Pour ce qui est des effets de la violation de ces dispositions, on pourrait, il est vrai, ainsi qu'on l'a fait dans l'arrêt Suska contre Kellenberg, du 28 avril 1953 (RO 79 II 205), considérer séparément la prétention au salaire et le droit au remboursement intégral des frais, et décider que la créance en remboursement des frais vient s'ajouter au salaire librement convenu, même si le total des sommes reçues de l'employeur laissait, tous frais déduits, une somme représentant une rémunération équitable. Il a été jugé toutefois depuis lors et en jurisprudence constante que les dérogations conventionnelles aux règles impératives de la loi ne sont nulles qu'en tant qu'elles atteignent le voyageur dans ses intérêts légitimes et que, pour savoir si tel est le cas, il ne faut pas examiner seulement si la clause contractuelle relative aux frais assure au voyageur le remboursement intégral de ses dépenses, mais au contraire faire la somme des versements effectués par l'employeur et voir si, après déduction des frais, elle représente une rétribution équitable des services du voyageur (RO 80 II 151, 81 II 238). Il se peut en effet que, bien que contraire à la loi, en la forme, la convention dans son ensemble satisfasse néanmoins les intérêts du voyageur, en lui
garantissant sous une autre forme que celle qui est prévue par la loi une rémunération convenable et le remboursement de ses frais. Cette jurisprudence se rapportait sans doute au cas où la convention ne prévoyait pas d'indemnité spéciale pour les frais ou à celui dans lequel cette indemnité était comprise dans le salaire ou la commission. Mais il n'y a pas de raisons de traiter différemment le cas où, comme en l'espèce, bien que le contrat prévoie une indemnité spéciale en couverture des frais, cette indemnité se révèle cependant insuffisante en fait. Une solution contraire créerait en effet une inégalité de traitement inadmissible. Si toute l'indemnité est comprise dans la rémunération, le juge - a-t-on dit - doit examiner si une telle convention, irrégulière en la forme, lèse les intérêts légitimes du voyageur, c'est-à-dire que si la rémunération le permet, il en affectera une partie à la couverture des frais. Il serait choquant que, lorsque la rémunération n'est amputée que d'une partie seulement des frais, autrement dit lorsque l'indemnité forfaitaire se révèle insuffisante, le voyageur puisse prétendre à un complément sans égard au montant de la rémunération, alors que dans ce dernier cas la dérogation à la loi est moins caractérisée. Cette solution porte sans doute atteinte au principe selon lequel la rémunération peut être fixée librement par les parties. On ne voit toutefois pas pourquoi ce principe devrait être strictement observé dans le cas où la convention prévoit bien une indemnité spéciale pour les frais, mais une indemnité insuffisante, alors que dans les autres cas jugés jusqu'ici le juge doit en faire abstraction pour décider si les intérêts "légitimes" du voyageur sont lésés. Cette atteinte au principe de la liberté des contrats n'est que la conséquence inéluctable de la réglementation légale qui, en recourant à la notion "au préjudice du voyageur", oblige le juge à se référer non plus à la volonté des parties, mais à des critères objectifs pour déterminer s'il y a "préjudice", c'est-à-dire si les intérêts "légitimes" du voyageur sont lésés. C'est donc à bon droit qu'en l'espèce les premiers
juges ont examiné si, déduction faite des frais dont le recourant était en droit de demander le remboursement, ce qu'il avait reçu au total de l'intimée représentait ou non une rétribution convenable de ses services pour le temps qu'avait duré son engagement.