BGE 109 Ib 285 |
47. Arrêt de la IIe Cour de droit public du 24 juin 1983 dans la cause Département fédéral de l'intérieur contre Conseil d'Etat du canton de Vaud (recours de droit administratif) |
Regeste |
Verordnung über die Nationalstrassen (NSV): Verbot des Alkoholverkaufs in Autobahnrestaurants. Gesetz- und Verfassungsmässigkeit von Art. 4 Abs. 4, 2. Satz NSV. |
Das Verbot, in Autobahnrestaurants Alkohol zu verkaufen, geht nicht über den in Art. 7 Abs. 2 NSG vorgesehenen Delegationsrahmen hinaus, obwohl es in der Bestimmung nicht ausdrücklich erwähnt wird (E. 3 und 4). Das Verbot verstösst auch nicht gegen das Verhältnismässigkeitsprinzip (E. 5). |
Sachverhalt |
Sur le territoire de la commune vaudoise d'Yvorne, un centre de ravitaillement - comprenant une station d'essence, un restaurant et des places de stationnement - a été aménagé, dans chaque sens de circulation, le long de la route nationale 9 (autoroute Vallorbe - Lausanne - Villeneuve - Sion - Brigue). Par décision motivée du 5 juin 1981, le chef du Département de la justice, de la police et des affaires militaires du canton de Vaud a autorisé la création d'un restaurant sans alcool, en précisant notamment que la personne désignée pour exploiter l'établissement public devra solliciter une patente de restaurant sans alcool dans les formes requises par l'art. 7 du règlement d'exécution de la loi vaudoise du 3 juin 1947 sur la police des établissements publics et la vente des boissons alcooliques (en abrégé: LPEP).
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En réalité, par requête déposée le 17 décembre 1981, Philippe Matti a demandé la délivrance d'une patente de café-restaurant (et non pas de restaurant sans alcool) pour le "Relais du Chablais" - un restaurant de 134 places avec une terrasse de 66 places -, qu'il entendait exploiter pour le compte de la société Mövenpick Restauroutes Yvorne S.A. (sur l'aire de ravitaillement à l'ouest de l'autoroute). Le chef du Département de la justice, de la police et des affaires militaires a estimé que la disposition de l'art. 4 al. 4 ORN "me paraît dépourvue de bases légales dans la mesure où elle ne repose sur aucune délégation de compétence expresse des Chambres fédérales permettant au Conseil fédéral de prohiber la vente d'alcool dans les restoroutes". Il a donc accordé, par décision du 25 mars 1982, une patente de café-restaurant avec les réserves suivantes:
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"L'établissement devra offrir en tout temps un choix de boissons sans alcool à un prix qui ne dépasse pas, à quantité égale, celui de la boisson alcoolique la moins chère.
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Cette patente autorise uniquement son titulaire à servir de la bière et des vins suisses, en accompagnement d'un plat principal.
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Cette patente est accordée sous réserve de l'observation stricte des conditions fixées dans notre lettre du 13 avril 1982."
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Dans sa séance du 1er septembre 1982, le Conseil d'Etat du canton de Vaud a rejeté le recours formé contre cette décision par le Département fédéral de l'intérieur.
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Agissant par la voie du recours de droit administratif, le Département fédéral de l'intérieur demande au Tribunal fédéral
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"que la décision attaquée soit annulée et que le Conseil d'Etat du canton de Vaud reçoive pour instruction de respecter l'interdiction de débiter de l'alcool dans les restaurants autoroutiers".
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Se basant sur un avis de l'Office fédéral de la justice, le département recourant fait valoir non seulement que l'art. 4 al. 4 ORN a une base légale suffisante, mais encore que cette interdiction de débiter de l'alcool dans les restaurants autoroutiers ne viole aucun principe constitutionnel. Il reproche donc au Gouvernement vaudois d'avoir fait application du droit cantonal, en violation d'une norme - valable - de droit public fédéral.
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Le Tribunal fédéral a admis le recours et annulé la décision attaquée.
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Considérant en droit: |
a) Selon l'art. 97 al. 1 OJ, le recours de droit administratif est ouvert contre les décisions au sens de l'art. 5 PA, c'est-à-dire contre les mesures prises par une des autorités mentionnées à l'art 98 OJ et fondées sur le droit public fédéral.
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Pour accorder à Philippe Matti une patente de café-restaurant, les autorités vaudoises se sont basées sur les dispositions de la loi vaudoise du 3 juin 1947 sur la police des établissements et la vente des boissons alcooliques, en particulier sur la clause de besoin énoncée à l'art. 40 LPEP. La décision entreprise apparaît ainsi fondée exclusivement sur le droit cantonal. Il est vrai que, statuant sur le recours du Département fédéral de l'intérieur, le Gouvernement vaudois n'a pas eu à se prononcer sur l'application des dispositions de la LPEP. Il a dû trancher la question - seule litigieuse entre le Département fédéral de l'intérieur et le Département vaudois de la justice, de la police et des affaires militaires - de savoir si cette patente doit être refusée en raison de l'interdiction édictée par le Conseil fédéral à l'art. 4 al. 4 ORN, ce qui l'a conduit à examiner le problème de la légalité et de la constitutionnalité d'une norme de droit public fédéral. Le recours porte, sans conteste, uniquement sur la question de l'applicabilité d'une norme de droit public fédéral, puisque le département recourant soutient que les autorités vaudoises n'ont pas appliqué, à tort, la disposition de l'art. 4 al. 4 ORN. Il n'est dès lors pas douteux, au regard de la jurisprudence, que la décision du Conseil d'Etat vaudois - qui ne porte d'ailleurs elle-même que sur cette question de droit - peut être attaquée par la voie du recours de droit administratif (ATF 108 Ib 74 consid. 1a, 107 Ib 172/3, 105 Ib 107 consid. 1a et 108 consid. 1c, 100 Ib 448 consid. 2b).
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Par ailleurs, cette décision émane d'une autorité cantonale de recours qui a statué en dernière instance cantonale, aucun recours n'étant prévu contre les décisions du Conseil d'Etat en matière de police des établissements publics (art. 97 LPEP).
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b)...
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c)...
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En principe, le Tribunal fédéral examine librement la légalité et la constitutionnalité des ordonnances du Conseil fédéral. Toutefois, lorsque le législateur laisse au Conseil fédéral un très large pouvoir d'appréciation, le Tribunal fédéral est lié par cette délégation légale; il ne peut donc pas substituer sa propre appréciation à celle du Gouvernement, spécialement en ce qui concerne l'opportunité. Son examen porte alors sur la question de savoir si le Conseil fédéral a manifestement excédé le pouvoir d'appréciation qui lui a été délégué ou si, pour une autre raison, l'ordonnance est contraire à la loi ou à la constitution. En outre, il vérifie que l'ordonnance réalise le but poursuivi par le législateur et que le principe de la proportionnalité a bien été respecté; tel est le cas lorsque l'ordonnance met en oeuvre des moyens raisonnablement proportionnés au but recherché par le législateur. En revanche, le contrôle du Tribunal fédéral est plus strict lorsque l'autorité ne dispose d'aucun pouvoir d'appréciation ou que d'un pouvoir limité (ATF 107 Ib 247 consid. 4 et les arrêts cités).
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b) Dans le cas particulier, le litige porte tout d'abord sur la question de savoir si l'interdiction, prévue à l'art. 4 al. 4, 2e phrase ORN, de vendre ou de consommer de l'alcool dans les restoroutes repose sur une base légale suffisante. De l'avis concordant des parties, la seule norme de délégation qui puisse entrer en ligne de compte est celle de l'art. 7 al. 2 LRN, qui habilite le Conseil fédéral à édicter "les règles fondamentales régissant les installations annexes". Le Conseil d'Etat vaudois croit, tout au moins dans la décision attaquée, devoir vérifier la validité de cette clause de délégation au regard des principes dégagés par le Tribunal fédéral en sa qualité de juge chargé, dans le cadre de recours de droit public, de contrôler la constitutionnalité de délégations prévues par des dispositions de droit cantonal. Il faut donc rappeler, préliminairement, que l'art. 114bis al. 3 Cst. interdit au Tribunal fédéral de vérifier la validité des normes de délégation contenues dans les lois fédérales (ATF 104 Ib 367 /368, ATF 101 Ib 73 /74 consid. 3). Il s'agit en revanche d'examiner si l'art. 7 al. 2 LRN peut être interprété, dans le sens invoqué par le Département fédéral de l'intérieur, comme une norme de délégation donnant au Conseil fédéral la compétence d'édicter l'interdiction de servir des boissons alcooliques dans les restaurants aménagés le long des autoroutes.
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3. Les parties divergent d'opinion sur cette première question déjà de savoir si le Conseil fédéral peut, sans outrepasser le cadre de la délégation prévue à l'art. 7 al. 2 LRN, réglementer également l'exploitation des installations annexes, ou s'il ne dispose au contraire que de compétences purement techniques, portant uniquement sur la construction et l'entretien desdites installations. Aux yeux du Conseil d'Etat vaudois - et de l'intimé Philippe Matti -, cette dernière interprétation est la seule qui soit conforme à l'art. 36bis al. 2 Cst., qui dispose, dans sa première phrase, que "les cantons construiront et entretiendront les routes nationales conformément aux dispositions arrêtées par la Confédération et sous sa haute surveillance".
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a) L'art. 36bis al. 1 Cst. charge la Confédération d'assurer par voie législative l'établissement et l'utilisation d'un réseau de routes nationales. La Confédération est ainsi investie d'une compétence législative exclusive, qui l'habilite à régler complètement l'ensemble de ce domaine (cf. Rapport du Conseil fédéral, du 22 octobre 1957, concernant l'initiative populaire pour l'amélioration du réseau routier, FF 1957 II p. 858; Message du Conseil fédéral, du 3 juillet 1959, à l'appui d'un projet de loi sur les routes nationales, FF 1959 II p. 96 ss). Quant aux cantons, leur rôle en matière de construction et d'entretien (art. 36bis al. 2 Cst.) se limite pour l'essentiel à des tâches d'exécution (cf. art. 61 LRN) qu'ils n'exercent que sous la haute surveillance de la Confédération et sous réserve, au surplus, du pouvoir de substitution prévu à l'art. 55 LRN. Le constituant de 1958 a donc consacré une importante attribution de compétence en faveur de la Confédération. Ce faisant, il a délibérément choisi une solution explicitement reconnue comme fort peu fédéraliste mais considérée, selon les termes du rapporteur de langue allemande de la commission du Conseil national, comme "die zweckmässigste (...), staatsrechtlich richtige und praktisch einzig gangbare Lösung" (BO, CN, 1958, p. 205; cf. aussi, dans ce sens, BRUNO KLÄUSLI, Bundesstaats- und verwaltungsrechtliche Aspekte der Nationalstrassengesetzgebung, thèse Zurich 1970, p. 80 s., 89 s. et 95 ss; ALFRED RECHSTEINER, Die Kompetenzverteilung im Nationalstrassenbau, thèse Zurich 1970, p. 26, 54 ss et 75 ss). Cette répartition des compétences vaut aussi en ce qui concerne les installations annexes, qui sont parties intégrantes des routes nationales (art. 6 et 7 al. 1 LRN, art. 3 lettre d ORN; cf. Message du 3 juillet 1959 précité, FF 1959 II p. 101/102), et cela indépendamment du régime de propriété institué par le droit cantonal (cf. art. 8 al. 2 LRN).
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b) Contrairement à l'opinion soutenue par les autorités vaudoises et l'intimé Philippe Matti, rien n'indique que cette compétence législative générale et exclusive de la Confédération ne puisse porter que sur la construction et l'entretien des installations annexes, à l'exclusion de leur exploitation. Cela ne résulte pas de l'art. 36bis Cst., dont l'al. 1 parle - de façon parfaitement claire dans sa teneur française - de "l'utilisation" des routes nationales (en allemand: "Benützung" et en italien: "l'uso"; cf. aussi Rapport du Conseil fédéral précité, in FF 1957 II p. 858). A la différence de la question du financement, ce point n'a pas été contesté au cours des débats parlementaires, bien qu'il fût mis en évidence par les rapporteurs des commissions (BO 1958, CN pp. 203 et 205, CE pp. 8, 10 et 13).
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La volonté du législateur fédéral de soumettre les installations annexes à une réglementation minimum et uniforme qui prenne en compte, outre les impératifs de la sécurité (art. 5 al. 1 LRN), les besoins des usagers, ressort tant du texte de la loi que des travaux préparatoires.
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Tout d'abord, l'alinéa 1er de l'art. 7 LRN donne des installations annexes une définition très large: il s'agit d'installations pouvant "être aménagées (...) selon le besoin", notamment pour "permettre aux usagers de la route de se ravitailler, de se restaurer et de se loger". "Les règles fondamentales", que le Conseil fédéral est chargé d'édicter en vertu de l'alinéa 2, portent donc également sur la détermination des besoins auxquels doivent répondre les installations annexes. S'il est vrai que la portée exacte de cette habilitation pouvait éventuellement prêter à discussion lorsque l'art. 7 LRN était encore rédigé dans sa teneur initiale - plus restrictive -, tel n'est plus le cas depuis que le législateur a, en adoptant la loi du 17 décembre 1971 modifiant les art. 7 et 50 LRN, dissipé toute équivoque à cet égard. En effet, il a alors clairement exprimé sa volonté "d'élargir la conception actuelle des installations annexes" en formulant "les normes juridiques d'une manière plus large et plus souple (...) afin que l'on puisse installer tous les types imaginables de kiosques, de restaurants et d'hôtels, pourvu qu'ils répondent aux besoins du trafic routier" (Message du 28 avril 1971 précité, FF 1971 I pp. 1132/1133). Cette extension a été dûment soulignée par le rapporteur de la commission du Conseil des Etats: "Eine Planung für das gesamte Netz und eine gewisse Einheitlichkeit im Betrieb sind unerlässlich. Der Bund stellt also in Zukunft nicht nur Grundsätze über die Errichtung von Nebenanlagen auf, sondern erlässt die allgemeinen Grundsätze für die Nebenanlagen. Ich verweise hier auf Absatz 2 des Artikel 7." (BO, CE 1971, p. 860.) Par ailleurs, rappelant la nécessité, déjà exprimée en 1959 (FF 1959 II p. 103), d'avoir une réglementation uniforme assurant une conception unique des installations annexes et leur aménagement selon un plan d'ensemble, le législateur a voulu renforcer les attributions de la Confédération en matière de coordination et de surveillance (FF 1971 I pp. 1130 et 1133). Ce renforcement de la compétence réglementaire du Conseil fédéral n'a suscité aucune opposition au sein des Chambres fédérales (cf. BO 1971, CN p. 1369 ss, CE p. 860 s.).
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c) C'est donc en vain que les autorités vaudoises et l'intimé Philippe Matti prétendent inférer des art. 7 al. 3 et 50 LRN que les cantons sont seuls compétents pour réglementer l'exploitation des installations annexes. L'art. 7 al. 3 reconnaît certes aux cantons le droit de délivrer les autorisations de construire, d'agrandir et d'exploiter ces installations, mais cela sous réserve de la législation fédérale et de l'approbation des projets par les autorités fédérales. Interprétée à la lumière de l'art. 36 bis Cst. - et du régime de compétences qu'il consacre -, ainsi que de la volonté du législateur - clairement exprimée dans les travaux préparatoires -, cette réserve de la législation fédérale signifie que les cantons ne peuvent exercer leur tâche - d'exécution - qu'en respectant l'ensemble des règles de droit fédéral et donc, notamment, celles que le Conseil fédéral édicte par voie d'ordonnance en vertu de la délégation de l'art. 7 al. 2 LRN. Il n'y a aucune raison qu'il en aille différemment en ce qui concerne l'exploitation, qui est aussi expressément mentionnée à l'art. 7 al. 3 LRN.
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Les mêmes considérations conduisent à affirmer que les compétences - rappelées à l'art. 50 LRN - des cantons en matière d'exploitation des installations annexes ne les dispensent pas de l'obligation de se conformer à la législation fédérale. On ne saurait donc déduire de l'art. 50 LRN que l'art. 7 al. 2 n'habilite pas le Conseil fédéral à édicter des règles fondamentales pour l'exploitation des installations annexes. Au reste, la deuxième phrase de l'art. 50 dispose que "si les nécessités du trafic ou des intérêts d'ordre général l'exigent, le Département fédéral de l'intérieur peut édicter d'autres prescriptions". Dans l'ancienne teneur de cet article (RO 1960, p. 580), cette délégation expresse était attribuée au Conseil fédéral (FF 1959 II p. 122; cf. KLÄUSLI, op.cit., p. 187; RECHSTEINER, op.cit., p. 48). Le fait que, en 1971, elle ait été transférée au Département de l'intérieur ne saurait signifier que le Conseil fédéral - autorité hiérarchiquement supérieure - soit pour autant dépouillé de toute compétence de réglementer l'exploitation des installations annexes.
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d) Le législateur eût certes pu circonscrire plus précisément la portée de l'habilitation du Conseil fédéral en cette matière. Mais il a délibérément choisi, tant en 1959 qu'en 1971, que certaines règles soient fixées par voie d'ordonnance, en raison du caractère évolutif des exigences techniques et des besoins en matière de trafic routier (FF 1959 II p. 122 et 1971 I pp. 1130 et 1133). On rappellera à ce propos que le recours à de semblables délégations en faveur de l'exécutif est parfaitement admissible et d'ailleurs fréquent, notamment lorsqu'il s'agit d'assurer la faculté d'adaptation de normes à l'état de la technique, des connaissances scientifiques ou à l'évolution de l'économie (ATF 103 Ib 140 consid. c, 102 Ia 68, ATF 100 Ib 434 /435 consid. 5; cf. GYGI, Interventionsrecht und Interventionsverwaltung, in: Abhandlungen zum schweiz. Recht, 334/1958, p. 47 ss; P.-L. MANFRINI, Nature et effets des ordonnances administratives, Genève 1978, p. 162 s.).
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Il faut donc constater que, par la délégation de l'art. 7 al. 2 LRN, le législateur a conféré un très large pouvoir d'appréciation au Conseil fédéral. Selon les principes jurisprudentiels rappelés plus haut (consid. 2a), le Tribunal fédéral est lié par une telle délégation, en sorte qu'il ne peut substituer sa propre appréciation à celle du Gouvernement (ATF 107 Ib 246 /247 consid. 4 et les arrêts cités). En l'espèce, rien n'interdit d'interpréter la norme de l'art. 7 al. 2 LRN en ce sens qu'elle habilite le Conseil fédéral à réglementer aussi l'exploitation des installations annexes et, partant, à édicter une interdiction relative à l'exploitation des restoroutes.
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a) A l'origine, le législateur fédéral avait prévu, le long des autoroutes, l'aménagement de simples buvettes et de kiosques attachés aux stations d'essence (art. 7 al. 1 LRN en sa teneur du 8 mars 1960; RO 1960 p. 570) et le Conseil fédéral avait précisé qu'il s'agissait de buvettes sans alcool (art. 4 al. 3 ORN en sa teneur du 24 mars 1964; RO 1964 p. 301). Lors de la revision de la loi en 1971, on a autorisé l'aménagement, le long des autoroutes, de restaurants et de motels: on s'est alors demandé si, malgré l'opposition de certains milieux, il fallait maintenir l'interdiction de débits d'alcool et, le cas échéant, si cette interdiction devait être introduite dans le texte légal.
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Dans son message du 28 avril 1971, le Conseil fédéral a développé clairement les raisons pour lesquelles il n'y avait pas lieu de lever l'interdiction, concluant son exposé en ces termes: "On sait que les autorités fédérales combattent l'ivresse "au volant" par tous les moyens; la législation sur la circulation routière et les innombrables mesures, prises en vue de lutter contre l'éthylisme, en témoignent. Mais si l'Etat ne dispose en général que de moyens limités pour prévenir l'ivresse "au volant", la législation sur les routes nationales lui donne au moins la possibilité de le faire dans un domaine limité: En effet, d'après le droit actuellement applicable, la vente de boissons alcooliques peut être interdite sur les autoroutes et semi-autoroutes qui sont exclusivement réservées au trafic motorisé. Il nous paraît que la vente de boissons alcooliques et l'intérêt qu'elle représente pour certains milieux de notre population doivent être subordonnés aux exigences plus hautes du bien public, autrement dit à la nécessité d'accroître la sécurité du trafic et de lutter contre l'alcoolisme. D'un point de vue très général, la question de savoir si les restaurants bordant les autoroutes pourront servir de l'alcool doit donc être tranchée par la négative. Nous ne voyons aucune raison de revenir sur notre décision antérieure." (FF 1971 I p. 1138.)
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La majorité de la Commission du Conseil national a approuvé cette décision et son rapporteur de langue allemande a fait la déclaration suivante lors de la séance du 7 octobre 1971:
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"Der Sprechende seinerseits zählt kaum zu den Kreisen, die mit besonderer Leidenschaft gegen jeden Alkoholgenuss ankämpfen. Er ist aber persönlich auch der Meinung, dass die bisherige Regelung, wonach durch bundesrätliche Verfügung kein Alkohol an Autobahnen ausgeschenkt werden soll, richtig sei. Im Namen der Kommissionsmehrheit bitte ich Sie daher, von der Aufnahme einer Alkoholbestimmung im Gesetz abzusehen." (BO, CN 1971, p. 1368.)
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Au cours du débat d'entrée en matière, une seule réserve a été formulée par le porte-parole du groupe PAB (paysans, artisans et bourgeois), qui cependant a approuvé le projet de loi:
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"Wie erwähnt, betrachten wir den uns unterbreiteten Vorschlag als richtig, trotzdem festgestellt werden könnte, eine Verweigerung des Alkoholausschankes müsste ja eigentlich nur den Autolenker als solchen betreffen, aber nicht unbedingt die Mitfahrer. Wir denken da beispielsweise an Cars, wo ja eine einzige Person für die andern verantwortlich ist und nur sie speziell keinen Alkohol trinken dürfte. Die Zeit wird dann zeigen, ob vielleicht später andere Möglichkeiten in die Gesetzesformen aufgenommen werden können. Heute aber stehen wir auf dem Standpunkt, dass die Raststätten nur mit alkoholfreien Getränken sollten bewilligt werden." (BO, CN 1971 p. 1369.)
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Quant au chef du Département fédéral de l'intérieur, il a dit ce qui suit:
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"Es liegt mir aber daran, dem Rate dafür zu danken, dass das Alkoholverbot unbestritten geblieben ist. Es wird zwar nicht im Gesetz festgelegt, auch nicht in der neuen Fassung, der Bundesrat hat sich aber in seiner Botschaft sehr klar für das Alkoholverbot ausgesprochen. Er wird es in der Verordnung aufrechterhalten." (BO, CN 1971 p. 1370.)
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Finalement, le Conseil national puis le Conseil des Etats ont voté, sans discussion ni opposition, le texte proposé par le Conseil fédéral (BO, CN 1971 p. 1371, CE 1971 p. 861).
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Il ressort ainsi clairement des travaux préparatoires que les Chambres fédérales ont accepté non seulement que l'on interdise de servir des boissons alcooliques dans les restaurants autoroutiers, mais encore que cette interdiction figure uniquement dans le texte revisé de l'ordonnance d'exécution et non pas dans la loi elle-même. Par là même, elles ont également admis la constitutionnalité de cette mesure, considérant, avec le Conseil fédéral, que la notion d'utilisation du réseau, au sens de l'art. 36bis Cst., englobe, outre tous les équipements et installations nécessaires, "les mesures propres à augmenter le bien-être personnel des usagers" (FF 1971 I p. 1140).
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b) Il est vrai que, pris à la lettre, l'art 7 al. 2 LRN n'habilite pas expressément le Conseil fédéral à interdire le débit d'alcool dans les restoroutes. Mais il est de jurisprudence qu'une base légale matérielle suffit pour que l'exécutif puisse édicter, dans le cadre d'une ordonnance de substitution, une réglementation qui restreint la liberté du commerce et de l'industrie dans un domaine de sa compétence (ATF 104 Ia 198 /199, ATF 98 Ia 591).
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Nul ne conteste que l'interdiction litigieuse est une pure mesure de police - et non de politique économique -, qui tend, ainsi que le veut la loi (art. 5 LRN), à garantir la sécurité du trafic. Une telle prescription de police, que le Conseil fédéral peut édicter en vertu de l'art. 7 al. 2 LRN - ainsi d'ailleurs que le Département fédéral de l'intérieur en vertu de l'art. 50 -, relève de la législation réservée par l'art. 31 al. 1 Cst. et est, partant, compatible avec cette disposition (cf. ATF 83 I 150 consid. 4b).
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Par ailleurs, on pourrait se demander si l'art 4 al. 4 ORN constitue réellement une nouvelle règle qui restreint les droits des citoyens ou leur impose de nouvelles obligations, au sens de la jurisprudence (ATF 104 Ib 209 consid. 3b, ATF 99 Ib 165 consid. 1a). En effet, il ne fait que reprendre une interdiction préexistante en l'appliquant aux nouveaux droits - d'exploiter des restaurants et des motels - introduits par la loi du 17 décembre 1971. Mais surtout, on a vu que si le législateur a certes voulu conférer un large pouvoir d'appréciation au Conseil fédéral, il a en même temps limité en quelque sorte ce pouvoir, en se prononçant lui-même directement sur l'insertion d'une interdiction dans l'ordonnance. Il apparaît ainsi que si la norme de l'art. 4 al. 4 ORN doit bel et bien être qualifiée, formellement, de règle primaire, elle s'apparente plutôt, en fait, à une simple disposition d'exécution comportant une règle indiquée avec précision par le législateur. Dans ce sens, la question pourrait même se poser de savoir si, malgré son large pouvoir d'appréciation, le Conseil fédéral eût pu prendre la liberté de renoncer, de lui-même, à inscrire cette interdiction de débit d'alcool dans l'ordonnance. Certes, ce problème relève en réalité surtout de l'opportunité politique. Il n'en demeure toutefois pas moins que les particularités de la procédure d'élaboration législative qui est à l'origine de l'art. 4 al. 4 ORN doivent nécessairement être prises en considération: elles offrent une raison supplémentaire d'admettre que la norme de délégation de l'art. 7 al. 2 LRN n'a pas besoin d'être expresse pour pouvoir être interprétée dans le sens proposé par le département recourant.
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c) Outre qu'elle n'est pas contredite par le texte de la loi, cette interprétation est largement corroborée par les travaux préparatoires, qui attestent la volonté claire et unanime du législateur. Elle résiste au surplus à l'objection tirée du défaut de délégation expresse puisque, d'une part, l'interdiction litigieuse - en tant que restriction à la liberté du commerce et de l'industrie fondée sur des motifs de police - est compatible avec l'art. 31 Cst. et que, d'autre part, le législateur s'est lui-même directement prononcé sur la portée, en ce qui concerne cette règle particulière, de la norme de délégation inscrite à l'art. 7 al. 2 LRN.
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d) Cette conclusion rend superflu l'examen des autres problèmes constitutionnels abordés par les parties. Il n'y a donc pas lieu de se demander si l'exploitation des installations annexes n'entrerait éventuellement pas dans le champ de la liberté du commerce et de l'industrie, ou encore si les compétences reconnues aux cantons en matière d'établissements publics et de commerce des boissons spiritueuses (cf. art. 31 al. 2, 31 ter et 32 quater Cst.) pourraient faire obstacle à celles dont dispose la Confédération en vertu de l'art. 31 Cst. et de la disposition spéciale de l'art. 36bis Cst.
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Sans aucun doute, l'opportunité et la justification d'une semblable prohibition suscitent - et susciteront encore à l'avenir - de nombreux avis contradictoires. Le Conseil fédéral les a exposés dans son Message du 28 avril 1971 précité (FF 1971 I p. 1136 ss) et a conclu à la prééminence des motifs liés tant à la sécurité du trafic qu'à la lutte contre l'alcoolisme. Au Parlement, qui n'est pourtant pas composé que d'ennemis du vin ou des milieux viti-vinicoles, nul ne s'est opposé à ce point de vue. Qui plus est, les Bulletins officiels déjà cités (cf. consid. 4a) révèlent que le législateur s'est déterminé en connaissance de cause et a estimé qu'il y a des raisons sérieuses et pertinentes d'interdire l'alcool dans les restoroutes, sans que cela implique pour autant des atteintes excessives à des intérêts importants. Pour le reste, il n'est pas déraisonnable d'estimer, comme l'indique le recourant, que toute autre mesure moins incisive s'avérerait forcément moins efficace et plus difficilement applicable.
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