BGE 99 II 363
 
51. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 8 novembre 1973 dans la cause A. contre B.X.
 
Regeste
Art. 312 Abs. 1 ZGB. Wohnsitz des ausserehelichen Kindes.
 
Sachverhalt
A.- B.X. est née le 28 avril 1971 à Z. (France). Elle est la fille naturelle de D.X., née le 5 octobre 1956. Elle réside, comme sa mère, à Y. (France). Elle est de nationalité suisse, étant originaire, par filiation, des communes de (...).
Le 2 décembre 1971, la Justice de paix du cercle de Lausanne lui a nommé un curateur.
B.- Le 25 avril 1972, B.X. a ouvert action en paternité, par requête de conciliation adressée au Juge de paix du cercle de Lausanne, contre A., né le 3 juin 1956, de nationalité française, domicilié à Z.
Statuant sur déclinatoire du défendeur, le Président du Tribunal du district de Lausanne s'est déclaré incompétent pour connaître de l'action.
Le 25 juin 1973, la Chambre des recours du Tribunal cantonal du canton de Vaud a annulé le prononcé de première instance et admis la compétence du Tribunal civil du district de Lausanne.
C.- A. recourt en réforme. Il conclut derechef à l'incompétence du Tribunal du district de Lausanne pour statuer sur l'action en paternité dirigée contre lui.
D.- B.X. conclut au rejet du recours et à la confirmation de l'arrêt attaqué.
 
Considérant en droit:
1 et 2. (...)
Quant à l'art. 8 LRDC, qui réserve la juridiction du lieu d'origine, il est applicable à la seule action en recherche de paternité avec effets d'état civil (RO 79 II 347; 77 II 115). Or l'intimée n'a formulé que des conclusions pécuniaires dans la procédure au fond.
Une telle décision n'a pas été prise à l'égard de l'intimée.
Celle-ci a d'autant moins de raisons de prétendre être domiciliée en Suisse que sa mère - mineure et habitant chez ses parents en France - n'a jamais résidé en Suisse.
Certes, dans son arrêt Salcher c. Weisseisen, le Tribunal fédéral a fixé le premier domicile de l'enfant illégitime au siège de l'autorité tutélaire qui lui a désigné un curateur en vertu de l'art. 311 CC (RO 94 II 227 consid. 5). Mais, ce faisant, il n'a pas entendu édicter une règle générale destinée à affaiblir la portée de la notion de séjour effectif dans la détermination du domicile de l'enfant, et encore moins créer un domicile fictif pour y établir un for. En principe, en effet, lorsque la mère est domiciliée en Suisse, l'autorité tutélaire compétente pour désigner un curateur à l'enfant mineur est celle du domicile de la mère au moment de la naissance. Il s'ensuit que le domicile de l'enfant correspond à celui de la mère au moment de la naissance.
Dans l'arrêt cité, la mère - étrangère et mineure - avait fait de son lieu de travail en Suisse le centre de ses relations personnelles, mais sa minorité l'avait empêchée de s'y créer un domicile; l'enfant avait résidé à cet endroit depuis la naissance; il se justifiait, au vu de ces circonstances, de lui reconnaître un domicile séparé de celui de sa mère. Ce domicile a été rattaché au siège de l'autorité tutélaire chargée de désigner le curateur, c'est-à-dire au lieu où la mère avait fixé le centre de ses relations personnelles et où elle avait établi avec son enfant un domicile de fait.
En l'espèce, l'enfant et la mère n'ont jamais résidé en Suisse. Leur domicile légal et leur résidence habituelle sont en France. Au moment de la naissance, ni l'enfant, ni la mère ne résidaient ou n'étaient domiciliés en Suisse. A part l'origine, ils n'avaient aucun lien avec un lieu déterminé en Suisse. La désignation d'un curateur par l'autorité du lieu d'origine, intervenue après la naissance, ne saurait, dans ces conditions, faire présumer que l'intimée était domiciliée en Suisse au moment de la naissance; c'est donc à tort qu'elle a saisi le juge suisse.
A cela s'ajoute que le for naturel de l'action est situé en France, puisque l'intimée réside dans ce pays avec sa mère et que le recourant, qui est Français, y est également domicilié. L'intimée n'a d'ailleurs aucun intérêt à poursuivre son action en Suisse: le jugement qui serait rendu ne serait pas reconnu en France. En effet, pour la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière d'obligations alimentaires envers les enfants, la convention de La Haye du 15 avril 1958 considère comme seules compétentes en principe les autorités de l'Etat où le débiteur - respectivement le créancier - d'aliments avaient leur résidence habituelle au moment où l'instance a été introduite (RO 92 II 85 consid. 3). C'est, en l'espèce, le juge français.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
Admet le recours, annule l'arrêt attaqué et écarte l'action.