. 5.3.2).
Leur grief d'arbitraire est ainsi infondé.
5. En ce qui concerne les réductions de loyer fondées sur la baisse du taux hypothécaire de référence et l'indice suisse des prix à la consommation, la cour cantonale a admis un loyer réduit à 743 fr. dès le 1er septembre 2013, puis à 697 fr. dès le 1er septembre 2016. Les recourantes concluent à un loyer réduit à 1'319 fr. dès le 1er septembre 2013, puis à 1'310 fr. dès le 1er septembre 2016.
Dès lors que les recourantes ne formulent aucune critique au sujet de ces réductions, il n'y a pas lieu d'y revenir.
6. Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable, aux frais des recourantes (art. 66 al. 1 LTF). Celles-ci verseront également une indemnité de dépens à l'intimée (art. 68 al. 1 LTF).
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1. Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2. Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 fr., sont mis solidairement à la charge des recourantes.
3. Les recourantes verseront solidairement à l'intimée une indemnité de 5'000 fr. à titre de dépens.
4. Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour d'appel civile.
Lausanne, le 18 avril 2017
Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente : Kiss
Le Greffier : Piaget