BGE 106 II 36 |
8. Arrêt de Ia Ire Cour civile du 29 avril 1980 dans la cause K.B. contre A. van V. (recours en réforme) |
Regeste |
Anwendbares Recht beim Grundstückkauf; ausservertragliche Haftung. |
2. Ein Anspruch aus "culpa in contrahendo" ist ausgeschlossen, wenn die Ungültigkeit des Vertrages wegen Formmangels gleichermassen auf die Nachlässigkeit der einen wie der andern Partei zurückzuführen ist (E. 5). |
Sachverhalt |
A.- A. van V., citoyenne néerlandaise, s'est établie en Suisse en 1972. Elle s'intéressa à l'achat d'une villa à Lutry, propriété de K. B., citoyen néerlandais domicilié en Suisse. Comme A. van V. ne pouvait acquérir d'immeuble en Suisse avant d'y avoir séjourné cinq ans, les parties décidèrent de passer un accord prévoyant la conclusion de la vente dès que la législation suisse la permettrait; entre-temps, A. van V. prendrait la villa à bail. Les parties entendaient se conformer aux dispositions légales restreignant l'acquisition d'immeubles par des étrangers. Elles confièrent la préparation de leur accord à leurs avocats aux Pays-Bas. Au cours des négociations, l'avocat d'A. van V. déclara qu'il soumettrait le texte du projet définitif à l'appréciation d'un juriste suisse.
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Le 20 octobre 1972, les parties passèrent cet accord sous seing privé aux Pays-Bas. Elles s'engagèrent à conclure la vente de la villa "et à transférer la propriété de l'immeuble, pour le prix de 1'300'000 fr., dans les deux mois dès le jour où la législation suisse permettrait à Mme van V. de se porter acquéreur". Elles s'obligèrent simultanément à conclure en Suisse un bail à partir du 1er novembre 1972. En garantie de ses engagements, A. van V. promit de verser à K. B., aux Pays-Bas, une somme de 650'000 fr. non productive d'intérêts. En vue d'assurer la restitution de cette avance, K. B. devait fournir le cautionnement irrévocable d'une banque néerlandaise pour 550'000 florins.
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Le 9 novembre 1972, en exécution de cet accord, A. van V. versa 552'890 florins à la N. V. Slavenburg's Bank qui devait fournir la garantie promise par K. B. La banque retint 550'000 florins sur un compte bloqué, en couverture du cautionnement, et établit la garantie bancaire convenue en faveur d'A. van V.
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En novembre 1972, A. van V. s'installa dans la villa de K. B. Elle s'y comporta en propriétaire et en paya régulièrement le loyer.
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En 1975, A. van V. consulta un avocat suisse. Il lui déclara que l'accord du 20 octobre 1972 était nul faute d'acte authentique et parce que destiné à éluder les restrictions légales à l'acquisition d'immeubles par des personnes domiciliées à l'étranger. A. van V. résilia alors son contrat de bail pour le 31 octobre 1975. Elle demanda restitution de la somme versée le 9 novembre 1972 en requérant l'ouverture d'une poursuite contre K. B. pour 650'000 fr. avec intérêt. Le commandement de payer fut notifié le 4 août 1975.
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B.- A. van V. a ouvert action contre K. B. Elle a conclu au paiement de 650'000 fr. avec intérêt à 5% l'an à compter du 1er novembre 1972. K. B. a conclu au rejet de l'action et, reconventionnellement, au paiement de 500'000 fr. à imputer sur les 552'890 florins reçus de la demanderesse.
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Par jugement du 4 octobre 1979, la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud a condamné le défendeur à payer à la demanderesse 647'250 fr. avec intérêt à 5% l'an à compter du 4 août 1975, sous déduction de 60'000, 13'335 et 12'030 fr., avec intérêts.
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C.- Le défendeur a interjeté un recours en réforme au Tribunal fédéral. La demanderesse a déposé un recours joint en temps utile, sans toutefois le motiver.
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Le Tribunal fédéral a admis partiellement le recours principal et réduit la condamnation du défendeur à 562'289 fr., avec intérêts, sous déduction de 60'000, 13'335 et 12'030 fr., avec intérêts. Il a déclaré le recours joint irrecevable.
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Considérant en droit: |
2. La cour cantonale a vu dans l'accord du 20 octobre 1972 une vente immobilière conclue sous condition suspensive. Elle l'a tenue pour nulle, faute d'avoir été passée par acte authentique. Par surabondance de droit, elle a jugé que les parties avaient objectivement éludé les restrictions mises à l'acquisition d'immeubles par des personnes domiciliées à l'étranger. Le défendeur devait donc restituer la somme que la demanderesse lui avait remise sans cause valable, soit 647'250 fr. au cours moyen du jour du versement. La cour cantonale a imputé sur ce montant l'enrichissement de 60'000 fr. obtenu par la demanderesse qui, en raison des circonstances de l'affaire, a payé durant trois ans un loyer notablement inférieur aux loyers usuels. Elle a en outre déduit le montant des dégâts que la demanderesse a causés à la villa et au jardin durant son séjour, soit 13'335 fr. et 12'030 fr.
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En droit international privé suisse, la vente immobilière est soumise à la loi du lieu de situation de l'immeuble; cette loi régit également la forme du contrat (ATF 82 II 553 consid. 3). Contrairement au principe généralement admis en matière contractuelle, les parties ne peuvent passer une vente immobilière en respectant simplement les exigences de forme posées par la loi du lieu de conclusion. L'intérêt public, et notamment les exigences de la publicité foncière, commande en effet que la vente d'un immeuble sis en Suisse soit passée dans la forme prévue par la loi du lieu de situation (ATF 82 II 553 consid. 3; ATF 47 II 383; ATF 46 II 391; NIEDERER, Einführung in die allgemeinen Lehren des internationalen Privatrechts, p. 183; SCHÖNENBERGER/JÄGGI, Allg. Einl. n. 189 s.; VISCHER, Internationales Vertragsrecht, p. 156; RIGAUX, La loi applicable à la forme des actes juridiques, in Liber amicorum Adolf Schnitzer, p. 387 s.).
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Le Tribunal fédéral a soumis la promesse de vente d'un immeuble étranger aux règles de forme prévues par la loi du lieu de situation (ATF 82 II 553 consid. 3). En matière intercantonale également, la promesse de vente doit être passée en la forme prescrite au lieu de situation de l'immeuble (ATF 47 II 383; 46 II 391). Ce principe doit être maintenu et la promesse de vente portant sur un immeuble sis en Suisse doit donc, tout comme la vente, être conclue en la forme imposée par le droit suisse (contra, GUTZWILLER, Annuaire suisse de droit international, 1957, p. 280 ss). Pour des motifs d'intérêt public en effet, la vente d'immeubles sis en Suisse doit être passée en la forme prévue par la loi suisse, soit par acte authentique (art. 657 al. 1 CC, art. 216 al. 1 CO). Pour les mêmes motifs, le législateur a soumis les promesses de vente à la forme authentique également (art. 216 al. 2 CO). Les règles précitées manqueraient leur but si les parties pouvaient se lier par une promesse de vente passée simplement en la forme prévue au lieu de conclusion. De plus, un rattachement différent de la vente immobilière et de la promesse de vente pourrait conduire à des difficultés inextricables. Le juge ne pourrait déterminer la loi applicable à la forme de l'acte sans un examen préalable approfondi de son contenu et de ses effets. La controverse qui a surgi en l'espèce entre les parties sur la nature de leur accord montre bien l'insécurité qu'engendrerait une telle méthode.
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Point n'est besoin de déterminer si les parties peuvent soumettre conventionnellement à un droit étranger le fond ou la forme d'une vente ou d'une promesse de vente portant sur un immeuble sis en Suisse (cf. ATF 102 II 143). Le défendeur ne se prévaut pas d'une désignation expresse de la loi applicable. La nationalité des parties et le lieu de conclusion du contrat ne suffisent pas à faire admettre une élection de droit tacite lorsque le rattachement objectif du contrat coïncide avec le domicile des parties et le lieu de situation de l'immeuble.
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C'est donc à bon droit que la cour cantonale a soumis à la loi suisse la forme de l'accord du 20 octobre 1972. Conclu sous seing privé, cet acte est nul, qu'on le qualifie de vente ou de promesse de vente (art. 216 al. 1 et 2 CO).
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4. A juste titre, les parties ne contestent pas l'application du droit suisse à l'action en répétition du paiement de l'indu intentée par la demanderesse. Lorsque l'enrichissement provient d'une prestation fournie en exécution d'un contrat invalide, sa restitution est soumise à la loi régissant l'acte juridique en cause (ATF 78 II 385).
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L'art. 64 CO oblige le défendeur à restituer la valeur de son enrichissement au moment de la répétition. La date déterminante est en l'espèce le 4 août 1975, jour de la notification du commandement de payer par lequel la demanderesse a fait valoir ses prétentions (ATF 87 II 142). Le 9 novembre 1972, la demanderesse a versé 552'890 florins à la N. V. Slavenburg's Bank qui en a crédité le compte du défendeur. Le défendeur n'a pas converti en une autre monnaie la créance qu'il a acquise contre sa banque. La demanderesse n'a pas établi que le dépôt eût produit des intérêts. L'enrichissement du défendeur au moment de la répétition est donc de 552'890 florins. La demanderesse ne peut exiger que la contre-valeur de cette somme. Il importe peu qu'en versant des florins, la demanderesse ait exécuté un engagement contracté en monnaie suisse, par 647'250 fr. Dans l'action en répétition du paiement de l'indu, l'enrichissement ne se détermine pas selon les stipulations du contrat invalide, mais d'après la situation patrimoniale du défendeur au moment de la répétition (ATF 48 II 235).
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Le 4 août 1975, les banques suisses achetaient 100 florins en devises au prix de 101 fr. 70. L'enrichissement du défendeur au moment de la répétition correspond donc à 562'289 fr. Le défendeur, qui est en demeure depuis le 4 août 1975, doit supporter la perte liée à la dépréciation ultérieure de la monnaie néerlandaise par rapport au franc suisse (ATF 76 II 375 ss; ATF 60 II 340 et les arrêts cités).
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L'avocat néerlandais de la demanderesse a certes promis de soumettre à un juriste suisse le texte du projet d'accord. L'objet de cet examen ne ressort toutefois ni des faits allégués par les parties, ni de ceux retenus dans l'arrêt attaqué. Rien n'indique que les parties ou leurs conseils aient évoqué ou même aperçu la question de la forme du contrat.
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Il n'est pas nécessaire de déterminer si l'invalidité du contrat pour vice de forme est due en l'espèce à une négligence. Si fautes il y avait, celle du défendeur et celle de la demanderesse seraient équivalentes, ce qui exclut toute responsabilité fondée sur la "culpa in contrahendo". Les règles de la bonne foi, sur lesquelles repose la responsabilité précontractuelle, n'imposent pas à une partie des recherches juridiques qu'elle est dans la même mesure en droit d'attendre de la part de son cocontractant. Au demeurant, le Tribunal fédéral n'a imposé à ce jour qu'en cas de dol l'obligation de réparer le dommage résultant de l'invalidité d'un contrat pour vice de forme (ATF 68 II 237 consid. 2 IV; 49 II 54; 41 II 101 consid. 2; 39 II 227 consid. 4). Aucune manoeuvre dolosive n'est établie à la charge de la demanderesse.
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