23. Arrêt de la Cour de cassation du 10 mars 1972 dans la cause Brique contre Commission genevoise de libération conditionnelle.
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Regeste
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Bedingte Entlassung, Art. 38 StGB, 26 ff. VwG.
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2. Hat der Verurteilte die Akteneinsicht erst nach Erlass des Entscheids über die bedingte Entlassung verlangt, so wird bei Verletzung des rechtlichen Gehörs nicht dieser Entscheid aufgehoben, sondern einzig derjenige über die Verweigerung der Akteneinsicht (Erw. 2).
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3. Da das Bundesgericht nicht sein eigenes Ermessen an die Stelle desjenigen der untern Behörde setzt, ist es nicht Rekursinstanz mit voller Kognition; Gehörsverweigerung kann daher nicht von ihm wiedergutgemacht werden (Erw. 3).
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Sachverhalt
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A.- Brique a été condamné aux peines suivantes:
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- le 10 janvier 1953, par la Cour correctionnelle de Genève, à un an d'emprisonnement et 1000 fr. d'amende pour homicide par négligence et infraction à la circulation routière;
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- le 7 mai 1955, par la même autorité, à 15 mois d'emprisonnement pour abus de confiance (peine additionnelle à la précédente);
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- le 29 février 1968, par la Cour d'appel de Chambéry, à un mois de prison pour infractions douanières;
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- le 7 novembre 1968, par l'officier de police de Genève, à une amende de 225 fr. pour parcages interdits;
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- le 16 mai 1969, par le même fonctionnaire, à une amende de 100 fr. pour arrêt interdit;
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- le 26 avril 1971, par la Cour de justice de Genève, à 4 ans de réclusion (sous déduction de 2 ans, 1 mois et 10 jours de détention préventive) pour infraction à la loi sur les stupéfiants. Brique subit cette dernière peine aux Etablissements de la plaine de l'Orbe. Le 16 octobre 1971, il sollicita sa libération conditionnelle.
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B.- La Commission de libération conditionnelle du canton de Genève (ci-après: la commission) rejeta la requête, le 9 novembre. Elle expose que les renseignements recueillis ne permettent pas de penser qu'il a réalisé la gravité de ses actes et qu'elle ne peut avoir la conviction, au vu de l'ensemble du dossier, qu'il se conduira honnêtement en cas de libération conditionnelle; que, par ailleurs, ses projets sont très vagues et ne donnent pas de garanties suffisantes pour l'avenir.
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C.- Contre cette décision, Brique a formé un recours de droit administratif. Il conclut à sa libération conditionnelle, avec effet immédiat.
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D.- La commission et le Département fédéral de justice et police proposent de rejeter le recours.
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Considérant en droit:
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Aussi, invoquant l'art. 4 Cst., se plaint-il de la violation du droit d'être entendu.
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Depuis que le Tribunal fédéral a rendu, au sujet de ce droit, son arrêt fondamental dans la cause Chastel (RO 74 I 247 ss.), la jurisprudence a évolué, pour trouver finalement une consécration légale dans les art. 26 ss. LPA. Sans doute ces dispositions régissent-elles uniquement la procédure dans les affaires administratives qui doivent être réglées par des décisions d'autorités administratives fédérales (art. 1er LPA). Il n'en demeure pas moins que les principes essentiels qu'elles expriment ont une portée générale - la Cour de droit public les avait déjà déduits de l'art. 4 Cst. - et doivent, partant, être observés dans les autres affaires administratives. Il n'est pas nécessaire d'examiner ici s'ils pourraient être tenus en échec par une loi cantonale de procédure qui assurerait aux administrés une protection moins étendue, car cette hypothèse n'est pas réalisée: ni le recourant ni la commission ne se réfèrent à des règles cantonales.
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La commission tient le dossier de la libération conditionnelle pour absolument confidentiel; les rapports qui y figurent contiennent des appréciations sur la personnalité du détenu qui, connues de lui, risqueraient de perturber l'ordre et la sécurité dans l'établissement; de plus, les services consultés à l'occasion d'une demande de libération conditionnelle doivent pouvoir émettre des avis fondés sur leur intime conviction, sans avoir à redouter des réactions violentes de la part du condamné. Certes, les risques allégués ne sont pas imaginaires. Les intérêts menacés ne sont toutefois pas assez importants pour légitimer le refus de consulter l'ensemble du dossier (cf. art. 27 LPA). Lorsque les conditions de l'art. 38 ch. 1 al. 1 CP ne sont pas remplies, l'autorité compétente n'hésite pas à rendre une décision négative, malgré le mécontentement qu'éprouvera probablement l'intéressé et les difficultés qui en résulteront peutêtre pour la direction du pénitencier. Il n'y a pas lieu de craindre que la connaissance des préavis qui se trouvent au dossier n'aggrave sensiblement la situation. Quant aux réactions violentes, le juge qui inflige une peine, qui ordonne une mesure portant atteinte à des droits éminemment personnels (mise sous tutelle, internement, déchéance de la puissance paternelle) ou qui, dans les motifs de sa décision, émet une appréciation sévère sur la personne d'une des parties (dans un jugement de divorce, par exemple) n'en est pas à l'abri non plus. Rien ne permet de supposer qu'elles retiendront les services appelés à donner leur avis au sujet d'un détenu réclamant sa libération conditionnelle de s'exprimer selon leur intime conviction.
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Il s'ensuit que la consultation du dossier ne doit pas être refusée, du moins en principe, au condamné qui en fait la demande, pour autant que les conditions de l'art. 27 LPA ne soient pas réunies à l'égard de l'une ou l'autre pièce. La commission cependant n'invoque en l'espèce aucune circonstance spéciale qui justifierait une dérogation.
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2. Selon l'art. 28 LPA, une pièce dont la consultation a été refusée à la partie ne sera utilisée à son détriment que si l'autorité lui en a communiqué le contenu, du moins pour l'essentiel, en lui donnant l'occasion de s'expliquer et de fournir des preuves à ce sujet. Cette règle est conforme à la doctrine (ZWAHLEN, ZSR 1947 p. 156 a; IMBODEN, Schweizerische Verwaltungsrechtsprechung, 3e éd., T 2, p. 623; FAVRE, Droit constitutionnel suisse, p. 253; GRISEL, Droit administratif suisse, p. 182). En tant qu'elle relève que les renseignements recueillis ne permettent pas de penser que Brique a réalisé la gravité de ses actes - et c'est là le motif principal du refus - la commission se fonde sur un document dont le contenu essentiel n'a pas été communiqué au recourant: la question se pose dès lors de savoir si elle a violé le droit qu'il avait d'être entendu en le privant de la faculté de s'exprimer sur les griefs formulés contre lui.
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D'après l'art. 38 ch. 1 al. 3 CP, l'autorité compétente entendra le détenu lorsqu'il n'aura pas présenté de requête ou lorsqu'il n'est pas sans plus possible d'accorder la libération conditionnelle sur le vu de la requête. Cette disposition ne prescrit pas la communication d'office du dossier. Une telle communication ne résulte pas davantage des règles de la procédure administrative (cf. RO 96 I 610).
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En conséquence, il appartenait au recourant de demander communication du dossier avant que ne soit prise la décision attaquée, faute de quoi il ne peut arguer du refus qui lui a été opposé postérieurement à celle-ci pour la remettre en cause (RO 96 I 610 précité). En revanche le grief du recourant doit être compris en ce sens que, n'ayant pas disposé du dossier quand il l'a demandé, il n'a pu motiver son recours en pleine connaissance de cause. C'est alors la décision du 22 novembre 1971, par laquelle la communication du dossier lui a été refusée, qui viole son droit d'être entendu.
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3. Ce droit étant de nature essentiellement formelle, sa violation entraîne en principe l'annulation de la décision attaquée, sans que le recourant ait à justifier d'un intérêt (RO 92 I 188, 264 no 45; 96 I 22, 188). La jurisprudence admet cependant que la violation peut être réparée lorsque le recourant a eu la possibilité de s'exprimer devant une autorité de recours jouissant d'une pleine cognition (RO 96 I 188). On pourrait penser que tel est le cas du Tribunal fédéral, en tant que juridiction administrative (art. 105 al. 1 OJ), lorsque le recours, comme en l'espèce, n'est pas dirigé contre la décision d'un tribunal cantonal ou d'une commission de recours (art. 105 al. 2). Il n'en est toutefois rien, tout au moins lorsque le Tribunal fédéral, bien qu'ayant latitude de revoir non seulement l'application du droit mais encore les constatations de fait, s'interdit de substituer son appréciation à celle de l'autorité inférieure mais se borne à vérifier que celle-ci n'a pas abusé de son pouvoir appréciateur (RO 81 I 384 consid. 5; 86 I 248 consid. 4; 87 I 348 consid. 6; 89 I 340 consid. 11; 91 I 147 consid. 1b; 92 I 493 consid. 1b; 93 I 564 consid. 2; 941 560 consid. 1; Arrêt non publié Wirz du 30 décembre 1971).
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Dans cette éventualité en effet, la violation du droit d'être entendu peut avoir une incidence précisément sur une question d'appréciation que le Tribunal fédéral ne revoit pas librement.
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In casu, il conviendra que la commission, si elle persiste à refuser la communication complète du dossier, résume pour l'essentiel le contenu des pièces qu'elle entend en retirer et cite notamment à cette occasion une phrase du rapport (pièce 3, p. 3 du dossier cantonal) selon laquelle le recourant "n'exprime aucun regret, disant que ce n'est pas lui qui oblige les gens à se droguer". Cet extrait formule en effet la principale critique émise à l'endroit du recourant.
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Une fois en possession de ces pièces, le recourant disposera du délai de l'art. 106 OJ pour déposer un mémoire complémentaire, après quoi le Tribunal fédéral statuera sur le fond du recours.
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Par ces motifs, la Cour de cassation pénale:
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Admet partiellement le recours, en ce sens que la décision du 22 novembre 1971 est annulée.
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Renvoie la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision.
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