BGE 141 I 221 |
21. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public dans la cause Bacca et Jaggi contre Conseil communal et Municipalité d'Aigle (recours en matière de droit public) |
1C_58/2015 du 1er octobre 2015 |
Regeste |
Art. 34 Abs. 2 BV, Art. 17c Abs. 2, Art. 20, 26 und 120 Abs. 2 LEDP/VD, Art. 33, 34, 36-39, 43 Abs. 1, Art. 44, 46, 57 und 58 RLEDP/VD; Aufhebung einer kommunalen Abstimmung; Unregelmässigkeiten bei der Auszählung; mögliche Beeinflussung des Abstimmungsergebnisses. |
Im konkreten Fall wurde kein amtliches Visum auf der Vorderseite der im Stimmlokal abgegebenen Stimmrechtsausweise und Stimmkuverts angebracht, sodass diese Stimmen nicht hätten berücksichtigt werden dürfen (Art. 20 Abs. 3 LEDP/VD und Art. 39 Abs. 1 lit. a RLEDP/VD; E. 3.5). Fehlen eines Zwischenberichts über die vorgezogene Auszählung der auf der Kanzlei eingegangenen Stimmen in Verletzung von Art. 58 Abs. 5 RLEDP/VD (E. 3.6). Diese Unregelmässigkeiten verunmöglichen die Rückverfolgung der Stimmkuverts und sind als schwer zu qualifizieren. Die Stimmendifferenz ist kleiner als die Differenz zwischen den eingegangenen Stimmrechtsausweisen und Stimmzetteln, sodass eine mögliche Beeinflussung des Abstimmungsergebnisses durch die Unregelmässigkeiten als wahrscheinlich erscheint. Die Voraussetzungen für eine Aufhebung der Abstimmung sind somit erfüllt (E. 3.7). |
Sachverhalt |
A. Le 18 juillet 2013, le Conseil communal d'Aigle a adopté un préavis relatif à une demande de crédit d'un montant de 18'650'000 francs pour les travaux de renouvellement des infrastructures souterraines et de surface ainsi que pour le réaménagement des espaces publics en ville, dénommé "Aigle centre 2020". Le référendum communal lancé contre cet acte a abouti dans le délai utile. Le Préfet du district d'Aigle a fixé au 24 novembre 2013 la date de la votation communale, en même temps que trois votations fédérales. Selon le procès-verbal établi par le bureau du Conseil communal, la décision du Conseil communal du 18 juillet 2013 a été acceptée par 1'624 voix contre 1'532, 26 bulletins blancs et 6 nuls.
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Marcel Jacques Bacca et Jean-François Jaggi ont recouru notamment contre le résultat de la votation communale du 24 novembre 2013 auprès du Conseil d'Etat du canton de Vaud (ci-après: le Conseil d'Etat) et en ont demandé le prononcé de la nullité. Chargé par le Conseil d'Etat d'instruire les griefs soulevés à l'encontre du matériel de vote et du déroulement du dépouillement, le Préfet du district d'Aigle a rendu un rapport le 14 février 2014. Il a notamment été procédé, sous contrôle du Préfet, à un recomptage des bulletins de la votation communale du 24 novembre 2013, lequel a abouti à un résultat de 1'624 "oui" contre 1'533 "non", 26 bulletins blancs et 6 nuls, soit une différence d'une voix en faveur du "non".
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Par décision du 14 mai 2014, le Conseil d'Etat a rejeté les recours en tant que dirigés contre la votation populaire du 24 novembre 2013. Il a précisé en particulier que l'examen des griefs présentés par les recourants se limiterait aux seuls griefs en relation directe avec le déroulement du scrutin et le dépouillement.
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Marcel Jacques Bacca et Jean-François Jaggi ont interjeté un recours contre cette décision auprès de la Cour constitutionnelle du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: la Cour constitutionnelle), concluant au prononcé de la nullité de la votation populaire communale du 24 novembre 2013. Par arrêt du 10 décembre 2014, la Cour constitutionnelle a rejeté le recours et confirmé la décision du Conseil d'Etat du 14 mai 2014. Elle a considéré en substance que lesrecourants ne rendaient pas vraisemblable que les irrégularités alléguées à l'encontre du déroulement de la votation communale et de son dépouillement auraient pu influencer de manière décisive le résultat du vote.
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B. Agissant par la voie du recours en matière de droit public, Marcel Jacques Bacca et Jean-François Jaggi demandent au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du 10 décembre 2014 et de renvoyer la cause à l'instance précédente pour nouvelle décision au sens des considérants. Ils concluent implicitement à l'annulation de la votation communale du 24 novembre 2013. (...)
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Le Tribunal fédéral a admis le recours et annulé l'arrêt attaqué. Il a annulé la votation communale du 24 novembre 2013.
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(extrait)
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Extrait des considérants: |
Il n'examine en revanche que sous l'angle restreint de l'arbitraire l'application de normes de procédure et d'organisation qui ne touchent pas au contenu même des droits politiques (arrêt 1P.786/2005 du 8 mai 2006 consid. 3.1, in SJ 2006 I p. 533).
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3.2 Selon l'art. 34 al. 2 Cst., la garantie des droits politiques protège la libre formation de l'opinion des citoyens et l'expression fidèle et sûre de leur volonté. L'art. 32 de la Constitution du canton de Vaud du 14 avril 2003 (RS 131.231) prévoit que toute personne est libre d'exercer ses droits politiques sans encourir de préjudice. De cette garantie découle notamment le droit d'exiger qu'aucun résultat ne soit reconnu s'il n'exprime pas la libre volonté du corps électoral (ATF 131 I 126 consid. 3.1 p. 132 et les arrêts cités). Il en découle le droit à une exécution régulière du scrutin (ATF 121 I 138 consid. 3 p. 141) ainsi que le droit à un décompte exact et précis des voix (ATF 98 Ia 73 consid. 4 p. 85). En particulier, l'autorité chargée du dépouillement est tenue de procéder aux diverses opérations de tri du matériel de vote, de qualification des bulletins et de décompte des suffrages avec soin et conformément aux dispositions applicables (ATF 131 I 442 consid. 3.1 p. 447; ATF 98 Ia 73 consid. 4 p. 85; voir aussi ATF 114 Ia 42 consid. 4c p. 46).
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L'art. 34 Cst. impose une obligation de résultat, s'agissant de l'exactitude du scrutin, mais ne prescrit aucune procédure particulière s'agissant des opérations de dépouillement. Il appartient d'abord au droit cantonal de définir la nature et l'ampleur des vérifications à effectuer dans le cadre du dépouillement (arrêt 1P.786/2005 du 8 mai 2006 consid. 3.1, in SJ 2006 I p. 533; ATF 114 Ia 42 consid. 4c p. 46). Les autorités de recours ont toutefois l'obligation d'examiner soigneusement les griefs soulevés contre le résultat d'une votation, en tout cas lorsque ce résultat est très serré et que le recourant peut indiquer des éléments précis permettant de conclure à un comptage erroné des voix ou à un comportement illégal des autorités chargées d'assurer le déroulement correct de la votation (ATF 114 Ia 42 consid. 5 p. 48).
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Le droit cantonal vaudois prescrit par ailleurs qu'en matière d'élection ou de votation, le recourant doit rendre vraisemblable que la nature et l'importance des irrégularités dont il fait état ont pu influencer de façon déterminante le résultat (art. 120 al. 2 de la loi du 16 mai 1989 sur l'exercice des droits politiques [LEDP; RSV 160.0]).
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Le greffe municipal traite des votes par correspondance qui lui parviennent par la poste ainsi que des votes qui sont déposés auprès de l'administration communale ou dans sa boîte aux lettres (art. 33 RLEDP) jusqu'au vendredi à 12h00 précédant le jour du scrutin; il s'assure que le votant remplit les conditions d'accès au scrutin et que le matériel reçu est conforme; il sépare les votes conformes des votes susceptibles d'être annulés par le bureau et des votes n'ayant pas à être pris en compte; il établit un procès-verbal dressant l'inventaire des votes reçus (art. 34 al. 1 RLEDP). Avant le début du dépouillement, le greffe municipal transmet au président du bureau communal en particulier le procès-verbal mentionné à l'art. 34 RLEDP (art. 36 al. 1 let. a RLEDP) ainsi que l'urne ou les urnes contenant d'une part les enveloppes de vote conformes et d'autre part le matériel susceptible d'être annulé par le bureau communal (let. c). Il n'est pas habilité à ouvrir les enveloppes de vote (art. 34 al. 2 RLEDP).
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Les votes proviennent ensuite de la boîte aux lettres ou la case postale communale (qui est relevée une dernière fois à 12h le jour du scrutin: art. 17c al. 2 LEDP; art. 43 al. 1 RLEDP).
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Il y a enfin les votes qui ont été émis directement à l'urne et qui proviennent du bureau de vote.
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3.4.2 S'agissant des opérations préliminaires au dépouillement (tri et décompte du matériel de vote), l'art. 44 RLEDP prévoit qu'en se référant aux instructions du bureau cantonal, le bureau communal traite successivement le matériel trouvé dans la boîte aux lettres, reçu du greffe et issu du bureau de vote; il met définitivement de côté par provenance (boîte aux lettres, bureau) l'ensemble du matériel à ne pas prendre en compte; il rassemble les votes conformes par scrutin; il détermine et relève le nombre de votes à prendre en compte.
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Vient ensuite la phase du dépouillement. En cas de scrutins de niveaux différents, le bureau communal établit le nombre total de cartes de vote à prendre en compte reçues dans la boîte aux lettres, au greffe et au bureau de vote; ce nombre doit être établi pour chaque scrutin, en tenant compte des capacités de vote figurant sur les cartes; il en reporte le nombre sur les procès-verbaux (art. 46 al. 1 RLEDP). L'alinéa 2 de cette disposition précise que le bureau communal regroupe le matériel à prendre en compte en provenance de la boîte aux lettres, du greffe et du bureau. Il trie les bulletins par scrutin en regroupant les bulletins valables, nuls et blancs; le total constitue le nombre de bulletins rentrés (al. 3). Il s'assure, pour chaque scrutin, que le nombre de bulletins rentrés n'excède pas celui des cartes de vote reçues (al. 3).
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a) Par le greffe municipal
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1 Les votes émis par correspondance ou déposés à la commune ne sont pas pris en compte lors du dépouillement lorsque:
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a. la carte de vote fait défaut, n'est pas officielle ou se rapporte à d'autres scrutins que ceux en cours;
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b. les indications personnelles requises sur la carte de vote (signature et date de naissance complète) font partiellement ou totalement défaut, ou se révèlent fausses;
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c. en cas de votes multiples, le nombre de cartes de vote se trouvant dans l'enveloppe de transmission ne correspond pas exactement à celui des enveloppes de vote; ou lorsque les capacités de vote en présence ne concordent pas;
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d. l'enveloppe de transmission ne contient que la carte de vote;
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e. les bulletins de vote ou électoraux ne sont pas contenus dans l'enveloppe de vote;
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f. l'enveloppe de transmission parvient hors délai.
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2 Le greffe municipal conserve le matériel non pris en compte jusqu'à l'échéance du délai de recours.
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b) Par le bureau électoral
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3 Les votes émis au bureau de vote ne sont pas pris en compte dans le dépouillement lorsque l'enveloppe de vote ne porte pas le visa du bureau électoral ou ne contient aucun bulletin.
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5 Le bureau électoral transmet le matériel non pris en compte au greffe municipal, pour conservation jusqu'à l'échéance du délai de recours.
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L'électeur présente ensuite sa carte et son enveloppe de vote au contrôle à l'urne, puis introduit son enveloppe de vote dans l'urne (art. 37 al. 2 RLEDP). Avant le dépôt du vote dans l'urne, le bureau communal s'assure que la carte et l'enveloppe de vote sont munies du visa du contrôle d'entrée; dans le cas contraire, il signale le cas au président du bureau et veille à ce qu'aucun matériel ne soit introduit dans l'urne (art. 39 al. 1 let. a RLEDP); il retire la carte de vote (let. b); il s'assure que l'électeur n'introduit qu'une enveloppe dans l'urne (let. c).
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Les votes émis au bureau de vote ne sont pas pris en compte dans le dépouillement lorsque l'enveloppe de vote ne porte pas le visa du bureau électoral ou ne contient aucun bulletin (art. 20 al. 3 LEDP).
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La cour cantonale a considéré cependant que le visa avait pour unique objectif de permettre de vérifier qu'il y avait le même nombre de cartes d'électeurs que d'enveloppes de vote à la fermeture du bureau de vote: or, toutes les cartes de vote, donc y compris celles qui sont déposées au bureau de vote, étaient scannées, ce qui permettrait de contrôler qu'une personne ne vote pas deux fois. Cette argumentation fait toutefois fi du fait que le bureau communal ne scanne pas les enveloppes de vote, de sorte que le scannage informatique des cartes de vote n'est d'aucune utilité pour assurer la concordance interne entre les cartes de vote et les enveloppes de vote. En l'absence de visa sur les enveloppes de vote, il n'est pas possible de vérifier quelles enveloppes ont été prises en considération et lesquelles ne l'ont pas été. Le scannage des cartes de vote ne permet pas non plus d'assurer qu'une personne ne vote pas deux fois.
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L'instance précédente a ensuite relevé que le vote dans le local n'avait concerné qu'un nombre très faible de personnes; la commune avait précisé que seules 30 personnes en moyenne se déplaçaient au bureau de vote le dimanche matin. La Cour constitutionnelle insiste aussi sur les contrôles effectués par le bureau communal - composé de personnes assermentées à l'unique exception de l'huissier -, lesquels permettaient notamment de s'assurer qu'un électeur ne mettait pas deux enveloppes de vote dans l'urne (cf. art. 37, 38 et 39 RLEDP).
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L'appréciation de la cour cantonale ne repose cependant sur aucun chiffre concret s'agissant du scrutin du 24 novembre 2013; elle se fonde sur une simple affirmation de la commune indiquant qu'habituellement seule une trentaine de personnes se déplacerait au local de vote le dimanche. On ignore ainsi le nombre de personnes qui a réellement voté à l'urne le jour du scrutin litigieux. En effet, le procès-verbal du bureau communal ne distingue pas la provenance des bulletins de vote (greffe municipal, boîte aux lettres municipale et urne; voir supra consid. 3.4).
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Lorsque le résultat du vote est serré comme en l'espèce, on ne peut se fonder sur des approximations ou des suppositions pour évaluer si l'irrégularité en cause a pu influencer l'issue du scrutin. Le recomptage des bulletins de vote n'est d'aucune utilité pour guérir cette irrégularité; il ne permet pas de vérifier la concordance entre les enveloppes de vote et les cartes de vote. Il faudrait procéder à un décompte, non pas des bulletins de vote, mais des enveloppes de vote. Or on ne sait pas si la commune a gardé toutes ces enveloppes de vote; à cet égard le rapport préfectoral expose uniquement que l'art. 57 RLEDP n'imposait pas de conserver ces pièces; la commune ne dit pas si elle a gardé toutes les enveloppes de vote; elle se contente d'affirmer qu'elle n'avait pas l'obligation de conserver ces pièces à teneur du règlement communal. La question de savoir si la commune devait conserver lesdites enveloppes en vertu des art. 20 al. 5 LEDP et 36 al. 2 RLEDP, comme le soutiennent les recourants, peut toutefois demeurer indécise. Seul importe en effet le fait que la commune et la cour cantonale ne contestent pas qu'on ne peut pas, en l'état, assurer la traçabilité des enveloppes de vote et opérer un contrôle de cohérence.
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Pour ce motif, la cour cantonale a eu à tout le moins raison de qualifier cette irrégularité de "pas de peu d'importance". Il y a lieu cependant d'aller plus loin que l'appréciation très prudente de l'instance précédente. La violation de la loi et du règlement cantonaux exposée ci-dessus doit être qualifiée de grave, ce d'autant plus que les opérations électorales requièrent un grand formalisme.
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Selon l'art. 58 RLEDP, le bureau communal, moyennant autorisation préalable du bureau cantonal, est compétent pour décider de procéder au dépouillement anticipé d'un scrutin; il en informe la municipalité en temps utile (al. 1); en cas de scrutins simultanés, le dépouillement anticipé n'est autorisé que si chacun des scrutins peut donner lieu à un dépouillement anticipé au sens notamment de l'art. 26 LEDP (al. 2); le dépouillement anticipé ne concerne que les votes reçus par le greffe; il doit se dérouler dans une salle séparée du local de vote (al. 3); à la fin des opérations, un procès-verbal intermédiaire est établi (al. 5).
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La cour cantonale a cependant considéré que le dépouillement anticipé ne pouvait avoir concerné d'autres votes que ceux parvenus au greffe jusqu'au vendredi 22 novembre 2013 à midi. Elle s'est fondée sur le procès-verbal du greffe dressant l'inventaire des votes reçus (art. 34 al. 1 RLEDP), signé le 22 novembre 2013 par la secrétaire municipale et le président du conseil communal, indiquant que 2'546 enveloppes de vote conformes avaient été mises dans l'urne et que le même nombre de cartes de vote les accompagnait. L'instance précédente a encore précisé que le dépouillement des votations du 24 novembre 2013 avait eu lieu dans deux salles, l'une, réservée à l'ouverture des enveloppes et au scrutin fédéral, l'autre, réservée au scrutin communal. Elle a ajouté que comme le bureau de vote avait fermé à 12h00, le dépouillement des votes au bureau et ceux trouvés dans la boîte à lettres, au nombre de 754, avait ensuite été effectué dans la continuité du dépouillement anticipé. L'instance précédente a aussi insisté sur l'assermentation des personnes qui avaient dépouillé le scrutin.
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Ces différents éléments ne permettent cependant pas d'assurer que le dépouillement anticipé n'a porté que sur les votes parvenus au greffe jusqu'au vendredi 22 novembre à midi. En l'absence de procès-verbal intermédiaire, il est en effet difficile de retracer valablement les opérations effectuées. Si on connaît le nombre d'enveloppes de vote - non ouvertes - transmises par le greffe municipal au bureau électoral, on ne sait pas combien de ces enveloppes ont été déclarées conformes et on ignore le nombre de celles qui n'ont pas été prises en compte. Le procès-verbal intermédiaire revêt ainsi toute son importance pour assurer la traçabilité des opérations de vote. Il se justifie d'autant plus que le matériel de vote provient de trois sources différentes (le greffe municipal, la boîte aux lettres et le bureau de vote; cf. supra consid. 3.4).
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Faute de procès-verbal intermédiaire, il est encore plus difficile de déterminer d'où provient la différence de 111 voix entre les cartes de vote reçues et les bulletins de vote rentrés. La régularité du scrutin ne peut ainsi pas être retracée. Si le déroulement des opérations de tri, de décompte du matériel et de dépouillement des bulletins requiert un formalisme important, c'est précisément pour éviter de s'en remettre à des déductions pour reconstituer le déroulement des différentes opérations ayant conduit à la constatation du résultat du vote. A nouveau, la cour cantonale s'est montrée très prudente en qualifiant l'irrégularité exposée ci-dessus de "pas de peu d'importance". Ce vice de procédure est en effet substantiel. Il s'ajoute à la violation des art. 20 al. 3 LEDP et 39 al. 1 let. a RLEDP (cf. supra consid. 3.5) et renforce la gravité constatée au considérant précédent.
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S'agissant des 111 voix de différence, il existe au moins trois possibilités: il s'agit de bulletins qui ne devaient pas être pris en compte (notamment au sens de l'art. 20 LEDP), ou d'enveloppes de vote vides, ou encore de bulletins perdus.
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La cour cantonale a fourni encore une autre explication à la différence litigieuse. Elle a soutenu que le scrutin du 24 novembre 2013 portait sur des objets fédéraux sensibles qui avaient provoqué une participation importante: le taux de participation dans la commune avait ainsi été d'un peu plus de 60 % pour chacun des objets fédéraux, alors qu'il avait été moins important s'agissant du scrutin communal, puisqu'il s'était élevé à 50,04 %. La Cour constitutionnelle en a déduit qu'il était ainsi "hautement vraisemblable" que certains électeurs ne se soient prononcés que sur ces objets et n'aient pas participé au scrutin communal, conduisant à un écart entre le nombre de votants et le nombre de bulletins de vote rentrés.
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S'agissant de la participation moins élevée au scrutin communal qu'aux scrutins fédéraux, le raisonnement inverse à celui de l'instance précédente peut aussi être tenu, comme le font valoir les recourants: il est également "hautement vraisemblable" que les citoyens de la commune d'Aigle se sentent davantage concernés par le scrutin communal portant sur le réaménagement de leur centre ville plutôt que par les scrutins fédéraux.
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En définitive, il est notoire que lors de tout scrutin populaire le nombre cartes de vote reçues dépasse celui des bulletins rentrés, du fait que des électeurs consciemment ou par inadvertance font parvenir leur carte de vote par correspondance sans inclure leur bulletin de vote dans l'enveloppe ou déposent une enveloppe vide dans l'urne. Cependant, la différence en l'occurrence de 111 voix représente 3,36 % des cartes de vote reçues. Ce pourcentage ne s'inscrit pas dans la marge habituelle des bulletins manquants par rapport aux cartes de vote reçues. Ainsi à titre de comparaison, pour les trois scrutins fédéraux qui se sont déroulés le même jour, la différence est respectivement de 0,33 % (10 cartes en sus), de 0,44 % (13 cartes en sus) et de 0,37 % (11 cartes en sus).
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Quant aux irrégularités constatées dans les considérants précédents, elles sont d'autant plus graves que le sort des enveloppes vides doit faire l'objet d'une attention particulière. L'art. 20 al. 1 LEDP dispose qu'en ce qui concerne les votes non pris en compte, les instructions de l'autorité cantonale exposent clairement ce qu'il faut faire en cas d'enveloppes vides ou partiellement vides. En effet, la "Marche à suivre pour le dépouillement d'un scrutin", datée du 16 mars 2007, transmise par la Chancellerie d'Etat du canton de Vaud à la commune d'Aigle précise que si l'enveloppe de vote est partiellement vide, les bulletins manquants, qui ne doivent être considérés ni comme des bulletins "rentrés" ni comme des bulletins blancs ne sont pas pris en compte: il y a lieu d'entourer sur l'enveloppe, les niveaux de scrutin (fédéral, cantonal ou communal) correspondant aux bulletins manquants pour la traçabilité et en relever le nombre pour un contrôle de cohérence.
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Enfin, le fait que le recomptage des bulletins de vote a permis d'aboutir au même résultat avec une voix de plus en faveur du "non" ne guérit aucunement les irrégularités constatées, dans la mesure où il n'a pas porté sur les 111 bulletins non pris en compte et dont le sort n'est pas documenté.
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Il ressort de ce qui précède que les irrégularités constatées sont graves et que l'écart de voix (91) est inférieur à la différence entre les cartes de vote reçues et les bulletins rentrés (111), de sorte qu'il est vraisemblable qu'elles ont pu exercer une influence sur l'issue du scrutin. Les conditions posées par la jurisprudence pour une annulation du scrutin sont ainsi remplies. Il y a donc lieu d'annuler la votation litigieuse.
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