BGE 93 I 561
 
69. Arrêt de la Ie Cour civile du 26 septembre 1967 dans la cause Eurobel Handels G.m.b.H. contre Office fédéral du registre du commerce.
 
Regeste
Art. 944 Abs. 2, 952 OR; 45/46 HRegV.
2. Voraussetzungen, unter denen das eidgen. Amt für das Handelsregister ausnahmsweise die Verwendung einer nationalen Bezeichnung oder eines territorialen oder regionalen Zusatzes in einer Firma gestatten kann. Prüfungsbefugnis des Bundesgerichts bei verwaltungsgerichtlicher Beschwerde gemäss Art. 97 ff. OG (Erw. 2).
3. Die Nichtzulassung der Firma "Eurobel" bedeutet keinen Ermessensmissbrauch des eidg. Handelsregisteramtes (Erw. 3 und 4).
 
Sachverhalt
A.- La société anonyme "Eurobel Holding" a été fondée le 31 juillet 1964 à Luxembourg où elle a son siège. L'art. 4 des statuts définit son but en ces termes:
"La société a pour objet la prise de participations sous quelque forme que ce soit dans des sociétés luxembourgeoises ou étrangères, l'acquisition par achat, souscription ou de toute autre manière, ainsi que l'aliénation par vente, échange ou de toute autre manière, de valeurs mobilières de toutes espèces, la gestion ou la mise en valeur du portefeuille qu'elle possédera, l'acquisition, la cession et la mise en valeur de brevets et licences d'exploitation.
La société peut prêter ou emprunter avec ou sans garantie, elle peut participer à la création et au développement de toutes sociétés et leur prêter tous concours. D'une façon générale elle peut prendre toutes mesures de contrôle, de surveillance et de documentation et faire toutes opérations qu'elle jugera utiles à l'accomplissement ou au développement de son objet, en restant toutefois dans les limites tracées par la loi du trente et un juillet mil neuf cent vingt-neuf sur les holdings companies."
B.- La société anonyme "Eurobel Holding" a constitué d'autres sociétés de fabrication et de vente, à savoir:
- Eurobel Paris S.à r.l., à Paris;
- Eurobel Amsterdam N.V., à Amsterdam;
- Eurobel Handelsgesellschaft m.b.H., à Munich.
Elle a projeté de fonder à Lausanne une société qui aurait la raison "Eurobel Lausanne SA". Interpellé sur le point de savoir si cette raison sociale serait admise, l'Office fédéral du registre du commerce a répondu négativement le 5 août 1965. Il invoquait les art. 45 et 46 ORC, ainsi que l'arrêt publié au RO 86 I 243 dans lequel le Tribunal fédéral a jugé que le refus d'admettre la raison de commerce "Eurofiduciaire" ne comportait pas un abus du pouvoir d'appréciation que les dispositions précitées reconnaissent audit office.
En décembre 1965, la société anonyme "Eurobel Holding" et l'associé gérant de la société à responsabilité "Eurobel" de Munich ont décidé que celle-ci fonderait une succursale à Lausanne et désigné un fondé de procuration en la personne de Walter Kühnlein, à Pully. La requête d'inscription a été présentée au préposé au registre du commerce de Lausanne sous la raison "Eurobel Handels GmbH, à Munich, succursale de Lausanne".
Le 22 février 1967, l'Office fédéral du registre du commerce a informé le mandataire de la requérante qu'il n'admettait pas l'inscription de la succursale sous la raison indiquée. Il s'est référé aux motifs de son avis du 5 août 1965.
C.- Contre cette décision, Eurobel Handels G.m.b.H a formé un recours de droit administratif. Elle requiert le Tribunal fédéral d'autoriser l'inscription de la raison sociale "Eurobel Handels G.m.b.H., à Munich, succursale de Lausanne".
Dans ses observations, l'Office fédéral du registre du commerce propose de rejeter le recours.
 
Considérant en droit:
Assurément, la raison de la succursale suisse d'une entreprise dont le siège principal se trouve à l'étranger, est régie en principe par le droit étranger (RO 37 II 374). Mais la succursale suisse ne peut être inscrite au registre du commerce que si elle est conforme aux prescriptions impératives du droit public suisse relatives à la formation des raisons de commerce (BURCKHARDT, Le droit fédéral suisse, trad. par BOVET, vol. III, No 1556 II al. 2, p. 986; DE STEIGER/FAVEY, Les raisons de commerce en droit suisse, p. 48). Il appartient dès lors à l'entreprise étrangère qui veut installer une succursale en Suisse de se conformer à la législation de ce pays (RO 90 II 201, consid. 4).
2. L'art. 944 al. 2 CO confère au Conseil fédéral le droit de régler par une ordonnance l'emploi des désignations de caractère national ou territorial dans les raisons de commerce. Fondé sur cette délégation législative, le Conseil fédéral a édicté les art. 45 et 46 ORC, qui interdisent en principe les désignations nationales, ainsi que les adjonctions territoriales et régionales. L'Office fédéral du registre du commerce a toutefois la faculté d'autoriser exceptionnellement une dérogation à la règle, lorsque des circonstances spéciales le justifient. Il doit consulter au préalable l'organisme compétent du commerce, de l'industrie ou de l'artisanat.
Savoir si des circonstances spéciales justifient l'emploi de désignations nationales, territoriales ou régionales dans une raison de commerce est une question d'appréciation. Mais l'Office fédéral du registre du commerce ne jouit pas en la matière d'un pouvoir illimité. Il doit fonder sa décision sur des motifs objectifs et appliquer les règles du droit et de l'équité, selon le principe général énoncé à l'art. 4 CC (RO 92 I 294, consid. 2). Quant au Tribunal fédéral, saisi d'un recours de droit administratif, il ne saurait substituer sa propre appréciation à celle de l'office. Il se borne à vérifier si la décision attaquée ne viole pas le droit fédéral (art. 104 al. 1 OJ), c'est-à-dire à examiner si l'autorité administrative s'est référée à des critères objectivement déterminants et si elle n'a pas outrepassé les limites que le droit assigne à sa liberté d'appréciation, ni abusé de ce pouvoir (RO 85 I 134, 86 I 248, 91 I 216, 92 I 294).
3. Contrairement au qualificatif "international", qui n'est pas une désignation nationale ou territoriale (RO 87 I 307), les deux syllabes "Euro", qui indiquent l'Europe, soit une partie du monde, rentrent dans les adjonctions territoriales visées à l'art. 46 ORC (RO 86 I 247 s.). L'Office fédéral du registre du commerce ne pouvait dès lors autoriser l'inscription de la raison de commerce "Eurobel" que si des circonstances spéciales justifiaient une dérogation à la règle. Consultés en vertu de l'art. 45 al. 2 ORC, le directoire de l'Union suisse du commerce et de l'industrie ainsi que la Chambre vaudoise du commerce et de l'industrie ont émis un avis négatif. Si la raison "Eurobel" se rapproche davantage d'une désignation de fantaisie que la raison "Eurofiduciaire" dont il est question dans l'arrêt publié au RO 86 I 243 ss., elle n'en suggère pas moins que l'entreprise qui s'en sert revêt un caractère officiel ou semi-officiel et exerce son activité dans toute l'Europe. Elle éveille ainsi l'idée d'une coopération économique ou technique sur le plan européen. Cela est d'autant plus vrai que la dernière syllabe "Bel" n'apporte aucune précision sur le genre de l'activité déployée par l'entreprise. Dans son recours, la société affirme que le groupe dont elle fait partie a pour but de fabriquer et de vendre des eaux minérales. Mais sa raison de commerce ne renferme aucune indication dans ce sens. Qui plus est, le but défini par les statuts de la société mère, qui a son siège à Luxembourg, est beaucoup plus large. Il permet des activités propres à induire le public en erreur sur le caractère officiel ou semi-officiel de l'entreprise.
4. S'agissant d'appliquer les règles du droit suisse sur la formation des raisons de commerce, il est sans importance que la dénomination "Eurobel" ait été admise dans d'autres pays. L'enquête effectuée auprès de plusieurs ambassades de Suisse en Europe centrale et occidentale a du reste confirmé que la pratique diffère notablement, selon les pays, au sujet des désignations territoriales. Quant aux dénominations d'entités établies à Lausanne, qui comprennent le mot "Europe" ou ses deux premières syllabes, l'Office fédéral du registre du commerce déclare que deux raisons seulement sont inscrites, à savoir "Europhone SA", dont l'inscription a été opérée en 1958, soit avant la jurisprudence instaurée par l'arrêt "Eurofiduciaire" qui a été rendu en 1960 (RO 86 I 243 ss.), et "Euromart Investments SA", dont l'inscription a été autorisée en 1964 en vertu de circonstances spéciales, conformément à l'art. 45 al. 2 ORC. De toute manière, la recourante ne saurait tirer argument d'inscriptions qui auraient été admises à la suite d'une erreur de fait ou d'une méconnaissance des règles de droit (cf. RO 87 I 309).
L'examen de la cause montre dès lors qu'en refusant l'autorisation requise par "Eurobel", l'Office fédéral du registre du commerce s'est fondé sur des motifs pertinents et n'a pas abusé de son pouvoir d'appréciation ni dépassé les limites que lui assigne la législation en vigueur.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
Rejette le recours.