30. Extrait de l'arrêt de la re Section civile du 23 mai 1944 dans la cause
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La Winterthour c. Eray.
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Regeste
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Circulation routière.
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1. Le louage d'une automobile pour une demi-journée ne suffit pas à transmettre la qualité de détenteur au preneur ; art. 37 al. 1er LA.
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2. Notion du transport gratuit ; art. 37 al. 4 LA.
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Motorfahrzeugverkehr.
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1. Kein Übergang der Haltereigenschaft auf denjenigen, der ein Fahrzeug für einen halben Tag mietet ; Art. 37 Abs. 1 MFG.
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2. Begriff des unentgeltlich Mitgeführtwerdens ; Art. 37 Abs. 4 MFG.
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Circolazione d'autoveicoli.
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1. La locazione d'un'automobile per una mezza giornata non basta a trasferire al locatario la qualità di detentore ; art. 37 cp. 1 LCAV.
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2. Nozione del trasporto gratuito ; art. 37 cp. 4 LCAV.
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en fait:
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Le 23 avril 1940, Tevfik Ercan, étudiant à l'Université de Lausanne, a loué une automobile chez le garagiste Magnenat à Lausanne. L'après-midi du même jour, il est parti au volant de la voiture occupée par quatre de ses camarades d'études, au nombre desquels se trouvait Salim Eray. Tous se rendaient à une fête nationale célébrée à Genève par l'association des étudiants turcs de cette ville.
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A un tournant de la route avant Céligny, Ercan perdit la maótrise de sa voiture. L'automobile heurta une bouche à eau, fit trois culbutes et se renversa. Tous ses occupants furent blessés, Eray grièvement. H a actionné la Société d'assurance La Winterthour, auprès de laquelle Magnenat était assuré comme détenteur de la voiture louée, en paiement de 39 499 fr.
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La défenderesse a conclu au rejet de la demande.
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Par jugement du 11 novembre 1943, la Cour civile vaudoise a condamné la défenderesse à payer au demandeur 19 900 fr.
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Les deux parties ont recouru au Tribunal fédéral. Le jugement cantonal a été confirmé.
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Extrait des considérants :
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Ces hypothèses ne sont pas réalisées en l'espèce. Par emploi dans son propre intérêt et à ses frais, on n'entend pas l'intérêt à une course particulière et isolée, mais l'intérêt à l'emploi plus général du véhicule selon sa destination. L'entreprise d'un garagiste comporte le louage de ses voitures. C'est lui qui a intérêt à les faire circuler pour en tirer profit.
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Et par maótrise sur le véhicule on n'entend point le pouvoir momentané de s'en servir, tel qu'il appartient au conducteur, mais le pouvoir de décider si, dans quelles conditions et notamment sous la conduite de quelle personne la voiture pourra circuler. Cette décision ressortit, sans aucun doute, au garagiste en cas de louage de courte durée. Dans l'espèce, le pouvoir de disposer de l'automobile est d'autant plus resté en main de Magnenat que, suivant une clause du contrat, le preneur certifie avoir un permis de conduire et s'interdit de confier la voiture à un tiers. Le garagiste a donc gardé la maótrise sur la voiture à l'exception de l'usage particulier réservé à une personne déterminée possédant le permis de conduire.
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Les conditions de l'assurance contractée par Magnenat ne se concilient pas non plus avec un changement de détenteur en cas de location de courte durée. Le § 7 de la police prévoit le changement de détenteur et statue le passage de l'assurance au nouveau détenteur pourvu que l'assureur ait été avisé et n'ait pas fait opposition dans un délai de quatorze jours. Le louage des voitures faisant partie de l'exploitation d'un garage, il y aurait des transferts et retransferts continuels de la qualité de détenteur, ce qui n'a pu être la volonté des parties...
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Cette opinion repose sur une fausse interprétation de la loi. Ce n'est pas le rapport entre Ercan et Eray qui décide s'il y a eu transport gratuit, c'est en première ligne le rapport entre Ercan et le détenteur Magnenat.
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L'atténuation prévue à l'art. 37 al. 4 procède du principe général d'équité selon lequel la personne responsable qui a seulement voulu rendre service ne doit pas subir toute la rigueur du droit en cas d'accident (cf. à ce sujet Oftinger, Haftpflichtrecht V p. 937 et sv., Strebel, note 183 sur art. 37). Cette règle est sans application en l'espèce, car le garagiste a reWu le prix de location de sa voiture. Il était obligé de mettre la voiture à la disposition du preneur auquel il n'a fait aucune gracieuseté. Peu importe d'ailleurs que Magnenat n'ait été payé que par Ercan. Le prix de la course a été acquitté par lui pour tous les usagers de la voiture ; aucun d'eux n'a bénéficié d'une libéralité du détenteur.
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L'exception prévue à l'art. 37 al. 4 se fonde encore sur la considération qu'une partie du risque inhérent à l'em ploi du véhicule à moteur peut équitablement être laissée à la charge de celui qui l'utilise dans son propre intérêt sans bourse délier. Mais cette éventualité n'est pas réalisée pour le demandeur ; il a payé son écot, et sa contribution n'a pas profité à Ercan mais uniquement au garagiste. La course projetée et la location ne sont vraisemblablement venues à chef que parce que les frais se partageaient entre tous les participants.
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La solution proposée par la défenderesse aurait, au surplus, pour conséquence de faire signer le contrat par tous les participants à la course, ou au nom de tous par un représentant, afin de paralyser d'avance l'exception tirée de l'art. 37 al. 4. La situation réelle ne s'en trouverait pas modifiée. Du reste, il serait inéquitable que celui qui, dans la forme, n'est pas intervenu au contrat soit désavantagé à l'égard du détenteur par rapport à celui qui a conclu la location aussi pour le compte mais non pas expressément au nom des autres usagers de la voiture.
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