BGer 2C_39/2019 |
BGer 2C_39/2019 vom 24.01.2019 |
2C_39/2019 |
Arrêt du 24 janvier 2019 |
IIe Cour de droit public |
Composition
|
MM. et Mme les Juges fédéraux Seiler, Président,
|
Aubry Girardin et Donzallaz.
|
Greffier : M. Dubey.
|
Participants à la procédure
|
X.________,
|
représenté par Me Michel De Palma, avocat,
|
recourant,
|
contre
|
Service de la population et des migrations du canton du Valais,
|
Conseil d'Etat du canton du Valais.
|
Objet
|
Refus de renouveler l'autorisation de séjour UE/AELE et renvoi de Suisse,
|
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour de droit public, du 23 novembre 2018
|
(A1 18 122).
|
Considérant en fait et en droit : |
1. X.________, ressortissant portugais né en 1968, est entré en Suisse le 14 février 2007. Il bénéficiait d'une autorisation de séjour UE/AELE renouvelée la dernière fois jusqu'au 31 décembre 2016 en raison de son emploi de menuisier qualifié auprès d'une entreprise valaisanne du bâtiment. Il est marié à une ressortissante portugaise depuis le le 8 février 1992 et père de quatre enfants nés en 1992, 1993, 1999 et 2010.
|
Par jugement du 30 mai 2016, la Cour pénale du Tribunal cantonal du canton du Valais l'a condamné à une peine privative de liberté de trois ans, assortie d'un sursis partiel de 18 mois et d'un délai d'épreuve de 3 ans, pour actes d'ordre sexuel avec des personnes dépendantes, de contrainte sexuelle et de tentatives d'actes d'ordre sexuel avec des personnes dépendantes perpétrés à trois reprises (début septembre, 14 et 21 septembre 2012) au détriment de l'apprenti alors âgé de 17 ans avec qui il travaillait sur les chantiers. Les juges cantonaux ont retenu à charge de l'intéressé une responsabilité entière, le caractère répétitif, la gravité objective des faits, l'attitude en cours d'instruction et l'absence de manifestation de regret et de prise de conscience de la faute que l'auteur a tenté de rejeter sur la victime, ainsi que les risques de réitération et les graves conséquence sur la victime. Ils ont ajouté que la culpabilité de l'accusé qui avait profité de son ascendant sur la victime pour la contraindre à subir plusieurs actes d'ordre sexuel dont l'un particulièrement grave (la sodomie) était lourde et justifiait une sanction sévère se situant entre 39 et 48 mois de peine privative de liberté. Tenant compte toutefois de la claustrophobie de l'accusé, attestée par certificats médicaux, les juges cantonaux ont fixé la peine à 36 mois. L'intéressé a purgé sa peine du 1er septembre 2016 au 25 octobre 2016 en section fermée, du 25 octobre 2016 au 12 juin 2017 en section ouverte, le solde avec la permission de travail externe jusqu'au 17 février 2018.
|
Par décision du 13 juillet 2017, le Service de la population et des migrations du canton du Valais a refusé de prolonger l'autorisation de séjour UE/AELE de X.________ et ordonné son renvoi de Suisse. Par décision du 16 mai 2018, le Conseil d'Etat du canton du Valais a confirmé la décision rendue le 13 juillet 2017 par le Service de la population et des migrations.
|
2. Par arrêt du 23 novembre 2018, le Tribunal cantonal du canton du Valais a rejeté le recours que l'intéressé avait déposé contre la décision rendue le 16 mai 2018 par le Conseil d'Etat du canton du Valais.
|
3. Agissant par la voie du recours en matière de droit public, l'intéressé demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt rendu le 23 novembre 2018 par le Tribunal cantonal du canton du Valais et de le mettre au bénéfice d'une autorisation d'établissement B UE/AELE pour une durée indéterminée. Il se plaint de la violation des art. 5 al. 1 Annexe I ALCP, 96 de la loi du 16 décembre 2005 sur les étrangers et l'intégration (LEI; RS 142.20, nouveau titre dès le 1er janvier 2019 [RO 2017 6521]) et 8 CEDH. Il demande l'effet suspensif.
|
Il n'a pas été ordonné d'échange des écritures.
|
4. D'après l'art. 83 let. c ch. 2 LTF, le recours en matière de droit public est irrecevable contre les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit. Un tel motif d'irrecevabilité n'est en principe pas opposable aux ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne qui recourent contre une décision leur refusant le droit de séjourner en Suisse, sans toutefois que cela ne préjuge de l'issue du litige au fond, dans la mesure où le droit de séjour et d'accès à une activité économique leur est en principe accordé conformément à l'Accord sur la libre circulation des personnes (ALCP; RS 0.142.112.681; cf. ATF 131 II 339 consid. 1.2 p. 343; arrêt 2C_1061/2013 du 14 juillet 2015 consid. 1.2). En l'occurrence, le recourant, de nationalité portugaise, a bénéficié d'une autorisation de séjour UE/AELE lui permettant d'exercer une activité lucrative. Il a ainsi potentiellement droit au renouvellement de cette autorisation, de sorte que la voie du recours en matière de droit public est ouverte sous l'angle de l'art. 83 let. c ch. 2 LTF.
|
5. Le recourant se prévaut d'une violation des art. 62, 96 LEI et 5 annexe I ALCP, ainsi que 8 CEDH.
|
5.1. Le Tribunal cantonal a correctement présenté le droit applicable (art. 2 al. 2, 62 al. 1 let. b LEtr, 5 al. 1 annexe I ALCP) et la jurisprudence, relative notamment à la révocation d'un titre de séjour en lien avec une peine privative de liberté de longue durée (ATF 139 I 16 consid. 2.1 p. 18 s.) et à la notion de menace d'une certaine gravité à l'ordre public (ATF 139 II 121 consid. 5.3 p. 125 s.), de sorte qu'il y est renvoyé (art. 109 al. 3 LTF). Enfin le recourant peut se prévaloir de son droit à la vie de famille garanti par l'art. 8 CEDH.
|
5.2. En premier lieu, contrairement à ce que semble penser le recourant, la condamnation de celui-ci à 36 mois de peine privative de liberté, malgré le fait que cette sanction ait été prononcée avec un sursis partiel, remplit la condition de la peine de longue durée de l'art. 62 al. 1 let. b LEI (ATF 139 I 16 consid. 2.1 p. 18 s.).
|
5.3. S'agissant des raisons d'ordre public prévues par l'art. 5 al. 1 annexe I ALCP, il ressort de l'arrêt entrepris que le recourant a été condamné pour infractions d'ordre sexuel avec des personnes dépendantes (art. 188 ch. 1 CP), de contrainte sexuelle (art. 189 al.1 CP) et de tentatives d'actes d'ordre sexuel avec des personnes dépendantes (art. 2 al. 1 et 188 CP), à l'encontre d'un adolescent de 17 ans pour lui avoir notamment imposé la sodomie. Il s'agit d'atteintes graves à l'intégrité sexuelle, la contrainte sexuelle constituant un crime, perpétrées alors que le recourant était à l'époque des faits lui-même père d'adolescents effectuant des apprentissages.
|
Pour le surplus, la menace que constitue le recourant pour l'ordre public suisse est bien actuelle et concrète, puisqu'il ressort des faits retenus dans l'arrêt attaqué qu'il persiste à nier aujourd'hui encore l'existence même des actes sordides qu'il a commis, à ne pas manifester le moindre remord et à se faire passer pour victime alors qu'il était l'agresseur, ce qui est de nature à infirmer l'opinion de l'Office des sanctions et des mesures d'accompagnement du canton du Valais formulée dans sa décision du 3 novembre 2017 et le plan d'assistance détaillé du 17 novembre 2017, qui estime faible le risque de récidive sexuelle si l'intéressé n'est pas laissé seul en présence d'apprentis et moyen le risque de récidive générale. A tout le moins, la prise en considération globale du déni du recourant et de l'appréciation du risque de récidive par l'Office des sanctions et des mesures d'accompagnement permet de conclure à l'existence d'une menace actuelle et réelle, d'autant plus importante que le recourant entend poursuivre son travail de menuisier et que sur les chantiers se trouvent des apprentis de tous corps de métiers, comme le souligne à juste titre l'instance précédente.
|
Le recourant ne peut pas se prévaloir de son bon comportement en prison et depuis sa sortie de prison car le contrôle étroit que les autorités pénales exercent sur un détenu au cours de la période d'exécution de sa peine ne permet pas de tirer des conclusions déterminantes de son attitude, du point de vue du droit des étrangers, afin d'évaluer sa dangerosité une fois en liberté. Il en va de même de la période de libération conditionnelle, puisqu'une récidive conduirait probablement à la révocation de ce régime (ATF 139 II 121 consid. 5.5.2 p. 127 s.; arrêt 2C_139/2014 du 4 juillet 2014 consid. 4.4).
|
5.4. Une ingérence dans l'exercice du droit au respect de la vie de famille garanti par l'art. 8 par. 1 CEDH est possible aux conditions de l'art. 8 par. 2 CEDH. L'examen de la proportionnalité sous l'angle de cette disposition se confond avec celui imposé par l'art. 96 LEtr (cf. arrêts 2C_535/2018 du 10 septembre 2018 consid. 5; 2C_970/2017 du 7 mars 2018 consid. 4; 2C_153/2017 du 27 juillet 2017 consid. 3.2.1).
|
Il y a lieu de confirmer la proportionnalité de la mesure (art. 96 al. 1 LEtr) pour les raisons exposées par l'instance précédente, auxquelles il est renvoyé (art. 109 al. 3 LTF). Celle-ci a dûment pris en considération la peine pénale prononcée, l'activité professionnelle du recourant, son manque d'intégration sociale, ses dettes fiscales et d'assurance maladie antérieures à son incarcération, ainsi que sa situation personnelle et familiale. Il est arrivé en Suisse à l'âge de 39 ans. Il est encore jeune et en bonne santé, au bénéfice d'expériences professionnelles variées et d'excellentes connaissances linguistiques qui lui permettraient de se mettre à nouveau à son compte au Portugal, comme cela a déjà été le cas pendant 10 ans à l'époque. Trois de ses quatre enfants sont majeurs et l'on ignore s'ils ont conservé des relations avec leur père. Son épouse a son propre travail et pourrait subvenir aux besoins en Suisse de leur fille encore mineure. Il semble toutefois qu'elle le suivrait au Portugal avec leur fille après avoir réglé la situation en Suisse, selon les déclarations du recourant qui ressortent du plan d'assistance détaillé du 17 novembre 2017.
|
Considérant l'ensemble de ces circonstances, le Tribunal cantonal a jugé à bon droit, d'une part, que le recourant présentait un risque de récidive concret et, par là même, une menace actuelle pour l'ordre public, qui justifie la limitation de son droit à la libre circulation et, d'autre part, que l'intérêt public à maintenir le recourant éloigné de la Suisse l'emportait sur l'intérêt privé de celui-ci, de sorte que l'atteinte à sa vie familiale en découlant restait proportionnée.
|
6. Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours manifestement mal fondé, en application de la procédure simplifiée de l'art. 109 LTF. La requête d'effet suspensif est devenue sans objet. Succombant, le recourant doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF).
|
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : |
1. Le recours est rejeté.
|
2. Les frais judiciaires, arrêtés à 1'500 fr., sont mis à la charge du recourant.
|
3. Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Service de la population et des migrations du canton du Valais, au Conseil d'Etat du canton du Valais, au Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour de droit public, ainsi qu'au Secrétariat d'Etat aux migrations.
|
Lausanne, le 24 janvier 2019
|
Au nom de la IIe Cour de droit public
|
du Tribunal fédéral suisse
|
Le Président : Seiler
|
Le Greffier : Dubey
|