BGE 86 I 304 |
43. Arrêt du 4 novembre 1960 dans la cause Portmann contre OFIAMT. |
Regeste |
Art. 99 Ziff. IX lit. a OG. |
Art. 1 Abs. 1 lit. d der Verordnung vom 3. Oktober 1919 über den Vollzug des Fabrikgesetzes. |
Ist die Unterstellung industrieller Anstalten anzuordnen oder aufrechtzuerhalten, in denen infolge Automatisierung der Produktion die Zahl der Arbeiter das gesetzliche Minimum nicht oder nicht mehr erreicht? (Erw. 2). |
Sachverhalt |
A.- La maison Portmann SA, manufacture de pierres fines pour l'horlogerie, est constituée en société anonyme de famille. Le 29 décembre 1930, elle-même (ou son prédécesseur) a été assujettie à la loi fédérale sur le travail dans les fabriques en vertu de l'art. 1er al. 1 lit. a de l'ordonnance du 3 octobre 1919 concernant l'exécution de ladite loi (en abrégé: OTF), car elle employait alors des moteurs et occupait jusqu'à seize ouvriers. Au cours de ces dernières années, elle a acquis six machines automatiques et, tout en maintenant sa production, put réduire fortement le nombre de ses ouvriers, lequel tomba à trois en 1957 et à deux en 1960 (sans compter les époux Briod-Portmann, qui sont membres du conseil d'administration, comme président et secrétaire, dirigent l'entreprise et travaillent aussi à l'atelier). Le 20 juillet 1960, l'Office fédéral de l'industrie, des arts et métiers et du travail (en abrégé: l'OFIAMT) décida que Portmann SA n'était plus assujettie à la loi sur le travail dans les fabriques, parce qu'elle n'occupait plus le nombre d'ouvriers fixé par la loi comme minimum.
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B.- Portmann SA a formé un recours de droit administratif contre cette décision, qu'elle demande au Tribunal fédéral d'annuler, en bref par les motifs suivants:
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La décision entreprise est entachée d'arbitraire, parce que la diminution du nombre des ouvriers est le fait de l'automation, qui se répand de plus en plus dans la fabrication des pierres pour l'horlogerie et est devenue indispensable pour soutenir la lutte contre la concurrence. Les six machines automatiques, acquises pour le prix de 100 000 fr. environ, remplacent 12 ouvriers et produisent 20 000 pierres par jour. Il faut donc appliquer par analogie l'art. 12 OTF, selon lequel, dans la branche de la broderie, c'est le nombre des machines et non celui des ouvriers qui est décisif pour l'assujettissement à la loi sur le travail dans les fabriques. La recourante demande à être traitée de la même façon que les ateliers de décolletage qui sont déjà soumis à ladite loi lorsqu'ils occupent un ou deux ouvriers.
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C.- L'OFIAMT conclut au rejet du recours. Son argumentation se résume comme il suit:
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L'art. 1er lit. d OTF définit comme fabriques et permet d'assujettir à la loi les établissements industriels qui, employant des moteurs, occupent moins de six ouvriers lorsqu'ils exposent à des dangers exceptionnels la santé et la vie des ouvriers ou présentent manifestement le caractère de fabriques par leur genre d'exploitation. Le premier alinéa de l'art. 11 al. 1 OTF donne des exemples concrets de telles exploitations, mais exige au moins trois ouvriers. L'al. 2 réserve l'application de l'art. 1er lit. d OTF à d'autres cas encore, mais si cette application demeure possible avec un nombre d'ouvriers inférieur à trois, il faut au moins, dans ces cas, que les conditions de l'art. 1er al. 1 lit. d soient remplies d'une façon particulièrement nette. Il n'en va pas ainsi dans l'exploitation de la recourante. La réglementation spéciale de l'art. 12 OTF, réservée aux entreprises de la broderie, ne saurait être appliquée, par extension, à des entreprises d'autre nature. Dans l'interprétation de l'art. 1er al. 1 lit. d, il faut exiger un degré d'automation plus élevé à mesure que le nombre des ouvriers descend au-dessous de six. En général, les entreprises de décolletage n'ont été assujetties que lorsqu'elles utilisent dix automates au moins. Aucune ne l'a encore été, qui employait deux ouvriers avec six automates. Si l'on appliquait la loi sur le travail dans les fabriques à la recourante, il faudrait aussi soumettre à ladite loi un grand nombre d'exploitations semblables, ce qui susciterait une violente résistance dans l'industrie horlogère.
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Considérant en droit: |
2. - Selon son art. 1er al. 1, la loi sur le travail dans les fabriques s'applique à toute entreprise industrielle qui a le caractère d'une fabrique. La loi ne définit ni la notion d'entreprise industrielle, ni celle de fabrique. Elle entend, par le premier de ces termes, une exploitation où l'on confectionne des marchandises, par opposition à l'agriculture, d'une part, et au commerce, d'autre part (RO 80 I 394, consid. 1). Selon l'art. 1er al. 2, un établissement industriel peut être qualifié fabrique lorsqu'il occupe plusieurs ouvriers hors de leur logement. L'art. 1er al. 1 OTF précise la notion au moyen d'autres facteurs, en particulier de l'installation de l'entreprise. Les établissements industriels qui occupent onze ouvriers ou plus sont en tout cas des fabriques (lit. c); ceux qui en occupent six à dix ne le sont que s'ils emploient des moteurs ou si des jeunes gens se trouvent au nombre des ouvriers (lit. a et b); lorsque le nombre des ouvriers est inférieur à six, l'assujettissement s'impose néanmoins si l'entreprise présente des dangers exceptionnels pour la santé et la vie des ouvriers ou revêt manifestement le caractère d'une fabri que par le genre de son exploitation (lit. d). L'art. 11 al. 1 OTF donne trois exemples de fabriques selon l'art. 1er al. 1 lit. d; l'al. 2 réserve l'application de l'art. 1er lit. d à d'autres cas.
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Dans la présente espèce, il est incontesté que l'entreprise de la recourante constitue un établissement industriel et - en plus des époux Briod-Portmann, qui, en leur qualité de membres de la société anonyme de famille, ne comptent pas - n'occupe que deux ouvriers. Elle ne pourrait donc être assujettie à la loi sur le travail dans les fabriques qu'en vertu de l'art. 1er al. 1 lit. d OTF. Les parties sont, de plus, d'accord qu'elle ne présente pas de dangers exceptionnels pour la santé et la vie des ouvriers. Il ne reste donc plus qu'à rechercher si, par le genre de son exploitation, elle revêt manifestement le caractère d'une fabrique. La recourante estime que l'affirmative s'impose du fait de la mécanisation et allègue que les machines automatiques qu'elle a acquises ont remplacé douze ouvriers; l'OFIAMT le conteste. Le Tribunal fédéral a effectivement appliqué la disposition précitée à des exploitations dont une partie des ouvriers ont été remplacés par des installations mécanisées spéciales et importantes (RO 71 I 286) ou dans lesquelles la production est essentiellement le fait de machines, l'activité de la maind'oeuvre se réduisant au service de celles-ci (RO 80 I 395, consid. 2). On tient ainsi compte des cas où l'introduction progressive de systèmes de production automatique réduit la main-d'oeuvre, même dans les entreprises qui présentent manifestement le caractère de fabriques, sans pour autant le leur faire perdre. Mais il ne s'ensuit pas que l'emploi d'automates et le nombre des ouvriers qu'ils remplacent caractérisent toujours et à l'évidence une entreprise comme fabrique, quel que soit le nombre des ouvriers qu'elle continue d'employer. Pour en juger, il faut bien plutôt prendre en considération l'ensemble des circonstances; c'est de toute l'organisation que doit ressortir avec certitude le caractère de fabrique, vu non seulement le nombre et la capacité de production des automates utilisés, mais encore le nombre des ouvriers qui les servent. C'est ce qu'exprime clairement l'art. 11 al. 1 OTF, qui donne comme exemples de fabriques selon l'art. 1er al. 1 lit. d les moulins à céréales, les usines à gaz et les établissements pour la production, la transformation et la distribution de l'énergie électrique, mais qui exige que trois ouvriers au moins y soient occupés. Alors même que l'al. 2 ne prévoit pas expressément la même limitation par le nombre, il serait naturel de l'imposer dans les cas qu'il vise. Au contraire, l'art. 12 OTF soumet à la loi sur le travail dans les fabriques les ateliers de broderie employant au moins trois machines à main ou deux machines à navettes avec pantographe ou une machine à navettes avec automate "quel que soit le nombre des ouvriers". Bien que cette disposition, spéciale à la broderie, ne s'applique pas aux autres industries, il faut néanmoins en tenir compte dans l'interprétation de l'art. 1er al. 1 lit. d, qui en est aussi la base; elle fournit un argument contre l'exigence d'un nombre d'ouvriers déterminé dans les autres cas d'assujettissement selon l'art. 11 al. 2 OTF. Même alors, cependant, il faut prendre en considération l'ensemble des circonstances, y compris le nombre des ouvriers et il sera juste d'être d'autant plus exigeant, sur les autres points, que ce nombre sera inférieur à six. On aura aussi égard au nombre des automates utilisés. Dans son arrêt Compagnie des compteurs SA, du 1er juin 1945 (RO 71 I 285), le Tribunal fédéral a relevé le caractère exceptionnel de l'art. 1er al. 1 lit. d et a refusé l'assujettissement, parce que l'entreprise ne présentait aucun caractère spécial, qui aurait justifié une exception à l'exigence légale de six ouvriers au minimum. Dans son arrêt Glatzfelder, du 17 décembre 1954 (RO 80 I 395), il a confirmé l'assujettissement d'un atelier de décolletage avec quatre ouvriers et 26 automates et il a jugé de même dans les deux arrêts (non publiés) Affolter et Bovet, du 17 décembre 1954, touchant deux entreprises de même nature, l'une avec trois ouvriers et 23 automates, l'autre avec quatre ouvriers et 12 automates. Dans le dernier de ces cas, le recourant avait objecté que d'autres entreprises de décolletage, qui se trouvaient dans des circonstances semblables, n'avaient pas été assujetties et il s'était réclamé de l'égalité de traitement; sur ce point, le Tribunal fédéral a dit qu'il appartiendrait bien plutôt à l'autorité compétente d'examiner s'il n'y aurait pas lieu d'assujettir les entreprises auxquelles le recourant comparait la sienne. Il semble qu'il en ait été ainsi fait depuis lors et que l'OFIAMT ait exigé, pour l'assujettissement, un minimum de dix automates. La limite à tracer est une question de mesure, dont la solution dépend, non pas d'un seul chiffre, mais de divers facteurs; le Tribunal fédéral ne saurait, sans raisons majeures, intervenir, sur ce point, dans la pratique de l'autorité spécialisée, qui voit et connaît les circonstances de plus près.
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L'exploitation de la recourante n'occupe que deux ouvriers et six automates; elle se distingue nettement, par là, de toutes celles qui ont été, jusqu'ici, assujetties à la loi de par l'art. 1er al. 1 lit. d OTF. Sans doute y a-t-elle été précédemment assujettie de par l'art. 1er al. 1 lit. a OTF, vu le nombre de ses ouvriers. Mais son caractère a changé par l'introduction des machines automatiques, qui a fait tomber ce nombre de 16 à deux. Si l'on continuait néanmoins à la considérer comme une fabrique, il faudrait procéder à l'assujettissement de nombreuses autres entreprises et modifier profondément la pratique de l'OFIAMT, lequel se heurterait dès lors à une forte résistance. Une telle modification ne se justifierait que si les limites observées jusqu'ici se révélaient trop étroites et que des inconvénients en soient résultés. Or les parties n'allèguent rien de tel. Le statu quo s'impose d'autant plus que la loi fédérale sur le travail dans les fabriques sera prochainement remplacée par la loi fédérale sur le travail, qui fixera à nouveau les cas d'assujettissement et tiendra compte des problèmes que suscite l'introduction des méthodes de travail automatique.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral
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