7. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public du 11 janvier 1996 dans la cause X. et Y. contre Cour de droit public du Tribunal cantonal du canton du Valais et Conseil d'Etat du canton du Valais (recours de droit public)
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Regeste
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Art. 87 OG: Beschwerde gegen die Regelung der Kosten- und Entschädigungsfrage in einem Zwischenentscheid.
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Sachverhalt
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Le 1er juillet 1994, X. et Y., enseignants dans un cycle d'orientation sans être au bénéfice d'une formation universitaire, ont notamment demandé au Conseil d'Etat du canton du Valais de constater dans une décision formelle susceptible de recours que la différence salariale existant entre les maîtres possédant un titre universitaire et ceux n'en possédant pas violait le principe de l'égalité de traitement.
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Par lettres des 23 novembre 1994 et 12 janvier 1995, le Conseil d'Etat a informé X. et Y. qu'il ne lui appartenait pas de prendre la décision demandée. La compétence de fixer le traitement salarial des maîtres du cycle d'orientation incombait en effet au législateur cantonal qui en avait fait usage en édictant un décret prévoyant expressément une distinction salariale selon que l'enseignant possédait ou non un titre universitaire.
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X. et Y. ont recouru à l'encontre des deux lettres précitées auprès de la Cour de droit public du Tribunal cantonal du canton du Valais. Ils ont principalement conclu à leur annulation et au renvoi de l'affaire au Conseil d'Etat pour décision sur le fond. Subsidiairement, ils ont demandé au Tribunal cantonal de constater que les différences salariales invoquées étaient contraires au principe de l'égalité de traitement et de leur allouer des arriérés de salaire dès le 1er juillet 1989 de même qu'un salaire égal à celui d'un maître bénéficiant d'un titre universitaire dès le 1er juillet 1994.
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Par arrêt du 10 avril 1995, le Tribunal cantonal a constaté que le litige avait trait au décret cantonal précité qui prévoyait que les difficultés résultant de son application devait être tranchées par le Département cantonal de l'instruction publique, sous réserve de recours auprès du Conseil d'Etat. Ce dernier aurait dès lors dû transmettre l'affaire à ce département comme objet de sa compétence. Les conclusions principales du recours demandant le renvoi de l'affaire au Conseil d'Etat devaient dès lors être rejetées et les conclusions subsidiaires, étrangères à l'objet du litige, devaient être considérées comme irrecevables. La cause était par ailleurs transmise au Département de l'instruction publique comme objet de sa compétence. Il n'était en outre pas perçu de frais judiciaires afin de tenir compte de l'omission du Conseil d'Etat et aucune indemnité à titre de dépens n'était allouée aux recourants.
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Agissant par la voie du recours de droit public pour violation de l'art. 4 Cst., X. et Y. demandent au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt rendu le 10 avril 1995 par le Tribunal cantonal. Invoquant la violation de l'interdiction du déni de justice formel et matériel, ils affirment que c'est à tort que l'autorité intimée a rejeté leur recours et refusé de leur allouer des dépens.
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Le Tribunal fédéral a déclaré le recours irrecevable.
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Extrait des considérants:
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a) Le présent recours étant fondé exclusivement sur l'art. 4 Cst., sa recevabilité doit notamment être examinée au regard de l'art. 87 OJ. Selon cette dernière disposition, le recours de droit public pour violation de l'art. 4 Cst. n'est recevable qu'à l'encontre des décisions finales prises en dernière instance; il n'est recevable contre des décisions incidentes prises en dernière instance que s'il en résulte un dommage irréparable pour l'intéressé. Cette limitation de la possibilité d'attaquer des décision incidentes prises en dernière instance n'a cependant pas une valeur absolue. Font exception les décisions relatives à des questions d'organisation judiciaire qui par nature doivent être définitivement réglées avant que le procès puisse se poursuivre. On y inclut notamment les décisions en matière de composition du tribunal ou celles en matière de compétence ratione loci ou ratione materiae (ATF 117 Ia 396 consid. 2 p. 399 et les références citées).
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aa) Il faut considérer comme une décision finale au sens de l'art. 87 OJ toute décision qui clôt une procédure, sous réserve de recours à une autorité supérieure, que ce soit par un jugement au fond ou pour des motifs de procédure. Les décisions incidentes en revanche ne mettent pas fin à la procédure mais représentent seulement une étape sur la voie de la décision finale, peu importe qu'elles aient pour objet une question de procédure ou, à titre préalable, une question de droit matériel. A cet égard, le prononcé par lequel une autorité cantonale de recours renvoie une affaire, pour nouvelle décision, à une autorité qui a statué en première instance ou à une autre autorité est une décision incidente. Il s'agit en effet d'une simple étape avant la décision finale qui doit mettre un terme à la procédure (ATF 117 Ia 396 consid. 1 p. 398 et les arrêts cités). Lorsque l'autorité de recours statue simultanément sur les dépens de la procédure suivie devant elle, ce prononcé accessoire doit aussi être considéré comme une décision incidente, alors même qu'il porte sur des prétentions qui ne seront plus en cause par la suite (cf. ATF 117 Ia 251 consid. 1a p. 253 et les références citées). Du reste, on ne peut généralement pas vérifier la répartition des frais procéduraux sans examiner aussi, à titre préjudiciel, le bien-fondé de la décision de renvoi. Cet examen ne peut cependant intervenir que si cette dernière décision entraîne un préjudice irréparable; s'il en allait autrement, le Tribunal fédéral pourrait en effet être amené à vérifier indirectement, par le biais des recours dirigés contre la répartition des frais, la constitutionnalité de toutes les décisions incidentes. Cela ne correspondrait pas au but de l'art. 87 OJ qui veut que le Tribunal fédéral ne s'occupe en principe qu'une seule fois d'un procès et seulement lorsqu'il est certain que le recourant a subi un dommage définitif (ATF 117 Ia 251 consid. 1b p. 254, ATF 106 Ia 229 consid. 3d p. 235).
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Dans le cas particulier, il est manifeste que l'arrêt attaqué est une décision incidente, tant dans son prononcé principal renvoyant la cause au Département de l'instruction publique, que dans celui accessoire portant sur les frais et dépens. Il faut dès lors examiner si cet arrêt cause un dommage irréparable aux recourants.
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bb) Un préjudice irréparable n'est réalisé que lorsque l'intéressé subit un dommage qu'une décision favorable sur le fond ne fait pas disparaître complètement; le dommage doit en outre être de nature juridique, un inconvénient seulement matériel, résultant par exemple de l'allongement de la procédure, est insuffisant (ATF 117 Ia 251 consid. 1b p. 253-254 et les arrêts cités). En principe, la décision par laquelle une juridiction de recours annule un jugement et renvoie l'affaire à une autorité inférieure pour nouvelle décision constitue une décision incidente qui n'entraîne pour l'intéressé aucun dommage irréparable (ATF 117 Ia 396 consid. 1 p. 398-399 et la jurisprudence citée). Il en va de même en ce qui concerne le prononcé sur les frais et dépens. En effet, si l'autorité à laquelle la cause est renvoyée prend une décision défavorable pour l'intéressé, la décision concernant les frais et dépens pourra être attaquée devant le Tribunal fédéral, après épuisement des instances cantonales, en même temps que la décision sur le fond. En outre, si les intéressés n'ont plus d'intérêt juridiquement protégé à recourir sur le fond car l'une des autorités cantonales a statué entièrement en leur faveur ou que la procédure cantonale a été rayée du rôle comme devenue sans objet ou par l'effet d'un retrait de recours, ils peuvent encore s'en prendre au prononcé sur les frais et dépens, celui-là les touchant personnellement et directement dans leurs intérêts, par un recours de droit public auprès du Tribunal fédéral dirigé directement contre la décision de l'autorité cantonale inférieure (ATF 117 Ia 251 consid. 1b p. 254-255 et les arrêts cités).
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Dans le cas particulier et compte tenu de cette jurisprudence, les recourants pourront attaquer le prononcé sur les dépens contenu dans l'arrêt entrepris en même temps que la décision au fond et former, au besoin, un recours de droit public auprès du Tribunal fédéral après l'épuisement des instances cantonales. Par ailleurs, si l'issue de la procédure cantonale devait les priver d'un intérêt à recourir sur le fond, ils pourraient encore former directement un recours de droit public auprès du Tribunal fédéral pour lui demander uniquement d'examiner le refus de l'autorité intimée de leur allouer des dépens.
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cc) Il n'y a aucun motif, et les recourants ne le prétendent d'ailleurs pas, de s'écarter de la jurisprudence précitée. Il n'y a en particulier pas lieu de traiter différemment, ainsi que le propose PETER LUDWIG (cf. Endentscheid, Zwischenentscheid und Letztinstanzlichkeit im staatsrechtlichen Beschwerdeverfahren, RJB 110/1974 p. 161 ss, n. 4.3 p. 180-181), le cas dans lequel le grief d'arbitraire est dirigé contre le prononcé sur les dépens pour des motifs indépendants de la décision incidente de renvoi. Il serait du reste difficile de distinguer ce cas de celui où la question des frais et dépens ne peut être dissociée du fond.
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b) Au vu de ce qui précède, il faut constater que l'arrêt attaqué ne cause aux recourants aucun dommage irréparable au sens de l'art. 87 OJ, ni en renvoyant la cause au Département de l'instruction publique pour décision sur le fond, ni en refusant de leur allouer des dépens. Le présent recours doit par conséquent être déclaré irrecevable.
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