BGer 6B_102/2019 |
BGer 6B_102/2019 vom 04.03.2019 |
6B_102/2019 |
Arrêt du 4 mars 2019 |
Cour de droit pénal |
Composition
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MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président,
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Rüedi et Jametti.
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Greffier : M. Graa.
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Participants à la procédure
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X.________,
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représenté par Me Bernard Nuzzo, avocat,
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recourant,
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contre
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Ministère public de la République et canton de Genève,
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intimé.
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Objet
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Imputation de la détention avant jugement (art. 51 CP),
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recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision, du 14 janvier 2019 (P/10111/2016 AARP/8/2019).
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Faits : |
A. Par jugement du 7 septembre 2018, le Tribunal correctionnel de la République et canton de Genève a condamné X.________, pour actes d'ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance, à une peine privative de liberté de huit mois. Il a en outre ordonné un traitement thérapeutique institutionnel et a suspendu l'exécution de la peine au profit de cette mesure.
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B. Par arrêt du 14 janvier 2019, la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice genevoise a rejeté l'appel formé par X.________ contre ce jugement.
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Il en ressort ce qui suit.
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B.a. Par jugement du 26 novembre 2003, la Cour correctionnelle de la République et canton de Genève a condamné X.________, pour actes d'ordre sexuel avec des enfants et contrainte sexuelle, à une peine privative de liberté de 30 mois. L'exécution de la peine a été suspendue au profit d'une mesure d'internement. Le 30 août 2005, cette mesure a été levée à l'essai, au profit d'un traitement institutionnel, soit d'une hospitalisation à l'Unité de psychiatrie et du développement mental (ci-après : UPDM) de la clinique A.________, en milieu fermé puis, dès le 15 novembre 2011, en milieu ouvert.
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B.b. Le 28 février 2016, X.________ a commis des attouchements sexuels sur une autre patiente présente au sein de l'UPDM, faits en raison desquels il a ensuite été condamné par jugement du 7 septembre 2018 confirmé par l'arrêt du 14 janvier 2019.
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B.c. Par décision du 3 mars 2016, le Tribunal d'application des peines et des mesures (ci-après : TAPEM) a ordonné la poursuite du traitement thérapeutique institutionnel - au sens de l'art. 59 CP - en milieu ouvert.
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Le 28 juin 2017, le Service de l'application des peines et mesures (ci-après : SAPEM) a décidé de placer X.________ en milieu fermé. Il a révoqué le régime de travail externe et de congés associés.
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Le 30 juin 2017, le prénommé a été transféré à la prison de B.________ puis, durant l'été 2017, aux Etablissements C.________.
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Par jugement du 31 août 2017, le TAPEM a ordonné la poursuite du traitement thérapeutique institutionnel de X.________ en milieu fermé.
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C. X.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 14 janvier 2019, en concluant, avec suite de frais et dépens, principalement à sa réforme en ce sens que la détention subie depuis le 30 juin 2017 est déduite de la peine privative de liberté de huit mois qui lui a été infligée et qu'une indemnité de 2'500 fr. lui est allouée pour ses dépens. Subsidiairement, il conclut à son annulation et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision. Il sollicite par ailleurs le bénéfice de l'assistance judiciaire.
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Considérant en droit : |
1. Le recourant reproche tout d'abord à la cour cantonale de ne pas avoir rejeté expressément certains arguments soulevés devant elle. Il ne présente cependant aucun grief spécifique - répondant aux exigences de motivation découlant des art. 42 al. 2 et 106 al. 2 LTF - concernant une violation de son droit d'être entendu à cet égard. Au demeurant, les arguments en question sont évoqués dans l'arrêt attaqué (cf. p. 5). On comprend que la cour cantonale les a implicitement rejetés, en considérant en substance qu'une application de l'art. 51 CP ne pouvait en aucun cas entrer en ligne de compte. Une telle manière de faire est conforme aux exigences de la jurisprudence en matière de droit d'être entendu (cf. ATF 143 III 65 consid. 5.3 p. 71), puisque le recourant a en définitive compris les motifs ayant guidé l'autorité précédente et a pu attaquer sa décision en connaissance de cause.
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2. Le recourant soutient que la privation de liberté subie depuis le 30 juin 2017 - date de son transfert de la clinique A.________ à la prison de B.________ - devrait être considérée comme une "détention avant jugement" au sens de l'art. 51 CP et, partant, imputée sur la peine privative de liberté de huit mois à laquelle il a été condamné par l'autorité précédente.
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2.1. Aux termes de l'art. 51 CP, le juge impute sur la peine la détention avant jugement subie par l'auteur dans le cadre de l'affaire qui vient d'être jugée ou d'une autre procédure. Il découle de cette disposition que la détention avant jugement - soit la détention ordonnée au cours d'un procès pénal pour les besoins de l'instruction, pour des motifs de sûreté ou en vue de l'extradition (cf. art. 110 al. 7 CP) - doit être imputée sur la peine même si cette détention résulte d'une procédure antérieure (ATF 141 IV 236 consid. 3.3 p. 239; 133 IV 150 consid. 5.1 p. 155; arrêt 6B_389/2018 du 6 septembre 2018 consid. 1.1). Est déterminant, à cet égard, le fait que le prévenu eût été privé de liberté (cf. Message du 21 septembre 1998 concernant la modification du code pénal suisse [dispositions générales, entrée en vigueur et application du code pénal] et du code pénal militaire ainsi qu'une loi fédérale régissant la condition pénale des mineurs, FF 1999 1869).
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2.2. En l'occurrence, le recourant ne prétend pas qu'une détention avant jugement, au sens de l'art. 110 al. 7 CP, ou des mesures de substitution (cf. à cet égard ATF 140 IV 74 consid. 2.4 p. 79) auraient été prononcées durant la procédure ayant conduit à sa condamnation par la cour cantonale. Selon lui, les événements du 28 février 2016 constitueraient la cause de son placement en milieu fermé, ordonné par le SAPEM le 28 juin 2017 puis par le TAPEM le 31 août 2017, de sorte que son placement à la prison de B.________ devrait être considéré comme une détention avant jugement au sens de l'art. 51 CP.
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Il ressort de l'arrêt attaqué que, préalablement à la décision du SAPEM du 28 juin 2017 et au transfert à la prison de B.________ le 30 juin suivant, le recourant exécutait une mesure thérapeutique institutionnelle en milieu ouvert. Depuis le 28 février 2016, date des événements ayant conduit à la condamnation du 14 janvier 2019, l'intéressé était maintenu dans sa chambre pour des raisons de sécurité, sauf pour des activités thérapeutiques surveillées sur le domaine de la clinique. A partir du 30 juin 2017, le recourant ne s'est donc pas trouvé détenu à la prison de B.________ "avant jugement" au sens des art. 51 et 110 al. 7 CP, mais a subi un changement de régime d'exécution de la mesure thérapeutique institutionnelle prévu par l'art. 59 al. 3 CP.
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Les événements du 28 février 2016 - à supposer qu'ils fussent de manière prépondérante à l'origine des décisions du SAPEM du 28 juin 2017 puis du TAPEM du 31 août 2017, ce qui ne ressort pas de l'arrêt attaqué (cf. art. 105 al. 1 LTF) - n'ont ainsi de toute manière pas eu pour effet de priver le recourant de liberté mais éventuellement - de façon indirecte - de modifier le cadre et le régime d'exécution de son traitement thérapeutique institutionnel. L'art. 51 CP doit éviter à l'auteur de subir, en définitive, une privation de liberté plus longue que celle à laquelle il a été condamné en raison d'une peine. Le recourant se trouve quant à lui privé de liberté depuis de nombreuses années et l'on ne voit pas dans quelle mesure les événements du 28 février 2016, non plus que les décisions des 28 juin et 31 août 2017, pourraient avoir pour effet de prolonger sa privation de liberté au-delà de la peine privative de liberté de huit mois qui lui a été infligée par la cour cantonale. La situation du recourant ne diverge pas, à cet égard, de celle d'un détenu purgeant une peine privative de liberté et qui serait alors condamné à une nouvelle sanction. Celui-ci ne pourrait pas - à supposer que son cadre de détention puisse changer en raison de la dangerosité révélée par ses agissements - davantage prétendre à imputer une quelconque détention avant jugement sur la nouvelle peine, quand bien même la privation de liberté en cours d'instruction aurait dispensé les autorités pénales de requérir sa détention provisoire ou des mesures de substitution. Ainsi, contrairement à ce qu'affirme le recourant, ce dernier ne se trouve pas dans une situation plus défavorable que celle qui aurait été la sienne si sa détention provisoire - au sens de l'art. 221 al. 1 CPP - avait été ordonnée, ce qui exclut la prétendue violation de l'art. 9 Cst. dont il se plaint.
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Pour le reste, on ne voit pas en quoi la décision de la cour cantonale consacrerait une violation de l'art. 57 al. 3 CP, l'autorité précédente ayant uniquement relevé que cette disposition pourrait, à l'avenir, être appliquée au recourant en cas de levée de la mesure thérapeutique institutionnelle qu'il exécute.
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3. Le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Comme il était dépourvu de chances de succès, la demande d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF), dont le montant sera fixé en tenant compte de sa situation financière, laquelle n'apparaît pas favorable.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : |
1. Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
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2. La demande d'assistance judiciaire est rejetée.
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3. Les frais judiciaires, arrêtés à 1'200 fr., sont mis à la charge du recourant.
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4. Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision.
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Lausanne, le 4 mars 2019
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Au nom de la Cour de droit pénal
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président : Denys
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Le Greffier : Graa
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